Grand Theft Auto IV


Niko Bellic est dos au mur. En effet, la controverse qui n'a cessé d'alimenter l'actualité de Grand Theft Auto IV depuis juillet 2007 - date de la dernière présentation du jeu à laquelle nous avons assisté - place l'anti-héros supposé Russe face à ses responsabilités. Après avoir encaissé sans broncher un report de plusieurs mois, nul doute que Niko Bellic ne survivrait pas à un second faux pas. C'est donc dans ce contexte légèrement tendu que nous nous sommes rendus à Londres pour répondre présent à la troisième invitation de Rockstar Games. Après un speech de quelques minutes des deux hommes de main du bad boy, la pièce est plongée dans l'obscurité et l'écran s'illumine.


Sans faire durer le suspense plus longtemps, Grand Theft Auto IV est quasiment prêt à briser des rotules sur Xbox 360, support sur lequel tournait la démo. Oui, les lacunes techniques aperçues il y a encore quelques mois ont été gommées. Oui, les développeurs ont travaillé d'arrache-pied pour rendre une copie impeccable lorsque Take Two Interactive attaquera son second trimestre fiscal. Nous voilà rassurés. Les premières secondes se déroulent dans un silence religieux. Niko Bellic se tient devant nous, dans une zone portuaire, et semble avoir meilleure mine. Toujours aussi mal rasé, certes, mais une dégaine plus rageuse, un regard plus ténébreux, et un charisme intact. L'interface paraît plus light, plus digeste, guérie des impuretés qui la gangrenaient jusque-là; la lisibilité de l'écran n'en est que meilleure. Rockstar Games amorce une mission, car même si les sucreries offertes permettent de calmer l'estomac, c'est avant tout pour se prendre des gifles que nous avons traversé la Manche. Bellic doit se rendre chez Brucie, un garagiste qui aurait pu faire carrière dans le rap US tellement son verbe rythmé collerait à n'importe quelle instru du genre. Un corps tatoué et blindé de stéroïdes, et un Q.I. flirtant avec le zéro absolu. Ce gaillard au cerveau de moineau ne cache pas son amour pour les femmes et le tuning, mais évite d'aligner ses plus belles caisses afin de ne pas éveiller les soupçons. Malgré la vie de pacha qu'il mène, Brucie fait appel aux services de Niko pour qu'il le débarrasse d'un certain Rivas Lyle, un homme à priori un peu trop gênant pour notre ami le garagiste. Le problème c'est que Brucie ne connaît pas l'adresse de la cible. Bellic va donc devoir se débrouiller pour avoir accès à la base de données de la police, et localiser ainsi le domicile de Mr Lyle. Il se glisse derrière le volant de la première bagnole sur laquelle il tombe, et se met à sillonner les rues de Liberty City. Cette petite balade improvisée est l'occasion de souligner l'impression de vitesse qui n'a jamais semblé aussi saisissante dans GTA. Ce n'est pas de la Formule 1, c'est clair, mais le tout petit effet de blur qui vient ponctuer chaque coup d'accélérateur grise, forcément. On en oublierait presque le léger clipping qui se fait ressentir par moments. Il faudra probablement patienter encore quelques semaines avant de se forger une opinion plus précise sur la conduite une fois la manette entre les mains, mais les à-cotés - piétons qui paniquent lorsque l'on roule sur le trottoir, gestion des dommages, voitures qui s'écartent... - sont toujours de mise. Niko repère un flic au coin de la rue, et provoque délibérément un carambolage au carrefour pour le contraindre à sortir de son véhicule. Malgré toutes les précautions d'usage, l'immigré russe se fait repérer assez rapidement, et après un bref échange de tirs, Bellic réussit à subtiliser la caisse du flic.

 

Belliccima !

 

