MADWORLD
Chez SEGA, on compte toujours les minutes quand il s'agit de MADWORLD, la production sanguinaire signée Platinum Games qui a promis de faire de la Wii une console pour les grands. Nous avions déjà eu l'occasion d'avoir un bref un aperçu des talents de boucher de Jack, le héros du jeu, à la Games Convention 2008 ; mais l'expérience s'avère beaucoup plus jouissive lorsque l'on se retrouve avec la Wiimote et le Nunchuk entre les mains, pour découper des torses et arracher des tendons. S'il faudra patienter jusqu'à la fin de l'année pour savoir si MADWORLD est parvenu à marquer 2009 de son empreinte, il est difficile de ne pas le considérer comme le nouveau porte-étendard du beat'em all. Nos impressions vous expliquent pourquoi.
Pour les néophytes n'ayant pas encore entendu parler de MADWORLD, il s'agit d'un beat'em all ambitieux qui tente de prouver que la Wii est capable de proposer autre chose que du fitness sur la Wii Balance Board. Un miracle pour certains, une désillusion pour d'autres. Toujours est-il que la balance penche nettement du coté des hardcoregamers ce coup-là, et il faudrait vraiment être de mauvaise foi pour prétendre que leur Wii n'avait pas pris la poussière ces derniers mois. Vouant un culte sans limite pour les Double Dragon et autres Final Fight, MADWORLD va droit au but et ne propose pas un scénario hitchcockien à se tordre le cerveau. Dans le cadre d'une émission télévisée appelée le Death Watch, Jack va devoir se frayer un chemin à travers plusieurs zones truffées d'autres candidats qui souhaitent, au même titre que lui, sauver leur peau. Pour progresser dans ce qui devient rapidement un cimetière à la Running Man, et gagner le droit de combattre le boss de chaque level, le bonhomme aura pour mission d'engranger un maximum de points. Un procédé qui rappelle évidemment The Club, sauf qu'ici il ne sera pas seulement question de flatter son égo avec des scores venus d'ailleurs. En effet, chaque fourchette de points franchie permettra d'obtenir des nouvelles armes, et ouvrira également des zones jusqu'alors inaccessibles, ainsi que des mini-jeux supplémentaires. Il va donc falloir y aller avec le style, et faire preuve d'ingéniosité pour impressionner la foule. Plus concrètement, Jack devra exploiter chaque élément du décor pour éliminer les adversaires avec le plus de classe possible, synonyme de gros points dans sa besace. Les possibilités sont multiples, et les quelques croquis qui habillent astucieusement les temps de chargement donnent des pistes. Un adversaire que l'on enverra valser sur le toit d'un train en route, par exemple, rapportera beaucoup plus de points qu'un bandit que l'on se contente de coffrer dans un baril. On peut ensuite concocter plusieurs types de combinaisons comme enfermer un gangster dans un baril que l'on expédie ensuite sur le toit du train, ou dans une benne à ordures, à coup de batte de base-ball. Vous l'aurez sans doute déjà compris : tant que le malfrat n'est pas définitivement hors-jeu, on peut s'amuser à rajouter un maillon à la chaîne pour obtenir le plus gros score possible.
Who's mad ?
Ce système est d'autant plus grisant que la prise en main de MADWORLD est sacrément intuitive. En pressant le bouton A de la Wiimote, on balance un coup de poing ravageur qui n'a rien à envier à celui de Chris Redfield dans Resident Evil 5 ; tapoter trois fois de suite amorcera même un combo vers lequel on revient souvent au cours de la partie. Pour varier les plaisirs, il est également possible de choper l'adversaire en maintenant A : soit on l'expédie ensuite dans le décor avec un mouvement sec de la télécommande, soit on l'assène de coups de tête en agitant le Nunchuk. Excellent. La tronçonneuse, quant à elle, entre en action via B pour que les choses soient claires. Elle permet d'abréger les combats de façon efficace, surtout lorsque l'on se retrouve entouré d'une horde de rageux. En plus du contrôle de Jack, le Nunchuk est chargé de la gestion des sauts (Z), mais également de celle de la caméra (C) qui, d'une simple pression, se repositionne dans le dos du joueur pour une visibilité optimale. Le déplacement du personnage n'est pas ultra précis (même au pas), un défaut que l'on remarque surtout lorsque l'on doit se faufiler à travers des lames particulièrement tranchantes. Les développeurs de Platinum Games rattrapent tout de même le coup en proposant un lock en maintenant C pendant les affrontements ; un petit curseur vient alors se placer au-dessus de la tête de l'opposant visé. Pour le moment, il n'est pas autorisé de passer d'un adversaire à un autre d'un coup de stick analogique, mais on croise les doigts pour que ce soit le cas dans la version définitive du titre. Le stun est aussi une notion qu'il va falloir maîtriser sur le bout des doigts dans MADWORLD. Sonner son adversaire est la porte ouverte à toutes les tortures qui passent par la tête pour gratter des points supplémentaires. Il y aura toujours une scie rotative, un poteau, un fil électrique, une hélice ou une pince découpante pour massacrer un corps, ce qui, d'ailleurs, permet de souligner l'intéractivité des décors qui paraît sans limite. Elle incite réellement à se creuser la tête pour dénicher les combinaisons les plus rémunératrices. Puisque l'on participe à un show télévisé, il faut garder à l'esprit que les autres candidats peuvent, eux aussi, appliquer les mêmes supplices à Jack. Sans doute pas d'une manière aussi poussée, mais être conscient que l'on peut se retrouver avec une barre de fer dans les fesses, ça évite les mauvaises surprises.
