16 20
Naughty Dog honore une nouvelle fois Sony de son savoir-faire. Certes, Uncharted : Drake’s Fortune n’aura pas réinventé l’eau chaude, mais tous les éléments de gameplay piqué ça et là sont repris avec talent et efficacité. Particulièrement réjouissante pour nos sens, et diablement addictive, l’aventure de Nathan Drake est menée sur un rythme effréné, et se veut prenante de bout en bout. On pestera tout de même contre quelques imperfections techniques ou une durée de vie un poil trop juste, mais nul doute qu’à défaut d’être exceptionnel, Uncharted : Drake’s Fortune constitue un excellent moment de jeu vidéo.
- Prenant de bout en bout
- Aventure parfaitement rythmée
- Prise en main instinctive
- Au dessus du lot graphiquement
- Doublage français particulièrement convaincant
- Phases de jeu variées
- Quelques bugs de collision
- Frame-rate parfois pris en défaut
- Caméra agaçante par endroit
- Personnages peu charismatiques
- Scénario convenu
- Un peu court
- Aucune originalité au niveau du gameplay
Le cortège de killers app’ exclusifs étant passé avec les résultats que l’on connaît, Uncharted : Drake’s Fortune constitue désormais – malgré sa sortie tardive en cette saison de fêtes – le seul espoir pour Sony de mettre tout le monde d’accord avec un titre first party. De grosses influences trouvées chez la concurrence et un héros aux allures de gendre idéal suffiront-ils à Naughty Dog pour imposer Nathan Drake aux panthéons des icônes vidéoludiques comme Crash Bandicoot et Jak l’ont été en leur temps ?
Autant être franc, qui aurait pu croire qu’Uncharted : Drake's Fortune serait considéré comme le jeu phare de cette fin d’année chez Sony Computer Entertainment ? Pas grand monde. Il faut dire que le dernier projet sorti des studios de Naughty Dog aura pris son temps avant de véritablement se dévoiler, désertant le devant de la scène au profit de la belle Nariko, des dragons de Lair ou des véhicules de Warhawk. Ces trois porte-étendards du monolithe haute-définition de Sony s’avérant finalement être des pétards mouillés (dans une moindre mesure pour Warhawk qui est un cas particulier), Nathan Drake peut maintenant venir occuper la place qui lui est due, car oui, Uncharted : Drake's Fortune est un sacré bon jeu.
Prince of Sera
Et certainement la meilleure exclusivité PlayStation 3 parue à ce jour. Le game design du bougre a beau avoir été façonné en piochant chez les voisins, il n’empêche que celui-ci est impressionnant de maîtrise et d’efficacité. Contrairement à ce que l’on aurait pu penser à la vue des premiers visuels dévoilés, Uncharted : Drake's Fortune ne joue pas dans la même cour que Lara Croft. Bien que la recherche d’antiquités soit au cœur de leur périple, la muse d’Eidos Interactive et Nathan ne partagent pas vraiment le même mode opératoire. Ce dernier a beau être un athlète confirmé, il n’en dispose pas moins de capacités physiques bien plus humaines que la miss. Pas de place pour les sauts improbables ici, ni pour les prises d’appui invraisemblables ; par contre, chaque corniche, chaque balcon, chaque poutre sera susceptible de se glisser sous les phalanges avertis de notre héros, qui tel le Prince de Perse va devoir progresser pas à pas dans des paysages en ruines. L’observation de l’environnement dans lequel on évolue est d’ailleurs primordiale pour ne pas se retrouver inutilement perdu, à la recherche de la route à suivre. Les moins attentifs pourront tout de même bénéficier d’une option Indice qui apparaît de temps en temps et qui les remettra à coup sûr en selle. Mais très franchement, ici, pas de quoi se sentir paumé. Les environnements sont suffisamment clos et dirigistes pour ne pas avoir à tourner des heures durant ; cependant, bien que linéaire, le level design se veut assez inspiré pour nous laisser aller à nos déplacements félins, à la recherche du moindre bloc de pierre à agripper. Diriger Nathan se fait avec un plaisir certain, son agilité et la prise en main impeccable nous donnent cette agréable sensation de mainmise sur les décors, où le moindre faux pas serait dû à une erreur d’inattention plus qu’à une faute de main. D’ailleurs, cette tranquillité est voulue par le game design, qui dissocie bien les deux phases de gameplay que sont les séquences de plateforme, et les séquences d’action. A priori, en faisant correctement le ménage, personne ne sera susceptible de venir troubler vos acrobaties. Les ennemis n’en ont d’ailleurs pas intérêt.
