Test Detroit Become Human (PS4) : David sort enfin de sa Cage ! sur PS4
18 20
- Des séquences impressionnantes sur le plan graphique
- La durée de vive titanesque
- Terriblement immersif
- Une B.O. démentielle
- Le nombre incalculable de choix
- Kara, l’émotion à l’état pur
- Connor, on a adoré
- Rythmé du début à la fin
- Des scènes vraiment marquantes
- Une expérience unique à vivre absolument
- Des personnages secondaires au niveau
- Trois héros, trois univers différents
- Des thèmes qui nous parlent
- Des contenus bonus qui valent le détour
- Des acteurs qui crèvent l’écran…
- …sauf Jesse Williams (Markus)
- Des inégalités visuelles
- Pas beaucoup de challenge
- Un jeu qui va diviser, clairement
- Des choix de réponse pas tout le temps clairs
- Pour revenir sur ses choix une fois le jeu terminé, c’est compliqué
- On ne peut pas zapper les cut scenes
On peut accuser David Cage d’être un cinéaste frustré (ce qui n’est pas notre cas, hein), mais on ne peut certainement pas douter de son implication dans chacune de ses créations ; elle est totale, c’est évident. De toute façon, pour coucher sur papier un scénario contenant des milliers de variables, il ne faut pas compter ses heures et renoncer aux ponts du mois de mai. Maintenant que l’on a bouclé Detroit : Become Human, on peut le dire : ce gars-là est un taré. Lui et ses équipes ont abattu un boulot monstre, et il suffit de regarder l’arborescence défiler sous nos yeux au terme de chaque chapitre pour s’en apercevoir. Là, on ne parle même plus d’un choix qui entraîne quelques conséquences, mais d’une décision qui provoque une cascade de réactions à court et à long terme. C’est tout simplement hallucinant le nombre d’éventualités prises en compte par Quantic Dream, ce qui permet d’obtenir une trame d’une richesse inouïe. Si l’on dit de David Cage qu’il est un grand malade, c’est aussi parce qu’il y a des scènes que très peu de joueurs verront mais qui n’ont pas été écartées pour autant par les développeurs. De toutes celles que l’on a vues après avoir découvert quatre fins différentes, aucune n’a été réalisée à l’arrache. Elles ont chacune bénéficié du même soin, de la même attention, de la même minutie ; quand on fait partie du staff, il faut être ultra solide dans la tête. Pardon si l’on donne l’impression de ne pas s’en remettre, mais c’est sans doute la première fois qu’un jeu va aussi loin dans le concept, surtout quand on a conscience de toutes les sessions de mocap que ça a nécessité.
VARIABLES & CONSÉQUENCES
Avec Detroit : Become Human, jamais l’expression « écrire sa propre histoire » n’aura été aussi vraie. Certes, les dialogues n’ont pas tous un impact sur le déroulement des événements, mais l’idée est de permettre au joueur de faire le salaud ou de rester fidèle à ses valeurs sans qu’il soit remis sur une sorte de rail scénaristique en forme d’entonnoir. Zéro game over, il faut assumer jusqu’au bout. Puisque David Cage n’est pas du genre manichéen, tout est fait pour que l’on ait de l’empathie envers les personnages, y compris quand ils se comportent comme des pourritures. Ca reste du jeu vidéo, mais c’est vrai que l’on se demande en permanence ce que l’on aurait fait dans telle ou telle situation. Ces questionnements sont dus aux nombreux thèmes abordés par le jeu tels que la ségrégation, le racisme, l’esclavage domestique, l’intelligence artificielle, le chômage engendré par les nouvelles technologies, ou encore la clandestinité. Des sujets forts sur lesquels se divise la société, ce qui explique pourquoi l’aventure sera différente d’un joueur à l’autre. Après avoir dit tout ça, on peut raconter les premières pages du script de Detroit : Become Human qui se déroule donc dans un futur proche (en 2038) et permet d’incarner trois androïdes différents conçus par CyberLife. Hyper froid, programmé pour ne se fier qu’aux faits et déterminé à mener à bien sa mission, Connor est un enquêteur pince-sans-rire. Il va tenter de comprendre pourquoi plusieurs de ses congénères sont devenus des déviants et ont commencé à se comporter comme s’ils étaient dotés d’une conscience.
Avec Detroit : Become Human, jamais l’expression « écrire sa propre histoire » n’aura été aussi vraie. Certes, les dialogues n’ont pas tous un impact sur le déroulement des événements, mais l’idée est de permettre au joueur de faire le salaud ou de rester fidèle à ses valeurs sans qu’il soit remis sur une sorte de rail scénaristique en forme d’entonnoir. Zéro game over, il faut assumer jusqu’au bout.
