Test Carrion : le monstre qu'on prend plaisir à incarner, notre coup de coeur sur Xbox One
15 20
- Sanglant à souhait
- Un concept assez original
- Du bien beau pixel art
- Animation du monstre extrêmement plaisante
- Décors guère variés
- On se perd parfois
- Gestion de la biomasse dispensable
- Cinq à six heures de durée de vie
L'air de rien, la Pologne est un train de devenir un pays qui compte en matière de jeux vidéo. Si CD Projekt, récemment devenue la première capitalisation boursière de l'industrie vidéoludique européenne, fait naturellement figure de proue, d'autres studios plus modestes apportent également leur eau au moulin. Après Techland, People Can Fly, CI Games, Bloober Team ou encore 11 Bit Studios, c'est aujourd'hui au tour d'un petit nouveau nommé Phobia Game Studio de briller sur la scène internationale. Mission accomplie : Carrion a beau être leur premier jeu, il a déjà tout ce qu'il faut pour marquer les esprits !
Un laboratoire niché au fond d'une base militaire secrète, des couloirs sombres, une créature monstrueuse qui rôde dans les conduits d'aération, des scientifiques apeurés, des soldats armés, des hurlements et des corps déchiquetés : voilà quelques ingrédients très classiques que l'on retrouve dans de nombreuses productions cinématographiques et vidéoludiques à caractère horrifique. Si Carrion reprend à son compte tous ces éléments, il prend également le genre à contre-pied en nous proposant d'incarner non pas un courageux mercenaire ou un héros dévoué, mais la terrible créature elle-même. Déjà plaisante en soi, cette inversion des rôles devient carrément jouissive lorsqu'on effectue nos premiers déplacements. A la fois arachnéenne, tentaculaire, véreuse et blobesque, la chose que l'on incarne possède en effet des mouvements extrêmement fluides et organiques, qui bénéficient d'une animation rapide et précise. Quand le simple fait de se déplacer procure à lui seul du plaisir, on sait d'emblée qu'on va passer un bon moment !
Jouer une créature tout droit sortie d'un film d'horreur à la The Thing, voilà qui n'est pas banal ! Fort de cette originalité, Carrion séduit également par son ambiance et ses graphismes.
En ce qui concerne les contrôles, sachez que la manette permet de se déplacer plus facilement que le clavier/souris, mais qu'on vise plus efficacement avec cette dernière option. Dans les deux cas, les contrôles demandent un léger temps d'adaptation mais on prend assez rapidement le pli. Par ailleurs, ne vous fiez pas trop aux captures d'écran pour juger des qualités esthétiques du jeu, car il est vraiment plus beau en mouvement. Toujours lisible, le pixel art s'avère de très bonne qualité. Il baigne de plus dans des effets de lumière très convaincants. Et les scènes affichées sont d'autant plus agréables à l’œil que la créature fait gicler le sang des malheureux qui croisent sa route par hectolitres, jusqu'à repeindre une bonne partie des décors. L'aventure nous propose également trois passages plus calmes, où l'on incarne un humain qui se balade tranquillement dans les environnements et actionne quelques interrupteurs ici ou là. Essentiellement narratives et "ambiançantes" ces séquences de flashback portent particulièrement bien leur nom, puisque leur style graphique rappelle immanquablement le hit de Delphine Software sorti en 1992. Les développeurs sont donc des hommes de goût !
MONSTRE ET COMPAGNIE
Le gameplay en tant que monstre fait la part belle à l'exploration, mâtinée de quelques énigmes à résoudre, de points de sauvegarde à dénicher, et d'accès à la prochaine zone à débloquer. Rien de vraiment difficile, quelques neurones suffisent pour comprendre comment actionner tel interrupteur, franchir tel passage, atteindre tel endroit, ou vaincre tel ennemi. Les adversaires sont essentiellement constitués de scientifiques inoffensifs, de civils armés d'un simple pistolet, de soldats muni d'un flingue et d'un bouclier électrique, de militaires équipés d'un puissant lance-flammes, ainsi que de quelques tourelles, drones, et autre véhicules bipèdes. Là encore, la difficulté reste modérée, ce qui est plutôt une bonne chose. Après tout, on incarne le prédateur et non la proie ! L'attaque de base consiste à agripper un humain à l'aide d'une tentacule afin de le dévorer. Cela permet de gagner de la biomasse et donc d'augmenter de volume. Ainsi, on devient plus résistant aux tirs, plus impressionnant à l'écran, et on peut même accéder à différents pouvoirs supplémentaires. Ces derniers se débloquent au fil de l'aventure et des containers ADN trouvés, et portent des noms exotiques tels que Xiphorrée, Harpagorrhée, Acanthosis, ou encore Arachnophtisie.
Concrètement, il devient par exemple possible de lancer une toile d'araignée afin de piéger les victimes ou pousser les interrupteurs, de se projeter en avant pour détruire les obstacles en bois, de devenir invisible quelques instants, de se transformer en nuée de vers une fois dans l'eau, ou encore de se recouvrir temporairement d'une armure de kératine. Le pouvoir le plus intéressant reste certainement le Parasitisme, qui permet de prendre le contrôle d'un humain, afin de lui faire ouvrir des portes… ou de l'obliger à tirer sur ses collègues s'il est armé ! Ces pouvoirs sont suffisamment variés pour proposer des combats et des énigmes agréables, mais ils souffrent tout de même d'un léger défaut de game design. Le jeu nous oblige en effet à faire varier régulièrement la biomasse de la créature, car certains pouvoirs sont réservés à telle ou telle section de la "barre de poids".
Si on accepte parfaitement l'absence de mini-map étant donné le caractère animal de notre avatar, le jeu aurait tout de même gagné à aiguiller un peu mieux le joueur, quitte à perdre un peu en durée de vie.
En conséquence, il faut régulièrement déposer ou récupérer de la biomasse dans des endroits spécifiques, afin de pouvoir accéder à la capacité qu'on désire. Cela engendre quelques allers-retours guère utiles. On aurait préféré pouvoir sélectionner n'importe quel pouvoir à n'importe quel moment. Les autres défauts de l'aventure concerne le peu de variété des décors, ce qui participe d'ailleurs à perdre le joueur par moments. Si on accepte parfaitement l'absence de mini-map étant donné le caractère animal de notre avatar, le jeu aurait tout de même gagné à aiguiller un peu mieux le joueur, quitte à perdre un peu en durée de vie. Quant à cette dernière, elle est loin d'atteindre des records puisqu'il ne faut que cinq à six heures pour voir le générique de fin. Restons positifs, le jeu évite ainsi de traîner en longueur et de devenir trop répétitif !