Okamiden : nouveaux coups de pinceau
Malgré l'abandon des chiens fous de Clover Studio, Capcom a tout de même conservé la fourrure blanche d'Amaterasu dans un coin afin de faire renaître la déesse si l'envie et les perspectives financières le, permettaient. Une résurrection qui a donc pris la forme d'Okamiden, lesté de ses anciens maîtres mais accueilli dans un nouveau chenil où les petits orphelins sont visiblement traités avec attention. Car si Okamiden n'a pas le regard vif et la truffe au vent de son prédécesseur, il effectue ses premiers pas avec une assurance qui était loin de couler de source.
Quelques temps après la victoire d'Amaterasu sur les légions des ténèbres, qui avaient envahi les terres mystiques du Japon, le ciel s'obscurcit à nouveau et voit les ombres du passé revenir à la charge. Les êtres fantasmagoriques liés à la nature commencent à voir leurs pouvoirs s'amenuiser et même le puissant esprit de l'arbre Konohana, Sakuya, se voit obligé de faire une nouvelle fois appel à la maîtresse du pinceau céleste. Mais cette fois-ci, c'est sous la forme de Chibiterasu et non de la vénérable Amaterasu que cette dernière va se montrer. Un petit louveteau dont le taux de "mignonitude" atteint des sommets tels qu'une armée de goodies à son effigie fleurissent au Japon. Un émissaire immédiatement attachant qui donne plus envie d'être câliné que d'être envoyé au combat contre des hordes de démons. C'est malgré tout ce but qu'il va devoir suivre avec l'aide de plusieurs personnages qui agiront en coopération avec lui, le premier d'entre eux étant Kuni. Fils du légendaire guerrier Susano et de Kushi, il se révèle aussi contrasté que son paternel, tour à tour froussard et gorgé d'une énergie étonnante, marque des héros. Un duo dont l'association est l'oeuvre d'Issun, dont les remarques désobligeantes sont désormais laissées à l'imagination des divers compagnons que rencontrera Chibiterasu. Différente des grandes envolées solitaires d'Amaterasu, cette quête s'orne d'un gameplay mettant en avant la dualité du couple principal.
The chiot must go on
Reposant sur les mêmes mécanismes que son prédécesseur avec une utilisation du pinceau céleste dans le but de modifier l'environnement, que ce soit pour réparer un pont, faire fleurir un cerisier ou encore chasser les ténèbres d'une zone naturelle, Okamiden conserve cette interaction intelligente en l'agrémentant d'une prise en compte du second personnage. Dans les faits, certains obstacles nécessite de laisser l'un des cavaliers de Chibiterasu de côté afin de lui donner une tâche définie en un coup de stylet. Par exemple, face à certains ponts trop fragiles pour laisser passer le louveteau, il vous faudra faire descendre Kuni et tracer un chemin le menant au coffre ou à l'interrupteur situé de l'autre côté. Un type d'utilisation du pinceau céleste que vous utiliserez à de très nombreuses reprises tant les donjons et les zones de jeu possèdent de cachettes abritant des items plus ou moins utiles. Cet ajout permet de varier les "puzzles" et les situations tout en restant dans l'esprit de manipulation des éléments extérieurs, au coeur du concept de la série. Un concept qui semblait d'ailleurs conçu idéalement pour une console disposant d'un aspect tactile, le tracé des divers symboles étant dans l'absolu plus ergonomique selon ce principe qu'avec un stick PlayStation 2 assez rigide sur la première version d'Okami. Si les arabesques se montrent effectivement bien plus souples à dessiner dans Okamiden, l'intégration de ce côté tactile dans le gameplay souffre d'un réel déséquilibre.
L'extension du pinceau
Plutôt que de proposer un titre entièrement jouable au stylet ou de donner au moins un choix au joueur dans sa manière d'appréhender les commandes, Capcom a défini une prise en main entre-deux peu pratique. Chibiterasu se dirigeant à la croix directionnelle, il est nécessaire pour influer sur le décor de passer en mode "dessin" par une pression sur l'un des boutons de tranche et de laisser parler sa créativité au stylet. Il faut donc toujours avoir ce dernier à disposition tout en tenant les commandes, au creux de la main ou posé sur les genoux afin de le dégainer au besoin. Une ergonomie mal pensée qui ne gâche pas l'expérience de jeu, mais qui amène un aspect laborieux là où Okami premier du nom conservait un dynamisme grisant malgré des tracés pas franchement réguliers. Un souci du rythme qui a tout de même été conservé, mais à un autre niveau. En effet, bien moins étendu et cloisonné en petites zones, le monde d'Okamiden ne permet pas les courses effrénées dans les grandes plaines de son prédécesseur et son aspect exploration clairement mis en avant. Ici, les chemins de traverse se font rares et la progression se concentre sur l'axe principal du scénario avec des missions qui s'enchaînent rapidement en formant un tout qui se détache un peu plus du modèle Zelda. Un fonctionnement qui adopte une mécanique plus classique et qui se révèle néanmoins très efficace dans les premières heures, une fois la déception du découpage en zones étroites digérée. Un choix qui permet également au jeu de se montrer techniquement irréprochable, avec des décors enchanteurs ainsi que des modèles de personnages convaincants et animés avec un grand soin. Si l'aspect papier humide retranscrivant fidèlement le rendu estampe est resté malheureusement de côté, limitations techniques obligent, Okamiden est une réussite visuelle qui conserve toute la poésie du monde mythologique exposé. Une ambiance qui passe dans le même temps par une bande-son menée par Rei Kondo, déjà à l'oeuvre sur Okami, qui s'adapte une nouvelle fois de manière idéale aux évènements et à l'atmosphère globale, se montrant étonnamment claire malgré le processeur sonore limitée de la console de Nintendo. Au final, sur ces premières heures de jeu, Okamiden apparaît comme un jeu carré, qui fait très bien ce que l'on attend de lui sans pour autant abriter le supplément de caractère de son grand frère. L'absence de Clover se fait ressentir et même si l'expérience de jeu reste très agréable, plus directe, voire plus équilibrée, le caractère tempétueux qui se dégageait d'Okami est désormais plutôt un souffle. Un souffle mélodieux et doux mais qui nécessiterait un peu de folie pour se libérer.