*Test* Shadow of the Tomb Raider : l'efficacité avant l'originalité ? sur Xbox One
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Shadow of the Tomb Raider mérite son nom plus que jamais et nous emmène beaucoup plus loin dans l’exploration au détriment de combats plus rares mais néanmoins sauvages. Si le jeu n’invente rien et puise beaucoup dans la compétition tout en conservant les gros mécanismes de survie de ses prédécesseurs, il n’en reste pas moins la culmination de la splendide carrière d’une Lara Croft mature et définitivement charmante. Une véritable aventure exotique qui mise tout sur son univers, visuellement époustouflant et desservi d’une atmosphère sonore séduisante, qui n’est pas exempt de légèretés mais qui a le don de nous décrocher la mâchoire. Sacrément dépaysant.
- Une direction artistique à tomber par terre
- Graphiquement sublime
- Une OST vraiment immersive
- Un rythme plus soutenu et moins hollywoodien
- Des tombeaux qui forcent le respect
- Un HUD discret et bien pensé facilitant l'immersion
- Une longue durée de vie pour un univers séduisant
- Un tas d'actions à débloquer sous-exploitées
- Des animations un peu saccadées
- Une certaine imprécision dans les déplacements
- Une histoire efficace, mais classique et prévisible
- Rien de neuf à l'horizon... mais le boulot est bien fait
Après deux opus réussis en 2013 et 2015, on peut dire que Lara Croft en a sacrément bavé : partir à l’aventure avec un bout de bois en guise d’arc, empêcher des catastrophes mystiques planétaires et lutter contre des milices entières à longueur de journées, oui, notre charmante anglaise commence à être rodée dans son métier casse-cou. Pourtant, l’heure est à un dernier tour de piste, celui de l’aboutissement et de la maturité pour une trilogie dans laquelle l’archéologue s’expérimente crescendo. Dans Shadow of the Tomb Raider, il ne sera plus tellement question d’affronter des hordes d’ennemis et de courir au milieu d’explosions inexplicables comme nous avaient parfois habitué ses prédécesseurs, il s’agit surtout de restaurer l’ADN pure du jeu d’exploration. Et, en ça, le nouveau titre d’Eidos Montreal le fait avec brio au détriment d’une action justement devenue beaucoup plus précieuse.
LE TEMPS EST COMPTÉ
L’Ordre de la Trinité, puissante et mystérieuse organisation à la recherche d’artefacts antiques et aux motivations dominatrices, avait été introduite dans Rise of the Tomb Raider et autant dire que ses innombrables hommes de main avaient causé du tort à Lara. Pas de bol, ils seront plus que jamais au centre du scénario de Shadow of the Tomb Raider qui, cette fois-ci, s’enfoncera dans un premier temps au Mexique. À la recherche d’un objet mystérieux et surtout lancée dans une course contre-la-montre envers la Trinité, Lara Croft va commettre sa première grosse et très lourde bourde. Certains renversent leur café sur leur rapport de stage, d’autres oublient de serrer le frein à main après le créneau : Lara, elle, va déclencher l’avènement d’une apocalypse maya. Tranquille. L’introduction du jeu donne le ton et il est résolument dramatique avec un tsunami monstrueux, première étape dans la destruction du monde où la ville locale se voit engloutie et où les morts innocentes s’enchaînent. Notre héroïne et son fidèle compagnon Jonah sont quelques peu embarrassés et, devant l’ampleur du chaos, décident d’empêcher cette destruction programmée en se lançant dans un périple dangereux qui les emmènera tout droit… au Pérou.
On reste globalement cantonné à une chasse au trésor plutôt classique mais bien construite, nous emmenant de fil en aiguille à notre but après moult découvertes et quelques bousculades prévisibles.
C’est en fait là que se passera la quasi-totalité de l’aventure et, plus précisément, dans les dizaines de cités mayas à l’abandon. Le pays sud-américain abritera également de nombreuses villes humaines, plus ou moins modernes, qui serviront de HUB à ces deux protagonistes qui marcheront dans les pas de toute une ancienne civilisation pour empêcher la fin du monde et se défaire des tentacules d’une Trinité déterminée. Pour être honnête, le pitch est franchement séduisant et s’il se plaît à proposer des dialogues intelligents au début du jeu, effleurant les thèmes de la responsabilité ou de la solitude, le reste n’en reste malheureusement assez plat. On reste globalement cantonné à une chasse au trésor plutôt classique mais bien construite, nous emmenant de fil en aiguille à notre but après moult découvertes et quelques bousculades prévisibles. Malgré tout, le soft propose des bonnes idées narratives, notamment dans la puissance de certains échanges humains où les doublages au poil et les animations faciales affinées véhiculent de véritables émotions. À savoir qu’il existe même un mode « immersion » dans lequel chacun des personnages parlent dans sa langue natale pour plus de réalisme. Original, même si l’on vous conseillera définitivement la VO. Malgré tout, le cœur de Shadow of the Tomb Raider ne réside pas là : ce fil conducteur qu’est l’histoire est surtout un excellent prétexte pour nous faire éclater au visage un univers sublime qui s’avère certainement l’un des plus réussis de cette gargantuesque année 2018.
