Emotions et jeu vidéo
Depuis 1992, la société Bowen Research recueille les sensations d’un large panel démographique de joueurs (essentiellement de sexe masculin, étrangement) afin d’en dégager un feedback marketing pour diverses compagnies. Une de leur récente enquête, publiée dans le magazine next-generation.biz met en avant un aspect intéressant de la vie d’un joueur : l’émotion. Il est entendu que n’importe quel jeu fera ressentir quelque chose à celui qui y joue, mais quels sont les genres et les séries qui ont le plus généré d’empathie émotionnelle auprès des joueurs Américains ?
Le sondage de Bowen, mené auprès de plus de 500 joueurs, nous apporte des éléments de réponse concrets. Il est surprenant de constater que les interessés n’ont pas élu leur passion au premier rang du classement « artistique ». Les jeux vidéo n’arrivent en effet qu’en quatrième position derrière les films, la musique et les livres. Rien d’étonnant en revanche à découvrir la suprématie des RPG lorsque l’on parle d’émotions. Par nature le genre est long, met en place des scénarii souvent élaborés et fait évoluer la psychologie des personnages ainsi que la finesse de leur relation avec le joueur comme aucun autre genre ne peut se le permettre. 78% pensent que le RPG est le domaine le plus vecteur d’émotions. Ils sont suivis des First Person Shooter (violence, sentiment de puissance) à 52%, de l’Action (panique, suspense) à 49% et de l’Aventure (tension, découverte) à 48%. En entrant davantage dans les détails on découvre que c’est la série des Final Fantasy qui récolte le plus de suffrages, loin devant Resident Evil, Silent Hill, et Metal Gear Solid. USA oblige, on retrouve également Halo et même Madden. Il me paraît important de signaler la présence des MMORPG à 32%. Le jeu en ligne est un cas un peu à part, dans lequel le joueur dépasse le cadre diégétique du soft pour découvrir le plaisir de jouer et de partager tout un tas d’experiences avec des inconnus du monde entier.
Si ce sondage n’est « que » le reflet de la population américaine (et uniquement masculine, déplorons-le une fois de plus) il est l’occasion de se souvenir que si la course à la puissance technologique est inévitable, et pas forcément nuisible en soi, le réel challenge d’un concepteur n’a jamais été de faire turbiner un maximum de polygones simultanément mais bien d’arracher toutes sortes d’émotions au joueur. En privilégiant l’aspect sensitif du jeu vidéo, nous contribuerons sans nul doute à le faire rayonner au même niveau artistique que la littérature, le cinéma ou la musique, et ceci aux yeux de tout le monde.