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Tout comme son ancêtre, BioShock Infinite devrait faire date dans l'Histoire du jeu vidéo. Non pas pour des raisons techniques, puisque le jeu reste perfectible de ce point de vue, mais bel et bien pour des raisons artistiques. La représentation visuelle de Columbia est absolument splendide, l'univers sort agréablement des sentiers battus, et le scénario sert un véritable propos. A mille lieux des jeux vidéo génériques qu'on oublie dix minutes après avoir reposé la souris ou la manette, BioShock Infinite imprimera durablement la mémoire de ceux qui auront la chance de le parcourir. Gâteau sous la cerise, le gameplay n'est pas en reste. Les amateurs de FPS apprécieront notamment les différents spécificités du jeu (toniques, failles, aérotrams, Elizabeth...) qui permettent de dynamiser les combats, moins mous que ceux du premier Bioshock. Que vous soyez un intello ou un excité de la gâchette, vous trouverez dans tous les cas votre bonheur dans ce fabuleux Bioshock Infinite !
Retrouvez plus bas la suite du test de BioShock Infinite
- Direction artistique magnifique
- Univers réellement original
- Ambiance et scénario captivants
- Aérotrams pleinement fonctionnels
- Toniques et failles dynamisent les combats
- Une fin brillante
- Comportement des PNJ trop artificiel
- Légèrement daté techniquement
- Une ou deux erreurs de level design
Uchronie, utopie et dystopie semblent décidément être les marottes de Ken Levine. Après la sous-marine Rapture, construite par un adepte de l'objectivisme, c'est dorénavant l'aérienne Columbia qui sert de fabuleux décor au nouveau BioShock. Nous sommes en 1912, et cette ville volante fondée par Father Comstock porte le nationalisme au rang de véritable religion. A première vue, Columbia est un véritable eden, détaché des malheurs du monde d'en bas (appelé la Sodome Inférieure). Les habitants sont polis, l'architecture grandiose, l'ambiance festive et les hot-dogs juteux. Bref, il y fait extrêmement bon vivre... tant qu'on est bien clair de peau. Dans le cas contraire, on n'est bons qu'à servir les maîtres blancs et à utiliser des toilettes réservées aux gens de couleurs. Pour se soulever contre cette ségrégation, les minorités opprimées ne peuvent compter que sur le mouvement révolutionnaire de la Vox Populi, dirigé par Daisy Fitzroy. Mais ce remède ne peut-il pas être pire que le mal ? C'est ce que vous découvrirez, entre mille autres choses, en incarnant Booker Dewitt. Initialement loin d'être concerné par les enjeux politiques de cette cité secrète, ce mercenaire a été chargé par un drôle de couple de capturer, ou plutôt de libérer, une jeune fille nommée Elizabeth. Enfermée dans une tour depuis sa plus tendre enfance, la belle joue un rôle majeur dans la religion qui guide Columbia. Vous découvrirez rapidement qu'elle possède des pouvoirs bien singuliers en matière de manipulation d'espace-temps, pouvoirs qui semblent de prime abord être la raison de son isolement. Si ces quelques lignes sur le scénario vous ont convaincu de la richesse de l'univers développé par Irrational Games, tant mieux ! Mais sachez qu'en vérité, nous n'avons fait ici qu'en effleurer la surface. Tout au long de l'aventure, les révélations et rebondissements seront extrêmement nombreux. Et nous pouvons d'ores et déjà vous dire que tout cela mène à un final absolument brillant !
Vers l'Infinite et au-delà
Brillante, la direction artistique (à la fois singulière et steampunk) l'est également. On pourrait passer des heures à se balader dans la ville rien que pour réaliser des captures d'écran, toutes plus éblouissantes les unes que les autres. La ferveur religieuse a ceci de bon qu'elle influe de manière grandiose sur l'architecture, tandis que le concept de ville flottante assure le dépaysement. Les statues sont innombrables et gigantesques, les points de vue et les lignes de fuite aussi impressionnants qu'improbables. On en prend plein les yeux, d'autant plus que le charme des années 1900 fait son petit effet. Des affiches de propagande aux devantures des boutiques, tout respire le travail riche et soigné. A ce titre, la première heure de jeu, pourtant bien calme d'un point de vue du gameplay, est un véritable bonheur. On se balade dans la ville avec un regard forcément émerveillé face à tant de maîtrise artistique. Les oreilles ne sont pas en reste puisque la bande-son ose mêler compositions originales, tubes de l'époque et même quelques reprises jazzy de chansons cultes des années 80... qui se payent le luxe d'être justifiées par le scénario. Si, si, vous verrez. A ce propos, nous vous conseillons vivement de partir à la recherche d'un maximum de voxophones (les enregistrements audio façon Columbia) afin d'obtenir le plus d'informations possible sur l'univers du jeu. Les bourrins qui fonceront directement au combat sans s'occuper de la partie narrative passeront à côté de la moitié du jeu, en terme d'intérêt comme de durée de vie. Et pourtant, ils ne regretteront certainement pas leur achat car le gameplay s'avère lui aussi riche et réussi, alors même que le premier BioShock péchait par des combats un peu trop mous. D'ailleurs, dans un premier temps, on se dit que cette malédiction est de retour. Mais en réalité, les combats deviennent de plus en plus dynamiques au fil du temps, grâce à de multiples possibilités.
