The Callisto Protocol : on y a joué, Dead Space a vraiment du souci à se faire (Preview)
On le sait depuis l’annonce du jeu aux Game Awards 2020 : l’histoire de The Callisto Protocol se déroule en 2320 sur Callisto, la lune morte de Jupiter. C’est là-bas, dans le centre pénitencier de Fer Noir, que Jacob Lee (interprété par l’acteur Josh Duhamel que l’on a vu notamment dans Transformers) purge sa peine. Le hic, c’est que suite à une épidémie à laquelle la United Jupiter Company ne serait pas étrangère, tous les détenus vont commencer à se métamorphoser en des Biophages assoiffés de sang. Vous l’aurez compris : tout en luttant pour sa survie, le héros cherchera à faire la lumière sur une conspiration dépassant sa simple personne. Il pourra compter sur l’aide d’autres rescapés tels que Dani Nakamura (leader d’un groupe de résistants), incarnée par l’actrice Karen Fukuhara (Suicide Squad, The Boys). « Jacob est quelqu’un d’ordinaire, nous a confié Glen Schofield quand on lui a demandé si le personnage était du genre badass. Il se demande ce qui se passe, c’est un vrai choc pour lui. Il n’a pas suivi d’entraînement particulier. Sa personnalité va se révéler au fil de l’aventure. […] À aucun moment il ne s’habitue à ce qu’il voit car les choses ne font qu’empirer. » Pour appuyer cette thèse, le patron de Striking Distance Studios et son équipe ont attiré notre attention sur l’illustration de la jaquette du jeu, en expliquant qu’il n’avait absolument pas la posture d’un héros. « Il a l’air fatigué, brisé, ont-ils souligné. C’est une personne comme nous qui est dans une sale situation. Il a envie d’en découdre mais ce n’est pas sans impact sur lui. » Pour l’anecdote, 65 ébauches ont été nécessaires pour arriver à ce résultat, les artistes ayant fini par trouver l’inspiration en tombant sur une photo de Y.A. Tittle, l’ex-quarterback star des Giants de New York (1961-1964). La ressemblance saute aux yeux.
Le jeu ne fait pas que reprendre certains codes de Dead Space, il améliore également une formule qui avait permis à l’œuvre de Glen Schofield d’être érigée en nouvelle référence du survival horror il y a maintenant quatorze ans.
Impossible de ne pas penser à Isaac Clarke (le protagoniste de Dead Space) lorsque Glen Schofield décrit Jacob Lee. Tout comme Ethan Winters (Resident Evil), ils affichent une certaine vulnérabilité qui, pour autant, ne les empêche pas de faire preuve de courage et de détermination face au danger. En fait, c’est surtout leur loquacité qui les oppose. Alors que dans le premier Dead Space, Isaac Clarke ne prononce aucune syllabe du début à la fin – « c’était une règle que nous nous étions fixés », nous a même indiqué celui qui a œuvré chez EA Redwood Shores – son homologue échangera beaucoup plus avec ses partenaires, notamment lors des cinématiques qui, cumulées, totalisent quasiment une heure. Si les dernières productions horrifiques ont tendance à privilégier la vue subjective pour des raisons d’immersion, The Callisto Protocol a opté pour la caméra à la 3e personne. Et si l’on en croit Glen Schofield, cette décision fut prise dès le départ. « Je venais de passer les dix dernières années à développer des FPS. En fait, je pense que la vue à la 3e personne crée un lien plus personnel avec le protagoniste, nous a-t-il affirmé. Vous le contrôlez vraiment, alors que dans un jeu avec une vue subjective, c’est l’arme qui devient le personnage. […] Et puis, je trouve que ça aide à mieux raconter l’histoire. Vous avez besoin de voir qu’au début de l’aventure, il porte une tenue de prison, et qu’ensuite, il en enfile une autre. Il y a aussi le fait qu’il soit recouvert de sang pendant les combats. » C’est vrai que chaque coup de matraque qui fait mouche donne lieu à des gerbes de sang qui éclaboussent le visage et la combinaison de Jacob. « Vous voulez voir ce bâton se déchaîner sur l’ennemi, a précisé Demetrius Leal. Vous avez besoin de sentir le caractère gore du jeu. Comme vient de le souligner Glen, c’est quelque chose qui vous explose en pleine face. »
BALLE AU PRISONNIER
