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Il est encore trop tôt pour savoir si Splatoon traversera les âges comme ont su le faire ses illustres aînés, mais le fun qu'il dégage colle déjà aux préceptes prônés depuis la nuit des temps par Nintendo. D'une simplicité absolue sur le papier, le jeu cache en réalité tout un tas de subtilités et d'aspérités qui permettent aux seiches d'affiner leurs stratégies comme dans n'importe quel autre TPS. Les fonctionnalités du GamePad deviennent rapidement indispensables (le gyroscope peut être désactivé pour ceux qui le souhaitent), et on se surprend à enchaîner les parties alors que le contenu actuel de Splatoon est plutôt chiche. Cinq cartes qui tournent toutes les quatre heures, deux modes multijoueur, quatre jeux d'arcade rétros et des défis à débloquer via les amiibo, ça fait désordre pour une nouvelle licence qui veut convaincre. Les développeurs ont beau avoir prévenu que des mises à jour viendraient rectifier le tir, on aurait préféré que tout soit là dès le départ. En attendant les inévitables DLC donc, la campagne solo solide et le mode "Dojo" permettant de jouer à deux sans écran splitté, sont là pour varier les plaisirs qui sont quand même beaucoup plus intenses à huit.
Retrouvez plus bas la suite de notre test de Splatoon
- Facile de prise en main...
- ...et fin à la fois
- L'efficacité du GamePad
- Du fun à revendre
- Les possibilités de customisation
- Le prix attractif
- Addictif
- La campagne solo...
- ...par moments répétitive
- Le contenu chiche
- Pas de filtre de matchmaking
- Les serveurs pas tout le temps pleins
- Le mode "Dojo" anecdotique
- Pas de chat vocal
Accusé de recycler ses licences jusqu'à les carboniser, Nintendo s'est lancé un nouveau défi pour booster les ventes de la Wii U : en créer une nouvelle. Splatoon, annoncé à l'E3 2014, a pour ambition de se faire une place au chaud parmi les séries prestigieuses qui trônent à Kyoto, et de devenir une marque qui compte dans le TPS. Une tâche loin d'être facile tant il semble difficile de bousculer l'ordre établi dans l'industrie vidéoludique, même pour les jeunes disciples de Shigeru Miyamoto. Splatoon résonne-t-il comme un coup de maître ou restera-t-il à tout jamais un one shot rangé au fond d'un tiroir ? Réponse dans notre test.
Le moins que l'on puisse dire, c'est que Nintendo croit dur comme fer au potentiel de Splatoon : la campagne marketing du jeu est calquée sur celle de Mario Kart 8. Ce dernier s'est écoulé à plus de 5 millions d'exemplaires et à moins d'un improbable miracle, les seiches ne réussiront pas à faire mieux. Mais bon, il faut également tenir compte du fait que les objectifs ne sont pas les mêmes avec Splatoon, et que la priorité de Nintendo est de construire une communauté pour la développer ensuite. Le meilleur moyen d'y parvenir, c'est bien évidemment d'inculquer les bases du jeu qui ne prennent que quelques minutes à être assimilées. Equipé d'un lanceur, le joueur - qui incarne un Inkling d'apparence humaine - doit propulser de l'encre sur le sol et les murs avant d'y plonger en se transformant en seiche. Alors invisible, il peut se déplacer partout où il y a de l'encre (à condition qu'elle soit de sa couleur) non seulement pour atteindre des zones en hauteur, mais aussi pour franchir des obstacles tels que des grillages par exemple. Et puis, se métamorphoser en céphalopode est précieux pour remplir son réservoir d'encre, une contrainte susceptible de bousiller une partie si on n'y prête pas attention. Bien que Splatoon s'apparente à un TPS pour culottes courtes, les armes secondaires sont de mise et permettent de varier les approches face aux ennemis de la campagne solo. Car si l'accent a souvent été mis sur le mode multijoueur, les âmes solitaires peuvent aussi trouver leur compte en allant donner un coup de main à l'amiral Macalamar. Planqué dans l'Octavallée, il est visiblement le seul à s'inquiéter de la menace que représentent les Octariens pour Chromapolis (également le hub du jeu), qui risque de ne plus être alimenté en énergie si on ne délivre pas le Grand Poisson-Charge.
Car si l'accent a souvent été mis sur le mode multijoueur, les âmes solitaires peuvent aussi trouver leur compte en allant donner un coup de main à l'amiral Macalamar.
