Test Ghostrunner : l'autre jeu cyberpunk polonais de 2020, et qui n'est pas en retard
17 20
- L'ambiance Cyberpunk
- Un gameplay hyper nerveux
- Une fluidité à toute épreuve
- Des "retry" instantanés
- La musique signée Daniel Deluxe
- Scénario relativement convenu
- Quelques passages sans musique
- VOST pas facile à suivre dans l'action
Si vous voulez troller gentiment vos amis, annoncez-leur que vous êtes déjà en train de jouer à un super jeu cyberpunk développé par des Polonais. Evidemment, ils penseront à coup sûr à Cyberpunk 2077. En réalité, Ghostrunner est un projet moins ambitieux que celui de CD Projekt, mais nous allons voir que le studio indépendant One More Level n'a vraiment pas démérité. Ces cracoviens nous proposent une aventure extrêmement dynamique, qui multiplie les influences mais possède une personnalité bien à elle, tranchante comme une lame de katana.
Cyberpunk oblige, l'univers de Ghostrunner est à la fois technologique et dystopique. L'intrigue tourne autour de la tour Dharma, un gratte-ciel aux proportions absolument dantesques puisqu'il abrite un million de personnes. Un nombre qui correspond également à l'intégralité de l'espèce humaine restante, car l'air extérieur est devenu totalement irrespirable. A la tête de la tour Dharma, deux personnalité s'affrontent. Mara, dite la maîtresse des clés et portée par des tentacules mécaniques, est en quelque sorte une version féminine du Docteur Octopus de Spider-Man. L'Architecte est quant à lui une intelligence artificielle qui ne peut agir que depuis le Cybervoid, le cyberespace local. Quant à vous, vous incarnez un Ghostrunner, soldat cybernétique chargé par l'Architecte d'éliminer Mara. L'aventure commence tout en bas du gratte-ciel, après une chute expliquée par la superbe cinématique d'introduction, et il faudra vous frayer un chemin jusqu'aux sections supérieures réservées à l'élite.
Le scénario est relativement simple, voire convenu pour le genre, mais il a le mérite d'être clair et efficace. On pourrait en dire autant des graphismes qui, comme il se doit, font la part belle aux ambiances nocturnes, urbaines, colorées, voire volontairement "pixelisées". En effet, le monde réel multiplie les zones industrielles et les néons vifs, tandis que le cyberespace nous propose des décors abstraits, des transparences troubles et des artefacts visuels. Dans cet espace virtuel, on notera la présence régulière de tétriminos, clin d’œil à un jeu vidéo fondateur et culte. D'ailleurs, l'outil permettant de configurer les compétences du héros utilise lui aussi des blocs de Tetris, que l'on doit placer au mieux sur une grille limitée. Une idée d'autant plus sympathique qu'on peut réagencer les pièces à tout moment, et ainsi s'adapter à la situation en cours. Tetris n'est pas là la seule référence vidéoludique que l'on peut s'amuser à distinguer dans Ghostrunner, qui multiplie les emprunts de gameplay ou de direction artistique. Il y a du Hotline Miami, du Mirror's Edge, du Titanfall, du BioShock Infinite, du Portal, du Tron ou encore du Superhot dans ce jeu cyberpunk ! Mais grâce à une digestion intelligente de toutes ces références, Ghostrunner s'avère finalement assez singulier.
BLADE RUNNER
Le cœur du gameplay réside dans les capacités de cyberninja du héros, qui lui permettent de se déplacer de manière extrêmement fluide et nerveuse, à travers une vue subjective immersive à souhait. Il dispose par exemple d'un grappin pour s'accrocher à certains points prédéfinis et peut même emprunter des rails à la BioShock Infinite dans certains niveaux. L'un de ses plus grands atouts consiste à pouvoir courir sur les murs, et sauter ainsi de surface en surface. Histoire de dynamiser encore plus l'expérience, on a droit à un dash à double emploi. Au sol, il permet de se propulser vers l'avant de manière habituelle. Mais en l'air, il déclenche un ralentissement du temps, qui permet de se repositionner latéralement (par exemple pour éviter une balle) avant de foncer sur la zone ciblée. Ajoutez à cela la possibilité de pirater certains éléments de plateformes afin de les repositionner, ainsi que quelques bonus temporaires à ramasser dans les décors qui permettent de lancer temporairement des shurikens ou encore de profiter d'un super-saut. Pour couronner le tout, le jeu ne déroge jamais à la règle du "one shot", qui concerne aussi bien le héros que les ennemis. Le moindre coup reçu ou donné est fatal. Si l'arme du prédilection du Ghostrunner est le katana, certains ennemis n'hésitent pas à utiliser des armes à feu. Le jeu arrive d'ailleurs à renouveler suffisamment le type d'adversaires pour qu'on ne ressente jamais aucune répétitivité. Il appartient au joueur de s'adapter en permanence à la situation en cours, que ce soit en ce qui concerne l'agencement du niveau ou bien le nombre, le positionnement et la nature des opposants. "Die & retry" dans l'âme, Ghostrunner a le bon goût de proposer des points de contrôle extrêmement fréquents et qui se chargent réellement instantanément. Du coup, on ne ressent jamais de frustration lorsqu'on doit recommencer une séquence. Ce qui tombe bien, car il faut parfois mourir cent fois (littéralement !) avant de pouvoir maîtriser parfaitement un niveau et réussir à interpréter une chorégraphie implacable. Le secret est de rester toujours en mouvement et d'utiliser au mieux la palette de mouvements du héros et ses quelques pouvoirs spéciaux.
BANDE ORIGINALE DELUXE
Ce gameplay hyper fluide et dynamique, qui devrait d'ailleurs permettre aux speedrunners de faire des merveilles, concerne les passages dans le monde réel. Mais les quelques séquences, plus rares, dans le cyberespace proposent un tout autre rythme. Dans le monde virtuel, on a droit à des phases de plateformes plus classiques ainsi qu'à des petites énigmes. Cela permet de faire une pause dans l'action façon parkour et, accessoirement, de débloquer plus de compétences. Dans les deux cas, on a droit à une bande originale absolument parfaite. Les morceaux sont signés Daniel Deluxe, et leur couleur électro et synthwave colle parfaitement au propos, au rythme, à l'univers et aux graphismes du jeu. On se sent réellement porté par les compositions, qui aident à garder le "flow" et le "momentum" nécessaires pour venir à bout de certains niveaux. Paradoxalement, le jeu souffre de quelques passages à vide, où la musique est étrangement absente. Cela ne dure jamais longtemps, quelques minutes tout au plus, mais c'est aussi étonnant que regrettable. On pourra également reprocher au jeu de ne pas proposer de doublage français. Dans le feu de l'action, suspendu au dessus du vide après avoir couru sur un mur alors qu'on cherche du regard un point d'accroche pour le grappin, il est parfois bien difficile de suivre les sous-titres des dialogues. Voilà à peu près tout ce qu'on peut reprocher au jeu, qui réussit par ailleurs tout ce qu'il entreprend. Le chemin est intelligemment balisé, les quatre boss que l'on affronte sont très différents les uns des autres, le tranchage d'ennemis est sanglant à souhait, nous n'avons été confrontés à aucun bug ni ralentissement, et la durée de vie d'une dizaine d'heures peut être facilement prolongée si l'on part à la recherche des divers éléments à collectionner. Il est même possible de profiter d'un new game plus qui ne dit pas son nom, puisque l'on conserve tous les pouvoirs acquis dans le cyberespace si l'on retente un niveau après avoir terminé l'aventure.