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Runaway : The Dream of The Turtle est un jeu passionnant, juste assez difficile pour entretenir nos méninges, et pourtant assez court pour que le joueur en redemande. Il faudra compter près d’une quinzaine d’heures de jeu agréablement dépensées pour en venir à bout. A la fois plein d’humour et de rebondissements habilement orchestrés, ce portage réussi d’un opus déjà plébiscité à sa sortie sur PC, est définitivement un exemple à suivre en matière de point & clic sur DS. Après cette mise en bouche, on ne peut qu’attendre avec impatience le portage du troisième volet à venir.
- Une belle qualité graphique
- Des dialogues à la fois amusants et recherchés
- Tout Runaway 2 dans une cartouche DS
- Les vidéos qui parfois pixellisent
- Des voix transformées en textes
- Des textes abondants et gênants
Ne s’arrêtant pas au succès unanime que le second volet des aventures de Brian Basco avait rencontré sur PC, le studio français Cyanide a pris la relève aux équipes espagnoles de Pendulo Studio pour transposer ce point & clic au format de poche. Le défi était de taille, car il s’agissait d’adapter Runaway 2 sur DS, une machine bien connue pour son côté ludique et interactif, mais surtout pour ses capacités techniques toutefois limitées. Le pari est cependant réussi.
La mise en bouche est alléchante. Une jeune fille se fait pousser d’un hydravion, puis tente d’ouvrir son parachute avant de tomber dans un lac, le tout sur un générique aguicheur. Cette nana n’est autre que Gina, l’ancienne strip-teaseuse sauvée des griffes d’un mafioso par Brian lors des frasques du premier Runaway. La trame s’installe sur un chat de Brian avec une tierce personne, où l’on voit notre héros tapoter sur un clavier pour solliciter de l’aide et raconter la situation dans laquelle il s’est embourbé. L’histoire de Runaway : The Dream of The Turtle est identique à celle de la version PC. Les deux amoureux profitaient d’un repos bien mérité sous les tropiques de l’île d’Hawai ; mais un beau matin, voilà que pour pimenter leur séjour de farniente, Gina entraîne Brian dans une petite excursion touristique sur l’île de la Tortue. Sachant que toutes les excursions ont été annulées et qu’un seul pilote est prêt à faire le trajet, notre couple se retrouve en possession d’un forfait spécial "ennuis à la clé", auquel les deux tourtereaux ont souscrit. Avec un vieux gus pilote qui clamse en plein vol et un seul parachute disponible, il fallait bien improviser, et en moins de deux Gina se fait jeter, malgré elle, hors du coucou. Brian, resté à bord, reprendra ses esprits en pleine jungle et devra user de débrouillardises pour pouvoir retrouver sa moitié.
Cours Brian ! Cours !
Avec son air de "je le fais, mais je ne sais pas toujours pourquoi", une décontraction à la Brice de Nice, Brian n’a pas grand chose à voir avec un agent secret ou un enquêteur en pleine introspection. Ce concept a le superbe avantage de changer des point & clic à l’ambiance austère que représentent des jeux comme Sherlock Holmes. Une nouvelle fois fourré dans une situation incongrue, c’est doté d’une chance insolente, et prêt à des actions farfelues et intéressées que Brian avancera dans son aventure. On ne peut que tirer son chapeau au studio parisien pour avoir su enfourner toutes les vidéos du jeu, initialement prévues pour tourner sur de grosses machines, dans une simple cartouche DS. Il est alors compréhensible que, poussées au maximum, les vidéos pixellisent et que quelques détails soient peut discernables dans les scènes sous-marines. La cinématique permettant de résumer le premier Runaway n’est ici plus présente, cela était un plus dans la version PC, mais ne constitue qu’une perte mineure pour la version portable. Les possesseurs de DS doivent pour l’instant se contenter du Runaway 2, car le portage sur DS du premier opus n’est pour l’instant pas prévu. Quoi qu’il en soit, si vous n’avez pas eu le plaisir de découvrir Brian Basco, Gina Timmins ainsi que d’autres personnages dans le premier volet, rassurez-vous car Le Rêve de la Tortue ouvre un chapitre tout autre, qui n’est donc pas une véritable suite.
