Test également disponible sur : PC - X360 - PS3

Test The Saboteur sur X360

Test The Saboteur
La Note
note The Saboteur 15 20

The Saboteur n’est pas le plus grand jeu de l’année, et certainement pas le plus beau, mais il possède ce qui fait défaut a bien des jeux : une identité. Quoique caricaturaux, ses personnages forts en gueule ne manquent ni de charisme ni de répartie, à commencer par son héros. Loup parmi les loups, Sean Devlin assume totalement son statut de bouffeur de Boches, et obtient au cours d’une aventure globalement maîtrisée les outils indispensables à sa grande opération de nettoyage d’une France stylisée avec goût. Riche et rigolo, assumant totalement ses références tant cinématographiques que ludiques – Crackdown, Assassin’s Creed, GTA et, évidemment, Mercenaries sont passés par là – la production de Pandemic Studios ne fera pas honte à la mémoire d’un studio qui aurait dû bénéficier de quelques mois de répit pour fignoler sa dernière œuvre. Techniquement inachevé, The Saboteur n’en demeure pas moins un bon divertissement pour qui est capable d’y jouer avec le recul nécessaire.


Les plus
  • Vaste terrain de jeu horizontal ET vertical
  • Des milliers de trucs nazis à détruire
  • Des milliers de Nazis à tuer
  • Jolie bande-son
  • Choix graphiques originaux
  • Bonus à débloquer
  • Belle durée de vie
  • Pas mal de véhicules sympas
  • Héros caricaturaux mais attachants
Les moins
  • Prise en main assez moyenne
  • Système économique inintéressant
  • La caméra a parfois du mal à suivre
  • Doublages très inégaux
  • Animations médiocres
  • Pas mal de pop-up et beaucoup de brouillard
  • I.A. à l'ouest
  • Carte peu ergonomique


Le Test

Leur résistance fut peut-être réelle, mais l’ennemi a tout de même triomphé. Les troupes de Pandemic Studios ont donc perdu, non pas une bataille, mais carrément la guerre. Une guerre de croissance dans laquelle le développeur californien s’était jeté corps et âme il y a quelques années, croyant pouvoir rapidement s’asseoir à la table des vainqueurs du marché vidéoludique. Sans doute trop ambitieux, ou trop malhabile, le conquérant subit dans un premier temps les affres de l’occupation, avant d’être purement et simplement assimilé par son nouveau souverain. EA, propriétaire depuis deux ans, conservera la marque, les licences, et une partie des équipes – redéployées dans d’autres studios internes – mais l’aventure initiée en 1999 par deux anciens d’Activision, John Resnick et Andrew Goldman, a officiellement pris fin à l’issue d’un dernier développement multi-supports. Honneur aux vaincus, leur œuvre posthume est une belle surprise.


Des développeurs américains mettent la France en scène ? La logique voudrait que nous n’échappions pas à quelques bons vieux clichés, du béret à la baguette en passant par les sales blagues sur l’hygiène. La France de l’Occupation qui plus est ? La crise diplomatique ne peut être loin ! Comment quelques Californiens, certainement privés de culture depuis toujours et nourris, dès leur plus jeune âge, aux hamburgers et au rodéo, pourraient-ils comprendre une période de l’Histoire française que le peuple raffiné que nous formons peine encore aujourd’hui à expliquer ? Un peu de sérieux, que diable ! Laissons les sujets importants aux intellectuels (européens), les histoires d’extraterrestres zombies qui menacent Washington DC aux Américains, et le reste à qui en voudra… Sans tomber dans ces extrêmes, l’annonce du développement par Pandemic Studios – développeur de produits assez brutaux quoique loin d’être dénués de tout contenu politique –  d’un produit sur nos années noires a tout de même provoqué quelques moues dubitatives au sein de la rédaction. Les mois passant, on a fini par quelque peu oublier ce titre qui ne figurait pas sur notre petite liste de Noël. Mais quel plus grand talent pour un saboteur que celui de se manifester bruyamment lorsque l’on s’y attend le moins ?