Il y a ensuite Kara, une domestique chargée de maintenir en ordre la maison de Todd et de sa fille Alice. Enfin, Markus est l’homme à tout faire de Carl Manfred, un peintre milliardaire ayant perdu l’usage de ses jambes. C’est lui qui va mener la rébellion, mais c’est aussi lui la petite faille du scénario. En effet, son point de vue permet de savoir ce qu’il se trame du côté des déviants, et on met donc assez vite le doigt sur l’origine du bug même si un enjeu supérieur vient se greffer derrière. En tout cas, Detroit : Become Human impressionne par sa faculté à supprimer les temps morts qui cassaient le rythme dans Heavy Rain et Beyond : Two Souls. En fait, tout a un sens et même le geste le plus insignifiant (ouvrir une fenêtre, par exemple) est susceptible d’avoir une conséquence, bonne ou mauvaise. Du coup, on se retrouve dans un univers immersif où chaque détail compte, où l’on n’a pas la sensation d’enchaîner les QTE pour combler un vide. A la limite, le dénouement final n’est que la cerise sur le gâteau, l’essentiel résidant surtout dans ce cheminement pour y parvenir. Le jeu nous fait passer d’un protagoniste à l’autre pendant une trentaine de chapitres, l’histoire s’étalant sur trois mois. Si Markus, Kara et Connor peuvent se croiser à certains endroits, ce n’est absolument pas une obligation ; encore une fois, les développeurs ont tenu à nous laisser notre libre arbitre. Pour ceux qui se posaient des questions sur la prise en main de Detroit Become : Human, sachez que la formule se rapproche de celle de Beyond : Two Souls, c’est-à-dire quelque chose de très maniable pour une production Quantic Dream, mais qui manque encore de souplesse quand on regarde ce qui se fait à côté.
SON JEU, VOTRE HISTOIRE
Après, cette rigidité n’est pas très gênante dans la mesure où le jeu reste assez dirigiste. Et puis, les zones à explorer sont loin d’être immenses. Non, on assiste plutôt à un enchaînement d’environnements réduits où l’inertie des personnages ne nous fera pas péter un plomb. Tant mieux. Comme on en a désormais l’habitude avec David Cage, le stick droit permet d’initier une action – ouvrir une porte, se saisir d’un cadre photo, ramasser un document. Les fonctionnalités gyroscopiques de la DualShock 4 sont également mises à contribution, tout comme le pavé tactile. Contrairement à Beyond : Two Souls où les commandes étaient plus ou moins masquées pour offrir une interface épurée, Detroit : Become préfère y aller franco, notamment lors des phases de combat où les icônes s’affichent en gros à l’écran. Est-ce que ça ruine l’ambiance ? Pas vraiment. Il s’agit même d’un choix intelligent puisque, en contrepartie, il n’y a plus ce bullet time qui avait tendance à bousiller le challenge avec Jodie. On ne dit pas que Detroit : Become Human est difficile, mais le gameplay étant déjà simplifié, il n’était pas nécessaire d’en remettre une couche. En plus de ces mécaniques communes aux trois persos, chacun d’eux possède ses propres compétences via le Mind Palace (R2). Ainsi, Connor est capable d’analyser n’importe quel indice trouvé sur une scène de crime et de reconstituer celle-ci une fois tous les éléments en main. C’est à la fois bien fichu et légèrement tiré par les cheveux, puisque l’on ne pourra interagir avec certains éléments qu’une fois la reconstitution achevée. Quand il se lance à la poursuite d’un suspect, l’agent de CyberLife peut aussi déterminer le chemin le plus rapide pour le rattraper, sachant que cela implique un nombre d’obstacles plus élevé. A l’inverse, la voie la plus safe sera la plus longue. Enfin, accéder à la mémoire des androïdes lui offre l’occasion de gratter quelques infos supplémentaires, comme à l’Eden Club.
Contrairement à Beyond : Two Souls où les commandes étaient plus ou moins masquées pour offrir une interface épurée, Detroit : Become préfère y aller franco, notamment lors des phases de combat où les icônes s’affichent en gros à l’écran. Est-ce que ça ruine l’ambiance ? Pas vraiment.
