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On aurait adoré aimer Naughty Bear. Parce que son postulat de base était osé, parce que son héros avait un peu de gueule et parce que trucider du Bisounours, ça défoule un max. Hélas, force est de constater qu'en ne sachant pas insuffler un minimum d'audace et de fond à son titre, Art Mind and Movement passe à côté de son sujet et nous offre un titre pas très fun, un peu vain, et surtout plombé par de nombreuses approximations techniques et un gameplay ultra redondant. Un titre surestimé et qui a définitivement vendu la peau de son ours avant de l'avoir tué.
- Une bonne idée de départ
- Les nombreuses Fatalités
- Les passages bourrins
- Quelques bonnes idées de pièges
- Pas difficile, mais presque
- Gameplay archi limité
- Répétitif à souhait
- Voix off insupportable
- Aucun scénario
- Les niveaux d'infiltration sont ratés
- Caméra capricieuse
- Réalisation limitée
- Violence trop gratuite
Naughty Bear, c'est véritablement le titre qui fait parler de lui sur la toile depuis plusieurs mois. Jugez plutôt : dans la peau d'un Teddy Bear fou furieux, vous allez devoir trucider tous ses petits camarades en peluche qui vivent dans un village enchanté. Un jeu hautement concept qui sent bon la vengeance pour les petits gars de chez Art Mind and Movement, habitués depuis plusieurs années à développer des titres comme Kim Possible, Scooby-Doo, Chicken Little, MySims Racing, High School Musical, Kung-Fu Panda, Lizzie McGuiren, etc. Bref, des titres qui ne brillaient pas par leur côté bad-ass . Et lorsqu'un développeur laisse exploser sa frustration, ça peut faire du bruit, ou pas...
Naughty Bear, c'est avant tout une promesse. La promesse d'exaucer un vieux rêve de gamer, un brin lassé ces temps-ci par la mode kawaii qui vient gangrener l'art qui le fait vibrer. Car oui, le gamer est las. Las de voir pulluler des navets vidéoludiques pour adolescentes en manque d'Hello Kitty, se déroulant dans des univers mignons et colorés avec pour héros des petits êtres malicieux qui s'offrent des cadeaux à longueur de parties. Stop ! Trop de sucreries, ça rend diabétique. Alors, pour éradiquer cette vague hyperglycémique, les développeurs d'Art Mind and Movement ont décidé de lâcher le loup dans la bergerie, et par la même occasion de réaliser ce vieux fantasme de geek qui consiste à placer un élément malveillant dans un monde rose-bonbon. Car qui n'a jamais rêvé d'un Alien vs. Teletubbies, d'un Freedy sur l'Ile aux enfants, d'un Godzilla contre le Grand Schtroumpf, ou d'un Martine au Mordor ? Naughty Bear, c'est un peu tout ça. Dans le petit monde des ours en peluche, Naughty Bear est un vilain petit canard. Il a le dos déchiré, une oreille rognée, un bras recousu, et contrairement à ses voisins aux couleurs arc-en-ciel, il affiche un pelage marron qui dénote franchement avec le décor ravagé à la sauce Valérie Damidot. Devenu au fil du temps le mal-aimé du village, persona non grata aux diverses fêtes organisées par ses petits camarades, Naughty Bear, tel un ours mal léché, va partir en guerre contre ses voisins les Bisounours. Grosfarceur et Groscopain peuvent trembler...
Ours en carton
Fort de ce postulat alléchant, Naughty Bear se pose comme un jeu d'action à la troisième personne. Le but du jeu ? Enchaîner les missions et engendrer le plus gros score possible, ce qui débloquera par la suite de nouvelles missions (il y en a une quarantaine en tout). La chasse au high-score est donc ouverte et pour atteindre la première place du podium, il faudra faire preuve d'imagination et ne pas se cantonner au simple génocide de masse à la machette, façon beat'em all. Car Naughty Bear n'est pas qu'un simple nounours en colère armé d'une machette, c'est aussi un sacré vicelard ! Car en plus de toute sa panoplie d'armes (batte de base-ball, hache, pistolet, uzis...) et de pièges (mines, pièges à loups...), il a à disposition une gamme complète de petits tours prêts à rendre fous ses congénères. Comme vous l'avez compris, ce sont ces tours qui lui feront gagner le plus de points. Prenons un exemple concret : Naughty Bear veut tuer un ours. Première option : il fonce sur lui avec une hache et lui tape dessus jusqu'à ce que mort s'en suive. C'est rapide, efficace, mais ça rapporte que dalle coté points. Deuxième option. Naughty Bear se planque dans les fourrés. Il attend que sa proie ait le dos tourné et va saboter une voiture. Puis, il détruit le téléphone qui sert à appeler la Police. Discrètement, il rentre dans une maison qui pourrait éventuellement servir de planque à sa cible. Il verrouille toutes les ports de l'intérieur et sort par une fenêtre, devant laquelle il prend soin de poser un piège à loups. Voilà, Naughty Bear a tendu sa toile et il n'a plus qu'à attendre. Sa proie se rend compte qu'un téléphone a été détruit et commence à le réparer. Naughty Bear arrive derrière lui et le terrorise et lui hurlant dessus. Le nounours, apeuré, se rue vers la porte de la maison. Horreur, elle est fermée ! Vite, il se jette sur la fenêtre et se prend la patte dans le piège. Naughty Bear revient alors à l'assaut, poussant peu à peu sa victime vers la folie. C'est alors que cette dernière décide de prendre la voiture pour s'enfuir. Manque de bol, le moteur ne tourne pas. Naughty Bear lui beugle une dernière fois dessus, ce qui a pour effet de rendre l'ours complètement fou. Il va alors errer dans les rues du village, ce qui aura pour conséquence d'inquiéter les autres habitants. En guise de finish him, Naughty Bear pourra le pousser au suicide, ou l'achever avec une petite Fatality qui variera en fonction de l'arme qu'il a entre les mains. Voilà donc le processus pour être sûr de marquer des points. Bien entendu, l'affaire ne sera pas aisée puisque vos adversaires ne manqueront pas de se défendre, de se barricader, de tenter de s'enfuir, et ce aux quatre coins du village où se déroule l'action, vous obligeant à être au taquet pendant toute la mission pour en venir à bout. De plus, quelques ennemis plus coriaces que les autres feront peu à peu leur apparition, histoire de corser l'affaire. Des nounours policiers puis des nounours militaires – voire carrément des nounours zombies ou des robots nounours – seront donc présents dans l'aventure et se montreront vite assez envahissants si vous oubliez de vous planquer de temps à autre. Pour faire le bilan, nous sommes là face à un nombre imposant de bonnes idées. Et pour en revenir à ce que nous disions en introduction, Naughty Bear est un titre bourré de promesses. Mais hélas pour les développeurs du titre, et pour citer un célèbre dicton : "mieux vaut donner sans promettre que promettre sans tenir". En effet, si sur le papier, ce titre avait tout d'un bon défouloir jouissif et audacieux, le résultat final nous a passablement laissé sur notre faim.