Avant de pouvoir consulter le computer, et mettre la main sur les précieuses informations, il va falloir semer les unités qui patrouillent le secteur en s'extirpant de leur périmètre de surveillance. En tendant l'oreille, on peut même entendre les agents communiquer entre eux; un détail qui contribue grandement à l'immersion. Un petit moment d'accalmie, un coup d'oeil rapide sur la base de données, et Niko file chez sa future victime qui ne tardera pas à prendre la poudre d'escampette. S'ensuit alors une course-poursuite à travers les rues de la ville. Là encore, GTA IV va démontrer son amour pour les détails qui tuent. En effet, en activant les sirènes de la bagnole, les civils s'écartent du chemin pour laisser la priorité. Certains bouffent même du rail de sécurité. La classe. Une fois Rivas à portée de tir, Bellic dégaine son arme et se met à fusiller dans le tas. Broyé par les flammes de son véhicule, puis flingué à bout portant par son prédateur caucasien, le compte de Mr Lyle est définitivement réglé. Grand Theft Auto IV, c'est aussi une histoire de relations et d'affinités. Entretenir régulièrement son réseau de contacts permettra à Niko de gagner des trips en taxi gratos, débloquer des missions annexes, et accéder à d'autres bonus du même acabit. Se faire un bowling, faire une partie de fléchettes, aller boire un verre, voilà un exemple des activités extra-mafieuses que l'on pourra exercer pour passer du bon temps. C'est d'ailleurs pour illustrer cet aspect du jeu que Bellic s'empare de son téléphone portable, et appelle Roman, son cousin qui l'accueille les bras ouverts dans le fameux trailer "Move up, ladies !". Les deux compères comptent bien enfiler les bouteilles de Vodka et grignoter quelques cacahuètes au bistrot du coin, un prétexte tout trouvé pour les faire ramper quelques heures plus tard devant le bar. Les veines gonflées par l'alcool, les deux lascars sont incapables de mettre un pied devant l'autre, et balbutient des syllabes incompréhensibles, hachées par des ricanements qui n'en finissent plus. Affichant sans doute le même taux d'alcoolémie que Niko et Roman, la caméra penche de gauche à droite pour signifier la perte d'équilibre, et on se retrouve même avec une vue complètement brumeuse une fois en voiture. Un excellent avant-goût des promenades subsidiaires proposées pour tuer le temps. Playboy X, un grand black qui a le chic pour exhiber des femmes aux formes généreuses sur son canapé d'angle, est le second guest auquel Bellic a affaire. Il souhaite que le cousin de Roman enraye la construction de grands buildings à priori emmenée par un groupe d'investisseurs. Le GPS devient alors un allié précieux pour localiser les armes dont on aura besoin. Une fois sur le chantier, Niko s'en prend d'abord aux gardes perchés sur les grues, avec un sniper un peu trop docile; on aurait préféré que la respiration du personnage influence la stabilité de la lunette par exemple. Mais quel plaisir - sadique ? - de les voir chuter d'une centaine de mètres !

 

American Gangster

 

Vient ensuite le plus gros morceau de l'embrouille, puisque c'est une armée de soldats du groupe Union Leaders que notre ami de l'Europe de l'Est va devoir se coltiner. On ne mentira pas en affirmant que jusqu'à présent, les gunfights n'ont jamais été le point fort de la série GTA. Dans Grand Theft Auto IV, ils se montrent nettement plus complets, avec un peu plus de possibilité au niveau des mouvements. Ce n'est pas du Gears of War ou du kill.switch pour faire plaisir à tout le monde, mais on peut désormais se planquer derrière une caisse, et même tirer par-dessus à l'aveuglette. Quelques gouttes de sang viennent même repeindre l'objectif de la caméra lorsque le corps de Bellic se retrouve criblée de balles. La visée semble elle aussi assez correcte, mais là encore il faudra attendre la sortie du jeu avant de juger de la précision du gameplay. Les quinze dernières minutes du private showcase de GTA IV nous ont permis de voir un Niko au service de la mafia de la région. Cette fois, il devra intercepter la livraison d'une marchandise qui doit avoir lieu dans un entrepôt de Liberty City. Une mission en nocturne qui en met plein la vue, à commencer par les innombrables gratte-ciels en tenue de soirée, et les lampadaires qui illuminent les rues du quartier. Planqué aux abords du hangar, Bellic décide finalement de sortir son gun de la poche - avec le geste qui va bien - et commence à envoyer une première salve de balles en direction des gardes. Chaque coup de feu éclaire le visage fermé de l'anti-héros, un spectacle que l'on ne se lasse pas de contempler.

On admire aussi lorsqu'il s'accroche au pare-choc arrière du camion, et s'agrippe ensuite à la poignée de la porte arrière. Il parvient ensuite à grimper sur le toit de l'engin alors qu'il est malmené par les coups de volant enragés du chauffeur. Ce n'est qu'une fois arrivé à hauteur de la cabine qu'il parvient à s'infiltrer et à prendre le contrôle du véhicule, après avoir éjecté le conducteur. Le GPS entre une nouvelle fois en jeu pour indiquer à Niko le point de chute. Durant le trajet, on retiendra surtout la portion un peu plus rurale, un peu plus forestière, bien fichue qui plus est même si ce fichu clipping ne lâche pas le morceau. Une fois sa tâche accomplie, le successeur de CJ décide d'enfourcher une moto qui ne démarre pas au quart de tour. GTA IV multiplie les détails de ce type, et c'est justement dans ce domaine que les gars de Rockstar Games sont sans doute les plus doués. Moins de pop-up, plus de réalisme, et surtout plus de dialogues; ça n'arrête pas de jacter ! Que ce soit de nuit, en pleine journée ou sous un coucher de soleil, Grand Theft Auto IV calme la rétine. Les environnements grouillent de textures, les rues sont bondées de monde et les cut-scenes ne manquent pas de charme. En guise de finish, on a même droit à une petite virée en zodiac, histoire de montrer que Niko Bellic pourra prendre les commandes de n’importe quelle machine. De l'aveu même de Rockstar Games, le jeu est terminé, et est entré dans une phase de finition. La sortie du titre ne devrait donc pas connaître d'énième report. Et si aucune autre précision n’a été fournie à ce sujet, GTA IV a d'ores et déjà assuré l'essentiel : il sera au rendez-vous. Bellic peut dormir tranquille, et nous aussi.





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