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Entre sa thématique Cyberpunk, son gameplay essentiellement basé sur les dialogues et sa bande-son qui fait frissonner, The Red Strings Club est un jeu que l'on aurait aimé adorer ! Hélas, il présente des défauts de taille, à commencer par une durée de vie rachitique (on peut boucler l'aventure en trois heures), des décors qui manquent cruellement de variété (ceci expliquant en partie cela), des mini-jeux à la réalisation plus que discutable, et des arcs scénaristiques non aboutis. Restent tout de même une ambiance délicieusement poisseuse et quelques bonnes idées, qui auraient mérité un meilleur développement. Dans la série des jeux édités par Devolver et réalisés par un studio espagnol, on retiendra plutôt le séduisant Crossing Souls. Moins branchouille que The Red Strings Club peut-être, mais bien plus solide !
- Des dialogues bien écrits
- Un scénario intéressant
- Une ambiance bien sombre
- Des choix qui ont des conséquences
- Une bande-son fort réussie
- Maniabilité des mini-jeux assez mauvaise
- Des questions laissées sans réponses
- Propos par moments moralisateurs
- Faible durée de vie
- Seulement trois ou quatre décors différents
Le Cyberpunk a donné naissance à quelques jeux cultes par le passé, Deus Ex étant certainement le meilleur représentant du genre. En ce qui concerne l'avenir, les plus grands espoirs sont permis pour le futur Cyberpunk 2077 de CD Projekt, la saga The Witcher nous ayant déjà prouvé l'étendue du talent des développeurs polonais. Mais aujourd'hui, c'est au tour de The Red Strings Club de chercher à convaincre les joueurs férus de dystopies futuristes et transhumanistes.
L'action de The Red Strings Club se déroule dans un futur typiquement cyberpunk. Les conglomérats règnent en maîtres sur la société, tandis que la plupart des gens utilisent des implants de toutes sortes pour améliorer leur vie ou leur productivité. Donovan, lui, reste réfractaire au transhumanisme. Ce barman pas comme les autres refuse toute augmentation et trouve son bonheur dans son activité quotidienne, qui consiste autant à servir des boissons qu'à récolter et divulguer des informations diverses et variées auprès de ses clients. Suite à l'arrivée impromptue d'un cyborg féminin prénommé Akara, Donovan se retrouve mêlé à une sombre histoire de "Bien-être psychique généralisé", qui serait imposé à tous les possesseurs d'implants. Nous ne vous en dirons pas plus sur le scénario, car le jeu repose essentiellement sur les dialogues, la découverte de l'histoire, et les relations entre les différents personnages. Donc moins vous en saurez, plus vous serez susceptibles d'apprécier l'aventure.
La bande-son vaut clairement le détour, et ce n'est pas la seule qualité du jeu. On ne peut que saluer la qualité des dialogues, ainsi que leur agencement dans un système d'embranchements sans concession.
Mais nous pouvons tout de même vous préciser que l'ambiance est particulièrement réussie. On se retrouve plongés dans un véritable polar noir et cybernétique, porté par des musiques parfaites, souvent jazzy, parfois électroniques, mais toujours mélancoliques. La bande-son vaut clairement le détour, et ce n'est pas la seule qualité du jeu. On ne peut que saluer la qualité des dialogues, ainsi que leur agencement dans un système d'embranchements sans concession. Selon les questions que vous poserez et les réponses que vous donnerez, vous pourrez tout à fait vous fermer des portes scénaristiques et donc louper des séquences entières. Certains personnages ne feront même carrément jamais leur apparition à l'écran si vous avez manqué de perspicacité quelques minutes auparavant. Seul problème à ce sujet : le jeu possède une très faible durée de vie (entre trois et cinq heures), et dans un tel cas, il est assez malvenu de ne pas dévoiler aux joueurs tout le contenu produit par les développeurs...
FICELLES ROUGES OU GROSSES FICELLES ?
D'une manière générale, la production du studio Deconstructeam manque clairement de coffre. C'est bien simple, l'intégralité de l'action se déroule dans seulement trois ou quatre décors différents, fixes qui plus est. Afin de ne pas être qu'une aventure textuelle, The Red Strings Club nous offre tout de même trois mini-jeux... dont deux présentent des problèmes de maniabilité. Ainsi, au début de l'aventure, Akara doit réaliser des implants à l'aide d'un tour de potier (l'aspect Cyberpunk en prend un sacré coup, mais passons). Pour le joueur, il va falloir sculpter la glaise à l'aide d'outils de différentes formes, et lutter avec des contrôles souris qui manquent clairement de précision. On a droit ensuite (et à de nombreuses reprises) au mini-jeu de création de cocktail, plus intéressant mais toujours aussi peu maniable. Avant chaque discussion avec un client, Donovan peut lui servir une boisson basée sur les "polarisations psychiques" de l'individu. En gros, différents états d'âme sont affichés sur la silhouette du client (par exemple "désir" ou "folie"), et vous devrez sélectionner celui qui vous semble le plus à même de vous aider à récolter des informations. Pour cela, il faut déplacer un curseur sur la zone choisie, en versant différents alcools dans le verre, chaque alcool permettant de déplacer la cible dans une certaine direction. L'idée d'influencer ainsi les dialogues à venir est très bonne, la mécanique de ce mini-jeu n'est pas inintéressante, sans être révolutionnaire, et la réalisation est assez catastrophique. L'écran dédié à l'élaboration des cocktails est particulièrement moche (alors que le reste des graphismes en pixel art fonctionne plutôt bien), tandis que la manipulation des bouteilles à la souris s'avère assez malaisée.
D'une manière générale, le jeu semble vraiment avoir été terminé à la hâte, sans inclure dedans tout ce qui était prévu à la base.
Enfin, le dernier mini-jeu consiste à appeler différentes personnes au téléphone, en sélectionnant la voix que l'on souhaite, un modulateur vocal permettant de copier la signature vocale de la plupart des personnages croisés dans l'aventure. En choisissant la bonne combinaison voix/personnes appelées, on peut ainsi obtenir des renseignements utiles à la progression dans l'histoire. Cette activité est celle qui se rapproche le plus d'un véritable jeu d'aventure, mais elle ne dure que quelques minutes. D'une manière générale, le jeu semble vraiment avoir été terminé à la hâte, sans inclure dedans tout ce qui était prévu à la base. Ainsi, de nombreuses questions restent sans réponse, notamment sur tout l'aspect surnaturel, brièvement évoqué mais jamais expliqué. Pourquoi Donovan semble-t-il immortel et ne peut pas quitter son bar ? Qui est le personnage à tête de mort qui vient lui rendre visite à deux reprises ? Enfin, le jeu avance en permanence avec ses gros sabots sur les thématiques qu'il souhaite aborder. Avec un couple homosexuel interracial et un personnage transsexuel, on sent bien que la question "progressiste" travaille les développeurs. Le joueur se fait même traiter de stupide si jamais il répond lors d'un dialogue que les femmes ne sont pas particulièrement opprimées de nos jours. Sachant que la responsable RH, l'ingénieur (orthographié "ingénieure" bien sûr) en charge du projet "Bien-être psychique généralisé", la directrice marketing, l'avocate et même la PDG du conglomérat au centre de l'aventure sont toutes des femmes, la cause féminine semble pourtant plutôt bien se porter dans l'univers du jeu ! Bref, les ficelles idéologiques de The Red Strings Club sont un peu trop grosses, tandis que sa réalisation parfois médiocre accompagne une durée de vie faiblarde. Difficile de crier au génie dans ces conditions...