CE TOMBEAU SERA VOTRE TOMBEAU
À vrai dire, jamais ce Tomb Raider n’aura aussi bien mérité son nom. À l’instar de ses deux grands frères, ce nouvel opus s’articulera autour de plusieurs zones ouvertes, chacune proposant de nombreux défis à réaliser. Et c’est une claque quasi-constante ! La jungle péruvienne offre de nombreuses cités totalement laissées à l’abandon, aux entrées prescrites et aux dizaines de collectibles à aller dénicher en s’aidant soit des cartes trouvées soit en résolvant les énigmes inscrites sur des totems oubliés. Les cryptes et les tombeaux, deux composantes essentielles du game design, sont clairement le grand point fort de cette aventure enivrante. Dans les deux cas, il s’agit essentiellement d’épreuves qui feront travailler soit vos méninges avec des problèmes élaborés – basés sur la physique de l’eau, les rouages à combiner ou encore le jonglage d’éléments comme le feu ou le vent pour débloquer des passages – ou bien directement vos nerfs avec des phases de plateforme mortelles et exigeantes.
Dans Shadow of the Tomb Raider, on passe la plupart de son temps à résoudre des énigmes, à s’enfoncer dans un caveau pour ouvrir un coffre ou franchir des passerelles bancales au sol en dents de scie. La mort n’est d’ailleurs pas étrangère et on termine bien souvent empalée, noyée ou écrasée par un poteau roulant. Ça fait partie du jeu. Ceci dit, on regrette une certaine imprécision dans les sauts et les déplacements, de même que plusieurs bugs de collision et d’interface qui n’aident pas à maintenir notre héroïne en vie. Le petit plus, c’est que les différents tombeaux du jeu restent optionnels et il faudra parfois revenir sur vos pas après avoir débloqué un outil précis dans l’histoire principale pour y accéder : une excellente manière d’assurer une certaine rejouabilité, et ce même après avoir terminé la campagne. Et, surtout, ces tombeaux offrent des surprises visuelles absolument démentes qui nous rappellent à quel point les développeurs d’Eidos Montreal, qui ont travaillé en collaboration avec Crystal Dynamics, n’y sont pas allés de main morte sur la direction artistique. Ne faîtes pas le jeu en ligne droite : baladez-vous, prenez votre temps et partez au quatre coin des maps, à la recherche de tous les secrets et magots. Et préparez du pop-corn.
LA CLAQUE PÉRUVIENNE
Que ce soit au travers de ses tombeaux, de ses cryptes ou tout simplement des différentes étapes narratives de la quête principale, Shadow of the Tomb Raider est beau à en pleurer et offre des panoramas à s’en décoller la rétine. Très souvent, on se surprend à ne plus toucher la manette et à scruter minutieusement chaque détail de scs cadres ultra-aboutis : le mieux, c’est que tout ou presque est affiché en temps réel en posant des bâtiments qu’il est possible de visiter sans chargement aucun. Les premiers abords d’un temple, avant d’y rentrer concrètement, sont époustouflants et donnent une crédibilité artistique indéniable aux concepteurs canadiens. Il en est de même pour les intérieurs, désignés à la perfection et surtout sublimés par une réalisation technique sans faille. Très clairement, Shadow of the Tomb Raider est l’un des plus beaux jeux de cette fin de génération, et ce même sans la 4K ! Et, pourtant, lorsque celle-ci est activée sur les consoles compatibles, le rendu n’est que plus saisissant encore.
Très clairement, Shadow of the Tomb Raider est l’un des plus beaux jeux de cette fin de génération, et ce même sans la 4K !
Non, vraiment, on ne peut que tirer notre chapeau et il s’agit là d’une artère principale pour ce soft qui tient tant à planter un monde crédible, mystérieux et ultra-immersif. Un régal graphique mais également sonore puisque l’OST est tout aussi réussie : réalisée par Brian D'Oliveira, les multiples thèmes adaptés aux tombeaux, à la jungle, aux scènes d’action, à celles de peur (car il y en a et elles sont efficaces) ou aux villages sont somptueux et prenants. Tous utilisent des instruments locaux et plus traditionnels pour une ambiance vraiment très pertinente en fonction des situations. Mis à part les animations de notre belle héroïne, étonnamment arcades et contrastant alors étonnamment avec ce rendu si réaliste (pour ce citer que lui, un Uncharted y gagne beaucoup en travaillant davantage les déplacements de ses personnages), il n’y a pas grand-chose à redire. Balaise.
MILLIONNAIRE ET MEUTRIÈRE : LA FEMME PARFAITE ?