A ce titre, la première heure de jeu, pourtant bien calme d'un point de vue du gameplay, est un véritable bonheur. On se balade dans la ville avec un regard forcément émerveillé face à tant de maîtrise artistique."
Tout d'abord, l'argent récolté dans les décors peut servir à améliorer les différentes armes (dégâts, capacité, temps de rechargement...). Ensuite, jusqu'à quatre pièces d'équipement aux effets divers peuvent être portés par le héros (chapeau, veste, pantalon, chaussure). De plus, les potions magiques appelées "toniques" permettent au héros de lancer des sorts tels que la décharge électrique, la boule de feu, la possession, etc. Projeter les ennemis dans les airs grâce au sort adéquat pour mieux les abattre au fusil à pompe comme des pigeons d'argile, les attirer vers une flaque d'eau pour ensuite les électrifier, ou encore leur lancer des corbeaux meurtriers au visage afin de les affaiblir et les abattre plus facilement à la mitrailleuse, ne sont que quelques exemples de mortelles combinaisons parmi d'autres. Pour pimenter encore tout cela, certaines arènes de combat sont parcourues par des aérotrams. Le joueur peut se déplacer sur ces rails aériens comme il l'entend (sauter d'un rail à un autre, changer de sens, fondre sur les ennemis situés en contrebas, rien n'est scripté) et il y garde même le contrôle de son arme principale. Sachant que les ennemis ne se privent pas eux aussi d'emprunter ce moyen de locomotion inhabituel, certains combats se transforment en ballets vifs et dynamiques.
Gym tonique
Enfin, il est à noter que la présence d'Elizabeth à nos côtés enrichit également le gameplay. D'une part, parce qu'elle est susceptible de nous envoyer en plein combat des fioles de vie ou de "mana", de sa propre initiative. D'autre part, parce qu'elle est capable d'ouvrir des failles interdimensionnelles, à notre demande. Concrètement, ces ruptures dans l'espace-temps permettent de faire apparaître des éléments de décors particuliers et prédéfinis dans certains niveaux. Sachant qu'Elizabeth ne peut s'occuper que d'une faille à la fois, le joueur doit en permanence faire des choix stratégiques. Vaut-il mieux matérialiser ce point d'accroche pour canarder les ennemis depuis les airs ou cette bobine tesla pour les griller quand ils s'approcheront de trop près ? Le moment est-il venu de faire apparaître ce pan de mur pour s'y abriter ou ce leurre pour détourner l'attention des ennemis ? Est-il plus intéressant de laisser cette tourelle automatique faire le travail ou d'utiliser cette flaque d'huile pour enflammer les adversaires ? Sachant que certaines failles permettent également de récupérer de la santé ou des armes particulières, le même combat peut être rejoué plusieurs fois de manières totalement différentes.
Mais la vraie replay value du jeu réside peut-être dans la force de son univers, dans lequel on a envie de replonger sitôt l'aventure terminée."
Mais la vraie replay value du jeu réside peut-être dans la force de son univers, dans lequel on a envie de replonger sitôt l'aventure terminée. Pourtant, l'expérience n'est pas dénuée de défauts. Les civils de Columbia semblent par exemple bien trop artificiels pour être réellement crédibles. Leur modélisation imparfaite, leurs animations raides, leurs visages clonés et le fait qu'ils ne se mettent à parler que lorsqu'on s'en approche font plus penser à un spectacle d'automates qu'à une ville réellement vivante. D'une manière plus générale, le jeu dégage un petit côté old-school d'un point de vue technique, évidemment largement compensé par la fabuleuse patte artistique. Et l'on pourra noter ici ou là quelques maladresses dans le level design ou la gestion des scripts (un ou deux murs invisibles, zone ouverte qu'on ne nous incite pas à visiter dans le bon ordre, lieu que les personnages semblent découvrir pour la première fois alors qu'on y est déjà passé...). Autant de petits défauts qui n'entament en rien l'attachement qu'on éprouve pour ce BioShock Infinite, qui est à la fois un très bon FPS et un excellent BioShock ! Bref, ce jeu est un voyage inoubliable et est d'ores et déjà culte !