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Auteur d’une série de jeux oscillant entre le bon et l’excellent, Free Radical Design s’offre ici sa première vraie sortie de route. Pourtant parti armé de quelques bonnes idées – des soldats dopés incapables de percevoir toute l’horreur du feu ; le revirement d’un individu qui pense retrouver son libre-arbitre – Haze se saborde au bout de quelques minutes. Mal écrit, pas bien réalisé, trop buggé et finalement très déplaisant à jouer en solo, la première production des développeurs anglais sur PS3 tient davantage du brouillon vite expédié que du FPS monumental que réclame désespérément la console de Sony. Et même les camés du pad, qui cherchent un bon produit en ce mois de mai bien morne, feraient mieux de surmonter leur manque plutôt que de céder à la tentation.
- Probablement rigolo en coop'
- Deux gameplays (légèrement) différents
- Prise en main décente
- La chope d'arme du rebelle
- Beaucoup de bruit pour rien
- Level design très imparfait
- Graphismes extrêmement inégaux
- Durée de vie minable et fin scandaleuse
- Nombreux ralentissements
- I.A. souvent misérable
- Scénario bâclé, dialogues ineptes
- Phases motorisées sans intérêt
- Cinématiques pesantes
- Globalement ennuyeux
Engagez-vous, qu’ils laissent entendre ! Mauvaises nouvelles et annonces désastreuses envahissent radios, télévisions, sites internet. Tous les médias relaient l’horreur moderne. Combats ici, conflits là-bas, massacres ailleurs, génocides plus loin, le monde de 2024 n’est pas le paisible océan dont peuvent légitimement rêver les victimes des affrontements contemporains. Heureusement pour la planète, diverses entreprises interviennent dans les zones de guerre, en lieu et place des armées gouvernementales. Mantel Global Industries est une de ces structures, et fournit à la fois la logistique et les hommes nécessaires à la résolution – rapide ou non – de tout problème militaire. Méga-corporation, Mantel dispose d’un énorme atout : elle est la seule société capable de synthétiser et de distribuer le Nectar. Cette substance hautement énergétique se révèle tellement efficace que les armures de combat qui équipent les unités de terrain disposent toutes d’un système de perfusion intégré. Dopés en continu, les hommes en armes supportent bien mieux le stress, voient leur récupération physique très largement améliorée, et sont beaucoup plus précis dans leurs assauts.
Le jeu avec un message intelligent dedans
Sergent enthousiaste, Shane Carpenter a choisi de mettre les mains dans le cambouis pour voir se réaliser son rêve d’un monde meilleur. Codirigeant une petite unité avec un autre sergent, il va rapidement tester toutes les possibilités offertes par sa combinaison magique, et ce contre les troupes rebelles de l’infâme Ecorcheur, dictateur sud-américain de sinistre réputation. Extrêmement brouillonnes, les premières minutes de Haze permettent toutefois de faire le tour des "innovations" d’un jeu qui en est autrement bien avare. Quelques mois après Crysis, la possibilité de mieux distinguer les ennemis à distance et de récupérer plus rapidement prête légèrement à sourire, mais il faudra bien s’en contenter… pour un temps. Débutant par une morne chasse aux guérilleros dans une jungle-couloir pas bien jolie, le nouveau jeu des géniteurs de TimeSplitters tente immédiatement de se distinguer par son ton résolument second degré, où perce à chaque instant une critique sans finesse de la course au profit, de la manipulation des masses par les médias, voire de la guerre en général. Le doublage français moyennement calé et pas toujours très convaincant ne sert pas vraiment le propos, pas plus que les caractères extrêmement caricaturaux de vos alliés. Les quelques sorties de Shane Carpenter lui-même ne rendent pas sympathique cet invisible héros que tout le monde cherche à rouler. A défaut d’être brillant, ce doux crétin se manie plutôt aisément et, bien qu’il ne puisse porter plus de deux armes simultanément, trace sa route sans grande difficulté au milieu de hordes d’ennemis pas franchement futés. Les défaillances perpétuelles de l’IA rendent d’ailleurs la progression à la fois simple et barbante, d’autant que vos adversaires ne sont pas les seuls à souffrir de troubles cérébraux. Toujours accompagné de quelques compagnons de boucherie, vous ne pourrez que constater leur incroyable capacité à se faire massacrer en cinq minutes, faute de stratégie cohérente.
