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Avec ce premier jet, Game Republic fait honneur au légendaire Yoshitsune, et après un coup d’essai de cette trempe, Genji 2, qui devrait en toute logique raconter les péripéties mouvementées de la famille Minamoto et de la traîtrise dont seront victimes Yoshitsune et Shizuka, fait désormais parti des titres que nous attendons le plus sur PlayStation 3. En attendant, n’oubliez pas de prendre votre temps pour savourer ce délicieux Genji ! Sept heures pour un jeu de cette qualité, ça passe vite, très vite.
- Terriblement efficace
- Réalisation d’orfèvre
- Jouabilité confortable
- Musique envoûtante
- Le mode Kamui !
- Intrigue passablement classique
- Mise en scène anecdotique
- Il manque l’autre moitié du jeu !
- Léger aliasing
Connu et acclamé pour son travail sur les séries Street Fighter et Resident Evil, Yoshiki Okamoto fait partie de ces créateurs de renom dont les ailes se sont senties pousser au début des années 2000 afin de fonder son propre studio indépendant : Game Republic. Pour prendre ses marques sous ce nouveau label, Okamoto et son équipe s’emparent d’un des plus grands héros du folklore historique japonais, Minamoto no Yoshitsune. Genji n’aurait pu être qu’un énième jeu d’action mimant le parfum d’un Onimusha ou d’un Otogi, mais le résultat s’avère bien plus flatteur. Inspiré d’événements historiques réels, Genji narre une histoire aussi navrante de pauvreté que son principe est accrocheur et sa réalisation esthétiquement hors du commun.
Après un âge d’or de paix et de tranquillité toute aristocrate, au sein d’une cour où les seuls joutes auxquelles on pouvait assister étaient verbales, l’ascendance des lignages guerriers Taira et Minamoto met fin au règne de la noblesse, et sonne le début de l’ère de luttes intestines qui n’auront de cesse pendant plusieurs siècles. Nous sommes aux environs de l’an 1180. Dans un premier temps ce sont les Taira qui remportent la victoire sur les Minamoto, supériorité que le jeu explique à sa façon à l’aide d’éléments fantastiques. Ainsi, si ces gros laids de Taira ont pu vaincre les beaux et précieux Minamoto, c’est uniquement parce qu’ils étaient en possession illégale de pierres aux propriétés magiques, les Amagahane. A l’instar d’un Onimusha qui se régale à faire passer Oda Nobunaga pour le pire être qui ait jamais existé, Genji narre des faits historiques bien réels, tout en romançant les objectifs de chacun des deux camps en attribuant le rôle des gentils altruistes d’un côté (Minamoto) et des méchants tyrannique de l’autre (Taira). Vous l’aurez donc compris, le joueur incarne un Minamoto, et plus précisément un des personnages les plus connus de cette période, Minamoto No Yoshitsune. L’homme qui renversera les Taira au cours de nombreuses batailles, et dont les succès incessants feront de lui une victime jalousé par sa propre famille. Nous n’en dirons pas davantage de peur de spoiler le futur Genji 2 sur PlayStation 3. Car il faut bien comprendre que le Genji que nous avons en face de nous ne narre qu’une partie de la vie de Yoshitsune, à tel point qu’une fois le jeu terminé, le joueur souhaiterait davantage voir défiler une page de publicité plutôt qu’un générique de fin. Qu’on se le dise, si Genji est si court et se finit en une poignée d’heures, c’est simplement parce qu’il n’est qu’une moitié de jeu. Faut-il le bouder pour autant ?
Genji Monogatari
Attention très appréciable de la part de Sony Computer Entertainment, cette version PAL nous propose de vivre l’aventure en version originale, avec voix japonaises sous-titrées dans la langue de Desproges. Dommage, pour le coup l’intrigue de Genji est d’une platitude alarmante doublée d’une mise en scène terrifiante de monotonie et de déjà-vu, avec des archétypes à la limite de la caricature en prime. C’est d’autant plus étrange que Genji dispose d’une présentation cinématographique jusqu’à sa jaquette qui dévoile le générique de la même façon qu’une affiche de film. Mais passons. Vous incarnez donc un jeune bretteur au look légèrement improbable, vivant paisiblement d'amour et d'eau fraîche (surtout d'eau fraîche en fait) dans sa cabane perchée sur le mont Kurama, et qui fut fort surpris et tourmenté (pendant au moins trois secondes) lorsqu’il apprit qu’il n’était autre que le fils du grand général défunt Minamoto no Yoshitomo. Bientôt assisté par le colossal moine brigand Benkei, Yoshitsune entame une lutte pour soustraire la capitale Heiankyô (ancien nom de Kyôto) du joug de cet immonde gros porc cleptomane de Taira no Kyiomori, adepte des Amagahane.
