16 20
- Un scénario très bien écrit
- Un casting fort
- La B.O. épique
- Une profondeur de jeu impressionnante
- Un mode multi bien pensé
- Les cinématiques dessinées par Wood
- Participer à l'émergence de Outer Heaven
- Un mode solo mal équilibré
- Une maniabilité imprécise
- Le multi uniquement en local sans ad-hoc party
- Le côté assemblage de niveaux
- Le support
Hideo Kojima aime brouiller les pistes, autant dans sa narration que dans la chronologie de parution des différents titres de la série Metal Gear Solid. Après un second opus qui suivait logiquement le premier, les aventures politico-génétiques de Snake - ou des Snake plus précisément - ont laissé de côté le cours logique des choses. Le troisième volet est une sorte de prologue, le quatrième fait office de suite du second et le cinquième - officieux - clôt l'épisode trois. Apportant chacun de très nombreux éléments scénaristiques, ces morceaux de la mythologie de Kojima s'appréhendent chacun très difficilement hors du contexte global de la saga. Et si Metal Gear Solid : Peace Walker fait des efforts pour être didactique, il mise ses effets de manche sur la certitude que c'est un fan qui tient les commandes. Problématique ?
Développé au départ dans l'optique d'être un "véritable" épisode de la série et non un spin-off comme Portable Ops, Metal Gear Solid : Peace Walker aurait dû se nommer Metal Gear Solid 5. Sans doute à cause du support ou de modifications profondes dans l'appréhension du game design, ce nouvel épisode ne semblait visiblement pas convenir à l'arc principal. Néanmoins, dès les premières heures, la construction du scénario et la richesse des thèmes abordés permettent de l'encastrer aisément dans la grande machine Metal Gear Solid. Faisant donc directement suite à Metal Gear Solid 3 : Snake Eater, l'action de Peace Walker se déroule dix ans après les événements impliquant The Boss, en plein coeur des années 70. Héritier du titre de Boss, Naked Snake est désormais connu sous le nom de Big Boss et agit pour son propre compte après l'échec de FoxHound. Marqué par la mort de son mentor et par les diverses trahisons dont il a fait les frais, Big Boss, rejoint par son ami Miller, décide de créer une armée apatride nommée Militaires sans Frontières (MSF). Vierge de toute pression des diverses nations mondiales, cette entité a pour unique but d'apporter la paix sans remettre en cause les traités de non-agression très fragiles de la Guerre Froide. Pour autant, le passé de Big Boss intéresse la CIA et le KGB qui surveillent de près MSF. C'est dans cette atmosphère paranoïaque qu'une jeune fille et son professeur vont venir demander de l'aide à cette légende vivante dans le but d'aider leur pays, le Costa Rica. Ce dernier, dénué d'armée, se trouve en effet dans une situation délicate avec la CIA. C'est donc pour éviter de déclencher une guerre que Big Boss va se rendre en Amérique du Sud, touché par les aspirations pacifistes de la jeune Paz. Bien évidemment le scénario ne va pas s'en tenir à ces prémices et des thématiques telles que l'équilibre de la puissance, le risque nucléaire ou encore la faiblesse morale de l'humanité face à elle-même vont participer à une histoire écrite avec brio. Et cette fois-ci, elle a le bon goût d'être cohérente et de ne pas éclipser le gameplay.
Une guerre par épisodes
Très, voire même trop ambitieux pour la PSP, Metal Gear Solid : Peace Walker s'est vu obligé de fragmenter ses phases de jeu à la fois au sein des missions et dans sa construction même. Le titre ne propose pas une aventure globale comme Metal Gear Solid 3 : Subsistence mais plus une compilation de chapitres à la Metal Gear Solid 4 : Guns of The Patriots. Ces derniers se scindent ensuite en missions qui sont elles mêmes découpées en parties. De fait, le rythme est très haché et devient même carrément laborieux si vous n'installez pas une partie des données sur votre carte mémoire, afin d'éviter des chargements d'une longueur insupportable entre chaque zone. Les environnements traversés sont donc un ensemble de niveaux à la superficie souvent très réduite, notamment dans la jungle. Un choix de construction logique dans le cadre de la PSP, mais qui s'avère dommageable en réduisant l'éventail des possibilités d'action, surtout face aux espaces « ouverts» de Snake Eater. Le joueur a pour le coup davantage l'impression de terminer des séries de tableaux que de s'enfoncer dans une forêt tropicale. Si l'immersion s'en ressent, le titre parvient habilement à compenser ce sentiment par la variété des situations de jeu, et surtout leur évolution. Metal Gear Solid : Peace Walker force toujours le joueur à s'adapter, à utiliser de nouveaux stratagèmes pour survivre. Si Big Boss débute simplement avec son pistolet tranquillisant et une matraque électrique, il devra suivre techniquement et stratégiquement l'évolution parallèle de ses ennemis. Les soldats de base peuvent rapidement être mis au sol via une simple prise d'étranglement ou un petit enchaînement CQC bien placé, tandis que ceux avec un bouclier, apparaissant plus tard, nécessitent que l'on détourne leur attention avant de frapper.
Très, voire même trop ambitieux pour la PSP, Metal Gear Solid : Peace Walker s'est vu obligé de fragmenter ses phases de jeu à la fois au sein des missions et dans sa construction même."