En ce qui concerne Kara, bien qu’elle sache se défendre, elle est encore plus à l’aise quand il s’agit de se déplacer sans être vue. Rien de bien compliqué, il suffit juste de passer d’un endroit à un autre dès que les ennemis ont le dos tourné, une armoire ou un placard pouvant très bien servir de planque provisoire. Pour ce qui est de Markus, il a la possibilité de visualiser le trajet qui lui permettra d’atteindre sa cible ou le point de chute sans se crouter. C’est également le seul à pouvoir convertir les androïdes pour qu’ils ne soient plus sous le joug des êtres humains. En proposant trois types de gameplay, Quantic Dream renforce la singularité de ses héros auxquels on s’attache au fil du jeu ; enfin, sauf un. Pour tout vous dire, on a vite mis de côté Markus qui est d’une transparence affligeante alors qu’il est censé être le leader des déviants. Jesse Williams (l’acteur qui l’incarne) est mono-expressif au possible, tout le contraire de Bryan Dechart (Connor) et de Valorie Curry (Kara) qui parviennent à insuffler toute une palette d’émotions à leur personnage. On évitera de trop rentrer dans les détails pour ne pas spoiler, mais Valorie Curry est indéniablement celle qui nous a le plus émus, bouleversés, secoués, remués, etc. On ne s’attendait pas à la voir à un tel niveau d’acting, et pourtant… Bien évidemment, ça n’engage que nous, mais quand on sait comment Detroit : Become Human est né, c’est un sacré symbole. La qualité d’écriture est telle que même les personnages secondaires défoncent ; mention spéciale à Rose et Luther qui nous ont profondément touchés, ainsi qu’au Lieutenant Hank.
LE JEU DE LA MATURITÉ ET DE LA REJOUABILITÉ !
Même si la narration et l’émotion ont toujours été la priorité de David Cage, quand on bosse avec des acteurs aussi cotés que Clancy Brown (Starship Troopers) ou Lance Henriksen (Aliens), on ne transige pas avec la technique. Sur ce point, le jeu s’inscrit dans la droite lignée de ses prédécesseurs avec une modélisation des personnages tout à fait remarquable. Les expressions faciales sont au top, le grain de peau et ses irrégularités plus vrais que nature, et la synchronisation labiale calée. On a également été bluffés par certaines animations, notamment celles où Connor s’approche de Daniel avec prudence, où lorsqu’il pourchasse Rupert. Bref, ce n’est pas sur la performance capture que le jeu va se planter. Bizarrement, on retrouve cette inégalité visuelle qui caractérise les titres du studio français : certaines séquences sont d’une beauté de dingue, d’autres traînent un peu la patte. Le plus étrange, c’est que ça ne touche pas un aspect du jeu en particulier. Par exemple, les intérieurs peuvent être aussi bien sommaires que magnifiques ; on pense plus particulièrement à la demeure du détraqué Zlatko, ou alors à la scène de crime avec cette atmosphère façon Seven. A ce sujet, chaque protagoniste dispose de son propre code couleur : à dominante bleue pour Connor, ou plus orangé pour Markus. Trois univers bien distincts qui régalent également au niveau du sound design. Là encore, Quantic Dream a fait appel à trois compositeurs différents pour que la B.O. colle au mieux à leur personnalité. On ne vous cache pas que l’on a un faible pour les sonorités binaires de Connor, mais les partitions chaudes et rassurantes de Kara envoûtent tout autant. Rien à redire, donc ? Si, tout de même, car la console (le jeu a été testé sur une PS4 standard) a commencé à cracher ses tripes sur la fin, avec des chutes de framerate suffisamment sérieuses pour abîmer les cut scenes.
Quoi qu’il en soit, une fois le premier run torché, il est possible de revenir sur chaque chapitre et de faire un choix différent via des points de sauvegarde. Pratique pour découvrir un pan du scénario à côté duquel on serait passé.
Quoi qu’il en soit, une fois le premier run torché, il est possible de revenir sur chaque chapitre et de faire un choix différent via des points de sauvegarde. Pratique pour découvrir un pan du scénario à côté duquel on serait passé. Le problème, c’est que pour que notre nouvelle décision ait un impact sur la suite, il est obligatoire de se coltiner tout le reste sans sauter le moindre chapitre. Ce n’est pas vraiment embêtant quand ça concerne les derniers moments de l’aventure, mais quand on désire ramener à la vie un perso dans le dernier tiers du jeu, bon courage. A moins que l’on ait raté quelque chose – auquel cas, toutes nos excuses – c’est plutôt lourd comme système, sachant que l'on ne peut pas zapper les cut scenes. Sinon, on a été agréablement étonné de voir que Detroit : Become Human intégrait quelques à-côtés comme Chloe, un androïde qui nous sert de guide et avec lequel on vous laisse faire connaissance pour ne pas gâcher la surprise. Il y a aussi tous les points que l’on récolte au fur et à mesure que l’on complète les arborescences. Ces crédits permettent de s’acheter du contenu bonus, dont une séquence sublime ou Luther reprend "Hold on just a little while longer" bien connu des amateurs de gospel. Du grand art du début à la fin.