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- Réalisation séduisante dans son ensemble
- Scénarios originaux
- De bonnes sensations de vitesse
- Bonus à débloquer
- Réglages de la monoplace trop simplistes
- Ambiance sonore cacophonique
- Musiques anecdotiques
- Temps de chargement plutôt longs
- Réalisme du jeu inabouti
- Bugs de collision flagrants
Cela va sans doute en choquer plus d'un, mais depuis le magnifique Formula One 97 sorti sur PlayStation, le sport automobile le plus prestigieux au monde avait perdu quelques-unes de ses lettres de noblesse sur le marché vidéoludique. Hormis l'opus 05 développé par Studio Liverpool qui a récemment réconcilié tout le monde avec Bernie Ecclestone sur PlayStation 2, la Formule 1 avait sombré dans un sommeil léthargique qui aura duré un peu plus de sept ans.
Les éditions sorties entre-temps se la jouaient FIFA & Cie, reposant uniquement sur la présence de la licence officielle FIA (Fédération Internationale de l'Automobile) pour tenter de convaincre les amateurs du vibreur. Or, il serait assez réducteur d'attribuer la magie et les paillettes de ce sport mécanique aux seuls pilotes et véhicules, même s'ils y contribuent grandement. Une casse moteur, une rupture de suspension, une crevaison ou un simple accrochage sont les aléas d'un grand prix qui font également monter l'adrénaline. Si les géniteurs de Gran Turismo et Forza Motorsport l'ont immédiatement appliqué à leur discipline, on cherche toujours un réalisme au poil du coté de la Formule 1. F1 Grand Prix a-t-il su répondre à nos attentes ?
Faire bonne impression
En guise d'apéritif, les barmen de Traveller's Tales nous servent une préface animée assez enivrante. Non alcoolisée, elle permet encore une fois de faire étalage du potentiel de la PSP dans ce domaine. Sans être particulièrement originale pour un soft de ce genre, la cinématique insiste sur une course-poursuite que se livrent les ténors de la Formule 1. On appréciera au passage les gouttelettes d'eau qui, à base de bullet time, arrosent le casque de Fernando Alonso ou Giancarlo Fisichella, c'est selon. Les fanboys de Kyoto auront beau dire que la console portable de Sony n'apporte rien de neuf en terme de gameplay, l'écran 16/9e et ses graphismes cristallins suffisent à faire vendre la machine, que ça plaise ou non. Cela dit, il ne faut pas tomber dans l'euphorie et croire que la perfection visuelle est constamment atteinte sur PSP. Les défauts existent, et F1 Grand Prix a du mal à masquer un aliasing et un clipping assez prononcés. Même s'il ne s'agit que d'un détail, on ne peut pas dire que le public ait été peaufiné jusqu'à la dernière extrémité. Quant à la dégaine des mécaniciens et des pilotes sur le podium, on se contentera de l’appréciation ‘peut mieux faire’.
Le moteur graphique de F1 Grand Prix offre tout de même quelques réjouissances bien délicieuses à savourer. En premier lieu, les pistes sont les copies conformes des originales, tant au niveau de leur étroitesse qu'au niveau de leur relief. Les artistes de Traveller's Tales sont même allés jusqu'à rester fidèles au revêtement des zones d'évacuation ! Ce réalisme pointu est sans doute ce qui bluffe le plus lorsque l'on est habitué à squatter TF1 les dimanches après-midi, et que l'on occupe à son tour le baquet de son champion favori. La Rascasse de Monaco, le Raidillon de Spa Francorchamps, le Banking d'Indianapolis, toutes les courbes, tous les virages sont reconnaissables au premier coup d'oeil. Pour un expert en la matière, c'est un véritable régal d'évoluer dans un environnement ne donnant pas l'impression de rouler sur des circuits aplatis par la 2D. Généralement, le grand prix de Monaco sert de mètre-étalon : la configuration citadine de la course oblige les développeurs à y porter une attention particulière, avec les résidences privées et les yachts de luxe qui jonchent le parcours. Quand Monaco va, tout va ! C'est le cas de F1 Grand Prix qui ne se contente pas de nous sortir de son chapeau des terrains de chasse à la sauce "au-delà du réel", mais s'applique également à fournir un cadre soigné et riche, toujours proche de ce que l'on peut voir à la télévision. Pas de baisse de régime importante à déclarer concernant l'animation, uniquement l'entrée et la sortie de la voie des stands qui s'avèrent parfois laborieuses. La modélisation des engins est parfaite, et leurs carrosseries "polishées" ne passent pas inaperçues. Bref, ce F1 Grand Prix est loin d'être laid sans pour autant mettre un coup de pression rétinien au joueur. Du sans risque avec, comme seules extravagances visuelles, des conditions climatiques variables et du lens flare sur certaines pistes. C'est tout.
