The Outfit


The Outfit

Annoncé et dévoilé pour la première fois à l’E3 2005, The Outfit a été, comme pas mal de titres Xbox 360, repoussé à une date ultérieure. C’est pourquoi, THQ – son éditeur – a décidé de faire le point sur son développement en nous invitant à Vancouver chez Relic Entertainment. Synthèse.


Vancouver. Paisible ville de la côte Ouest du Canada, elle rassemble pas moins de 2 millions d’habitants. En raison de sa situation géographique, située entre l’Océan Pacifique et les Rocheuses, la ville bénéficie d’un micro-climat qui l’empêche de sombrer dans les températures négatives que connaît par exemple la côte Est du pays. En contre-partie, les températures estivales n’excédent jamais la barre des 20 à 23° en moyenne. Malgré ces désagréments climatiques, cela n’a pas empêché Relic Entertainment d’y avoir élu domicile. Largement connu des joueurs PC et notamment tous ceux qui s’intéressent un tant soit peu à la stratégie en temps réel, ce jeune studio canadien est à l’origine de licences telles que Homeworld, Impossible Creatures, Warhammer 40.000 et le prochain Company of Heroes, leur nouveau RTS au potentiel démesuré. La firme n’est donc pas à son premier coup de maître et pouvoir accéder à l’antre de l’un des patrons de la stratégie est un moment suffisamment rare pour en apprécier chaque minute. Toutefois, si nous avons parcouru près de 10 000 kilomètres, ce n’est malheureusement pas pour se pencher de plus près sur Company of Heroes, mais pour découvrir ou plutôt redécouvrir The Outfit sur Xbox 360.

 

La guerre, il paraît que c’est super !

 

Pour sa première venue dans le monde des consoles, Relic Entertainment a décidé de jouer la carte de la simplicité et de l’efficacité marketing. Ici, point de space opéra, d’animaux farfelus ni encore moins de figurines de plateau de la gamme Games Workshop, on baigne dans la plus grande des banalités - celle qui frappe d’ailleurs de plein fouet le monde du jeu vidéo depuis quelques années déjà – puisque The Outfit est un jeu d’action/tactique se déroulant lors de la Seconde Guerre Mondiale. Côté inspirations, Relic Entertainment nous a habitué à plus imaginatif mais peu importe leur choix, peu importe leurs motivations, certains titres tels que Call of Duty 2, puise encore ses idées dans cette bonne vieille guerre de 39-45 et arrive pourtant à nous surprendre. Avec pas moins de la moitié de l’équipe du studio réquisitionné sur le projet, il y a de fortes chances pour que The Outfit soit l’un des projets les plus ambitieux du studio. Gare toutefois car certains cadeaux, même venus du ciel, s’avèrent être empoisonnés.

 

            

 

L’idée de base de The Outfit est relativement simple. Nous sommes en pleine Seconde Guerre Mondiale. Les Nazis occupent une bonne partie de l’Europe et les Etats-Unis, en libérateurs, tentent de contrecarrer les plans du moustachu à la mèche folle. Pour mener les attaques sur le front, l’armée de Washington envoie plusieurs troupes sur le terrain et notamment trois soldats, trois hommes à la motivation et à la compétence infaillibles. Si au dernier E3, The Outfit semblait prendre un parti-pris politique parodique, c’était assurément dû à son look propre et à ses personnages trop lisses façon Big Jim. Depuis, la Xbox 360 est arrivée entre nos mains et nous savons désormais que ces textures plastifiées sont inhérentes à la console. Car The Outfit est tout sauf une simple partie de rigolade. La guerre est bien réelle et son concept basé sur la destruction nous rappelle à quel point la guerre c’est loin d’être super. Encore faut-il que Jeff Brown, producteur du jeu en soit convaincu. Mais il s’agit-là d’un tout autre problème.

 

Search and destroy

 

Pas évident de se faire une véritable idée de The Outfit aux premiers abords. Si l’action joue un rôle prépondérant dans le jeu, la stratégie tient également une place toute aussi importante. C’est bien ce que Relic Entertainment, pourtant spécialiste en la matière, tente désespérément de nous faire avaler. Il n’empêche que les missions, limitées à la destruction, à la capture de positions ou parfois à quelques moments de sauvetage ne laissent que peu de place à l’établissement d’une quelconque stratégie. Surtout lorsque la présentation du jeu est orientée vers les performances physiques du moteur (pas encore bien optimisé aussi, il faut le souligner) qui permet de tout faire exploser, même en tirant un obus au bout de la carte. Les soldats jaillissent par paquet de dix, les véhicules s’affrontent dans un capharnaüm assourdissant et chaque exploit est récompensé par le gain d’argent, fort utile pour se payer un bon tank, histoire de tout balayer d’un coup de canon. Néanmoins l’idée et les options stratégiques sont bien là, certainement mal exploitées mais bien présentes. La taille et le level design des cartes par exemple auraient pu être mis à disposition du joueur pour tenter d’appréhender une mission furtivement ou d’une manière plus délicate que d’envoyer une nuée de soldats se faire charcuter sur le champ de bataille. Manque de bol, le game design de The Outfit empêche chaque approche tactique de prendre forme, nous rappelant systématiquement que le rentre-dedans est plus payant et efficace. Dommage.