Guerre de tranchées
Car pour ce qui est de l’action, Drake ne s’en tire pas mal non plus. Bon bagarreur, on préfèrera néanmoins étaler nos opposants en les criblant de balles. Grenade, 9mm, Uzi, AK-47, fusil à pompe, et même fusil sniper, le bellâtre sait se servir de toutes sortes d’armes. Ce qui n’est d’ailleurs pas plus mal, car si l’explosion visuelle – nous y reviendrons plus tard – est réelle, Uncharted : Drake's Fortune en propose de nombreuses autres aux forts relents de poudre. Dans le domaine, le modèle de Nathan se nomme Marcus Fenix. Le déroulement des nombreux gunfights s’inspire énormément de ce que Gears of War a introduit dans le domaine du jeu d’action. Pour ceux qui auraient manqué ce classique de Noël dernier, sachez que tout le concept repose sur une utilisation efficace et intelligente du décor. Le moindre coin de bâtiment, le moindre muret, la moindre colonne, la moindre caisse, tout ici est susceptible de nous couvrir. Car dans Uncharted : Drake's Fortune, les plus bourrins vont devoir apprendre à mesurer leur tension artérielle ; les ennemis arrivent massivement et ne se font pas prier pour abuser de la gâchette. Une bonne maîtrise de la touche rond est donc incontournable pour ne pas ressortir frustré de l’expérience. En plus de mettre Nathan à couvert, une fois en position d’attente, elle permet de se déplacer rapidement de planque en plaque grâce à quelques roulades bien senties. En effet, les ennemis sont prudents, et ne se risqueront que rarement à lancer aveuglément l’assaut, préférant souvent rester en sécurité dans leurs quartiers à mitrailler et à balancer des grenades. A vous de vous déplacer pour trouver les meilleurs angles de tir et ajuster comme il le faut vos proies. Car tout le caractère jouissif de Uncharted : Drake's Fortune repose bien ici, dans les gunfights. Plus que les séquences de plateforme qui ne demande pas vraiment de doigté, ceux-ci requerront en revanche d’un skill plutôt confirmé. Nous sommes donc loin d’être dans un schéma attentiste ; ces guerres de tranchées étant généralement bien tendues et nerveuses, la satisfaction qui découle de chaque victoire n’en est que plus gratifiante. Nos opposants ont la fâcheuse tendance de ne pas rester fixe, si bien qu’il n’est pas toujours évident de placer le précieux headshot (surtout que celui-ci ne passent pas toujours), de plus Naughty Dog a opté pour une vision grand spectacle hollywoodienne de ces scènes, avec tout ce que cela comporte en terme de réalisme. La gestion des dégâts n’existent pas, impossible donc d’affaiblir nos adversaires par quelques balles. Même touché, ils disposeront de la même vélocité et de la même hargne. S’il y aura de quoi râler contre un bonhomme un peu trop insistant, Nathan dispose tout de même d’une contrepartie plus que correcte : les trousses de soin sont aux abonnées absentes, et seules quelques secondes passé à l’abri de douilles suffiront à lui rendre sa vigueur.
Aventure Cinématoludique
Cela dit, les aspirations de grandeur cinématographique ne s’arrêtent pas à ces phases de gunfight, puisque le jeu a été construit comme un long film interactif. A ce propos, il est important de souligner le travail remarquable des développeurs qui n’ont à aucun moment privilégié les cinématiques au détriment du jeu. On s’amuse suffisamment pour savoir apprécié les cut-scenes (avec un doublage français particulièrement réussi) le moment venu, si bien que jamais la sensation d’être prisonnier d’un film interactif ne se fait sentir. Il y aurait pourtant de quoi, à commencer par l’excellente réalisation qui aurait pu orienter le gameplay dans une passivité contemplative qui aurait certainement ruiné l’intérêt de l’aventure. Cependant, si la PlayStation 3 nous livre là son plus beau titre, à aucun moment on ne ressent la claque monumentale infligée par Gears of War l’an dernier. L’habitude sans doute. Le résultat a pourtant de quoi caresser agréablement nos cornées rétiniennes, avec une mention spéciale pour les vêtements qui ressortent détrempés après un petit passage dans l’eau. La mise en scène n’est pas en reste, puisque pour faire varier les plaisirs, les développeurs ont eu la bonne idée d’intégrer des phases de course-poursuite ou de jet-ski. Plutôt simplistes, elles permettent néanmoins de faire varier les situations de jeu, même si les secondes ne sont pas une franche réussite au niveau technique et logique (motorisation 2 chevaux, aucune éclaboussure même à pleine vitesse ; remonter une rivière descendante à contre-courant ?). Toujours au chapitre des petites imperfections, on dénombrera quelques rares chutes de frame – sans que cela soit pénalisant –, quelques bugs de collision, ou une caméra un poil rigide en espace confiné. Rien de bien méchant en somme.