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- Gameplay en béton armé
- Un mode Rewind enfin intéressant
- Level design ingénieux
- Un espace maîtrisé
- Un peu court
- Des énigmes un peu prises de tête
- Quelques bugs de collision
Prince of Persia est une franchise que l'on ne présente plus. Ayant fait dans les années 90 les beaux jours de la Super Nes sous l'ère Konami, elle est ensuite passée entre les mains d'autres chefs cuisinier avec plus ou moins de réussite. Comme l'a déjà rappelé Maxime Chao dans nos colonnes, le passage de la série dans le monde de la 3D (Prince of Persia 3D) à l'aube de l'an 2000 lui a porté un coup d'arrêt que l'on aurait pu croire mortel, si les Perses d’Ubisoft Montréal ne lui avaient pas tendu la main afin de lui faire subir un lifting haut de gamme. Bien plus qu'un simple come-back, Prince of Persia : Les Sables du Temps aspire à devenir un incontournable du genre sur Xbox.
Le titre fut, à coup sûr, l'une des révélations sensationnelles du cru 2003 de l'E3. Les fans de la saga ne se comptent même plus, et les chimistes canadiens avaient sans doute conscience du travail qu'ils devaient accomplir pour ressusciter un prince longtemps consigné jusqu'à nouvel ordre. Disponible depuis peu dans les bijouteries françaises pour le prix plus que fracassant de 50 €, contre 60 € pour n'importe quel autre jeu PAL, la toute dernière perle de la marque Ubisoft brille de mille feux.
Un scénario revisité
A l'époque du père spirituel de la série, Jordan Mechner, sauver la princesse des griffes du grand méchant loup était le passe-temps favori du héros de service. Dans le tout premier volet de la série, c'était le Grand Vizir Jaffar qui retenait prisonnière la jeune fille du Sultan parti conquérir d'autres terres. Sans rentrer dans les détails, le joueur n'avait qu'une heure pour traverser les niveaux du donjon dans lequel il avait été jeté, et empêcher ainsi le traître d'accéder au trône. Ces derniers temps, nous avons pu constater que les licences ayant usé et abusé de ce concept princesse-héros tentent de se recycler en proposant aux joueurs une trame moins gnangnan, pas forcément légendaire, mais qui a le mérite de nous apprendre d'autres refrains. Et Prince of Persia : Les Sables du Temps ne déroge pas à la règle. Mieux encore, les scénaristes d'Ubisoft Montréal nous ont tissé une histoire plutôt originale avec le temps comme instrument principal. Le Roi de Perse et son fils, accompagnés d'une troupe de gardes bien armés, font route vers le palais du Sultan d'Azad afin de lui offrir un présent en guise d'amitié entre leurs deux royaumes : la fameuse Dague du Temps. Ce trésor, qu'ils ont récupéré après avoir pillé le palais d'un Maharajah en Inde, contient une puissance jusqu'alors insoupçonnée. Et lorsque le jeune prince décide de libérer les Sables Du Temps renfermés dans un sablier géant afin que le Sultan d'Azad en apprécie mieux la brillance, il jette sans le savoir une malédiction métamorphosant tous les occupants du palais en créatures enragées que seule la Dague du Temps peut vaincre. Une nouvelle aventure commence, et c'est le héros du jeu en personne qui nous la raconte.
Il n'est plus seul...
Comme pour donner un second souffle au label Prince of Persia qui en avait bien besoin, les scénaristes des Sables Du Temps ont décidé qu'il n'y aurait pas qu'un seul, mais bel bien deux personnages principaux. Après avoir cherché à fuir la présence du prince par pure rancune, Farah l'accompagne durant la quasi totalité de l'aventure afin de l'aider à réparer son erreur. Cette présence féminine à permis aux développeurs de jouer la carte du sidekick, un peu de la même façon qu'un Star Fox Adventures. A la seule différence qu'il n'est pas possible de donner des ordres à la jeune femme, et encore moins de la contrôler. Néanmoins, elle possède le minimum d'intelligence qu'il faut pour se faufiler à travers les décombres du palais, appuyer sur les interrupteurs au bon moment, tirer les leviers en tous genres, et nous offrir de nombreux moments hilarants lorsqu'elle se chamaille avec son compagnon. Munie de son médaillon qui la protège des effets néfastes des Sables Du Temps, Farah s'avère être une combattante dans l'âme, et n'hésite pas à affronter les ennemis à l'aide de son arc et ses flèches magiques. Bref, une aide précieuse qui prouve encore une fois que sans les femmes, les hommes seraient bien malheureux... Ubisoft Montréal a particulièrement tenu à créer un lien crédible entre les deux personnages. Leurs sentiments évoluent tout au long du jeu, et malgré une certaine méfiance contenue, ces deux caractères forts ont rapidement compris qu'ils devaient coopérer pour espérer venir à bout des Sables Du Temps. Cette relation ambiguë qu'entretiennent ces pseudo tourtereaux est l'un des autres fils directeurs du scénario que l'on prend plaisir à suivre.