Glorious Basterd

Et du talent, Sean Devlin n’en manque pas. Mécano devenu pilote de course pour l’écurie de Vittore Morini, Sean a une superbe capacité à se mettre dans des situations délicates, et l’art tout aussi remarquable de s’en sortir moyennant quelques gnons et de gros coups d’accélérateurs. Habitué du lit de femmes qui ne sont pas les siennes, probablement familier de résidences un peu trop fermées au goût d’un esprit libre comme le sien, le bonhomme est également un roi de la belle, et un ami sur lequel on peut compter. Cet Irlandais fort en gueule va se retrouver à Paris au lendemain de l’Armistice. Un Paris métamorphosé, encombré de bannières nazies, de tours de guet, de zone de contrôle, un Paris abruti par la propagande de l’Occupant, un Paris bien loin des cartes postales. Paris, l’Hexagone, et les petits intérêts de la population, Sean n’en a franchement rien à carrer. Mais le bonhomme a un compte à régler avec un dignitaire nazi qui occupe d’importantes fonctions dans la France occupée. Et pour avoir une chance de l’éparpiller aux quatre coins de la capitale façon puzzle, il va se lancer dans une croisade anti-allemande qui va bien arranger les affaires de la Résistance et des services d’espionnage britanniques. Mêlant action, aventure, course, et bien d’autres choses dans un monde ouvert, The Saboteur fonctionne comme le GTA-like qu’il est. Des PNJ-clés vous proposent des missions, certaines essentielles pour faire progresser l’intrigue, d’autres secondaires, toutes enrichissantes. Si vous avez envie de faire une pause entre deux travaux dirigés, vous pouvez explorer votre environnement et vous y livrer à quelques petits exercices divertissants. Il n’est néanmoins pas question de draguer les Parisiennes ou de faire les boutiques. Toutes les occupations disponibles tendent vers un seul et même objectif : casser des Boches. Plein, plein de Boches !

The Saboteur fonctionne comme le GTA-like qu’il est. Des PNJ-clés vous proposent des missions, certaines essentielles pour faire progresser l’intrigue, d’autres secondaires, toutes enrichissantes. [...] Toutes les occupations disponibles tendent vers un seul et même objectif : casser des Boches. Plein, plein de Boches !"

Sorte de pendant ludique et solitaire du Inglourious Basterds de Tarantino, The Saboteur vous place aux commandes d’un type totalement inconscient, assoiffé de vengeance mais aussi un peu joueur, engagé dans un nazicide furieux et forcément jubilatoire. Le contexte est évidemment particulièrement propice aux affaires, mais Sean aura vite fait de se retrouver avec la moitié de la Wehrmacht et de la SS aux basques s’il n’agit pas avec un minimum de subtilité. Pour s’en sortir, le héros peut compter sur son culot et sa parenté avec Altaïr. Adepte d’escalade urbaine, Sean est capable de grimper à n’importe quel bâtiment pour peu qu’il présente des éléments saillants à portée de main. Dans une ville où pierres de taille, balcons et toits plats ont la vie belle, il n’a que l’embarras du choix, surtout lorsque les câbles téléphoniques se révèlent suffisamment résistants pour l’autoriser à se déplacer d’un pâté de maison à l’autre sans passer par le trottoir. Cette aptitude physique va lui permettre de se rapprocher des nids de sniper érigés sur les immeubles parisiens, ou des généraux nazis abrités dans la cour d’immeubles aux issues solidement gardées. La progression verticale est assez simple. Dès que vous avez une prise, vous utilisez le stick de déplacement (gauche) pour mettre en surbrillance les points d’appui possibles depuis votre position et les rejoignez en appuyant sur A. Le déplacement est un peu chaotique mais on finit par anticiper les nombreuses ratées liées à une gestion peu optimale des collisions et à une caméra parfois chancelante. Jouer au Yamakasi est toutefois assez mal vu dans les années 40. Si les Parisiens ne s’émeuvent que modérément de vos performances, les soldats allemands se montrent suspicieux lorsque que vous tentez d’escalader une grille ou une façade devant eux. Dés que vous avez éveillé leur attention, vous avez quelques secondes pour faire profil bas. Si vous continuez à faire l’imbécile, leur jauge de méfiance continue de se remplir. Une fois pleine, l’Occupant sonne l’alerte à l’aide d’un sifflet… à moins que vous ne le lui coupiez préalablement.

