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Avec à son actif deux grosses sagas de RPG dont l’ambition narrative était d’une toute autre mesure, on aurait aimé que Monolith Software nous ponde un jeu d’action aux aspirations équivalentes. Hitoshi Yamagami et Tadashi Nomura en auront décidé autrement, et c’est non sans un certain succès que les deux producteurs sont parvenus à nous surprendre avec ce Disaster : Day of Crisis au rythme effréné. Assumé et revendiqué comme tel, le jeu gamer de la fin d’année de Nintendo enchaîne efficacement phases de tir, de course et d’exploration, tout en évitant de sombrer dans la répétition facile. Néanmoins, on regrette que le scénario ait cette fâcheuse tendance à s’étaler inutilement, ce qui pourrait gâcher chez certains le plaisir purement instantané que se doit de posséder un jeu d’arcade. De la même manière, une prise en main et une réalisation davantage travaillées n’auraient pas été de refus.
- Un vrai effort sur la mise en scène
- Gameplay varié et facile d'accès
- Solide replay value
- Un dénouement qui a du mal à arriver
- Prise en main un peu raide dans les phases d'exploration
- Quelques problèmes de caméra
Raymond Bryce, que nous appellerons Ray pour des raisons évidentes de style, est le genre de héros comme il en pullule par centaines dans les productions américaines de tout budget. Brisé par son incapacité à sauver son meilleur ami de la mort, notre beau brun ténébreux à la pilosité rebelle et à la tignasse ébouriffée décide de se retirer de son équipe de secouristes pour se morfondre dans la honte et la solitude… jusqu’à ce que la petite sœur dudit ami vienne le sortir de sa retraite. A l’instar de pas mal de seconds rôles féminins, tant dans le jeu vidéo que dans le cinéma, la belle a eu la bonne idée de se faire enlever par une troupe de rebelles, aux troubles desseins et à l’armement nucléaire. Comme d’habitude, le gouvernement américain n’a rien trouvé de mieux qu’un pauvre civil pour rétablir l’ordre dans le pays, qui plus est tourmenté par une succession inexplicable de catastrophes naturelles.
Une journée en enfer
Pour venir à bout de la double-mission qui lui est confiée, Ray est amené à évoluer dans un amoncellement de clichés, au mieux hollywoodiens, au pire tirés d’une série Z, reliés entre eux par des retournements de situations qui n’ont malheureusement pas grand-chose de renversant. La surenchère sur laquelle voulait se baser les concepteurs pour nous scotcher produit l’effet inverse à celui escompté, et a plutôt tendance à nous faire décrocher de l’intrigue. Pour un jeu qui se veut résolument arcade et intense, Disaster : Day of Crisis tire en effet sur la longueur – comptez une petite dizaine d’heures de jeu –, bien qu’il parvienne à se renouveler régulièrement durant ce laps de temps. Concrètement, le jeu est découpé en trois types de phases bien distinctes – exploration, tir et course – qui nous sont servis à un intervalle plus ou moins régulier. Les premières s’articulent essentiellement autour de deux axes que sont la progression dans l’aventure, et la recherche de survivants. Si l’on ne déplorera que peu d’originalité par rapport à un jeu d’action/aventure classique, on peut remarquer ici et là la volonté de Monolith Software à affirmer la personnalité de son bébé ; le meilleur exemple étant le système de nettoyage des poumons de notre héros, qui auront la fâcheuse tendance à s’encrasser au voisinage de fumée et de tout autre atmosphère viciée. Lorsqu’il s’agit de secourir la veuve et l’orphelin, Disaster : Day of Crisis se montre plus malin en faisant intervenir à bon escient le duo Wiimote / Nunchuk, que ce soit pour nettoyer et panser des plaies, tendre la main à un malheureux prêt à se faire dévorer par le vide, ou encore pour administrer quelques massages cardiaques. Si les situations sont forcément amenées à se répéter, on appréciera les efforts fournis en termes de variété de prise en main, évitant ainsi au soft de tomber dans la répétition bête, facile et méchante. Cette inventivité dans la mise en scène se retrouve d’ailleurs les phases de courses, qui auront le chic de répondre la plupart du temps à une urgence différente.
Pour un jeu qui se veut résolument arcade et intense, Disaster : Day of Crisis tire en effet sur la longueur – comptez une petite dizaine d’heures de jeu –, bien qu’il parvienne à se renouveler régulièrement durant ce laps de temps."
Mais si elle sont nombreuses, et parfois fastidieuses, elles ne se taillent pas l’autre part du lion, qui, vous l’aurez compris, est attribuée aux séquences de shoot façon Time Crisis. Comme dans la célèbre série de Namco, le salut passera ici par une bonne gestion du système de cover, qui permet de prendre le temps de recharger son arme, de s’abriter des nombreux assauts ennemis, et de préparer au mieux les ripostes alimentées à grand renfort de zoom, une fonction qui octroie une dose de précision supplémentaire, et qui double les dégâts reçus et infligés. Efficaces à souhait, ces étapes n’ont que peu de choses à envier aux cadors qui trônent en salle d’arcade, si ce n'est qu’elles manquent un peu de variété, et les ennemis d’agressivité et d’explosifs pour nous forcer à sortir de notre trou. Pour toucher deux mots de la réalisation et de la prise en main, on regrettera que Monolith Software n’ait pas été l’auteur d’un travail d’une grande homogénéité. Assez terne dans son ensemble, l’aspect visuel souffre en plus d’un frame rate trop inconstant pour être tout à fait digne de son support. Du côté de la maniabilité, ce sont les phases à pied qui jouent au cancre, avec quelques problèmes de caméra et une raideur générale assez regrettable. S’il ne propose pas un challenge insurmontable, Disaster : Day of Crisis a le mérite de ne pas délaisser complètement les joueurs habitués à explorer leurs softs de fond en comble grâce à l’ajout de quelques sucreries classiques, mais ô combien efficace. Outre la customisation de Ray et de ses armes – via les points glanés au cours des sauvetages ou des fusillades –, les jusqu’au-boutistes apprécieront la présence du stand de tir et de ses épreuves obligatoires pour débloquer la totalité de l’arsenal. Par ailleurs, à la manière d’un Snake dans les derniers Metal Gear Solid, Ray est gratifié, en fonction de sa manière d’agir, de rangs à l’issu des niveaux. Avec plusieurs dizaines de titres à récolter, inutile de préciser que le replay value est plus qu’assuré.