Enfin une 3D qui fait honneur !
Contrairement à celui de Prince of Persia 3D qui frisait le ridicule, le moteur 3D de Prince of Persia : Les Sables du Temps est bougrement efficace. En effet, celui-ci permet d'afficher des graphismes faisant rappeler ceux d'Eternal Darkness : Sanity's Requiem sur Gamecube, mais évoluant une classe au-dessus. Force est de constater que les peintres canadiens ont réalisé un travail remarquable, car ils ont réussi à conserver dans un espace tridimensionnelle cette ambiance visuelle qui caractérisait les deux premiers numéros 2D de la saga. La palette de couleurs utilisée colle parfaitement à la culture Prince Of Persia. S'ils peuvent paraître vides au départ, les paysages deviennent par la suite magnifiques. L'intérieur du palais n'est pas en reste avec des zones tantôt obscures, tantôt éclairées, et ces particules de sable omniprésentes caressant le sol sont envoûtantes. Les textures sont nombreuses, et lorsque l'on y ajoute l'immensité et la profondeur de l'environnement, le résultat obtenu est tout simplement stupéfiant. La XBox prouve une nouvelle fois qu'elle maîtrise son sujet, la qualité du character design appuyant cette impression de toute puissance laissée par la machine de Microsoft. L'allure du prince se modifie au cours de l'histoire. Vêtu de son costume royal au début de l'aventure, il en enlève quelques éléments pendant sa quête avant de terminer torse nu vers la fin du jeu. Farah n'a pas connu le même traitement de faveur, ce qui n'empêche pas sa tunique légèrement moulante de laisser deviner ses formes plus que généreuses. Les monstres ne sont pas particulièrement effrayants, mais les quelques gros plans dont ils peuvent faire l'objet suffisent à démontrer qu'ils n'ont pas été laissés sur le banc de touche. Qu'en est-il de l'animation ? La 3D l'a-t-elle rouillée ? Eh bien non ! Là encore, le studio de développement canadien nous en met plein la vue. Les mouvements du prince sont criants de réalisme. Pour ceux qui, comme notre ami (NDRC : ami, ami, c’est vite dit…) Maxime Chao, aiment les chiffres, sachez que pas moins de 700 postures différentes ont été réalisées pour obtenir cette fluidité exemplaire. En d'autres termes, Prince of Persia : Les Sables du Temps est aussi fluide que Prince of Persia premier du nom. Une sacrée performance lorsque l'on sait que 3D ne rime pas forcément avec fluidité.
Un gameplay fidèle à l'original
Au lieu de nous balancer dans un nouvel univers tout en 3D auquel nous ne sommes pas encore habitués, Ubisoft Montréal a eu la bonté d'ajouter un tutorial qui s'affiche de temps en temps à l'écran afin de nous apprendre les commandes de base, et nous conseiller lors d'éventuelles phases périlleuses. Une excellente initiative lorsque l'on sait que notre prince est capable de réaliser les acrobaties les plus folles. Après avoir fait plus ample connaissance avec chacun de ses mouvements, il est temps de mettre à contribution sa matière grise pour atteindre tel interrupteur, tel rebord, tel mur... Car tout Prince of Persia qui se respecte se doit de solliciter les méninges du joueur en permanence ! Et comme il ne s'agit plus d'un jeu dans lequel on évolue horizontalement, l'utilisation de la caméra s'avère indispensable pour explorer de la meilleure façon possible chaque recoin du palais. Chaque détail a son importance, et la moindre corniche peut servir de point d'appui. Une pression sur le bouton Blanc permet d'obtenir une vue d'ensemble, tandis que le bouton Noir offre une vue subjective. Et contrairement à ce que l'on pourrait croire, cette dernière s'avère très utile, notamment lorsqu'il s'agit de bien se caler en face d'une colonne pour y sauter par exemple. Le stick analogique droit, quant à lui, permet de zoomer et de jouer avec la caméra pour observer les alentours. LA nouveauté des Sables du Temps est la fameuse Dague du Temps qui, en appuyant sur le bouton L, permet de revenir en arrière et de recommencer une action sur laquelle on a échoué quelques secondes plus tôt. Autrement dit, de remonter le temps. Cela ne se fait pas de façon infinie, puisqu'une jauge jaune en haut à gauche de l'écran se vide à chaque fois qu'on utilise l'instrument temporel. Pour le recharger, deux possibilités : soit récupérer le sable contenu dans le corps des monstres pendant les combats via le bouton Y lorsqu'ils sont à terre, soit atteindre l'un des nombreux 'points sablonneux' qui requinquent d'un bloc toute la jauge.