Avant d’ajouter : « Vraiment, l’équipe en charge de la modélisation du personnage a fait un travail incroyable, avec notamment un niveau de détail impressionnant. Au fur et à mesure que vous avancez dans le jeu, vous portez en quelque sorte les stigmates de cette brutalité. Du coup, ça permet de nouer un lien avec le joueur et de renforcer l’immersion. » Une immersion qui passe également par les fonctionnalités de la DualSense, dont les gâchettes adaptatives et le retour haptique. Ce n’est pas nouveau, mais il faut bien avouer que les développeurs sont parvenus à retranscrire de manière remarquable les affrontements contre les monstres. On s’est surpris à presser les gâchettes comme des malades pour être sûrs d’allonger l’adversaire. Et ça va même au-delà, puisque l’intensité des vibrations est liée au sound design : le moindre bruit fait immédiatement réagir la manette de la PS5. Durant notre échange, Demetrius Leal a insisté sur un point qui devrait permettre à The Callisto Protocol de se démarquer de la concurrence : le « 50-50 combat. » D’habitude, dans les survival horror, même si le personnage a la possibilité de se défendre avec une arme blanche, on nous fait comprendre que les flingues restent la meilleure solution pour s’en sortir. Ici, le combat rapproché est plus qu’une option : selon le nombre de créatures, il y a moyen de s’en sortir sans faire feu. Pour ce faire, il est impératif de scruter l’environnement afin de repérer les différents endroits (pics, ventilateurs, murs, plafond entre autres) susceptibles d’infliger des dégâts après avoir chopé un monstre avec le GRP (l’équivalent du module de stase dans Dead Space). Bien qu’il n’ait jamais fait partie des forces spéciales, Jacob est néanmoins capable d’esquiver les attaques, et donc de s’offrir des opportunités de contre derrière.
"GARS, SCHOFIELD, IL A PAS L'TEMPS DE PLAISANTER"
Nous n’avons pas pris le temps de fouiner dans les améliorations que l’on pourra débloquer au fil de l’aventure, mais on a vu qu’il sera possible de booster son bâton (bloquer des coups plus puissants, casser le bras de l’infecté après une parade réussie, etc.) et le GRP via un arbre de compétences. Il faudra vérifier si cette approche tient sur la longueur, mais de ce que l’on a vu, même à court de balles – ce qui ne dispense pas de les économiser – Jacob aura le droit de regarder les monstres dans les yeux. Après, bien évidemment, avoir le chargeur plein facilite grandement les choses. Par exemple, on pense au skill shot qui se déclenche une fois que l’opposant est étourdi. Une cible apparaît alors sur lui, et si l’on est suffisamment rapide à la gâchette, les dégâts infligés sont décuplés. Le démembrement cher à Glen Schofield est également de mise, accompagné cette fois-ci d’une mécanique de mutation. Plus concrètement, il faudra faire attention à ne laisser aucune créature à moitié morte derrière soit – d’où l’utilité de bien les écraser comme dans Dead Space – sinon elle sera capable de se transformer en un ennemi plus compliqué à éliminer ; et on peut vous garantir que lorsque l’on a déjà deux-trois enragés sur le dos, ça devient irrespirable. « Sachez que nous avons gardé quelques gros monstres pour la fin du jeu, nous a prévenus Glen Schofield quand on lui a demandé comment ils s’y étaient pris pour rendre les Biophages imprévisibles. Du coup, même si vous pensez avoir tout vu dans le jeu, vous vous direz : ‘Mais qu’est-ce que c’est que ça ?’ Croyez-le ou pas, mais nous avons créé pas moins de 500 prototypes. Par exemple, nous avons prototypé un ennemi avec une arme à feu, et un autre, et encore un autre. Du coup, ça nous a permis de créer des combinaisons. Et puis, il y a les conduits d’aération qui font que leurs réactions sont moins anticipables. Vous les voyez y entrer, mais après, plus rien. Vous les entendez seulement rôder, et ils peuvent très bien surgir derrière vous. »
D’habitude, dans les survival horror, même si le personnage a la possibilité de se défendre avec une arme blanche, on nous fait comprendre que les flingues restent la meilleure solution pour s’en sortir. Ici, le combat rapproché est plus qu’une option : selon le nombre de créatures, il y a moyen de s’en sortir sans faire feu.