Runaway 2 : The Dream of The Turtle n’a pas seulement vu son support modifié ; un nouveau travail des fonctionnalités du jeu a été effectué pour que les commandes soit adaptées aux spécificités de la DS. On pouvait craindre un manque d’interactivité sans le traditionnel outil des jeux du genre qu’est la souris, mais Cyanide utilise astucieusement tous les avantages que la petite console peut offrir. Le stylet remplace désormais le mulot et permet d’un simple clic de déplacer le personnage sur le point voulu. L’écran étant ici réduit, la pression prolongée du stylet permet de passer en vision loupe et de voir de façon plus précise les différents objets du décor. En effet, malgré un champ visuel moins important à couvrir du regard, les quelques centimètres offertes par l’écran de la console ne permettent pas de toujours tout déceler, et une option a été ajoutée sous forme de petite carte. Une fois touchée, celle-ci affiche en couleurs phosphorescentes les zones et autres objets avec lesquels il est possible d’interagir. La croix directionnelle (ou les boutons pour les gauchers) change l’action, en passant de l’observation d’un objet, à son utilisation, sa substitution et d’autres possibilités disponibles en fonction du contexte. Les gâchettes L ou R permettent de faire défiler les objets possédés par le joueur et de saisir un objet pour le présenter au décor. L’écran supérieur permet d’ailleurs l’affichage permanent de l’inventaire. Afin de faire différente association entre les objets qui occupent la poche méga géante de Brian, il suffit de cliquer sur la petite sacoche présente dans l’écran tactile, pour faire basculer l’inventaire à portée de stylet. Le double clic s’avère aussi bien pratique pour passer rapidement d’un écran à un autre. Comme avec la souris en passant le stylet sur les personnages et en vérifiant les actions possibles, la bulle de BD permet d’engager le dialogue.
Les amateurs de ce type de jeu d’aventure reconnaîtront la méthodologie habituelle à suivre. Les actions sont à mener de façon méthodique, et les étapes de résolution d’énigmse ne peuvent pas être sautées. L’épuisement de tous les dialogues, les nombreux allers-retours s’imposeront pour prendre un objet, qui dans un premier temps paraissait moins utile, et ainsi déclencher une action nouvelle. La durée de jeu s’en retrouve forcément prolongée pour le plus grand plaisir des joueurs.
Autre fait majeur par rapport à la version PC : les voix ont été supprimées ; ce qui ne nuit pas à la qualité du jeu et a pour effet de faire apprécier l’ambiance sonore du jeu. Les plus pointilleux critiqueront la chanson du début grésillante, résultat d’une trop grande compression audio. Que ce soit sur l’île paradisiaque, dans une région enneigée, ou bien à bord d’un yatch de luxe traversant les régions et même le temps, les visuels restent tout aussi agréables et les couleurs rendent bien à l’ambiance du jeu. A chaque décor son détail d’animation, ses sons, son atmosphère... Des défauts inhérents au format de l’image existent cependant. Les dialogues, déjà bien fournis défilent parfois à une vitesse impressionnante à l’écran, et sachant qu’aucune voix n’est là pour permettre de suivre le fil, il faudra parfois s’y mettre à plusieurs fois si le joueur souhaite en relever tous les indices. Il faut également faire preuve de patience pour ne pas toucher trop vite l’écran du stylet et sélectionner la bonne réplique à utiliser. Les lignes sont petites et bien que la précision soit exemplaire, on blâmera cet inconvénient agaçant. Les vidéos relancées pour mémo au cours des dialogues s’affichant sur l’écran supérieur, il est impossible de les zapper. Mieux vaut faire bien attention à la précision de son toucher quand une ligne doit être sélectionnée. Heureusement que l’animation sur l’écran permet de confirmer l’orateur car dans le cas de Saturne, son avatar est celui de Brian. Cependant, la teneur des dialogues et les références qui y sont disséminées sont un réel atout qui rendent ce jeu plus moderne, et disons-le, moins formel et chaste. Le langage est familier mais pas choquant, et est adapté à chaque situation du jeu. Bourré d’humour et même intelligent, les répliques prêtent à sourire. On appréciera les situations loquaces, ainsi que les dialogues recherchés et comiques qui rendent le jeu très actuel. Les réactions de Brian ne sont pas toujours très sympathiques et pourront même s’avérer caustiques quand vous tenterez une de ces associations superflues d’objets. Ainsi peuvent être relevées des références de Brian quand il parle de Nip-Tuck pour qualifier une situation un peu glauque, ou de Candeloro pour insinuer que le ponton est aussi dangereux qu’une patinoire ; loisir à vous de découvrir aux furs et à mesures les subtilités des causeries.
On ne peut que saluer les personnages hauts en couleurs et caricaturés que l'on peut croiser au cours de l’aventure. Le joueur se jettera alors corps et âme dans le questionnement de la très serviable Lokelani, très "bonne" au dire de Brian, qui n’a bien sûr pas oublié son objectif premier (celle qu’il a balancé dans le lac pour ceux qui l’auraient oublié). Il ira se frotter au colonel et son énigmatique et non moins attractive collaboratrice Tarentula. Il s’associera à Joshua un vieux zélé qui communique avec les Trantoniens (une civilisation extra-terrestre bien supérieure à celle des Humains bien sûr !) Ne parlons pas de Sushi, et des deux frères : Robby le rasta inconditionnel de plantes naturelles qui font planer, et Saturne, celui qui invente tout à partir de n’importe quoi. Une galerie bien sympatique qui constitue l’un des ingrédients du succès de Runaway : The Dream of The Turtle, déjà incontournable en cette fin d’année sur DS.