Les combats de Prince of Persia : Les Sables Du Temps sont moins charismatiques que le tout premier épisode, mais n'en restent pas moins bien léchés. Reprenant les principes fondamentaux du brevet déposé par Shigeru Miyamoto depuis The Legend of Zelda : Ocarina of Time, le système développé par Ubisoft Montréal mise avant tout sur le dynamisme. Ici, le fameux lock permettant de cibler un adversaire bien précis n'a pas été retenu, car c'est la direction donnée au stick analogique qui permet d'attaquer un adversaire soit à droite, soit à gauche, soit devant, soit derrière. Si SCSK est resté sceptique au départ, il a rapidement été enchanté par ce concept avec lequel il est possible de donner deux coups de sabre au monstre de droite, un coup de genou à celui d'en face, un coup de boule à celui de derrière, et une balayette-manchette-retournette à celui de gauche (NDRC : Ca y est, il a pété les plombs, il parle de lui à la 3ème personne). Bref, un moment idéal pour ceux qui souhaitent se défouler après une rude journée de travail. Et comme notre héros est agile comme un chat, le bouton A permet de réaliser des saltos arrière et autres roulades latérales en guise d'esquives. L'IA n'est pas monstrueuse, mais venir à bout de ces grosses brutes immortelles n'est pas forcément une partie de plaisir. Se protéger avec le bouton R lorsque l'on est à terre est une situation qui devient rapidement monnaie courante.
Pour agrémenter le tout, il est également possible d'utiliser la Dague du Temps pendant les combats. Une brève pression sur le bouton R et l'on a l'impression de se retrouver dans une séquence à la Matrix avec l'effet bullet time toujours aussi plaisant à voir. En appuyant sur le bouton Y on immobilise l'ennemi, toujours avec cet effet cher aux frères Wachowski, ce qui offre la possibilité de l'éliminer en un seul coup mais sans pouvoir récupérer le sable qu'il contient. Comme nous vous l'avions déjà précisé plus haut, Farah est une épaule sur laquelle on peut se reposer. Durant les combats, sa barre de vie s'affiche uniquement si elle est attaquée. Dès lors, il ne faut pas hésiter une seule seconde à lui porter secours sous peine de devoir recommencer la partie; d'autant plus que physiquement elle n'est pas aussi robuste que notre héros. Ses flèches ont l'avantage d'immobiliser les ennemis, idéal pour leur porter le coup fatal ! En cas de besoin, un peu d'eau fraîche sur le visage pour remonter sa jauge d'énergie et on repart au combat. Gare à ne pas rater également certaines entrées cachées qui donnent accès à la fontaine magique. Chaque gorgée d'eau provenant de cette dernière permet d'allonger la barre de vie.
Perfect or not ?
Malgré toutes ses qualités, Prince of Persia : Les Sables du Temps n'atteint pas la perfection ultime. Le premier reproche que l'on pourrait lui faire, c'est d'avoir finalement laissé de coté le lock pour la gestion des combats. En effet, lorsque deux ennemis se suivent l'un derrière l'autre, comment faire pour en cibler un particulièrement ? Certes, Ubisoft Montréal a déjà du songer au problème puisqu'un coup d'épée porté au premier monstre touche obligatoirement le second; mais cette impression d'imprécision et de ne pas contrôler les choses entièrement est assez agaçante. Deuxième reproche : la durée de vie. Pour les rageux du paddle, environ neuf heures de jeu seront suffisantes pour sortir du palais ! Pour les moins chevronnés, une douzaine d'heures environ. La facilité de Prince of Persia : Les Sables du Temps est déconcertante, et même si certains combats demandent de l'endurance, la visite du palais est expéditive. C'est sans doute pour ne pas nous laisser sur notre faim qu'il est possible de débloquer le premier Prince of Persia une fois le jeu terminé. Concernant la caméra, lorsqu'elle se positionne automatiquement à certains endroits, la vue proposée n'est pas forcément la meilleure. On est alors obligé d'agir à l'aveuglette, en espérant ne pas faire une chute de 50 mètres. Enfin, Maxime a remarqué que, je cite : "le Prince n’est pas foutu de sauter par-dessus certains objets (des caisses par exemple) l’obligeant alors à les détruire à l’aide de ses armes blanches. Difficile à croire lorsqu’on le voit exécuter ses prouesses acrobatiques à faire pâlir un Tony Jaa (Ong Bak)". Il lui reproche également son manque de rythme et de continuité en affirmant que "les combats se déroulent, pour la plupart, au terme d’une série de phases de plates-formes". Généralement, lorsque les développeurs trébuchent sur des défauts qui ne relèvent pas forcément de leur savoir-faire, ils ont à la volonté de revenir avec un sequel encore plus abouti. Gageons que cela soit le cas pour ce titre qui demeure fabuleux.
Avec Les Sables du Temps, la série Prince of Persia a retrouvé de sa superbe. Graphismes magnifiques, animation fluide, character design exemplaire... Que demander de plus, si ce n'est qu'Ubisoft Montréal nous sorte rapidement une suite à ce jeu trop rapide à terminer. Prions seulement que les canadiens ne prennent pas quinze ans pour nous en pondre un aussi convaincant.