Aux frontières du réel ?
On le sait depuis trop longtemps : la Formule 1 est un sport qui nécessite un haut degré de simulation lorsqu'il est numérisé. Si, graphiquement, F1 Grand Prix semble respecter les normes de sécurité, il n'en va pas de même pour son gameplay qui affiche parfois un certain manque de crédibilité. Croix pour l'accélération, Carré pour la marche arrière, Rond pour le frein moteur, Triangle pour modifier la vue, R pour le freinage, L pour une jeter un coup d'oeil dans le rétroviseur, nous voici prêts à effectuer quelques tours de piste pour voir si le jeu a de la gueule. De prime abord, les monoplaces se laissent facilement dompter avec une maniabilité qui n'impose pas des heures d'entraînement. Elle s'offre néanmoins quelques subtilités via trois styles de pilotage - ou de réglages - qui conviennent plus ou moins selon le tracé auquel on a affaire. Une approche agressive valorise la vitesse de pointe mais diminue considérablement la tenue de route et la montée en régime. Monza et Indianapolis, avec leurs longues lignes droites et leurs courbes négociables à grande vitesse, correspondent à ce style de pilotage. Une approche défensive handicape la vitesse de pointe mais offre un appui aérodynamique et une accélération probantes. Monaco et Suzuka dont les tracés sont plus que sinueux collent parfaitement avec un tel réglage. Enfin, une approche équilibrée du véhicule répartit de façon équitable les trois vecteurs de la conduite. A choisir sur des circuits ni trop lents ni trop rapides tels que Gilles Villeneuve ou Silverstone. Simulation oblige, il est impératif de faire preuve de finesse à chaque coup de volant, sous peine de finir sa course dans le bac à gravier. Au-delà de la triplette agressif-défensif-équilibré, on aurait aimé pouvoir paramétrer sa monture de façon plus pointue. Gomme tendre ou dure, suspensions rigides ou souples, inclinaison des ailerons, hauteur de caisse... Cela peut paraître complexe, mais un tutorial bien ficelé pourrait simplifier l'apprentissage des rudiments.
Comparé à Formula One 05, F1 Grand Prix ne bénéficie pas d'aides à gogo, ce qui pourrait rebuter les newbies les moins téméraires. La trajectoire virtuelle, l'assistance au freinage et les panneaux indicateurs sont toujours au rendez-vous, mais les tête-à-queue récupérés par le CPU, la direction assistée et les dégâts dociles ne font pas partie du tableau. On est seul face à la concurrence, et ce n'est pas plus mal pour profiter pleinement de quelques sensations fortes. La gestion des dommages subis par l'engin drague avec l'imperfection, car aucun choc frontal ou latéral ne vient perturber le réglage du pilote. Assez surprenant. Même si l'on note un appui aérodynamique légèrement défaillant lorsque l'aileron avant est endommagé - et encore faut-il braquer le volant à fond pour partir en vrille - le tout demeure nettement en dessous de la moyenne avec, au final, une monoplace aussi indestructible que K.I.T.T.. Cet aspect arcade de F1 Grand Prix égratigne gentiment le réalisme maladroit du jeu. Pourtant, les pit stops sont plutôt bien réalisés avec une participation active du joueur, qui doit dans un premier temps presser Carré pour respecter la vitesse autorisée dans la voie des stands, puis tapoter Croix pour faire bouger le plus rapidement possible les mécaniciens de l'écurie. En moyenne, un arrêt dure entre 7 et 7.5 secondes. Là encore, les rageux du détail remarqueront que même avec un museau détruit, les réparations ne durent jamais plus de 8 secondes avec un bon tapotage. Hallucinant ! Et à la sortie, il est propre comme un sou neuf. Cherchez l'erreur. L'intelligence artificielle n'est pas au mieux de sa forme non plus, avec des concurrents qui se la jouent Destruction Derby en vous envoyant volontairement valser dans le décor. Perdre une course ou se retrouver en dernière position à cause d'un poltron du bitume, c'est plutôt rageant. Les dépassements sont loin de se faire dans les règles de l'art...!
