Test The Council : une sentence irrévocable ? sur PS4
15 20
Concept épisodique oblige, il est bien difficile de se forger un avis définitif sur The Council, dont 80% de l'aventure restent encore à découvrir. Mais une chose est sûre : le concept est audacieux, et ce premier épisode nous prouve qu'il tient parfaitement la route. Un gameplay basé sur les interactions sociales, ça change agréablement de la routine ! De plus, la direction artistique qui fait la part belle aux gueules cassées et aux belles œuvres picturales ne peut que séduire, tandis que l'ambiance à la fois occulte et historique renforce la singularité du jeu. Si vous êtes un adepte des aventures Telltale Games et que vous avez envie de passer la vitesse supérieure, vous pouvez vous plonger sans aucune inquiétude dans The Council.
- Une direction artistique très séduisante
- La présence de personnages historiques
- Des choix qui ont des conséquences
- Bonne rejouabilité
- Certains choix peu crédibles car forcés
- Système de points d'effort un peu artificiel
- Déplacements raides
- L'incertitude sur les épisodes à venir
The Walking Dead, Batman, Game of Thrones, Borderlands, Jurassic Park, Minecraft… Toutes ces licences sont passées à un moment ou à un autre à la moulinette Telltale Games. En s'associant quasiment systématiquement à des noms prestigieux, le studio californien a su séduire un public très large. Mais à force de tirer sur la corde et d'utiliser toujours les mêmes ficelles, la lassitude commence à se faire sentir. C'est dans ce contexte que débarque The Council, un jeu narratif d'un nouveau genre, développé par un petit studio indé français...
Composé en grande partie d'anciens développeurs d'Ubisoft et de Cyanide, le studio bordelais Big Bad Wolf s'attaque donc à une montagne. La méthode employée pour cela semble la bonne : garder les fondamentaux du genre, et l'enrichir à l'aide de mécaniques inédites. Comme un jeu d'aventures classique, The Council nous propose donc d'évoluer dans un nombre relativement limité de décors, d'en observer certains détails et de ramasser quelques objets qui pourraient être utiles par la suite. Et comme la plupart des jeux d'aventures narratifs, la production française nous place face à des choix cornéliens, que ce soit en termes de réponses à donner lors des questionnaires à choix multiples ou de situations à trancher (aider ou parler à tel personnage plutôt que tel autre semblant être ici le principal type de dilemme pour le moment). A vrai dire, le studio aurait pu s'arrêter là, nous pondre un plus ou moins bon clone des productions Telltale, et prier pour que le succès soit au rendez-vous. Mais fort heureusement, leur ambition va plus loin que cela.
Ainsi, une grosse couche d'interactions sociales vient se rajouter aux mécaniques de jeu habituelles. Vous devez notamment choisir une classe pour le personnage que vous incarnez (pas de panique, nous reviendrons par la suite sur le scénario), à choisir parmi trois : Diplomate, Occultiste ou Détective. Cela vous donne directement accès aux cinq compétences reliées à la classe retenue, sans vous interdire pour autant d'aborder les autres par la suite. Simplement, cela vous coûtera moins de points pour augmenter le niveau de vos compétences primaires tout au long de l'aventure que pour débloquer ou augmenter le niveau des autres compétences. L'arbre donne accès à Etiquette, Conviction, Politique, Diversion et Linguistique pour la première branche, Subterfuges, Sciences, Erudition, Occultisme et Manipulation pour la seconde, et enfin Interrogatoire, Vigilance, Psychologie, Logique et Agilité pour la troisième. Selon les aptitudes que vous aurez développées, et le niveau auquel vous aurez poussé chacune d'entre elles, vous aurez accès à différents choix de dialogues, différentes actions et même la possibilité ou non de remarquer certains détails dans les décors ou sur vos interlocuteurs.