Certains Biophages seront rapides, d’autres plus lents, d’autres encore plus robustes. D’après le boss de Striking Distance Studios, il sera possible de rencontrer entre 17 et 18 types d’ennemis différents dans The Callisto Protocol. Jacob pourra aussi avoir recours à l’infiltration, les niveaux ayant été conçus pour lui permettre de supprimer ses ennemis en se faufilant dans leur dos. Tout dépendra du du joueur, le but étant de ne lui forcer la main à aucun moment. Naturellement, les développeurs se sont inspirés de grandes œuvres de la science-fiction et du film d’horreur pour sculpter l’univers du jeu, Demetrius Leal appréciant tout particulièrement Alien (Ridley Scott), The Thing (John Carpenter) et même Prometheus. « Vous savez, les attachés de presse français m’ont dit que le jeu était assez brutal, ce qui m’a amusé parce que justement, les réalisateurs français ont fait trois des films les plus violents que j’aie jamais vus : Martyrs, Frontière(s) et À l’intérieur, a souri Glen Schofield. Ils sont incroyables, Martyrs étant celui qui m’a le plus touché. […] Vraiment, les Français ont fait de chouettes films d’horreur. » Si The Callisto Protocol est aussi sanglant, c’est parce qu’il dispose du Gore Engine. « Nous voulions voir toute cette chair arrachée, nous voulions voir toutes ces éclaboussures de sang, nous voulions entendre les os craquer », a insisté le directeur artistique, le Gore Engine s’appliquant également à Jacob. Comme Isaac Clarke, chacune de ses morts est un festival d’hémoglobine. On l’a vu se faire couper en deux par une énorme pale dans le système d’évacuation d’eau, ou alors se faire pulvériser la mâchoire par un Biophage qui avait muté. En fonction du coup mortel porté, le héros pourra décéder de mille et une façons. Et pour tout vous dire, on a pris un malin plaisir à l’envoyer plus d’une fois à l’abattoir pour profiter de ces exécutions jouissives.
Ce goût pour le gore va de pair avec la réalisation crade – dans le bon sens du terme – de The Callisto Protocol. À l’aide d’animations contextuelles – Jacob qui se masque le nez pour ne pas respirer la pourriture, par exemple – les développeurs ont crée une cohérence entre ce que voit le personnage et ce qu’il ressent. Ça n’a l’air de rien, mais en termes d’immersion et d’atmosphère, ça joue énormément. Et puis, il y a cette maîtrise totale de l’éclairage, Striking Distance Studios souhaitant même brouiller les cartes pour maintenir une tension permanente sur les épaules du joueur. Ainsi, une zone éclairée ne sera pas forcément synonyme de sécurité, et inversement. On a pu découvrir des secteurs où la fumée était tellement épaisse que l’on voyait les Biophages apparaître au dernier moment. Bref, un vrai régal pour les yeux. Enfin, Glen Schofield aimerait faire de The Callisto Protocol une nouvelle série horrifique. On imagine que tout dépendra des ventes du premier épisode.