Presque du grand classique
F1 Grand Prix se décline en plusieurs modes de jeu traditionnels dont Course Simple GP, Championnat du Monde, Multijoueur, Profil et Options. Le mode Course Simple GP offre la possibilité de participer rapidement à un grand prix de façon ultra-aléatoire; c'est la console qui choisit le circuit et la monoplace du joueur. Comme son nom l'indique, le mode Championnat du Monde permet de se mesurer aux 19 autres pilotes du plateau de la Formule 1. Il se divise en trois niveaux de difficulté : novice (3 tours), professionnel (5 tours) et expert (10 tours). Les fans de Michael Schumacher auront sans doute à coeur de réécrire la saison de cette année qui voit Fernando Alonso et Kimi Raïkkonen occuper les devants de la scène. Sauf surprise de dernière minute, le Baron Rouge n'obtiendra pas une huitième couronne mondiale. En solo, F1 Grand Prix ne représente un challenge intéressant qu'en expert. Les adversaires ont un comportement crédible, les arrêts au stand rendent la course plus attractive, et les écarts à l'arrivée ne se comptent pas en tours. Le point intéressant du mode Multijoueur est de pouvoir participer à un grand prix jusqu'à huit joueurs connectés en WiFi. Chacun sa PSP, chacun son volant, on va voir qui est le daron, Maxime ! Finalement, l'originalité de F1 Grand Prix réside dans le mode Epreuves qui propose une dizaine de scénarios dans lesquels il faut relever un challenge bien défini. Finir une course avec une boîte de vitesses coincée en 5e, atteindre une vitesse moyenne de 218 km/h sur deux tours, gagner une course en pneus secs contre des pilotes en pneus pluie... Voilà un exemple des festivités inhabituelles pour un jeu de Formule 1 qui vous attendent.
F1 Grand Prix jongle avec le bon et le moins bon. S'il propose des graphismes séduisants, des tracés au relief travaillé, un pilotage qui ne préconise pas le bourrinage, et des scénarios pour le moins originaux, il ne peut pas se vanter d'être réaliste du début jusqu'à la fin. Le choix simplifié du style de pilotage ne reflète pas vraiment la réelle complexité du réglage d'une monoplace. La mauvaise gestion des dégâts, et l'intelligence artificielle qui semble particulièrement apprécier les ambiances stock cars en bafouant allégrement les règles du code de la route, écornent sérieusement le réalisme du jeu. La Formule 1 est une discipline qui repose énormément sur des détails dont F1 Grand Prix a oublié une bonne poignée. On pourrait vous en faire une liste exhaustive, mais là n'est pas la question. Et puis ne boudons pas notre plaisir, et avouons que les amateurs du genre n'éteindront pas leur PSP au bout de quelques parties. Quelques bonus sont à débloquer, circuits miroir et monoplaces (William FW 11, Lotus 79, 81 Renault...). Avec un mode Course TV en prime, il est toujours sympa de régarder évoluer ces petites merveilles motorisées. Bref, en étant imparfait, F1 Grand Prix s'impose comme la référence du genre face aux débris qui ont longtemps obstrué le secteur de l'embarqué. Malgré cela, gageons que Traveller's Tales nous concoctera un prochain numéro hautement plus réaliste que ne l'est celui-ci. Ah oui, une dernière chose : coupez le son !