La vie en jaune
L’impossibilité de donner des ordres aux petits camarades artificiels achèvera de convaincre les plus sociaux d’entre vous de se farcir la campagne en coop, jusqu’à 4 associés. Nous n’avons pas eu l’occasion de tester cette option, mais il est certain que le jeu doit alors gagner en intérêt tactique, notamment lors des phases à bord de véhicules, durant lesquelles l’IA s’est révélée totalement désastreuse. Ces séquences, qui interrompent régulièrement vos assauts en vue subjective, ne présentent toutefois aucun réel intérêt : si des ennemis, parfois eux-mêmes motorisés, se dressent régulièrement sur votre route, il vous suffit de foncer à toute berzingue pour atteindre le prochain checkpoint, puis la fin du chapitre. Les plus facétieux pourront néanmoins écraser quelques violents piétons, voire descendre de leur véhicule – au risque de le voir détruit – pour faire le ménage au shotgun. Un nettoyage qui ne laissera toutefois pas de traces. La guerre que Mantel mène est en effet étonnamment propre : pas de sang qui gicle, pas de membres arrachés sous l’assaut d’armes puissantes, le monde que les unités de terrain voient à travers leur masque doré est coloré… et expurgé. A la faveur d’une défaillance de votre combinaison, vous prendrez pourtant conscience de la réalité du terrain, de l’horreur du conflit dans lequel vous évoluez. En faussant votre perception en même temps qu’il anéantissait votre libre arbitre, le Nectar vous a dévié du chemin de la justice. Pour rééquilibrer la balance, votre jeune héros va donc rejoindre les troupes d’un Ecorcheur bien plus humain que la propagande de Mantel ne le laissait supposer.
Avance, tue, avance, tue
C’est donc en tant que rebelle que vous abordez la seconde partie du jeu. L’assistance à la visée disparaît évidemment, mais votre nouveau statut vous permet de réaliser de nouveaux petits tricks sympas : arracher son arme à un ennemi au corps-à-corps, effectuer une glissade pour se mettre à couvert plus rapidement ou encore trafiquer les munitions d’autres armes pour alimenter un modèle différent. Le gameplay gagne légèrement en finesse, d’autant que vous pouvez vous amuser à tirer profit des faiblesses de la combinaison de vos anciens alliés : en tirant sur leur diffuseur de Nectar, vous ferez momentanément perdre tout discernement aux soldats de Mantel, qui s’entretueront joyeusement. On se sert toutefois assez peu de ces diverses manœuvres en solo, et les défauts de Haze ne s’estompent pas au cours des quelques heures passées aux côtés de l’Ecorcheur. Ainsi, bien qu’il fasse l’apologie du libre-arbitre au travers de son scénario pataud, le jeu se révèle épouvantablement dirigiste et affiche un level design assez limite. Les environnements sont ultra-convenus – usines désaffectées, canyons, bâtiments en ruine -, les possibilités d’interaction extrêmement limitées (tire le levier !), le radar est mal fichu et les objectifs ne sont pas toujours bien clairs. Un défaut qui n’en est presque pas un puisqu’il suffit toujours d’avancer et de buter le plus de monde possible pour satisfaire ses commanditaires. Malgré les quelques années de développement et les ambitions affichées, Haze n’est pas non plus une franche réussite graphique. Nous ne reviendrons pas en détails sur l’absence de la HD, mais les propos de Derek Littlewood ne manquent pas de faire sourire compte tenu des innombrables ralentissements qui viennent perturber les grosses phases d’action. Scénario minable, réalisation moyenne, game design piteux, baisses de rythme à répétition, Haze est un bien beau fiasco, qui a toutefois le grand mérite de ne pas vous faire perdre trop de temps. Six heures vous suffiront largement pour boucler la campagne, dont une grosse demi-heure de cinématiques sans intérêt et impossible à zapper. A soixante-dix euros le jeu, ça fait cher, très cher, la minute d’ennui.