Test Werewolf The Apocalypse Earthblood : attention, il y a un loup ! sur PC
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Avec son aspect Immersive Sim trop timide, ses éléments RPG trop limités, ses mécaniques de gameplay trop systématiques et sa réalisation technique extrêmement datée, Earthblood loupe incontestablement le coche. Si vous ne jurez que par les grands hits inoubliables, vous pouvez passer votre chemin sans vergogne. Cependant, les joueurs plus souples et adeptes de l'univers Werewolf ne passeront tout de même pas un trop mauvais moment. Après tout, ce n'est pas tous les jour qu'un titre nous propose d'incarner un héros à la fois humain, loup et loup-garou. Une fois qu'on en a accepté les défauts, l'aventure se laisse donc parcourir jusqu'au bout sans déplaisir, à la manière d'un petit film de série B.
- Se transformer en loup, c'est forcément classe
- Quelques quêtes où les dialogues changent la donne
- Bonnes sensations en loup-garou
- L'univers techno-mystique fonctionne plutôt bien
- Infiltration rudimentaire
- Aspect RPG réduit au strict minimum
- Décors trop répétitifs
- Le gameplay aussi
- Techniquement, c'est faible
- Certaines modélisations vraiment datées
- Fin d'aventure un peu bâclée
Werewolf: The Apocalypse est un jeu de rôle publié en 1992 par White Wolf Publishing, également connu pour Vampire : La Mascarade, un autre univers culte parmi les rôlistes. Si le nombre d'adaptations vidéoludiques de ces deux franchises tourne clairement à l'avantage des vampires, les loups-garous contre-attaquent aujourd'hui grâce à Cyanide Studio, qui nous propose un Earthblood assez séduisant sur le papier. Mais nous allons voir qu'en pratique, ce jeu pourtant prometteur souffre hélas de sérieux défauts.
A quelques loups-garous près, l'univers Werewolf est extrêmement proche du nôtre. D'ailleurs Earthblood s'inscrit dans des thématiques actuelles, où des mégacorporations hypocrites déclarent lutter contre le réchauffement climatique tout en pillant allègrement les ressources de la planète. L'entreprise maléfique principale s'appelle ici Endron, et le déroulement de l'histoire nous permettra de découvrir qu'elle dissimule un projet encore plus diabolique derrière ses nobles déclarations d'intention. Pour défendre la nature face à ces vils industriels, quoi de mieux qu'une meute de loups-garous ? Celle qu'on nous présente en début d'aventure est notamment constituée de Cahal, le héros lycanthrope chauve/barbu/musclé/tatoué que l'on incarne, sa femme humaine Ludmila et leur fille Aedana, qui n'a pas encore vécu sa première transformation. Si par la suite le scénario ne quitte jamais les sentiers battus, il a tout de même le mérite de se dérouler dans un univers plaisant et trop rarement adapté en jeu vidéo. Nous ne sommes ni dans un blockbuster ni dans un film d'auteur, certes, mais dans une série B qui assume totalement de faire s'affronter des loups-garous et des exosquelettes !
L'incorporation de créatures surnaturelles et mystiques dans un monde moderne et industriel fonctionne plutôt bien, même si l'écriture globale est loin d'atteindre des sommets. Et puis avouons-le, incarner un personnage capable de prendre trois états différents (humain, loup et loup-garou) est loin d'être désagréable. Dans son état de base, Cahal peut dialoguer avec des personnages alliés, voire ennemis dans certains cas, s'accroupir pour s'approcher d'un garde par l'arrière et lui tordre le coup, utiliser une arbalète, ou encore interagir avec des interrupteurs et autres ordinateurs. Vous l'aurez compris, nous avons donc affaire à un jeu qui met l'accent sur l'infiltration, cette composante se voyant renforcée par la possibilité de se transformer à volonté en loup. L'état animal permet en effet de se déplacer plus rapidement, d'être plus difficilement repérable par les ennemis, et d'emprunter les nombreux conduits d'aération présents dans les niveaux.
IL EST FOU ALF LE LOUP
Quant à l'état de loup-garou, il intervient généralement lorsqu'on loupe notre tentative d'infiltration et que les choses dégénèrent. Cahal se transforme alors en une bête féroce qui se déchaîne violemment sur les pauvres humains alentours. Le jeu nous offre des combats relativement classiques et efficaces, qui utilisent un système fait d'attaques rapides, puissantes et sautées, d'esquives, de coups spéciaux à déclencher grâce à une jauge de rage, d'alternance entre une position agile et lourde, et de frénésie ultime qui permet de bénéficier à la fois de vitesse et de puissance. Et contre toute attente, c'est cet aspect là du jeu qui s'avère le plus réussi ! Le héros et les ennemis bougent plutôt bien, les affrontements sont sanglants à souhait, et on ressent de bonnes sensations de puissance, renforcées par le contraste avec les phases d'infiltration qui précèdent les combats. Problème : Wereworld est une franchise de jeux de rôle, et cet aspect s'avère au final très limité. On dispose bien d'un arbre de compétences, mais il reste assez anecdotique et permet essentiellement d'améliorer nos capacités de combat.
Quant aux dialogues, ils n'ont la plupart du temps aucune importance, les différents embranchements menant généralement peu ou prou aux mêmes réponses et n'ayant la plupart du temps absolument aucune conséquence. La seule exception à ce sujet provient de certaines missions où il est possible de dialoguer avec les premiers ennemis du niveau. En répondant correctement à leurs questions, on peut alors s'infiltrer plus naturellement dans leur base. Sachant que les bonnes réponses ne peuvent être connues du joueur que s'il a prêté attention au lore du jeu (en écoutant des conversations apparemment anodines ou en lisant des documents), Earthblood remonte alors dans notre estime. Hélas, ces moments de fulgurance sont l'exception et non la règle. D'ailleurs les phases d'infiltration ne sont guère plus enthousiasmantes que l'aspect RPG, car elles se montrent bien trop statiques.
GARE AUX GAROUS
La plupart des ennemis restent plantés au même endroit, il n'est pas possible de détourner les autres de leurs rondes, et les décors usent et abusent du même principe de "barrières" destinées à aider le héros à se cacher. Que l'on se trouve dans des bureaux, des laboratoires, des entrepôts ou dans une prison, on trouvera forcément des rangées de murets qui balisent le chemin de manière bien trop évidente. L'aspect Immersive Sim qu'aurait pu revêtir l'aventure souffre également de ces mécaniques de jeu trop systématiques. On ressent trop nettement que les conduits d'aération sont placés là uniquement pour le joueur, et non de manière naturelle, tandis que toute caméra gênante sera forcément située non loin d'un ordinateur permettant de la désactiver. Durant la petite dizaine d'heures nécessaire pour visiter de fond en comble tous les niveaux, l'aventure souffle régulièrement le chaud et le froid, chaque aspect prometteur étant finalement exécuté de manière assez discutable. Histoire de ruiner définitivement ses chances auprès des joueurs les plus exigeants, Earthblood pâtit également d'une technique vieillotte. PNJ raides comme des piquets, échelles purement décoratives qu'on ne peut pas utiliser, héros qui glisse sur quelques centimètres pour rejoindre une position précise, modélisations parfois extrêmement sommaires, et animations inégales (souvent réussies pour les loups et les loups-garous, plutôt ratées pour les humains) vont de pair avec une fin de jeu un peu rushée, qui multiplie les transitions maladroites à base de fondus au noir fainéants. Cyanide Studio n'est donc clairement pas au meilleur de sa forme ici, Earthblood nous rappelant plus le moyen Of Orcs and Men que le plaisant Styx.