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On va la jouer franc jeu. Si le test de Here They Lie arrive 15 jours après la sortie du PlayStation VR, ce n’est pas par manque de temps ou par simple retard de planning. Non, c’est tout simplement parce que nous avons eu un mal fou à terminer le jeu. A cause de son motion sickness assez puissant il faut bien le reconnaître, mais surtout parce que nous avons été traumatisés par l’expérience que propose le jeu. Loin des jump scares – néanmoins efficaces – d’Until Dawn : Rush of Blood et de la démo Kitchen, Here They Lie est un jeu où la peur est avant tout psychologique. Le simple fait d’évoluer dans un univers sordide où des bruits inquiétants nous entourent suffit à installer une atmosphère anxiogène capable de marquer l’esprit du joueur à tout jamais. Tout est volontairement lent, calme et silencieux pour que la menace de ces créatures masquées soit encore plus pesante. Le scénario brumeux et ses fins alambiquées participent d’ailleurs à ce sentiment de malaise qui risque d’en traumatiser plus d’un. Il y a bien entendu quelques jump scares placés ici et là, histoire de générer quelques moments de tachycardie, mais il y a surtout des scènes de voyeurisme où le jeu vire au malsain et au dérangeant. C’est simple, c’est une expérience de jeu complètement nouvelle / inédite / incroyable que nous avons vécue avec Here They Lie, transcendée bien évidemment par la réalité virtuelle. Attention tout de même, ceux qui cherchent un jeu avec un gameplay recherché risquent d’être déçus, Here They Lie s’apparentant davantage à une expérience sensationnelle hors du commun. Et si vous jamais cherchez du jamais vécu, il est sans conteste le jeu à ne pas rater avec le PlayStation VR. Cela dit, on le répète, Here They Lie n’est véritablement pas un jeu à mettre entre toutes les mains.
- Une expérience de jeu totalement nouvelle
- On n’a jamais autant eu peur dans un jeu
- Direction artistique séduisante
- Plusieurs fins selon vos actions
- On en sort complètement éprouvé et bouleversé
- Chiche d’y jouer vers 2h du matin ?
- C’est quand même assez flou
- Gameplay minimaliste
- Motion sickness puissant
- Peut être traumatisant pour certains
C’est quelque chose qui est désormais connu de tous : horreur et réalité virtuelle font très bon ménage. Il suffit d’ailleurs de jeter un œil sur YouTube pour se rendre compte à quel point la VR a totalement sublimé le genre, capable d’agir sur certaines personnes comme un accélérateur de sensations fortes. Le meilleur représentant en la matière en ce moment est Kitchen, la démo qui fait office de prélude au prochain Resident Evil VII, attendu pour janvier 2017. Si les jump scares sont évidemment décuplés grâce à l’immersion totale qu’est capable de créer le PlayStation VR, il existe une autre forme d’horreur, plus subtile, plus latente, plus psychologique et du coup plus percutante, limite traumatisante… Cette horreur-là, elle existe dans le jeu Here They Lie. Et croyez-nous, c’est tout sauf un mytho.
Développé conjointement entre les studios Santa Monica de Sony et Tangentlemen, dont c’est le tout premier jeu, Here They Lie débute son aventure comme il le termine, c’est-à-dire pleine de questions et d’émotions. Il est en effet assez difficile de décrire l’histoire qui s’amuse à brouiller les pistes dès les premières minutes de jeu. On démarre sur le quai d’une gare, face à cette jeune femme dont le jaune poussin de sa robe tranche radicalement avec le reste du décor, fait de noirs et de blancs saturés. Cette demoiselle du nom de Dana va être la raison d’être (et de vivre) du héros que l’on incarne véritablement, immersion VR oblige. Si les développeurs se sont amusés à rendre cette quête aussi brumeuse que leur propos tout au long des 3-4 heures nécessaires pour terminer le jeu, on arrive tout de même à capter qu’il est question d’une rupture sentimentale, à laquelle se greffe un sentiment de rédemption assez fort. Des regrets de la part de notre héros qui vont se matérialiser par des scènes fortes, parfois malsaines où l’on va se retrouver au beau milieu d’un quartier rouge (un peu comme celui d’Amsterdam oui) où des hommes et des femmes tentent de passer du bon temps à leur manière, toujours une tête d’animal en guise de couvre-chef. S’il est quasi impossible de comprendre ce que les développeurs de Tangentlemen ont voulu nous dire au premier run, Here They Lie pousse littéralement à la seconde lecture, en incitant le joueur à retenter l’aventure cauchemardesque pour peu qu’on ait le courage et le cœur accroché.
