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Avec un auteur comme Warren Spector, on était en droit de s’attendre à de l’étonnement et de l’innovation avec Epic Mickey. Si l’ambiance est enchanteresse et les références s’empilent à la vitesse grand V, il faut reconnaître que la prise en main manque de finition et que le rythme général est assez décousu. Et que dire de l’implication du joueur qui n’est pas aussi mise en avant qu’on aurait pu l’espérer ? Au final, Epic Mickey reste un bon jeu d’action/plate-forme et il divertira sûrement les joueurs en quête d’une nouvelle aventure de la souris, mais d’une manière peut-être pas aussi épique qu’on aurait pu le croire.
- Rempli de référence
- Charme général du jeu
- Dualité peinture/diluant
- Les choix à faire…
- …qui ne changent pas grand-chose dans le fond
- Petite implication du joueur
- Manque de peaufinage des contrôles
- Déroulement du jeu haché
- Cinématiques façon storyboard loupées
Depuis l’annonce d’Epic Mickey l’an dernier, notre curiosité n’a jamais cessé d’être titillée. Outre l’espoir de voir la souris de Disney revenir à son plus haut niveau, c’est-à-dire celui de l’époque des 16-bit, c’est surtout la présence de Warren Spector (Deus Ex) qui a retenu toute notre attention. Pour savoir si le studio Junction Point a réussi à relever le défi, en nous proposant une aventure qui donne une importance aux choix du joueur, merci de nous suivre et de passer de l’autre côté du miroir. Direction donc le monde de la Désolation…
Pénétrer dans l’univers d’Epic Mickey, c’est comme découvrir un parc d’attractions truffé de clins d’œil. On sent en effet que chaque lieu a été méticuleusement travaillé pour faire ressortir l’essence des dessins animés mais aussi des parcs à thème de la firme. Et quand on sait qu’avant de devenir game designer, l’homme derrière Deus Ex rêvait d’être concepteur de manèges, on comprend mieux ce choix. Mais avant d’entrer plus en détails sur le côté imaginaire du soft, parlons un peu de son propos qui nous fait rencontrer Mr Mouse juste après sa lecture du roman De l’Autre Côté du Miroir de Lewis Carroll. Curieux, la souris traverse donc le miroir de sa chambre pour atterrir dans le laboratoire de Yen Sid qui vient de terminer un refuge miniature pour tous les personnages oubliés de Disney. Une fois le magicien de Fantasia parti, l’indiscret Mickey décide de fourrer son museau de rongeur dans l’affaire en ajoutant quelques couleurs à l’aide d’un pinceau aux vertus créatrices. Malheureusement, du diluant se déverse sur ce mini royaume et Mickey a juste le temps de prendre la poudre d’escampette avant le retour de Yen Sid. Quelques temps plus tard, une force obscure vient chercher la souris afin de le traîner dans ce petit monde oublié. Arrivé à bon port, et après quelques soucis, Mickey doit maintenant réparer ses erreurs avec l’aide de son nouvel acolyte : le Gremlin Gus, une sorte de Jiminy Cricket resté dans les cartons de Disney jusqu’à maintenant.