 

             

 

Autre point regrettable. Chaque chaque véhicule marchandé peut, à tout moment, faire l’objet d’une réparation mais là encore, on nous rappelle à l’ordre en nous signalant par l’assaut d’ennemis mais aussi par des moyens financiers (rappelez-vous, on gagne de l’argent pour chaque action menée dans une partie et le compteur augmente assez vite), qu’il est plus prompt à se payer un engin que de perdre son temps à le retaper. Autre choix fâcheux, le switch de personnages n’est accessible qu’une fois que l’on perd un soldat. Avoir trois personnages aux aptitudes distinctes et ne pas pouvoir en profiter paraît on ne peut plus déroutant. Erreur de game design ? Pas le moins du monde, puisque c’est un choix volontaire et assumé de la part du producteur qui voit en cette possibilité, et non une incapacité, d’augmenter le challenge. Certes. Toujours est-il que la mort dans The Outfit n’est plus une fin en soi puisque le Game Over a tout simplement été banni du vocabulaire du jeu. Excepté les soucis d’I.A. assez prononcé et quelques aberrations techniques, assurément dûes à une version peu avancée du code, The Outfit propose en réalité un gameplay limpidement adapté au jeu à plusieurs. Ca tombe plutôt bien puisque le titre est jouable via le Xbox Live et pourra accueillir un certain nombre de joueurs simultanément. Pas de chance pour nous, le multijoueur n’était pas suffisamment avancé ni même stable pour que les journalistes sur place puissent s’en faire une quelconque idée.

 

A l’E3, The Outfit paraissait tout sauf un jeu où la stratégie avait sa place. A Vancouver, chez Relic Entertainment, notre première idée s’est même renforcée, orientant désormais le titre vers une consonance multijoueur qui pourrait être intéressante sur le Live. Encore faut-il qu’on fasse autre chose que d’exploser des bâtiments à longueur de parties, sous peine de faire naître une répétitivité harassante. Pour mieux comprendre ces choix, pour la plupart volontaires et assumés, qui mieux que Jeff Brown et Adrian Crook, producteurs du jeu, pouvaient en parler ? Résumé de notre entretien.

 


 

INTERVIEW JEFF BROWN & ADRIAN CROOK – producteurs de The Outfit

 

 

            

 

 

JeuxActu : The Outfit se déroule durant la Seconde Guerre Mondiale. Pensez-vous qu’il y ait encore quelque chose à dire dessus ?

 

Jeff Brown : Bah oui vu qu’on est en train de faire un jeu dessus. Ce qu’on peut dire sur cette Seconde Guerre Mondiale, c’est : "Putain, qu’est-ce que c’est cool ! Il y a de grosses explosions et des trucs super sympas" Nous, ce qu’on a fait aussi, c’est d’apporter de nouvelles choses dans le jeu. On ne s'est pas contenté de reprendre des armes ou des véhicules traditionnels. Tout ça, on sait comment ça fonctionne. Si on avait décidé de faire un jeu plus traditionnel, du style jeu de shoot de base, on n’aurait pas choisi la Seconde Guerre Mondiale. Mais comme on avait plein de nouvelles idées, on s'est dit qu’on pouvait les transposer dans cet univers.

 

JeuxActu : J’entends bien mais Relic Entertainment s’est également taillé une belle réputation pour ses jeux à ambiance futuriste, le choix de la Seconde Guerre Mondiale semble vraiment classique justement…

 

Adrian Crook : Oh, je pense que Relic est avant tout connu pour ses jeux innovants en matière de gameplay. Pour reprendre ce qu’a dit Jeff, le gameplay de The Outfit est assez innovant pour l’adapter à la Seconde Guerre Mondiale. On ne voulait pas refaire un autre jeu où les Aliens combattent un autre peuple ou quelque chose dans le genre. On voulait essayer autre chose.

 

JeuxActu : Pourquoi avoir limité les trois personnages principaux du jeu à une certaine catégorie d’armes ? Il est par exemple impossible de récupérer les armes des Allemands ou ceux de son propre camp…

 

Adrian Crook : C’est une bonne question. Ce qu’il faut savoir, c’est que chaque personnage a la possibilité de faire évoluer son arme principale. Il y a trois degrés de puissance pour celle-ci à laquelle s’ajoute une seconde arme mais aussi plusieurs types de grenades. Au fil des missions, on pourra récupérer tout ça, faire appel à des véhicules… (Jeff Brown prend subitement la parole)

 

Jeff Brown : Si chaque personnage est cantonné à une certaine catégorie d’armes, c’est aussi pour maintenir un certain équilibre dans le jeu. On aurait très bien pu faire plus d’armes et leur donner la possibilité d’en changer quand on voulait. On se serait retrouvé alors avec un personnage puissant avec une arme puissance et tout le monde aurait pris le même personnage pendant tout le jeu. Quel est l’intérêt ? Par contre, si on prend un personnage faiblard avec une bonne arme, alors ça devient plus intéressant. Il suffit de prendre Battlefield en exemple. On ne donne pas à l’ingénieur la super grosse mitraillette, il n’y aurait aucun intérêt. Par contre si on limite chaque personnage à une catégorie d’armes, là il y a un vrai challenge.