Nonobstant une mise en scène ringarde et une durée de vie rachitique, Genji dispose en contrepartie de deux aspects majeurs à souligner. Le premier, c’est sa réalisation tout simplement splendide. Des montagnes à la végétation incroyablement généreuse, en passant par les chemins d’une rue commerçante jonchée de vie et de pétales de cerisiers, jusqu’aux jardins impériaux dont l’architecture splendide se mêle aux reflets naturels des étangs couleur mordoré, Genji est un régal esthétique constant, et le joueur poète et raffiné de s’extasier : "Putain, c’est beau le Japon ancien !". Un festival visuel particulièrement homogène, puisque sur la dizaine de lieux que vous serez amenés à visiter, les graphistes de Game Republic ne vous laisseront à aucun moment l’occasion de critiquer la moindre éventuelle faute de goût. Genji est esthétiquement irréprochable, un léger aliasing (NDMaxime : je dirais plutôt "prononcé") mis à part, et on n’ose imaginer ce qui nous attend dans quelques petites années pour la suite de l’aventure sur la prochaine génération de PlayStation. A côté de ce ravissement visuel, la bande son paraît un peu moins irréprochable, bien qu’elle s’accouple délicatement à vos péripéties. Ceux qui sont déjà passés par Onimusha et autres Otogi ne seront cependant plus vraiment surpris par ce genre d’ambiance faite d’instruments traditionnels mêlés à des sonorités tantôt vocales, tantôt saturées par des nappes stridentes et maléfiques. Efficace, sans plus. Mais une bonne réalisation ne justifie pas le statut de "must have" et Genji se devait de rompre la monotonie de sa mise en scène et de son déroulement à l’aide de quelque chose de neuf, dans le système de combat par exemple. C’est chose faite, et pour peu que vous aimiez les notions de contre-attaque et de timing, vous allez jubiler en jouant à Genji.
Concentration et anticipation
Si je vous dit que Genji et Benkei se manipulent de façon complémentaire, l’un agile et rapide pouvant atteindre des lieux en hauteur, et l’autre massif et puissant pouvant en contrepartie user de sa force pour atteindre d’autres zones secrètes, vous ne serez guère surpris. Pas plus que si je vous apprends qu’il existe deux touches d’attaque, une normale et une forte, des combos, des coups sautés, et autres esquives de bon aloi. Du classique que tout cela. Avec certains ennemis plutôt coriaces et des boss à la barre de vie démesurément longue, on peut même dire que le jeu a échappé au syndrome des combats répétitifs s’il ne possédait pas son petit plus bien à lui. Genji introduit en effet un système basé sur les contre-attaques à l’efficacité implacable, dont la réussite est basée sur un timing diabolique. Yoshitsune et Benkei disposent d’une jauge qui se remplit simplement en combattant. En la déclenchant avec le bouton L1, nos combattants passent pendant quelques secondes en mode Kamui. Ce mode, sorte de bullet-time défensif, fait réagir instantanément chaque ennemi d’une façon qui lui est propre. Après avoir esquissé un mouvement de recul, le fourbe lancera une attaque qui pourra être contré via une pression du bouton carré au bon moment. Le menu fretin sera idéal pour s’accommoder à cet exercice puisque le timing requis est large. Enchaînant les contres attaques avec classe, vous assisterez à un ballet dansant aussi jubilatoire que mortel. A l’occasion il peut arriver que quatre ou cinq benêts vous sautent dessus en même temps. A leur guise, dès lors vous réaliserez un coup tournoyant pour les envoyer ad patres simultanément. Classe et efficace. Mais les choses se corseront très rapidement avec des adversaires dont les attaques vont être de plus en plus rapides et le timing de plus en plus serré ! C’est bien simple, il arrive un moment où attendre simplement que le bouton carré s’affiche à l’écran ne sera plus suffisant, même pour les réflexes les plus affûtés. Ou alors dites tout de suite que j’ai des synapses de mollusque. La véritable clé du succès sera de mémoriser le comportement de chacun de vos adversaires, pour arriver à anticiper par vous même LE moment où appuyer. Et je n’exagère nullement en disant que cela se joue à d’infimes millièmes de secondes près, pour les ennemis les plus coriaces et les boss. A ma connaissance, jamais un système de contre aura nécessité un timing aussi serré. Votre sens de l’observation et de l’anticipation va être mis à rude épreuve, et nombreux seront les échecs qui vous coûteront de précieuses barres de vie. Mais c’est ça qui est bon ! La satisfaction ressentie en cas de réussite est dès lors tout simplement grisante.
Grâce à ce système sévère mais gratifiant, Game Republic élève son jeu à un degré supérieur du simple jeu d’action au sabre, et l’empêche d’être considéré comme un simple clone de Onimusha et consort. Le reste du soft est basé sur une construction simple mais efficace. Vos héros montent en niveaux, peuvent trouver des cristaux pour favoriser l’endurance, l’attaque ou la défense, peuvent s’équiper de différentes armes, armures et accessoires, acheter et stocker nombre d’herbes médicinales, ou encore commander des articles spéciaux aux forgerons, moyennant quelques objets rares acquis en abusant du mode Kamui. Cette technique favorisant également la montée en puissance, autant dire que Game Republic a fait en sorte que le joueur s’emploie à l’optimiser un maximum. Court, 6 heures sans traîner, et jusqu’à 7 ou 8 heures en fouillant les moindres recoins, Genji n’est heureusement pas trop facile grâce à ses quelques boss bien sentis.