CHOIX ET CONSÉQUENCES
Jouant intelligemment sur la frustration du joueur, l'aventure n'hésite pas à vous informer de la compétence qu'il aurait fallu avoir pour accéder à tel dialogue ou telle action. Le gameplay sans concessions rajoute même une dose de difficulté supplémentaire via un système de points d'effort, que l'on doit dépenser pour accéder aux actions et aux dialogues les plus efficaces. Si vous possédez la bonne aptitude au bon moment mais que vous avez déjà dépensé trop de points d'action, tant pis pour vous ! Ce système semble hélas un peu trop artificiel, surtout qu'il faut boire une potion "magique" pour récupérer quelques points, et on se force parfois à ne pas explorer un embranchement auquel on a pourtant accès, juste pour économiser nos points d'effort. Ou, au contraire, on se retrouve bêtement à court de points à un moment crucial, ce qui nous oblige à emprunter une voie qu'on aurait voulu éviter. De même, les dilemmes qui nous sont présentés à certains moments (l'équivalent de "sauver tel ou tel personnage" dans The Walking Dead) ne tiennent pas toujours la route. Parler avec un personnage important ne devrait pas nous empêcher de parler à un autre par la suite.
Jouant intelligemment sur la frustration du joueur, l'aventure n'hésite pas à vous informer de la compétence qu'il aurait fallu avoir pour accéder à tel dialogue ou telle action.
En dehors de cela, le reste des mécaniques de jeu fonctionnent bien. On pense notamment aux "Confrontations", que l'on peut à peu près définir comme des duels de dialogues. Lors de ces séquences on a droit à un certain nombre de maladresses (c'est à dire de mauvaises réponses), et si jamais on le dépasse, la joute verbale est définitivement perdue. Que se serait-il passé en cas de victoire ? Il vous faudra recommencer toute l'aventure pour le savoir, car les choix sont ici définitifs. Voilà qui assure une excellente rejouabilité au titre, y compris dans le cas des dilemmes, certains ayant des conséquences absolument majeures pour la suite des événements. En parlant de suite, le format épisodique oblige à la prudence puisque rien ne garantit que les futurs épisodes seront aussi bons que le premier. Mais on peut également positiver sur ce point, en considérant que les futurs segments de l'aventure corrigeront les quelques défauts du premier chapitre.
ILLUMINATI CONFIRMED
Dans tous les cas, il est à peu près certain que le jeu conservera ses atouts scénaristiques et artistiques. Car même si elle ne manque pas d'humour, l'aventure ne se vautre pas dans la facilité en utilisant un univers fun ou contemporain. Bien au contraire, le scénario nous plonge dans les années sombres qui ont suivi la révolution française. Nous sommes en 1793, et l'on incarne Louis de Richet, membre d'une société secrète dans laquelle sa mère tient un rôle majeur. Cette dernière ayant disparu lors d'une réunion se tenant sur une île privée et organisée par le mystérieux Lord Mortimer, Louis part à sa recherche. Cela lui donnera l'occasion de croiser le chemin de nombreux personnages illustres, parmi lesquels se trouvent notamment George Washington et Napoléon Bonaparte. Voilà qui rehausse d'emblée l'intérêt de l'aventure. En mêlant la réalité historique à un scénario mâtiné d'occultisme et de complotisme, le jeu est susceptible de plaire à des publics assez différents. D'ailleurs, les développeurs nous préviennent en introduction que The Council est "probablement une fiction" et qu'il s'inspire "d’événements et de personnages historiques". De manière totalement déplacée et WTF, ils nous précisent également sur le même écran que le jeu "a été conçu, développé et produit par une équipe multiculturelle de diverses croyances, orientations sexuelles et identités de genre." On ne voit pas en quoi la religion ou la sexualité des développeurs nous intéressent mais passons...
En mêlant la réalité historique à un scénario mâtiné d'occultisme et de complotisme, le jeu est susceptible de plaire à des publics assez différents. D'ailleurs, les développeurs nous préviennent en introduction que The Council est "probablement une fiction" et qu'il s'inspire "d’événements et de personnages historiques".
Intéressons-nous plutôt à l'utilisation de nombreuses toiles de maîtres dans les décors, qui est une manière habile et efficace d'imposer une patte artistique à peu de frais. Ce qui ne veut pas dire que le jeu manque de personnalité, loin de là. La direction artistique, "héritée" comme originale, est extrêmement séduisante. Le soin apporté aux décors très versaillais fait mouche, tandis que les différents interlocuteurs possèdent tous une véritable gueule. Certes, les personnages féminins sont moins réussis que leurs homologues masculins et, d'un point de vue purement technique, les déplacements du héros manquent clairement de souplesse. Mais au final, on retient surtout la force des visages, marqués et singuliers. D'ailleurs, la singularité est peut-être bien la qualité principale de l'aventure, qui sort agréablement des sentiers battus. Espérons que les prochains épisodes seront aussi bons, et même meilleurs !