TRAUMA CENTER
Cette descente aux enfers se fait d’ailleurs crescendo, avec une première heure de jeu qui joue véritablement avec nos nerfs. L’idée est tout d’abord de perdre le joueur dans cette ville où chaque ruelle incite à l’exploration, même si la raison nous dit clairement d’éviter les zones les plus sombres. Comme dit plus haut, tout est volontairement calme et silencieux, comme pour nous préparer à ce qui nous attend bien plus tard. Puisqu’on évolue dans cette cité où il n’y a pas âme qui vive, le moindre claquement de fenêtre, le moindre bruit de pas ou dune quelconque apparition inattendue génèrent forcément un sentiment de mal-être puissant. C’est d’autant plus vrai que le joueur n’a aucune arme dans le jeu, juste sa lampe-torche, un peu comme dans Outlast où la défense se traduit par la fuite. Seulement voilà, dans Here They Lie, notre héros ne sait pas courir et encore moins sprinter. On peut accélérer le pas en appuyant sur R2, mais sachez que vous serez toujours rattraper par votre "bourreau". C’est pourquoi, dans Here They Lie, on passe le plus clair de son temps à se retourner, comme pour vérifier si l’on n’est pas suivi par cette créature aux cris stridents et aux agissements pu logiques. Le seul moment du jeu où vous aurez une arme dans votre main intervient à un moment clef de l’aventure, et il sera demandé au joueur de faire un choix crucial qui aura des répercussions sur la fin du jeu.
Puisqu’on évolue dans cette cité où il n’y a pas âme qui vivr'e, le moindre claquement de fenêtre, le moindre bruit de pas ou une quelconque apparition inattendue génèrent forcément un sentiment de mal-être puissant. C’est d’autant plus vrai que le joueur n’a aucune arme dans le jeu, juste sa lampe-torche, un peu comme dans Outlast où la défense se traduit par la fuite.
C’est à partir de ce moment-là que Here They Lie bascule dans le jeu malsain où l’on devient spectateur de scènes aussi bizarres que choquantes. Beaucoup vous diront qu’il y a d’ailleurs du Gaspard Noé dans le jeu, et ils n’auront pas tort. Une scène très particulière rappelle en effet le film Into the Void pour le concept de corps céleste ou Irréversible pour le trip sado-maso, mais sans le Ténia. Vous l’aurez compris, Here They Lie s’autorise toutes les folies et comme il est compliqué d’en détecter les propos, notamment lorsqu’on y joue la première fois, on ne demande qu’à vouloir aller jusqu’au bout de cette descente aux enfers. Qui est Dana ? Qu’a-t-on fait à cette femme qui paraît si douce ? Face à soi-même, il sera temps de se poser les bonnes questions, à moins que cela en soulève d’autres. Toujours est-il que ce côté labyrinthique de l’esprit est renforcé par la patte graphique du jeu, en noir et blanc, mais qui n’hésite pas à faire usage de la couleur pour faire ressortir certains éléments du jeu, et certainement nous faire passer des messages. Si la direction artistique est franchement chouette et que les graphismes s’en sortent pas mal pour un jeu VR, on déplore en revanche un grand flou (artistique ?) qui peut faire office de cache-misère.
"JE TE SURVIVRAI !"
Reste alors la question du motion sickness, bien présent pour notre part, ce qui nous a obligé à rajouter le mot "gerbant" dans l'accroche de notre test. Car quand bien même, les nausées varient en fonction des joueurs, Here They Lie fait partie de ces jeux qui nous ont quand même poussé à retirer le PlayStation VR pour reprendre nos esprits. Faire une pause toutes les 30 minutes était nécessaire et cela est dû non seulement aux déplacements très bizarres du jeu (on a plus le sentiment de glisser que de marcher), mais aussi au fait que le stick analogique droit sert à changer de direction de façon plus prononcée, le tout entrecoupé d'un écran noir. L'objectif pour les développeurs de Tangentlemen était sans doute de limiter le motion sickness, mais pas de bol, cela a créé l'effet inverse. Pire encore, dans certains moments de panique, notamment de fuites, il n'est pas rare qu'un coup inopiné sur le stick droit et nous voilà en train de courir dans la mauvaise direction. Bref, pas pratique du tout, et à ne plus jamais retenter. Malgré tout, l’immersion arrive à prendre le pas sur ce désagrément, d’autant que le son 3D accentue encore ce sentiment d’avoir la mort à ses trousses en permanence. Franchement, c’est du jamais vécu.