 

            

 

JeuxActu : Il me semble qu’on ne puisse pas se soigner dans le jeu, ni même switcher de personnage puisqu’il faut attendre que l’un d’entre eux meurt. Ne pensez-vous que c’est un peu rédhibitoire ?

 

Jeff Brown : Les personnages se régénèrent automatiquement. Il suffit de se mettre à l’abri un instant pour retrouver sa santé. On voulait garder un rythme soutenu dans le jeu, quelque chose d’efficace. On ne voulait pas d’un jeu à la Brother in Arms, super réaliste où l’on peut mourir juste à cause d’une balle. Non, The Outfit, ce n’est pas ça. C’est une question de challenge, le joueur doit ainsi appréhender une mission différemment en fonction du soldat qu’il aura sélectionné. Cela le force à faire preuve d’imagination et c’est ce qui rend le jeu plus intéressant.

 

JeuxActu : The Outfit est présenté comme un jeu d’action-stratégie. De l’action, il y en a dans le jeu, par contre la partie stratégique semble avoir été délaissée…

 

Adrian Crook : Je suis d’accord, The Outfit est un jeu explosif mais il y a aussi beaucoup de stratégie dans le jeu. Est-ce que vous m’avez vu joué durant la présentation ?

 

JeuxActu : Oui, tout à fait mais j’entends par-là qu’il est bien plus efficace et payant de bourriner que d’établir une certaine stratégie dans le jeu…

 

Jeff Brown : Ce n’est définitivement pas un jeu de stratégie. Il y a des éléments de stratégie dans The Outfit, comme la possibilité de choisir son personnage ou de faire appel à des véhicules et autres tourelles. Evidemment, ce n’est pas non plus un RTS où l’on envoie une unité sur telle position ou telle partie d’une carte.

 

JeuxActu : Peut-être êtes-vous lassés de développer des jeux de stratégie... ?

 

Adrian Crook : Nous sommes de grands joueurs consoles et nous pensons que les jeux de stratégie sur consoles ne fonctionnent pas. Ca s'est déjà vérifié à plusieurs reprises.

 

Jeff Brown : Relic est connu pour ses jeux de stratégie. C’est notre qualité, notre spécialité donc je ne pense pas qu’on soit lassé de ce genre de jeu.

 

           

 

JeuxActu : The Outfit est votre premier titre sur consoles. Quelles ont été les difficultés que vous avez rencontrées durant le développement ?

 

Adrian Crook : Avoir un jeu qui sort quelques mois après le lancement de la console a été le premier de notre souci. Le hardware est totalement nouveau donc il faut apprendre et travailler vite. A ce propos, Microsoft a été très généreux en nous soutenant et nous épaulant constamment. Ils ont foi en notre projet et ça c’est pas du luxe.

 

JeuxActu : Beaucoup de personnes estiment que la Xbox 360 est une console prématurée. Quel est votre point de vue sur le sujet ?

 

Adrian Crook : Oh non, je ne pense pas. Quand on voit la qualité de The Outfit ou des autres jeux de lancement de la console, je pense que la machine est plutôt bien maîtrisée.

 

Jeff Brown :  Il suffit aussi de voir le nombre de jeux au lancement de la console. Je pense d’ailleurs que c’est le meilleur lancement qu’une console ait pu avoir depuis le début. La première Xbox par exemple, ne disposait que de trois jeux béton à sa sortie, dont Halo et Project Gotham Racing qui est resté pendant très longtemps l’un des meilleurs jeux de courses. Là on a Kameo, PGR 3, Dead or Alive 4 (NDR : le jeu a été reporté à début 2006 depuis) et tous les jeux de sport Electronic Arts.

 

JeuxActu : Vous avez l’habitude de développer des jeux sur PC et The Outfit ne sort que sur Xbox 360. Etes-vous intéressé par la PlayStation 3 ou la Nintendo Revolution ?

 

Adrian Crook : Oui bien sûr, nous sommes ouverts à toutes les propositions. Et nos futurs projets sur consoles seront des jeux multi-support.

 

Jeff Brown : Bien que nous soyons spécialisés dans les jeux PC, il faut savoir que nos équipes sont composées de personnes qui ont bossé énormément sur des titres consoles. En fait, il y a plus de développeurs consoles que PC.

 

JeuxActu : Une dernière question qui ne concerne pas The Outfit. Peut-on s’attendre à un Homeworld 3 ?

 

Jeff Brown : Malheureusement, nous ne sommes pas détenteurs de la licence de Homeworld, c’est Sierra qui possède les droits et puis nous appartenons à THQ dorénavant, donc il n’y a aucune chance pour qu’on développe Homeworld 3. C’est dommage mais rassurez-vous, on prépare de nouvelles licences qui seront aussi bonnes. (rires)




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