Pire, le principe du jeu étant basé sur le high-score, il faudra parfois les recommencer plusieurs fois de suite, histoire de décrocher une étoile d'or débloquant le niveau suivant..."
La première chose qui frappe dès le lancement de Naughty Bear, ce sont les nombreuses carences techniques dont souffre le titre d'Art Mind and Movement. Les décors sont pauvres, les niveaux ridiculement petits, les animations simplistes, le sound design peu excitant (quelle insupportable voix off !) et pire que tout, la gestion de la caméra frôle la catastrophe. Une horreur dès que l'on souhaite faire preuve d'un tant soit peu de finesse. De plus, on regrettera amèrement que le gameplay soit aussi minimaliste, rendant la panoplie de mouvements de Naughty sacrément limitée. On aurait été sur Wii, on aura pu se consoler avec quelques QTE tirant profit des capteurs de la Wiimote. De ce fait, incarner l'ours brun est loin d'être fun, ce qui est un comble pour un titre qui se revendique tout sauf prise de tête. Le paroxysme de ce manque de précisions se fait rudement sentir lors des niveaux demandant précision et souplesse. En effet, les différents stages du jeu se répartissent en plusieurs catégories, imposant une contrainte de temps et/ou d'objectifs. Par exemple, certains niveaux devront être traversés sans se prendre un seul coup. Parfois, Naughty Bear devra éliminer ses adversaires sans leur infliger de dommages physiques et dans d'autres moment se la jouer discret façon Sam Fisher. Encore une bonne idée dans l'absolu, sauf qu'une fois la manette en mains, on se retrouve sévèrement bridés par ces contraintes qui créent souvent plus de frustration qu'autre chose. Pas amusantes pour deux sous, ces phases s'avèrent assez pénibles à jouer compte-tenu des approximations techniques citées plus haut. Pire, le principe du jeu étant basé sur le high-score, il faudra parfois les recommencer plusieurs fois de suite, histoire de décrocher une étoile d'or débloquant le niveau suivant... Un véritable supplice, d'autant qu'une fois passées les deux ou trois premières heures de jeu, le joueur aura aussitôt fait de trouver les quelques mécaniques de gameplay qui fonctionnent à tous les coups, et traversera donc les niveaux en répétant les mêmes gestes ad nauseam. Incapable de se renouveler, très répétitif, Naughty Bear finit donc par s'enfermer dans ses automatismes. Une chose doublement préjudiciable, puisqu'en plus de plomber l'attention du joueur, elle remet complètement en cause d'essence du titre.
Let it be
Sans vouloir jouer les esprits rétro, nous devons bien admettre que Naughty Bear nous est apparu au final comme un titre particulièrement vain, une belle coquille vide comme on dit. Bien sûr, nombre de titres se voulant bourrins et défouloirs le sont souvent. Mais c'est un défaut que l'on pardonne plus facilement lorsque les sensations sont au rendez-vous, et lorsque la violence et la transgression affichées servent une histoire et ne se posent pas en seules et uniques notes d'intentions d'un titre. Ici, faute de véritables enjeux scénaristiques et de recul sur son concept, le jeu d'Art Mind and Movement ne nous aura pas convaincu, la faute à une violence purement et simplement gratuite. Certes, exploser du Bisounours à la hache est amusant quelques minutes mais passé la découverte, l'intérêt s'en retrouve assez vite bridé. Surtout qu'à part une petite moquerie en introduction, jamais les oursons – qui nous serviront de punching-ball – ne nous sont montrés sous un angle antipathique. Ainsi, on regrettera vite d'avoir à endosser le rôle du méchant de l'histoire, celui qui s'acharne contre des paisibles peluches qui n'ont rien demandé à personne. Alors, sous ses faux-airs de titre "high-concept", Naughty Bear pourrait s'apparenter à ces films qui partent d'un pitch en or, mais qui s'enlisent dans la médiocrité en ne sachant pas comment le justifier, et surtout comment en tirer profit ; ce qui reste vraiment préjudiciable...