Test HITMAN 2 : l'efficacité avant l'originalité, une suite à la hauteur ? sur Xbox One
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- Des niveaux variés et ultra-peaufinés
- Un level design à tomber par terre
- Une profondeur et une liberté de jeu impressionnante
- Une rejouabilité folle pour une durée de vie exemplaire
- Quelques autres modes, légers, mais qui contribuent à l'efficacité globale
- Techniquement, c'est beau, mais il va falloir grimper la marche
- Une I.A. correcte mais loin de la tuerie annoncée
- Une narration et une mise en scène à la ramasse
- Zéro innovation par rapport au jeu précédent
Il y a deux ans, IO Interactive étalait sur toute une année son nouveau jeu Hitman, divisé épisodiquement pour un modèle saisonnier discutable mais au contenu néanmoins réussi. Sûrement après avoir réfléchi attentivement, ce modèle ciselé a finalement été abandonné au profit d’une suite complète, en bonne et due forme, et disponible entièrement dès sa sortie. Pourtant, le studio danois semble réemprunter quasiment toutes les ficelles de son prédécesseur, de la structure narrative aux grandes mécaniques de gameplay, en passant par le moteur de jeu ou le game design. HITMAN 2 relève-t-il d’une Saison 2 déguisée qui s’assoit sur ses lauriers ou d’une véritable suite, conséquente et un minimum innovatrice ?
L’Agent 47 a un long parcours derrière lui. Avec déjà six aventures sur PC et consoles de salon à son compteur, on peut avouer sans mal que notre chauve préféré fait partie des plus grandes icônes vidéoludiques de son temps : il a même reçu – ou subit, c’est selon – deux adaptations sur grand écran, interprété respectivement par Timothy Olyphant et Rupert Friend. La mythologie du tueur à gages et de son agence ultrasecrète est désormais bien ancrée dans le cadre culturel, au point même que son célèbre code-barres relève aujourd’hui presque du mysticisme : on ne s’en lassera jamais et, clairement, le dernier Hitman de 2016 nous avait largement fait renouer avec les codes originaux de la saga. Ce nouvel épisode ne semble pas déroger à la règle en se calquant trait pour trait avec son prédécesseur : qu’on se le dise de suite, sa principale et presque seule différence réside en sa contenance, complète dès son lancement. Pour le reste, on a clairement l’impression de s’atteler à l’opus de 2016… et ce n’est pas un mal sur bien des points.
OEIL POUR OEIL, DENT POUR DENT
Si IO Interactive n’a finalement pas opté pour un modèle épisodique, tout pousse pourtant à croire que cette stratégie était bien celle définie au début du développement. Le téléchargement du jeu dans sa version dématérialisée indique clairement la couleur : on n’installe pas un seul et même titre, mais bien chaque mission indépendamment les unes des autres sous le seul onglet HITMAN 2. Une fois l’aventure lancée, tout est sectorisé comme l’était le soft précédent et l’on se rend bien vite compte que l’ensemble de son game design a été repris, pièce par pièce, afin de livrer une suite dans la totale continuité. Notre assassin reprend donc sa trame exactement là où elle s’était arrêtée, aux travers de diaporamas narratifs (en 2018, sérieusement ?) avec, à la clé des multiples assassinats et mises à mal d’organisations secrètes, des réponses sur ses mystérieuses origines. Ce deuxième jeu, qui aurait pu littéralement emprunter le sous-titre de « Saison 2 », s’arrête d’ailleurs sur un cliff-hanger forcé qui indique clairement qu’IO Interactive planche déjà sur une nouvelle salve d’épisodes : un squelette pas franchement des plus convaincants à l’aube de la nouvelle génération de consoles, pour ne pas dire vieillot et surfait. C’est dommage, car avec un plus de travail sur l’écriture et la mise en scène, le titre aurait pu réellement prendre aux tripes : il préfère toutefois se concentrer sur ce qui avait déjà fait la force de son grand-frère, à savoir un level-design à tomber par terre et une exquise liberté de jeu.