La principale force du mode "Histoire" de Splatoon - qui nécessite quatre bonnes heures pour être bouclé -, c'est de faire en sorte que chaque niveau soit l'occasion de découvrir une nouvelle mécanique de gameplay. Le taux d'ingéniosité n'équivaut pas celui d'un Mario, n'exagérons pas, mais il faut bien admettre que certaines idées nous ont agréablement surpris. On pense notamment aux éponges qui se gorgent d'encre ou rétrécissent, ou encore aux Mécabuvards venant effacer les tâches projetées. Il y a aussi les passages invisibles que l'on doit dévoiler à coups de lanceur, sans oublier tous les petits subterfuges pour détourner l'attention des ennemis. Bref, on sent clairement l'esprit Nintendo au fur et à mesure que l'on progresse dans les levels. Après, il ne faut pas s'attendre à de l'exploration pure et dure, et la partie se résume la plupart du temps à aller d'un point A à un point B. C'est vrai qu'en cours de route, on peut ramasser des oeufs de poisson pour améliorer l'efficacité de son équipement, même récupérer un bouclier ou bien des documents qui serviront à obtenir des nouvelles armes. Mais dans l'ensemble, on ne s'éloigne jamais vraiment de la voie principale, ce qui a tendance à rendre les missions répétitives à la longue. Heureusement que les boss sont là pour briser cette monotonie, et notre préférence va immédiatement à DJ Octave. En gros, cet ultime combat est un condensé de toutes les finesses pensées par les développeurs pour le mode solo. Une sorte de validation des acquis avant de s'attaquer au multijoueur qui constitue le coeur de Splatoon.
MONSTERS INK
Chose rare chez Nintendo, le online est indispensable pour que le jeu donne sa pleine mesure. Il y a moyen d'organiser des sessions à deux en local via le mode "Dojo", mais elles deviennent rapidement anecdotiques. Sincèrement, qui peut croire encore aujourd'hui qu'il suffit de proposer une bataille de ballons pour se mettre tout le monde dans la poche ? A la limite, le seul point intéressant réside dans les power-ups façon Mario Kart - le Super Saut pour intervertir la position des deux joueurs, la Fiole Toxique qui ralentit les mouvements de l'adversaire pendant quelques instants, ou encore le Détecteur grâce auquel on peut localiser sa proie à travers les murs. Ne pas devoir se coltiner un écran splitté (un joueur se focalise sur le GamePad tandis que l'autre suit l'action sur le téléviseur) offre un confort visuel non négligable, certes, mais pas de quoi passer des heures non plus. Le gros souci que nous avons eu avec Splatoon, c'est que les serveurs étaient quasiment vides au moment d'attaquer le test. La situation s'est améliorée depuis, mais il arrive encore que de longues minutes soient nécessaires pour réunir deux équipes de quatre joueurs, faute de quoi la partie ne se lance pas. Alors d'aucuns argueront qu'il est possible de patienter sagement avec l'un des quatre jeux d'arcade rétros qui s'affiche sur l'écran du GamePad, mais 1) il faut d'abord les débloquer avec les amiibo de la gamme Splatoon 2) on en fait rapidement le tour. Cerise sur le cake : lorsque la recherche d'une session est lancée, il est impossible de l'annuler pour en débuter une autre. Juste dingue. C'est d'autant plus dommage qu'une fois ce parcours du combattant derrière nous, on prend énormément de plaisir à balancer de l'encre partout. Enfin, avec un minimum de sens tactique quand même.
Chose rare chez Nintendo, le online est indispensable pour que le jeu donne sa pleine mesure.
C'est le cas dans le mode "Guerre de Territoire" en match classique, où le but est de recouvrir la majeure partie du niveau avec l'encre de son équipe. Etant donné que le chat vocal n'est même pas proposé en option pour ne pas heurter les oreilles sensibles, un rapide coup d'oeil s'impose afin de saisir le rôle que chacun doit tenir en théorie. Généralement, ceux pourvus d'un rouleau auront pour principal objectif de badigeonner la zone, tandis que les personnages en possession d'un fusil de précision devront plutôt aligner les adversaires à distance. Enfin, les partenaires équipés d'un lanceur plus conventionnel seront au front, prêts à se manger des balles pour assurer la victoire de leur clan. Bien sûr, rien n'est figé et il n'est pas interdit de distribuer quelques coups de rouleau en cas d'urgence. On ne va pas vous cacher que c'est un peu le bordel au début, mais on se rend compte assez rapidement qu'il est préférable de diviser l'équipe en deux binômes : un joueur qui peint et un autre qui le couvre. Si on a la chance de ne pas se retrouver dans une équipe de bras cassés, on peut même se permettre de placer un sniper en hauteur, pendant que les trois autres alliés s'occupent de refaire la couleur des alentours. Pour espérer enchaîner quelques kills, il est impératif de maîtriser la nage à la perfection ; autrement dit, plonger dans l'encre au bon moment afin de devenir invisible et prendre ainsi les adversaires en traître. Un mouvement simple mais qui apporte pas mal de profondeur au gameplay, dans le sens où les possibilités de placer une balle entre les yeux deviennent multiples, tout ça grâce à un level design bien fichu. Chaque tâche d'encre représente une planque/menace potentielle, et on peut aussi bien surgir du sol que des murs. Un vrai régal, il faut bien l'avouer.
