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Surgi de nulle part, A Shadow’s Tale éclaire d’un jour nouveau la réflexion/plates-formes sur Wii. Avec ses mécaniques intelligentes et sa construction d’une belle fluidité, la production de Hudson Soft plonge les aventuriers dans un monde tout en clair-obscur, qui doit autant à Echochrome qu’à ICO. Les idées sont là, les références aussi, mais le tableau contient bien des zones d’ombres. Trop répétitive, techniquement bâclée, inintéressante d’un point de vue narratif, la création nipponne ne peut prétendre à une place au firmament. Mais l’onirisme et l’originalité sont trop rares dans les jeux actuels pour bouder totalement ce petit titre imparfait mais singulier, qui pourra accompagner joliment les soirées des plus aventureux.
- Univers poétique atypique
- Mécaniques originales
- Construction intelligente, difficulté progressive
- Jolies boucles musicales
- Assez moche
- Combats imprécis
- Séquences en 3D ratées
- Bien trop répétitif
Que sont nos idoles devenues ? A l’exception de Nintendo, les géniaux créateurs des supports ludiques 8 et 16-bit made in Japan ont tous rangé leurs machines mythiques dans d’obscures armoires pour rejoindre, avec plus ou moins de succès, les rangs de l’édition. Co-géniteur il y a un peu plus de vingt ans de la fabuleuse PC Engine, Hudson Soft fait partie de ces déchus du jeu vidéo. Aux années de splendeur ont succédé des mois bien moins mémorables qui ont fini par coûter son indépendance à l’ex-star de l’archipel. Adossée à Konami, la marque à l’abeille fait désormais son miel de vieilles licences et de petites productions colorées destinées aux plates-formes dématérialisées et autres appareils mobiles. Entre cinq déclinaisons de Bomberman, le studio japonais parvient toutefois à produire des projets un poil ambitieux, généralement sur Wii. A Shadow’s Tale est de ceux-là.
Quand les ombres de Fumito Ueda et de Paul Grimault planent sur un jeu, peut-il être raté ? Ouvertement influencé par le mémorable ICO, mais également par la production indépendante Echochrome, assez proche de l’univers du Roi et l’Oiseau, A Shadow's Tale semblait plutôt bien armé pour réussir dans la vie. La cinématique d’ouverture inquiétait toutefois quelque peu, qui dévoilait un héros falot, bambin prisonnier d’une mystérieuse tour-monde flirtant avec les nuages. Du blondinet, le jeu n’a heureusement retenu que l’ombre, séparée de son corps d’un simple coup d’épée et jetée dans l’abîme par un mystérieux tortionnaire. C’est cette silhouette floue que vous incarnerez durant une douzaine heures, l’accompagnant dans sa ré-ascension vers son propriétaire. Il vous sera naturellement impossible d’évoluer sur le même plan que les êtres de chair. Contraint de progresser parmi vos pairs, ce sont les ténébreuses projections des objets et des créatures incarnées que vous devrez manipuler, éviter, éliminer. Un concept original et bien exploité, malgré des choix esthétiques qui ne conviendront pas à tout le monde.
Clairement obscur
Vaste et vide, la tour de cinquante étages qui sert d’écrin à l’aventure ne résonne plus que des soupirs et grincements de quelques dangereuses mécaniques et des crissements d’une poignée de terrifiantes créatures. Hudson Soft n’a hélas pas jugé bon de soigner cet univers particulièrement oppressant, le développeur nippon multipliant les textures hideuses et les ratés graphiques. Cette austérité extrême n’empêche pas le titre japonais de dégager une poésie singulière et de développer des mécaniques de jeu plutôt convaincantes. L’essentiel de la partie se déroule en 2D, votre avatar ne pouvant se déplacer que sur les ombres projetées des objets visibles. Au premier plan de l’écran, vous voyez ainsi le monde réel (un couloir de pierre, un escalier métallique, etc.) et, à l’arrière, sa silhouette sur laquelle vous prenez appui pour avancer. Il vous reste possible d’interagir, grâce à la Wiimote, avec quelques éléments en dur : certains mécanismes pourront ainsi être enclenchés, qui déplaceront des objets, et donc leur ombre, vous ouvrant une nouvelle voie vers les sommets de la tour. Mieux, dans certaines zones, vous pourrez jouer avec des ampoules. En changeant l’éclairage d’une zone, vous modifierez l’inclinaison des ombres, ce qui débloquera là aussi certains passages. Dans ses ultimes heures, le jeu vous permet même de basculer ponctuellement dans le vrai monde en 3D afin d’y tripoter interrupteurs et leviers et de modifier la structure de l’autre dimension. Une imbrication intelligente, si l’on passe sur la prise en main foireuse du héros en 3D. Les choses ne sont pas toujours plus satisfaisantes dans le royaume des à-plats noirauds. Les déplacements habituels des jeux de plates-formes sont plutôt bien gérés, à l’éternelle exception de l’escalade d’échelles, mais la partie combat, puisque votre avatar peut découper à l’épée des araignées et quelques bien curieuses créatures, s’avère imprécise et laborieuse. Le plus gros défaut de cette petite production tient néanmoins à sa répétitivité. Les puzzles sont assez variés mais les niveaux se ressemblent et, passées les joies de la découverte, l’aventure tourne rapidement en rond. Doté d’un scénario un peu moins indigent, d’une prise en main plus soignée et de séquences de jeu encore plus riches, A Shadow's Tale aurait assurément pu prétendre au statut de jeu-culte de la Wii. Il démontre néanmoins que les anciennes idoles ont encore du talent. Reste désormais à l’exprimer pleinement !