Final Fantasy XIV x Monster Hunter World : genèse, choix des monstres, Yoshida-San nous raconte tout !
JEUXACTU : Comment l’idée de fusionner l’univers de Final Fantasy XIV à celui de Monster Hunter World vous est-elle venue ?
Naoki Yoshida : Je suis avant tout un gros joueur de Monster Hunter, je passe des heures dessus, quel que soit l’épisode. Et puis, je suis aussi un ami de longue date de l’équipe de développement des Monster Hunter, notamment de son producteur Ryozo Tsujimoto et de son créateur Kaname Fujioka. Je suis ami avec eux depuis une dizaine d’années et tout a réellement commencé il y a 8 ans, quand j’ai été mandaté par Square Enix pour relancer Final Fantasy XIV après l’échec de la version 1.0. À cette époque, j’étais en contact avec Tsujimoto-san qui m’a été d’une grande aide car il savait que mon travail pour refaire entièrement Final Fantasy XIV était titanesque. Ryozo Tsujimoto m’a donc proposé son aide, dans le sens où il m’a officiellement demandé l’intervention de Capcom ou de la team Monster Hunter dans le projet. Tout cette histoire, c’était bien avant la sortie de Final Fantasy XIV : A Realm Reborn, et je me suis dit que si j’acceptais l’aide de Tsujimoto, je serais davantage considéré comme un opportuniste et que je profiterais de la force de frappe de Monster Hunter et non de mon travail de refonte pour lequel j’ai été embauché. Du coup, j’ai proposé d’abord à Ryozo Tsujimoto de me laisser le temps de retaper Final Fantasy XIV et d’en faire un bon jeu et qu’ensuite on pourrait alors réfléchir sur une collaboration. Les années ont passé, mais j’avais toujours ce partenariat en tête, puis Monster Hunter World était sur le point de sortir. Cet épisode avait pour objectif de faire connaître la série au monde entier, au-delà des frontières du Japon. Et puisque Final Fantasy XIV a retrouvé une vraie popularité, on s’est dit qu’il était temps de concrétiser ce partenariat qui avait été proposé il y a 8 ans. C’est donc comme ça que le cross-over est né.
JEUXACTU : Il y a dans chacun des jeux énormément de monstres. Comment la sélection s’est-elle faite pour mettre en œuvre le partenariat entre les deux licences ?
Naoki Yoshida : J’ai commencé à jouer à Monster Hunter dès le premier épisode, lorsque c’était encore sur PS2 et je me rappelle très bien du moment où j’ai rencontré Rathalos. C’était un moment épique, très puissant et je me suis demandé comment j’allais battre un monstre aussi imposant. Et c’est sur cette base que le postulat d’un Monster Hunter fonctionne : comment un être humain, plus petit, plus faible et plus vulnérable, peut parvenir à combattre et à tuer une créature aussi imposante ? Et c’est en jouant au jeu qu’on comprend que pour venir à bout d’un dragon comme Rathalos, il faut mettre en place des stratégies pour trouver les points faibles de ces bêtes puissantes. Et pour moi, Rathalos représente la créature parfaite, capable de retranscrire ce sentiment de puissance et de ce combat homérique entre David et Goliath qui en fait un monstre iconique. Du coup, lorsque les discussions entre Capcom et Square Enix ont débuté pour mettre en place la collaboration, j’étais excité à l’idée de voir Rathalos débarquer dans le monde de Final Fantasy XIV. Peu m’importait les combats qu’on allait mettre en place, j’étais vraiment focalisé sur l’arrivée de Rathalos et la manière de l’implémenter dans le jeu.
Quant au monstre qui a été choisi pour apparaître dans Monster Hunter World, c’est le Behemoth. Mais la manière dont Capcom a fait son choix est à l’opposé de nos méthodes, puisque c’est la manière dont le combat doit s’engager dans le jeu qui a motivé le choix de la créature. L’idée était de proposer un affrontement fun et intéressant à jouer. Ils ont donc testé plusieurs scénarios, plusieurs options pour que le Behemoth s’intègre bien dans le monde de Monster Hunter World en termes de gameplay, tout en conservant ce feeling Final Fantasy. Le choix du Behemoth s’est donc imposé naturellement, sachant que Capcom a également demandé mon avis sur la question pour laquelle j’ai répondu positivement. Dans Monster Hunter World, on peut détruire des parties du corps des monstres, donc pour le Behemoth, il est possible de lui couper sa queue, mais aussi briser ses cornes. Chaque jeu a donc eu son approche bien à lui.
