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- Le meilleur T-RPG de Nippon Ichi
- Musiques et ambiance toujours palpables
- Fourmille de bonnes idées et d’inventivité
- Durée de vie inépuisable
- Nécessite une bonne dose de "leveling"
- Moins explosif et drôle que Disagea et La Pucelle : Tactics
Si Phantom Brave n’est que la seconde offrande du tiercé gagnant de Nippon Ichi à être exportée sous nos latitudes, elle est surtout la production la plus récente dans l’ordre chronologique ainsi que la plus aboutie ! Après Disgaea et avant La Pucelle : Tactics, voici le test d’une véritable perle rare.
Résultant d’une étrange logique commerciale, le plus ancien des trois Tactical-RPG de Nippon Ichi, j’ai nommée La Pucelle : Tactics (2002) ne pointera le bout de ses pixels qu’en avril 2005 chez nous. C’est pourquoi, afin de bien connaître chacune de ces productions jumelles et ainsi faire le bon choix, un test import des aventures de Prier est à votre disposition dans nos colonnes. Pour l’heure, tâchez de vous décider rapidement en ce qui concerne Phantom Brave, car le faible nombre d’unités distribuées sur le territoire le rend encore plus désirable qu’il ne l’est déjà, dans son joli packaging accompagné de la superbe bande-originale de l’immense Tenpei Sato.
Ashes to ashes
La première chose qui surprend, passée la découverte du merveilleux thème principal, c’est l’ambiance dans laquelle nous plonge le prologue de Phantom Brave. Poursuivis par une horde de démons dans un contexte tout à fait glacial, un couple et leur garde du corps puisent dans leur dernières ressources pour se frayer un chemin vers la vie. Si les démons mineurs ne sont pas en mesure d’inquiéter le valeureux Ash, le couple se fera purement anéantir par une entité surpuissante, laissant derrière lui une fillette de 5 ans. Ash, quant à lui, malgré tous ses efforts, succombera également. Une entrée en matière plus mature par rapport à ce que nous avait habitué le développeur des Marl, Disgaea ou La Pucelle : Tactics. Le jeu commence quelques années après cet incident. La jeune orpheline Marona est une Chroma, c’est à dire qu’elle possède la capacité de commander les fantômes. Un don qu’elle met aux services de toute personne qui réclame son aide, bien qu’à cause de cette faculté, la pauvre enfant traîne avec elle une réputation de calamité, possédée par des esprits malfaisants. Isolée sur son île paradisiaque mais bien vide, Marona est donc constamment aux proies avec des démons d’un monde extérieur méfiant et ingrat. Altruiste à la limite de la naïveté et du haut de ses 13 ans, la jeune fille aux cheveux verts se répète inlassablement, comme pour se rassurer, qu’un jour ses efforts seront récompensés et que répandre le bien autour d’elle, finira par lui apporter l’amour de tous les êtres vivants. Certains apprécieront certainement la psychologie assez poussée des épreuves auxquelles sera confrontée Marona au fil des épisodes. Découverte de l’amitié réciproque, de l’abnégation, du dépassement de soi, mais aussi de la ségrégation, de l’ingratitude et de la trahison, Marona vivra un véritable développement initiatique dans lequel le rapport à l’argent se fera également assez présent. Pourtant, la voix off censée nous plonger avec empathie dans les sentiments de la petite, ne fait pas oublier un certain manque de consistance dans l’intrigue et surtout des carences au niveau de cet humour si cher aux Tactical-RPG du développeur Japonais. C’est vrai, on rigole peu devant Phantom Brave et le nombre de personnages principaux se voit plus réduit qu’à l’ordinaire pour se concentrer sur l’évolution de Marona et de son garde du corps personnel : le fantôme torturé Ash.
For her sake, I will not fail
Revenu d’entre les morts grâce à un ultime sort de son employeur, Ash protège Marona sous sa forme ectoplasmique et constitue le second personnage principal. La formation du reste de l’équipe est laissée au bon soin du joueur, lequel pourra créer autant de classes de fantôme qu’il en rencontrera. Si vous avez apprécié le physique des personnages de Disgaea, réjouissez-vous puisque le character designer Harada Takehito a repris du service pour Phantom Brave. Moins charnel que le style employé dans Marl ou La Pucelle : Tactics, Harada a créé des personnages aux courbes plus fines et racées pour un résultat détonnant de charisme et de diversité. Les classes sont en effet nombreuses, aux classiques guerriers et magiciens s’ajoutent d’autres rôles indispensables au bon développement de votre troupe. L’incontournable marchand verra sa force de vente augmenter au fur et à mesure que vous lui ferez des achats. A ce sujet, Phantom Brave ne s’embarrasse pas en camelote, le seul élément à acheter est l’arme ! Sacrilège ? Pas de panique, le jeu se rattrape en complexité dans bien d’autres domaines. Le soigneur sera chargé de remettre à neuf âmes et armes après une lutte sans merci. Ici encore, ce guérisseur pourra gagner un niveau supplémentaire à force de soigner ses camarades. Le forgeron lui, deviendra rapidement un de vos meilleurs alliés. En plus de la monnaie locale, les bordeaux, chaque victoire vous rapporte des points de mana et ce sont eux qui lui permettent de débloquer des capacités et d’améliorer le niveau de votre arme. Ces dernières disposent de HP et d’une force de frappe au même titre qu’un personnage. Les armes deviennent ainsi le complément naturel de vos unités, un peu comme s’ils ne faisaient qu’un. Il faudra ainsi étudier le profil de votre avatar pour lui fournir l’outil le plus adapté. Plus subtil encore, la classe des fusionnistes. Vous ne savez pas quoi faire de vos anciens objets et vous avez décidé de vous débarrasser d’un soldat devenu inefficace ? Le fusionniste vous propose de faire d’une pierre deux coups : il s’agit de les unir afin de mélanger les propriétés de chacun et donner naissance à un item boosté. Les possibilités sont infinies.