Shadow of the Tomb Raider séduit donc par son monde virtuel fascinant que l’on devra explorer majoritairement mais n’en reste pas moins un jeu d’action : ici, Lara n’est plus aussi fébrile qu’auparavant. Elle est plus âgée, plus expérimentée… et beaucoup plus aboutie dans l’art de l’assassinat. Pour information, il s’agit selon les développeurs de l’ultime épisode avant que notre aristocrate ne devienne la Tomb Raider aguerrie présentée sur PlayStation en 1996 ! Il n’est donc plus sujet d’être une proie pour ses ennemis mais, au contraire, d’en être le premier prédateur. Bien que les combats soit au final assez rares au profit de la vadrouille autonome en pleine nature – autant dire que l’on est les premiers surpris par ce choix étant donné le rythme des anciens chapitres – ceux-ci s’avèrent intenses et plutôt jouissifs. Lara peut se mouvoir au sein des hautes herbes, se planquer dans les végétations murales, se recouvrir de boue pour se camoufler ou attendre sagement sa proie postée depuis une branche. Le tout avec une multitude de cordes à son arc. Presque littéralement, d’ailleurs. Ce dernier reste toujours l’outil principal de notre aventurière avec lequel elle pourra décocher jusqu’à trois flèches en même temps, rendre fou ses ennemis en empoisonnant les pointes, attirer des individus à droite et à gauche en lançant des leurres ou étrangler puis pendre ses adversaires à des arbres. Sans pression, la fille.
Rajoutez à ça la possibilité d’user de différentes armes à feu (armes de poing, fusils d’assaut et fusils à pompe avec des types de munitions distincts) selon votre type d’approche ou si les choses se gâtent et vous avez une bonne idée de l’ouverture appréciable des phases d’action. Bien sûr, l’ensemble des facultés de Lara sont à débloquer via un arbre de compétences divisé en trois branches et il faudra naturellement avancer dans le jeu pour récupérer et crafter divers éléments. Là où le bât blesse, c’est que les combats sont au final si précieux que le jeu propose presque trop de possibilités d’affrontement, au point où l’on ne sert finalement que de peu de facultés et que l’on en voit mal la véritable utilité. Après avoir terminé le jeu et l’ensemble des quêtes secondaires, on est donc surpris de n’avoir jamais vraiment pu user de telles ou telles possibilités ; de même, de nombreuses armes à feu peuvent être achetées et améliorées, sans grand intérêt puisque celles de bases, upgradées (ce qui prend déjà du temps à être fait) sont déjà clairement efficaces pour le peu que l’on s’en sert. Shadow of the Tomb Raider met effectivement un point d’honneur à privilégier l’infiltration, plus maligne et sauvage, que les échanges de coups de feu brutaux. Le jeu ne coupe pas court à quelques courses poursuites dévastatrices et parsemées d’explosions, mais celles-ci sont plus rares et surtout davantage justifiées qu’auparavant, apocalypses mayas à l’appui… Un rythme beaucoup moins explosif, donc, ce qui n’est pas pour nous déplaire malgré le rendement mal exploité de l’ensemble des features combatives.
LARA CRAFT
Ne nous le cachons pas, Shadow of the Tomb Raider emprunte beaucoup à Uncharted, notamment à son quatrième épisode sorti en 2016. Dans son level design particulièrement, où Lara dispose également d’une corde dont elle pourra se servir pour se balancer d’un flanc de montagne à un autre ou se sortir d’une situation désespérée après un saut de la dernière chance. Les possibilités de camouflage en hautes herbes et ses éliminations ne sont également pas anodines : malgré tout, si le jeu n’invente en soit rien, il huile très bien ses mécanismes et les exploite en profondeur. Le crafting reste par exemple une nouvelle fois au cœur du gameplay avec des centaines d’éléments à récupérer à des fins diverses : se fabriquer une nouvelle tenue avec des propriétés propres, upgrader ses pétoires, préparer des kits de secours, se concocter des potions de chasse ou tout simplement se tailler des flèches en tout genre, l’univers regorge d’items à collecter pour améliorer ses divers talents et entretenir son arsenal. Peut-être même un peu trop puisque l’on arrive vite aux capacités de réserves maximales autorisées, rendant alors l’obtention des ressources un peu futiles à un stade avancé de l’aventure.
...malgré tout, si le jeu n’invente en soit rien, il huile très bien ses mécanismes et les exploite en profondeur.
À l’instar des compétences de combat, le jeu prend une autre dimension en NewGame+ et dans une difficulté supérieure, ce dernier étant disponible une fois la quête principale terminée. D’ailleurs, il vous faudra du temps libre puisque Shadow of the Tomb Raider est loin d’être court avec une petite vingtaine d’heures en ligne droite, et beaucoup plus en jouant le jeu et en allant fouiller les recoins et tombeaux. Il est important de noter la présence de quelques quêtes secondaires plutôt sympathiques sans casser trois pattes à un lama mais qui ajoutent une petite plus-value vidéoludique. Une épopée savoureuse, non pas sans défaut mais qui prouve bien que la licence a encore de très belles expériences atmosphériques à offrir.