JEUXACTU : Avez-vous eu besoin néanmoins d’apporter des changements de gameplay en intégrant Rathalos dans Final Fantasy XIV ? Son comportement n’est pas vraiment le même que les créatures habituelles de FF XIV…
Naoki Yoshida : Bien sûr, en choisissant Rathalos comme créature qui interviendrait dans l’univers de Final Fantasy XIV, nous avons étudié toutes les possibilités pour que son intégration se fasse de la meilleure manière possible. On a réfléchi sur sa manière à attaquer dans le jeu, comment les chasseurs vont-ils l’approcher également et nous avons dû travailler tout cet aspect depuis le départ. Nous sommes d’ailleurs plutôt confiants quant au résultat et je pense que les fans trouveront le Rathalos qu’ils connaissent dans la série Monster Hunter. Je pense que nous avons su garder son ADN intact.
JEUXACTU : Qu’est-ce qui a été le plus difficile à faire dans cette collaboration ? Le choix du monstre ? Les changements dans le gameplay ? Être sûr d’être le plus fidèle possible au matériau d’origine ?
Naoki Yoshida : Vous savez, cela fait plus d’un an que nous travaillons sur ce cross-over et lorsque nous avons démarré le projet, Monster Hunter World n’était pas encore sorti. Et une fois qu’il était sur le marché, il a fallu revenir dessus et ajuster par rapport à ce qui avait été fait dans le jeu. Cela dit, nous avons énormément partagé nos assets entre Square Enix et Capcom, qu’il s’agisse des textures, des modèles 3D, des effets sonores ou des musiques. On n’a vraiment rencontré de difficulté du coup pendant cette année de travail, puisque nous avons travaillé main dans la main.
JEUXACTU : Avant de lancer le projet, avez-vous eu des doutes, notamment en ce qui concerne les fans des deux jeux ? La peur d’un accueil mitigé par exemple ?
Naoki Yoshida : Non, vraiment pas. À aucun moment. Et pourquoi étions-nous aussi confiants ? Tout simplement parce que ce projet n’est pas né d’une idée commerciale, ce n’était pas du business, mais un vrai projet collaboratif. Vous savez, on a beaucoup de respect mutuel, entre les deux équipes de développement. Il y a beaucoup d’amitié dans cette relation, et j’estime que si cette entente est sincère, authentique, elle se traduira également auprès de nos fans. Lorsque l’on fait quelque chose pour l’argent, ou si le fond n’est pas honnête, les gens s’en rendent toujours compte. Ce n’est donc pas un schéma à produire et notre projet est là aussi pour respecter aussi bien les joueurs de Final Fantasy XIV que ceux de Monster Hunter World. Le but, c’est que chaque communauté puisse jouir de ce partenariat et tous les joueurs sont d’ailleurs les bienvenus dans ce cross-over. C’est aussi pour cela que nous sommes confiants.
JEUXACTU : Si je suis un joueur de Monster Hunter, quel intérêt aurais-je de jouer à Final Fantasy XIV et affronter Rathalos une fois encore ?
Naoki Yoshida : Pour le challenge ! Parce que vous êtes un chasseur ! (Rires). Notre but n’est pas de forcer les gens à venir jouer à notre jeu, ce n’est vraiment pas l’objectif derrière cette collaboration. Et cela vaut aussi pour la team Capcom qui n’a pas de velléité de faire venir des joueurs de Final Fantasy XIV dans leur jeu. Tout ce qu’on veut, c’est que les gens se rendent compte que deux grands jeux venus du Japon s’unissent pour proposer du contenu intéressant, et ce avec le plus grand respect l’un pour l’autre. Si cela peut faire venir d’autres joueurs dans chaque camp, tant mieux, mais ce n’est pas notre objectif premier. On serait ravi de vous voir accepter le challenge et de vous amuser par la même occasion. Quoi qu’il en soit, par le respect que nous avons accordé aux deux jeux, chacun trouvera un intérêt à basculer d’un camp à l’autre, ne serait-ce que par curiosité ou pour le défi.
JEUXACTU : Quelle est la durée de ce cross-over ? Avez-vous prévu d’autres événements
Naoki Yoshida : Concernant la durée de l’événement, je ne peux pas trop en parler en ce moment. Il est prévu qu’on communique dessus une fois que le jeu sera sorti, mais soyez assurés que vous aurez largement le temps d’en profiter. L’idée n’est pas de proposer un événement éphémère de quelques jours, mais plutôt un bon moment entre joueurs.
Propos recueillis par Maxime Chao