Le déplacement du personnage n'est pas ultra précis (même au pas), un défaut que l'on remarque surtout lorsque l'on doit se faufiler à travers des lames particulièrement tranchantes."
Les QTE sont légion dans MADWORLD, et introduisent la plupart du temps des exécutions que l'Australian Classification Board and Classification Review Board a certainement dû manquer au moment d'autoriser la vente du jeu au pays des kangourous. Comme souvent dans pareille situation, il suffit de suivre les instructions affichées à l'écran pour achever son rival. Les supplices varient en fonction de l'arme du moment - que l'on sélectionne avec la croix multidirectionnelle de la Wiimote - et rappellent que, même caricaturée, la violence est bel et bien présente. Pour revenir deux secondes sur les mini-jeux, SEGA nous a présenté le fameux Death Press dont on avait déjà parlé à Leipzig, et que nous avons eu l'occasion de tater ici. Le principe est archi-simple : écraser le plus d'adversaires possible en moins d'une minute à l'aide d'un pressoir truffé de pointes. L'opération s'effectue en deux temps : étourdir d'abord ses ennemis avec des mandales, puis les balancer sous le pressoir qui se charge du reste. Fastoche sur le papier, mais moins évident sur le terrain dans la mesure où il faut avoir un certain sens du timing. Plus exactement, en balançant trop tôt les voyous dans la fosse, on risque de les voir revenir indemnes. On peut également évoquer le prometteur Man Darts du niveau Asian Town qui reprend le concept du jeu de fléchettes. On vous laisse deviner la suite. Un petit mot également sur la map qui permet de se repérer efficacement, et de localiser surtout l'emplacement des objets et des sbires en un coup d'oeil. La réalisation de MADWORLD est à la hauteur de l'événement. Le corps de Jack donne l'impression d'avoir bouffé des stéroïdes anabolisants pendant des siècles, afin qu'il puisse tenir tête à ses opposants sans trembler. Son allure de bad boy lui confère naturellement du charisme, et lui permet de dégager une assurance à toute épreuve. Les développeurs de Platinum Games ont pris le temps de le munir d'une gueule et d'une carrure qui lui prêtent un lien de parenté avec le Hellboy de Mike Mignola, du moins celui du premier volet. Son cuir et sa paire de lunettes inciteront sans doute quelques illuminés à entamer une carrière de loubard ou d'acteur - c'est au choix -, mais il faut dire que l'art du noir et blanc cher à Frank Miller donne du cachet à la réalisation de MADWORLD, qui claque plus la rétine en mouvement qu'en images. Cela dit, l'animation des personnages ne se révèle pas archi-fluide, de même que leurs expressions faciales auront du mal à crever les yeux. Mais ce qui aurait pu constituer un défaut dans un titre coloré devient séduisant en monochrome. Par ailleurs, des détails amusants viennent amuser la rétine, comme les autres concurrents qui se chiffonnent entre eux sans prêter la moindre attention à vos faits et gestes. Reste maintenant à savoir si ce parti pris artistique ne risque pas, au final, de confiner MADWORLD dans des stages qui se ressemblent tous. MadTown, le seul quartier que nous avons eu l'occasion de visiter, avait l'avantage de l'effet de surprise. Mais une fois acclimaté au coup de crayon atypique de Platinum Games, le titre est-il capable de tenir sur la longueur d'un point de vue visuel ? Une question que SEGA a balayée d'un revers de main, en assurant que chaque niveau de MADWORLD renouvellerait continuellement l'expérience de jeu. Il faudra patienter jusqu'à la sortie du jeu au mois de mars prochain, sur Wii.