Walt Spector
En plus de nombreux Gremlins (à ne surtout pas confondre avec les petites créatures de Joe Dante), Epic Mickey permet de retrouver d’anciennes gloires du géant américain, à l’image du lapin Oswald et des nombreux rôles secondaires comme le Docteur Fou. Entre les versions du même personnage (Pat Hibulaire en est un bon exemple), ceux en noir & blanc et ceux qui sont tout droit issus de longs métrages comme Peter Pan, il faut reconnaître qu’il est plus qu’agréable de croiser autant de têtes familières ou d’en découvrir d’autres dans des décors toujours soignés. Et puisque l’on parle des décors, il faut savoir qu’ils participent grandement au charme du jeu. On a clairement l’impression de se balader dans Disneyland (les régions reprennent les noms des zones des parcs à thème), et ce ne sont pas les nombreux manèges modélisés qui viendront nous contredire. Les Tasses, Le Nautilus, Pirates des Caraïbes, Les Poupées, c’est avec une petite âme d’enfant qu’on traverse ces lieux accompagnés des musiques de circonstance en essayant de reconnaître les références. Mention spéciale à la décharge qui reprend des produits dérivés de Mickey dont des cartouches NES et Super NES. Mais Epic Mickey, ce n’est pas que de la contemplation. Ainsi, Mickey peut directement agir sur son environnement et prendre certaines décisions qui entraînent des conséquences irréversibles. Concrètement, à l’aide du pinceau, il est possible de restituer des zones pré-déterminées avec de la peinture pour découvrir de nouveaux chemins mais aussi rendre les ennemis dociles. L’objet peut également lancer des jets de diluant qui effacent les zones les plus colorées et tuent les adversaires. Voilà donc la mécanique principale autour de laquelle s’articule le jeu. Cela procure un sentiment de pouvoir, Spector oblige, et on prend vite l’habitude d’explorer chaque niveau pour y dénicher tous ses passages secrets pour remplir les quêtes subsidiaires qui parcourent le monde. En effet, s’il est possible de traverser les tableaux rapidement, on peut aussi fouiner dans chaque recoin afin de compléter sa collection d’objets, de résoudre diverses énigmes qui jouent sur la dualité peinture/diluant, de secourir des Gremlins et de faire quelques choix qui auront des répercutions. Les Gremlins vous donneront ainsi des coups de main pour progresser plus aisément. Des boss battus à la peinture deviendront alors vos alliés et vous rendront la pareille plus tard.
Cela procure un sentiment de pouvoir, Spector oblige, et on prend vite l’habitude d’explorer chaque niveau pour y dénicher tous ses passages secrets pour remplir les quêtes subsidiaires qui parcourent le monde."
Malheureusement, l’ensemble n’est pas à la hauteur des ambitions du jeu et globalement, peu importe les décisions, on arrive à avancer et les événements ne changent pas fondamentalement l’histoire. Hormis pour récupérer des croquis voire même des dessins animés originaux, la motivation manque pour réellement se sentir impliquer dans ce qui se passe à l’écran. On aurait aimé plus de répercutions. Par exemple, les surfaces peintes ou dissoutes ne le restent pas et se réinitialisent à partir d’un moment et si Spector nous avait promis un changement du comportement des PNJ en fonction de nos actions, on ne le ressent que trop peu. C’est regrettable car on avance simplement pour l’ambiance et finalement, le titre devient davantage une course aux trésors qu’autre chose avec une bonne dose de plate-forme. Et même là, tout n’est pas parfait et manque un peu de réglages. Si les déplacements et les sauts se réalisent facilement, il est parfois difficile d’appréhender les distances à cause d’une caméra capricieuse. Il aurait été plus judicieux de proposer des angles calculés pour ne se concentrer que sur la précision des actions. Et que dire de la précision du pointeur qui laisse souvent à désirer… Histoire de varier un peu la perspective, Epic Mickey nous propose aussi des passages avec une prise en main 2D avec scrolling. Appréciables et bourrés de charme (noir et blanc, mimiques des toons, écran bordé par de la vieille pellicule, musique authentique), ces moments reprennent de vieux classiques de Mickey ou Oswald. Mais là encore, l’atmosphère sauve la mise car le level design n’a rien d’original – on se contente d’avancer – et finalement on se réjouit de la courte durée de ces phases qui séparent deux niveaux en 3D. Enfin terminons sur un dernier point qui fait tache : la progression est assez lente et l’enchaînement des séquences manque de fluidité. Par exemple, quand Mickey débarque dans une salle, une cinématique se déclenche pour nous présenter les lieux, mais la présence de nombreux fondus noirs agace et casse le rythme du jeu. Dommage.