Mus par une I.A. quelque peu aux fraises, ces derniers sont en revanche très puissants et obligent quasiment le joueur à appréhender chaque mission de manière furtive. La force brute n'est pleinement efficace que contre les boss impressionnants et très retors, qui peuvent sans aucun problème mettre fin à vos jours en quelques secondes. Pensés pour la coopération, ceux-ci se révèlent mal calibrés en solo, poussant le joueur dans ses retranchements et l'obligeant à se servir à outrance des livraisons aériennes. Un défaut très étonnant lorsque l'on sait que le un jeu a été pensé dans ses moindres détails. Une diminution toute simple de la difficulté aurait été bien plus agréable pour le joueur, que la présence très artificielle d'objets permettant d'éliminer un boss avant de craquer nerveusement. Des défauts auxquels s'ajoute une prise en main loin d'être ergonomique, et ce, peu importe le type de contrôle choisi. Si le Type 1 reste le plus polyvalent et le plus accessible, il n'en demeure pas moins que la PSP manque cruellement d'un second stick et que cela se ressent très nettement dans Metal Gear Solid : Peace Walker. Surtout dans les affrontements contre les boss où il est impératif de rester mobile, tout en regardant autour de soi dans le but d'éviter leurs nombreuses et puissantes attaques. Un gameplay raide, une structure artificielle, une difficulté parfois mal dosée, le jeu de Kojima Productions semble bien mal en point. Et pourtant, comme son héros, les heurts ne l'arrêtent pas, bien au contraire.
Metal Gear Sims
Reprenant le principe d'engagement de soldats neutralisés sur le terrain de Portable Ops, Metal Gear Solid : Peace Walker simplifie grandement la copie un peu brouillonne de celui-ci. Désormais, dès que vous aurez l'opportunité de capturer un opposant, il vous sera possible de l'acheminer sur la base de MSF via le Futon Recovery System. Cette espèce de ballon-sonde emporte directement votre proie dans les airs en direction de votre base maritime, et évite donc les laborieux trajets jusqu'au camion de Portable Ops. Une fois en votre possession, ces nouvelles unités peuvent être affectées à différentes tâches comme la cuisine, la recherche, le combat, le soutien de terrain, etc. Chacune de ces spécialités a son importance : les chercheurs développent de nouvelles armes et objets de soins, les cuisiniers nourrissent les troupes et évitent que des démissions en cascade ne surviennent, les médecins donnent l'occasion aux soldats fatigués ou blessés de revenir plus rapidement en jeu, entre autres. Chaque section possède un niveau qui augmente en fonction du nombre de personnes qui y sont affectées, et surtout de leurs compétences. Il est donc impératif de ramener le maximum de soldats au QG de MSF, et de prendre le temps de gérer tout ce petit monde à la manière d'un chef d'entreprise révolutionnaire. D'autant que vos hommes peuvent également être envoyés en opérations à l'étranger afin d'engranger de l'expérience, et d'être donc plus productifs dans le domaine militaire ; l'autre solution étant de participer à des missions annexes assez anecdotiques qui génèrent aussi des gains d'XP. Le gros avantage d'avoir du personnel très qualifié étant que ce dernier parvient bien plus rapidement à mettre votre équipement à jour, donnée indispensable pour espérer finir le jeu en solo. Une limitation assez frustrante qui tend à s'atténuer au bout de quelques heures, une fois votre arsenal suffisamment fourni pour parer à toutes les situations. Extrêmement complet, celui-ci met à votre disposition un nombre impressionnant de gadgets, d'armes, de camouflages, allant de babioles inutiles mais amusantes comme des canettes de soda, un magazine de jeux video ou une caisse ambulance, à des outils très performants comme le Sonic Eye ou encore les lunettes de vision nocturnes, tous améliorables.
Très bien implémenté, le multi de Metal Gear Solid : Peace Walker est un prolongement intelligent à la quête principale. Loin d'être un simple bonus à la mode, il possède ses propres qualités et ne se résume pas simplement à une variation "à plusieurs" du solo."
Une fois sur le terrain, c'est un plaisir d'essayer ses nouvelles découvertes et de se rendre compte des possibilités de gameplay bien plus riches que lors de son premier passage sans l'équipement adéquat. Metal Gear Solid : Peace Walker ne change quand même pas à chaque partie, mais sait se renouveler avec talent au gré des pourtant très nombreuses missions de la trame principale. Malgré ses errances dans la prise en main, les situations proposées sont si bien pensées que le joueur progresse sans jamais une impression de déjà vu. Mieux, le jeu se relance dès que le rythme commence juste à quelque peu diminuer, notamment avec un système de scènes cinématiques interactives à base d'artworks magnifiques d'Ashley Wood et de passages épiques bien mis en scène. La profondeur du gameplay de cet épisode n'apparaît néanmoins vraiment qu'en multijoueur, où l'interaction entre les coéquipiers se fait de manière très fluide, presque instantanée. L'occasion de trouver une utilité intéressante à des objets secondaires du mode solo, comme les cartons fantaisies, voire de profiter du fait d'attirer l'attention, de faire diversion. Très bien implémenté, le multi de Metal Gear Solid : Peace Walker est un prolongement intelligent à la quête principale. Loin d'être un simple bonus à la mode, il possède ses propres qualités et ne se résume pas simplement à une variation "à plusieurs" du solo. Ce qui fait la force du jeu mais aussi sa faiblesse. En effet, s'adressant avant tout aux fans de par ses clins d'oeil constants et ses liens très forts avec les tréfonds de l'histoire de la série, Peace Walker parle justement à des joueurs orientés vers le jeu solitaire. De fait, le sentiment omniprésent de passer à côté d'un gameplay plus profond qu'il n'en a l'air, et de ne pas profiter d'un jeu suffisamment équilibré en solo, est réellement décevant. Si les joueurs japonais habitués à se retrouver pour des sessions de Monster Hunter Freedom Unite ou de Dragon Quest Monsters Joker ne doivent pas ressentir de gêne par rapport à cette orientation spéciale, les joueurs européens risquent d'avoir un peu plus de mal à l'accepter. Le concept du Metal Gear Sans Frontières n'est peut-être pas l'idéal.