*Test* The Messenger : quand un vieux ninja a plus d'un tour dans son sac !
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The Messenger cache bien son jeu, et si vous avez lu le chapitre "spoiler" de ce test, vous savez pourquoi. Dans le cas contraire, si vous envisagez d'acheter la production de Sabotage un jour, ne vous gâchez surtout pas la surprise. Car l'un des points forts du titre est sa propension à enchaîner les retournements de situation, en terme de narration comme de gameplay. Ces twists sont d'autant plus savoureux qu'ils font appel à la culture du jeu vidéo. D'ailleurs, The Messenger intéressera bien plus les joueurs ayant déjà une connaissance des univers 8-bits et 16-bits que les jeunes ou les novices, qui risquent de ne pas apprécier toutes ces spécificités et références à leur juste valeur.
- Hommage réussi aux jeux 8-bits et 16-bits
- Digne de Ninja Gaiden
- Des twists scénaristiques et de gameplay
- L'humour "méta"
- Les déplacements rapides et fluides
- Les graphismes 8-bits, c'est pas toujours magnifique
- Quelques pics de difficulté dispensables
- Touches du clavier non reconfigurables sur PC
- Moins intéressant si on n'est pas un vieux de la vieille...
The Messenger est le premier jeu de Sabotage, un studio aussi québécois qu'indépendant ("Vive le Québec libre !" diront certains). Et comme de nombreux indés, ils ont choisit la voie des gros pixels et de la mode rétro. Voilà qui ne s'annonce guère passionnant de prime abord. Mais The Messenger étant édité par Devolver Digital, qui n'a pas vraiment pour habitude de signer des titres parfaitement banals, il se pourrait bien qu'on ait affaire à tout autre chose qu'une simple resucée de Ninja Gaiden...
Le premier contact avec The Messenger s'avère on ne peut plus classique. Une brève introduction, composée d'écrans fixes pixelisés et accompagnés d'une musique chiptune qui fleure bon le 8-bits, nous apprend qu'un village de ninjas, derniers survivants de l'espèce humaine, se prépare à l'invasion imminente d'une armée démoniaque. Heureusement, la légende dit qu'un héros viendra de l'Ouest pour les aider à surmonter ce péril. Et comme il se doit, les monstres débarquent dans la minute, suivis de peu par le le héros, qui confie un précieux parchemin à un jeune ninja. Cet apprenti, c'est vous, et votre mission consiste à amener le parchemin en haut d'une montagne. Classique, très classique… Mais heureusement, quelques indices viennent rapidement nous mettre la puce à l'oreille sur la nature en vérité assez singulière du jeu. Ainsi, si l'on trouve assez rapidement sur notre chemin une boutique dans laquelle acheter des améliorations, le mystérieux marchand qui la dirige sort quelque peu des sentiers battus. Il raconte avec humour de multiples histoires philosophiques, se moque régulièrement du héros, et brise même de temps à autre le quatrième mur. Les premiers échanges entre le marchand et le ninja sont par exemple l'occasion d'entendre parler d'un certain John Gaiden, de profiter d'une remarque comme quoi il y a "trop de texte pour une seule boîte de dialogue", ou encore de lire : "certains cherchent l'amour ou la reconnaissance, d'autres espèrent juste que Devolver signera leur jeu qui déchire". Plus tard, le héros viendra s'enquérir régulièrement de la nature du prochain boss à affronter. Bref, les développeurs jouent la carte de la connivence avec le joueur. Nous verrons plus loin que cela dépasse le stade du simple gimmick, toute l'aventure étant un hommage aux jeux vidéo d'antan. A commencer par Ninja Gaiden, bien entendu. The Messenger en reprend tous les codes, et nous propose donc de la plateforme à l'ancienne, avec moult parois mouvantes, projectiles à éviter, pointes acérées, gouffres mortels, ennemis plus ou moins coriaces, et boss "à patterns" venant conclure chaque zone traversée.
LA THÉORIE DU NINJA
Notre ninja possède une panoplie de coups et de mouvements relativement étendue puisqu'il peut donner des coups de sabre, tirer des shurikens énergétiques, s'accrocher aux murs grâce à des griffes, planer à l'aide d'une cape, et utiliser un grappin sur l'axe horizontal. Mais le plus intéressant reste le "Saut du nuage", qui permet après avoir frappé certains éléments (lanternes, projectiles ennemis…) d'effectuer un saut supplémentaire, le processus pouvant être répété aussi longtemps qu'on trouve des cibles sur lesquelles rebondir. L'ensemble de tous ces éléments assure des déplacements rapides et fluides, et donc d'agréables sensations, une fois la manette bien en main. Au passage, signalons qu'il est impossible de réassigner les touches du clavier sur PC, alors même que ces dernières sont très mal choisies. Le gamepad est donc très fortement conseillé, d'autant plus que certains passages se montrent très ardus. Ces pics de difficulté à l'ancienne s'expriment à travers des graphismes qui datent eux aussi d'une autre époque. Et parfois, ça pique les yeux ! On soupçonne même les développeurs d'avoir choisi volontairement un écran particulièrement laid comme première image de la séquence d'introduction. Avec quatre couleurs et à peine plus de pixels, il y a de quoi effrayer l'amateur de modernité. Mais qu'on se rassure, là aussi, les choses ne sont pas forcément ce qu'elles semblent au premier abord. D'une part, ces graphismes 8-bits s'améliorent très rapidement et, contrairement à la "cinématique" d'intro, les écrans de jeu ne manquent pas de charme. Certes, certaines zones paraissent tout de même bien vides. Mais on ne peut rien y faire, n'est-ce pas ? A moins qu'il ne s'agisse d'une entourloupe supplémentaire de la part des développeurs… L'heure est venue de déchirer le voile et de vous en dire plus sur la véritable nature du jeu. Mais ne lisez surtout pas ce qui va suivre si vous envisagez de profiter un jour pleinement de The Messenger, dont la saveur tient en grande partie aux surprises qu'il réserve aux joueurs.
ÇA VA SPOILER, CHÉRIE !
C'est bien simple, le jeu est rempli de twists, petits comme grands. Les boss ne sont jamais les caricatures qu'ils semblent être lorsqu'on les rencontre la première fois. On recroise certains personnages qu'on pensait sortis de l'équation, et on les redécouvre sous un autre angle. Le parchemin que l'on trimballe depuis le début de l'aventure a un rôle très particulier (qu'on ne détaillera pas ici, histoire tout de même de ne pas tout dévoiler). Mais le plus étonnant provient de certains retournements de situation à grande échelle, qui viennent redéfinir les graphismes et le gameplay de l'aventure. Ainsi, après plusieurs heures passées dans ce clone de Ninja Gaiden au look 8-bits, vous vous retrouverez subitement dans une ambiance 16-bits. Couleurs plus nombreuses, décors nettement plus détaillés et musiques plus riches : le joueur effectue un véritable saut dans le temps. Et à vrai dire le personnage aussi puisque, un twist en suivant un autre, vous finirez par pouvoir faire des va-et-vient entre les deux époques. Dès lors, ce qui n'était qu'un simple jeu de plateformes à l'ancienne devient un jeu beaucoup plus moderne, qui nous propose de résoudre des petites énigmes, cette mécanique de saut dans le temps permettant de changer instantanément l'aspect et la disposition des niveaux. L'aventure qu'on croyait linéaire finit même par devenir un véritable metroidvania, où l'on doit régulièrement revenir sur pas pour dénicher de nouvelles zones. Il y a donc de quoi être enthousiasmé par The Messenger qui, sous ses airs de "un jeu rétro de plus", dissimule en réalité de multiples trésors.