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Malgré des voix insupportables, une grosse interrogation sur le public concerné et quelques incompréhensions dans l'histoire, Tony Tough 2 arrive néanmoins à se faire remarquer grâce à des références permanentes et à une patte graphique qui fait son petit effet. Une sympathique alternative donc aux mastodontes du genre tels que Runaway 2.
- Graphismes à la Hopper
- Une avalanche de références
- La voix insupportable du héros
- Scénario mal mené
- Ni pour adultes, ni pour enfants
- Quelques étapes assez dures
Après un premier épisode très décevant, c’est avec une réelle surprise que nous avons entendu parler d’une suite à Tony Tough 2. Et bien, la surprise est véritablement de taille puisque ce titre permet de revivre la vraie magie des jeux d’aventure à l’ancienne.
Pour bien comprendre à quel point nous nous sommes intéressés voire attachés à ce titre, malgré des défauts assez pénibles, il faut assimiler à quel point nous avions détesté le premier. A vrai dire, il y a peu de chances que Tony Tough soit sorti en France si Runaway premier du nom n’avait fait un tel carton. L’éditeur de l’époque avait quelque peu surfé sur cet engouement pour les jeux d’aventure, assez intelligemment d’ailleurs. Malheureusement, le public des jeux d’aventure ne tombe pas sous le charme d’un titre simplement parce qu’il y trouve un inventaire, des lieux variés et des objets à combiner. Runaway a fonctionné parce que c’était un bon jeu. Tony Tough n’a pas fonctionné, il était mauvais.
Tony, le dur
Passons sur les idées préconçues que nous avions avant de plonger dans le jeu pour vous dévoiler le ressenti lors des premières minutes du jeu. Plusieurs sentiments se mélangent. La crispation tout d’abord. Cette voix de fausset du héros Tony Tough, c’est juste insupportable. J’en regretterais presque la voix du gamin d’à côté qui a mis deux ans à muer, passant plusieurs fois dans la même phrase de l’aigu le plus pénible au grave le plus prononcé. En plus, il jouait de la flûte. Bien que cette période ait duré deux ans, elle fut plus supportable que la voix du héros. Les voix des autres personnages donnent heureusement moins envie de se suicider. Ca, c’est le mauvais point du début du jeu. En revanche, graphiquement, c’est bluffant. Les quelques images que nous avions pu voir avant de recevoir une version jouable laissaient présager du meilleur : rien à voir avec la précédente version. Mais en plein écran, c’est encore mieux. On repère une différence manifeste entre les personnages et les décors. Les personnages donnent l’impression de sortir d’un dessin animé et les décors d’aquarelles très détaillées. Les deux techniques ne jurent cependant pas l’une avec l’autre et le résultat demeure très agréable tout le long du jeu. Mais pendant un bon moment, on se demande quand même si ces fameux décors ne font pas penser à quelque chose… On y réfléchit un bon moment, on oublie un peu. On reviendra dessus plus bas…
L’histoire, pour tout vous dire, on ne l’a pas trop comprise et pour plusieurs raisons. La première, c’est que le scénario ne démarre vraiment pas tout de suite. Ce héros de 13 ans qui rêve de devenir détective privé, on le découvre petit à petit. La caractérisation est très longue pour pas grand-chose. Il se lève en retard, arrive à la bourre en classe et reçoit une retenue. Il doit tout faire pour échapper à cette petite prison. Après pas mal de temps de perdu à cause d’un problème d’interface pas vraiment intuitive, Tony parvient à s’échapper en finissant à l’hôpital dirigé par son père. Il doit encore s’échapper. Plus tard, il revoit son ami et voisin, Seymour. Il lui répète qu’il veut devenir détective. Après un délire un peu farfelu, ils tombent d’accord sur le fait qu’un bon détective doit posséder une perruque. La première mission de Tony consiste à réunir suffisamment d’argent pour acheter une perruque à la mère de Seymour. Trois ou quatre missions sont à effectuer. Lorsque Tony obtient l’objet tant convoité, il ne lui reste plus qu’à trouver une enquête à résoudre. Au même moment, la bonne de vos parents se fait enlever. Là voilà votre affaire ! Mais nous en sommes déjà à la moitié du jeu ! Difficile de faire une entrée en matière aussi peu percutante. Bien sur, des bribes d’informations sont lâchées au joueur sur ce qui se passera vers la fin mais il demeure difficile de savoir si ce sont des informations réellement utiles.
Les grandes évasions
Après le problème des voix, arrive le deuxième problème. Impossible de savoir à qui se destine ce jeu. Dans les dialogues, il existe déjà une ambivalence terrible. Par certaines répliques, Tony Tough 2 : Détective Privé semble s’adresser à des gamins de trois ans, pas spécialement précoces intellectuellement. Les adultes détesteront ces passages. A d’autres moments, les dialogues deviennent l’extrême opposé : pas une phrase sans un mot de plus de trois syllabes, des descriptifs qui n’en finissent plus… Petit exemple que j’ai noté. Dans la plupart des jeux d’aventure, lorsque vous demandez le descriptif d’une porte, le héros vous indique "C’est la porte", si les auteurs ont voulu aller à l’essentiel ou "Ca s’ouvre et ça se ferme" quand ils sont devenus verbeux. Ici, on a droit à un "Diaphragme en bois séparant deux espaces qui communiquent entre eu ". Et encore, cela reste plutôt light par rapport au reste du jeu. Les enfants détesteront ces passages évoquant clairement Achille Talon.
Mais c’est aussi dans ces moments là que l’on se demande où veulent en venir les auteurs. A une époque, les jeux d’aventure laissaient entrevoir des dizaines de références. Du temps des grands LucasArts, les références à Star Wars et à Indiana Jones pleuvaient mais de temps à autre, on avait aussi droit à quelques petites bribes de connaissances picturales. Or, dans Tony Tough 2 : Détective Privé, quand on commence à chercher, les références pleuvent, ça n’arrête pas. En visitant tous les écrans, on finit par comprendre la référence absolue des graphistes : Edward Hopper, bien entendu. Une ville morte, des palissades autour de chaque maison, des poteaux téléphoniques dont on se demande vraiment s’ils ont fonctionné un jour. C’est valable aussi bien dans les paysages, les rues que dans les intérieurs. Seymour qui passe son temps dans sa cabane placée dans un arbre n’est autre que le héros de Mark Twain, Huck Finn. Tony serait-il Tom Sawyer. Pas vraiment ; lui, il veut devenir détective, un rêve d’enfant assez proche d’un certain Guybrush Treepwood des Monkey Island. Le croque-mort fait également penser à un personnage d’un ancien LucasArts, dans Grim Fandango. Ca n’arrête pas et c’est précisément ce qui fait le charme de ce jeu. Une superbe forme, donc. Pour le fond, c’est plus délicat. La durée de vie reste moyenne, malgré une quantité d’actions à effectuer assez limitée. En effet, c’est parfois assez dur. Le jeu se divise en chapitres mais dès la sortie de l’hôpital, c’est dans toute la ville que se déroulera l’action. Certains chapitres, minuscules, exigent de trouver un objet à un bout de la ville, le combiner avec un autre de l’autre côté pour utiliser l’ensemble à un troisième endroit. De plus, certaines actions dans l’inventaire ne s’effectuent qu’à certains endroits et parfois, il vaut mieux utiliser l’objet A sur B que B sur A. Forcément, ça complique.