Ivoire, ivoire, qui est la plus belle ?
Marona vit sur Phantom Island, petite île tropicale au sable fin et à l’eau turquoise, isolée en plein cœur du monde d’Ivoire. C’est ici votre base, dans laquelle vous allez gérer votre équipe au mieux avant de partir à l’aventure. L’objet clef de ce petit coin de paradis se trouve être votre boite aux lettres. C’est là que vous réceptionnez les messages marins de vos employeurs. Grosso modo, à chacun des 20 épisodes (répartis sur quatres chapitres) correspondent un de ces petits boulots surnaturels. Il est temps de se plonger tout entier dans le système de combat concocté par les développeurs car c’est bien ici que se situe tout l’intérêt de Phantom Brave, bien au-delà d’une réalisation comme toujours désuète, avec certes des illustrations toujours plus belles et détaillées pour les cut-scenes, mais dans les faits nous nous retrouvons toujours devant une 3D isométrique pas folichonne avec des modélisations du siècle dernier. Cependant qui oserait en faire un cheval de bataille pour dénigrer un soft qui a tout d’un ténor du genre ?
Prenez votre inspiration, nous allons maintenant faire connaissance avec le système de combat de Phantom Brave, qui se renouvelle bien plus que tout ce que nous aurions cru. Si vous avez bien suivi jusqu’à présent, vous aurez remarqué que le seul personnage humain de votre équipe se trouve être Marona. Au début de chaque combat, elle est la seule à se trouver sur le champ de bataille, face à une horde de monstres déchaînés. La première chose à faire est d’observer les éléments du décor disposés un peu partout autour de soi. La commande confine va permettre à Marona d’invoquer un de ses fantômes, sachant que la limite est fixée à 8 personnages simultanément et à 16 unités au total. Première subtilité, en fonction de l’objet sur lequel vous utiliserez la commande confine, les propriétés du fantôme s’en verront complétement modifées. En ce qui concerne le vaillant Ash par exemple, il sera plus adéquat de le faire apparaître à partir d’un solide et puissant rocher, plutôt qu’à partir d’un joli buisson fleuri dont les propriétés en intelligence seront plus profitables à une magicienne. Seconde subtilité et pas des moindres, on pourrait même aller jusqu’à dire que tout le sel du jeu se trouve là : chaque fantôme ne dispose que d’un nombre de tour limité ! Alors bien sûr, au début on vous chouchoute, les arènes sont de petites tailles, les récépteurs à fantômes sont disposés partout autour de vous, mais très vite les espaces prennent de l’ampleur et ce satané boss se trouve à des centaines de mètres, encadré par un rempart de démons. Difficile de se rendre compte par des mots à quel point ce principe de tour limité est vicieux. Et le mot est faible.
Un fantôme bien brave
Savoir disposer les bonnes unités en fonction de la classe des adversaires, savoir à quel moment les faire apparaître, sachant que si Marona venait à périr, aucun fantôme ne pourrait plus apparaître sur la carte, voilà le genre de choses qu'il vous faudra apprendre à évaluer. Phantom Brave est définitivement le plus tactique des trois T-RPG qui débarquent en Europe. Cela veut-il dire pour autant qu’il en devient inaccessible et trop compliqué pour les non initiés ? Pas forcément. Avec un minimum de stratégie, on peut même passer le premier chapitre sans avoir besoin de faire beaucoup de séances de level-up, ce qui correspond tout de même a plus de 10 heures de jeu. Par la suite forcément, les affaires se corsent et la quête de montée en puissance sera aussi indispensable que dans La Pucelle : Tactics, très exigeant sur ce point lui aussi. Mais la troisième subtilité du jeu tourne cette fois à l’avantage du joueur et n’est donc pas à négliger. Il s’agit du ring out ! Là encore, Nippon Ichi déroute son monde. En autorisant l’élimination de votre pire ennemi simplement en l’éjectant hors de la surface de combat, relève de l’inédit. Chose réalisable au choix avec certains coups qui font valser au loin, soit en se délestant de son arme et en utilisant la commande lift (porter), déjà présente dans Disgaea.
Comme il y a des limites à tout, notez cependant que les boss ne peuvent pas être éliminés de cette manière, ainsi que certains adversaires triés sur le volet. Il eût été dommage en effet de baser toute sa stratégie en vue de ne faire que des ring out. Alors c’est le petit joueur en chacun de nous qui est bien déçu. Autre grande différence avec ses grands frères, Phantom Brave permet une meilleure liberté de déplacement. Ainsi on se déplace librement sur la surface de combat, laquelle n’est plus quadrillée, je vous laisse imaginer les aléas provoqués par la gestion des dénivelés et des surfaces glissantes. Il est heureusement toujours possible d’annuler son action par une simple pression du bouton Rond. Phantom Brave ne joue plus la carte du tour par tour entre les deux camps. Le tour de chaque personnage est calculé à l’avance et visible dans une colonne sur la droite de l’écran, accentuant encore plus l’aspect stratégique des incroyables affrontements qui vous attendent. Point à ne pas négliger donc, de la caractéristique speed de votre personnage dépend sa capacité à jouer rapidement et souvent. Si j’ai écrit "speed" et non "vitesse", c’est précisément parce que Koei n’a toujours pas cru bon de proposer une localisation française. La prestation des voix anglaises, quant à elles, ne m’a pas semblé aussi réussie que celle de Disgaea, notamment le doublage de Ash, bien trop fade. Pas vraiment de quoi se laisser décourager.