TUER C'EST JOUER
La campagne se distingue donc par ses six épisodes uniques, tous s’installant dans des cadres bien distincts et aux ambiances propres. On se rendra donc à Miami pour une course automobile, en Colombie dans la jungle du cartel Delgado, en Inde dans la surcharge humaine de Mumbaï, aux Etats-Unis dans les charmants pavillons de Whittleton Creek, sur l’île rocailleuse et secrète de Sgaìl ou encore, au tout début du jeu, sur une plage nocturne pour infiltrer la villa d’un dangereux homme de main. Très clairement, les différents niveaux de HITMAN 2 forment sa force indiscutable en s’appuyant sur des univers profonds, variés et surtout intelligents. À l’exact instar de son prédécesseur, notre objectif est d’éliminer une à plusieurs cibles précises avant de s’extirper dans le silence le plus total. Pour ce faire, il est possible d’user d’absolument tout le décor à son avantage, soit en suivant des missions scénarisées point par point, soit en s’accoudant de son seul et unique flair. À nouveau, HITMAN 2 séduit dans ses mécaniques d’infiltrations complexes et ses possibilités innombrables : se faire passer pour un vendeur de viennoiseries et empoisonner sa cible ? Check. Prendre le rôle d’un barbier avant d’égorger sa victime sur son fauteuil ? Check. Trafiquer l’auto-éjection d’un avion avant d’exploser son malheureux hôte dans les airs ? Check. Les voies de l’assassinat sont nombreuses et surtout monstrueusement jouissives, sans pour autant réinventer quoique ce soit. Le jeu marche dans les exacts pas de son ancêtre, à la différence près de quelques features in-game (la possibilité de voir ses ennemis bouger dans des fenêtres en temps réel) ou une I.A. que l’on nous annonce retravaillée (et qui, pourtant, est très loin d’être parfaite). Être un tel prédateur procure un plaisir indescriptible, fricotant avec nos instincts carnassiers les plus primaires. La formule marche toujours autant et fera parler le cœur des plus chasseurs.
PERMIS DE FLINGUER
Si le premier run se parcourt relativement vite avec moins d’une dizaine d’heures de jeu en mode Normal, il serait imbécile de ne pas préciser comment le jeu d’IO Interactive a été pensé : tout est misé sur sa rejouabilité. C’est bien simple, HITMAN 2 est un titre qui se savoure sur le long terme, qui explore notre patience et demande une connaissance des niveaux irréprochables pour en apprécier tout le potentiel. Véritable jeu de scoring, nos compétences sont analysées tout du long pour récolter des points d’expérience qui permettront de débloquer moult récompenses, permettant d’aborder les levels complètement autrement. Ainsi, il sera possible de partir avec tels items en poche plutôt que d’autres, de faire placer des objets stratégiques dans des coins déterminés de la map, de commencer la mission d’un emplacement précis, de se lancer dans un costume particulier… Afin de réaliser les dizaines de méthodes d’assassinats proposées, d’obtenir toutes les récompenses liées à des actes spéciaux et, donc, d’obtenir la meilleure note et le meilleur taux de complétion, chaque carte demande des heures et des heures d’essai et de pratique. Rajoutez à ça le mode de difficulté Maître – qui rajoute plus de gardes, de caméras de sécurité ou d’attention de la part des PNJ –, la possibilité d’attribuer ou d’accepter des contrats online sur la tête de bonhommes divers, une campagne annexe avec quatre nouveaux niveaux (et tout à fait honorables) ou, carrément, tous les épisodes de Hitman 1 (pour 29,99€ supplémentaires, attention), et vous avez une difficulté/longévité savamment dosée en fonction de vos objectifs personnels. Tuer dans la discrétion et sans dommages collatéraux, c’est un vrai métier.
MEURS PAS UN AUTRE JOUR, MEURS MAINTENANT
À côté de cette durée de vie plus qu’acceptable, on peut noter le mode Sniper Assassin, déjà disponible depuis quelques temps, qui occupe quelques dizaines de minutes et permet d’aérer le jeu grâce à des missions solo ou multijoueurs où l’on doit éliminer trois cibles et leurs gardes du corps dans un temps imparti. Un peu succin bien qu’appréciable : on se rabattra surtout sur Ghost, un véritable mode compétitif online et original dans lequel on sera mis en opposition à un autre Agent 47. Attention toutefois, il ne s’agit pas ici d’éliminer son concurrent mais, en réalité, de tuer le plus de cibles définies dans les niveaux principaux, et avant lui. De cette manière, chacun évolue dans son propre monde avec une vue sur le fantôme de l’autre en temps réel : une course à la montre divertissante et au concept louable, bien qu’au potentiel toujours un poil brouillon et vite exploité. De même, les cibles temporaires font leur retour, la première d’entre elle n’étant autre que Sean Bean et dont la mission sera disponible dans deux semaines, à l’heure où nous écrivons ces lignes. Difficile de cracher dans la soupe pour autant, même si l’on a du mal à relever la tête de l’extraordinaire profondeur de la campagne solo. Malgré tout, HITMAN 2 pèche un poil par son moteur, un Glacier Engine 2 définitivement vieillissant, et quelques bugs de collision embêtants. Tâchons toutefois de relativiser puisque l’ensemble s’avère beaucoup plus solide que ce qui nous avait été présenté lors de notre dernière preview : le jeu est finalement très stable, le rag-doll est moins un peu moins catastrophique que prévu et l’ensemble des décors est fouillé, vivant et maîtrisé. Néanmoins, il va être urgent pour IO Interactive d’apporter une cure de jouvence pour son prochain épisode car la formule graphique et architecturale commence véritablement à s’effriter. Il est temps de passer à la vitesse supérieure messieurs, et de ne pas se reposer trop longtemps sur ses acquis avant de perde l’indulgence de votre communauté…