Le silence de la mort

Tout le challenge de The Saboteur consiste justement à massacrer tout le monde et à faire sauter le plus de bâtiments possibles à la dynamite en limitant les alarmes. Pour y parvenir, Sean peut agir de manière discrète, en se faufilant derrière un garde pour lui briser la nuque et lui piquer son uniforme. Ainsi grimé, il s’approchera des installations portant la croix de fer et/ou la croix gammée avec autrement plus de facilité. Le subterfuge a toutefois ses limites, et si vous vous collez devant un groupe de SS en portant du vert de gris, vos interlocuteurs verront immédiatement que vous n’êtes pas des leurs. Dès que l’alarme est déclenchée, différents choix s’offrent à vous : jouer les barbouzes, sortir vos flingues et laisser la situation dégénérer au maximum, jusqu’à une alerte de niveau 5 qui vous oppose à des chars et des chasseurs… ou tenter de vous enfuir. La situation redeviendra normale si vous sortez du périmètre d’alerte en fonçant à toute berzingue à bord d’une voiture piquée pour l’occasion, ou si vous parvenez à rallier une planque (un abri sur les toits, une pissotière, …) à la condition qu’aucun soldat ne vous voit vous en approcher. Dans les modes de difficulté standards, Sean est relativement résistant aux balles et l’IA n’est pas trop regardante, ce qui permet de survivre même lorsque les tanks allemands sont de sortie. De plus, plus vous progresserez, plus vous pourrez  travailler tranquillement. Un système vous permet de débloquer trois niveaux de récompenses dans dix domaines différents : bagarre, matériel, sniper, explosifs, démolitions, sabotage, grabuge, course, mécaniques et évasion. Effectuer dix double-meurtres avec un fusil à lunettes, faire sauter des ponts, les tâches à accomplir sont ludiques, et les gains – en vrac, ne plus éveiller l’attention lorsque vous posez des explosifs travesti en allemand, compléter l’offre d’armes du marché noir – ne déçoivent pas. Complet, très arcade, notamment dans le maniement des véhicules, finalement assez jouable malgré des soucis de caméra, The Saboteur se distingue surtout par sa direction artistique assez originale et son beau terrain de jeu.

Film noir

En dépit d’une conception assez personnelle de la géographie française, une petite révision du plan de Paris et d’inévitables anachronismes, l’équipe californienne a su se jouer de la plupart des clichés et nous délivre ici une vision virtuelle convaincante du nord de l’Hexagone. Tout est loin d’être parfait, particulièrement dès que l’on quitte l’enceinte parisienne, mais les séquences en province ne constituent que de bucoliques intermèdes, le jeu privilégiant clairement la capitale. Les capacités acrobatiques de Sean permettent d’ailleurs de découvrir ce Paris joliment modélisé d’un tout autre point de vue. Vous aurez ainsi la possibilité assez unique de grimper au sommet de la plupart des grands édifices, depuis la Tour Eiffel jusqu’au Panthéon. Dommage que le moteur graphique soit un peu à la ramasse dès que la profondeur de champ augmente, et que l’horizon soit généralement plongé dans un brouillard assez dégueulasse, quand il n’est pas carrément barré par des montagnes imaginaires. Au sol, le parti pris graphique du jeu, qui fait ressentir visuellement le degré d’oppression des quartiers, n’en demeure pas moins particulièrement intéressant et donne au produit une patine de film noir assez saisissante. Les zones dans lesquelles Sean n’a pas commencé à opérer son grand ménage de printemps s’affichent ainsi dans un élégant noir et blanc, seulement percé de quelques touches de couleur : le rouge des drapeaux nazis, le bleu d’un foulard. En mettant à bas les symboles de l’oppression, l’Irlandais ramènera peu à peu l’espoir, et donc la couleur dans chaque secteur. Bercé par une belle bande-son, qui fait la part belle au music-hall et au jazz, vous vous attacherez très vite à cet univers assez singulier, qui aurait sans doute encore gagné à mettre en scène des personnages plus complexes. Sans sombrer dans la caricature ridicule, les compères du héros manquent de subtilité, et l’on distribuerait bien volontiers quelques baffes à certains d’entre eux. Les défauts de production et de mixage de la VF (il faut parfois baisser le volume, parfois le monter, certains dialogues ne sont pas raccords gâchent également un peu le plaisir. Il se dégage toutefois quelque chose de ce titre plaisant à jouer malgré ses imperfections, bien ficelé, et qui met en scène avec pas mal d’humour une douce chasse à l’envahisseur. Un quelque chose qui ne sent ni la baguette ni l’eau de Cologne, mais fleure bon la vengeance sans conséquence, la catharsis ludique à l’arme lourde. Un quelque chose qui vaut bien un coup de cœur.





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Florian Viel

le jeudi 3 décembre 2009, 9:03




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