UN JEU ATTACHANT ?
Là encore, les armes secondaires ont leur importance pour briser les lignes adverses. Nous n'allons pas toutes les citer ici, mais sachez que le Mur d'Encre peut faire très mal contrairement à ce que l'on pourrait croire. Idem en ce qui concerne la Bombe Gluante qui fait systématiquement mouche quand on se fait pourchasser par un rageux. Il y a aussi les armes spéciales qui s'activent d'un clic simultané sur les deux sticks, à condition que la jauge dédiée soit totalement remplie. Les tornades se montrent particulièrement efficaces quand les proies sont regroupées, tout comme le Haut-Perceur dont les ondes traversent les murs. Enfin, mention spéciale au Kraken avec lequel il est possible d'exécuter des vrilles meurtrières sans se poser de questions. Une fois à l'abri, on peut jeter un oeil sur l'écran du GamePad pour observer l'évolution de la partie. Si une zone est recouverte de l'encre ennemie et qu'un allié se trouve dans les environs, une pression sur sa position permet de le rejoindre immédiatement. Au terme du décompte, un gros matou vient constater les dégâts et désigne l'équipe vainqueur. Prendre part à ce genre de joute est vital pour monter en niveau, se remplir les poches et gagner le droit de discuter avec G. Latineux, Omar, Cartouche et Anne. En effet, ces derniers, qui ne se prennent pas pour de la merde, ne s'adressent qu'aux seiches ayant la classe comme ils disent et refusent donc de vendre leurs articles (armes, chaussures, hauts, casquettes/bonnets) aux néophytes. Une attitude hautaine qui a le don d'agacer, puisqu'il arrive que l'on ait les moyens de s'offrir le flingue dernier cri sans pouvoir l'acheter. Sale, en effet.
Malgré cette initiative appréciable, Splatoon a encore besoin de temps avant d'arrivée à maturité, aussi bien sur le plan visuel qu'au niveau du contenu. Mais la base est là et c'est bien là l'essentiel pour une nouvelle marque qui ne demande qu'à grandir.
En tout cas, on notera que chaque élément composant l'équipement donne accès à des bonus - quatre maximum - pour se faciliter la tâche pendant les affrontements. Consommation d'encre moindre, remplissage du réservoir plus rapide, puissance des armes accrue, augmentation de la durée d'utilisation de l'arme spéciale, voilà un exemple des skills que l'on peut débloquer au fil des sessions. En dehors des matchs classiques, il existe les matchs pros qui n'ouvrent leurs portes qu'à partir du niveau 10. Pour le moment, ils ne contiennent qu'un mode, "Défense de Zone", qui consiste à défendre plusieurs points stratégiques de la map. Rien de bien révolutionnaire mais c'est toujours ça de pris. En termes de réalisation, Splatoon nous a laissés sur notre faim pour être honnête. Ca aliase pas mal et les textures ne sont pas des plus folles. On note même de légères chutes de framerate par moments, phénomène difficilement compréhensible quand on voit les niveaux qui sont loin d'être blindés de détails. Cela dit, voir l'encre gicler des lanceurs demeure un plaisir pour les yeux et on peut même observer des coulures en fonction de l'arme choisie. Du côté du character design, on sent bien que le jeu n'a pas été développé par les dinosaures de Kyoto, et que le look des personnages est autrement plus funky que ce que l'on a l'habitude de voir chez Nintendo. Malgré cette initiative appréciable, Splatoon a encore besoin de temps avant d'arrivée à maturité, aussi bien sur le plan visuel qu'au niveau du contenu. Mais la base est là et c'est bien là l'essentiel pour une nouvelle marque qui ne demande qu'à grandir.