Test Super Meat Boy Forever : une suite qui prend à revers son public !
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Dix ans après Super Meat Boy, ce volet Forever a au moins le mérite de ne pas se reposer sur ses acquis. Hélas, le passage d'un jeu de plateformes classique à un autorunner risque de laisser pas mal de fans sur le carreau. Ce changement est réellement perturbant, même s'il n'enlève finalement rien aux qualités du jeu en matière de variété des niveaux et d'exigence façon "die & retry". La génération aléatoire des niveaux risque également de déplaire, malgré le gain en rejouabilité que ce système engendre. Loin d'être parfait, surtout pour les malheureux joueurs PC qui seront touchés par les bugs des contrôles claviers et manette, Super Meat Boy Forever mérite tout de même le détour pour les amateurs de défis. Toujours exigeant et plus beau que jamais, le jeu ne sombre absolument pas dans la médiocrité malgré ses quelques défauts.
- Du die & retry sévère mais juste
- Une direction artistique efficace
- Des niveaux qui savent se renouveler
- Des boss bien fichus
- Le changement de gameplay peut vraiment déplaire
- La génération aléatoire est discutable
- Le bug de manette
- Le bug de pause/quitter
Parmi les titres qui ont participé à l’explosion des jeux indépendants ces dernières années figure naturellement Super Meat Boy, sorti en 2010. Cette suite de Meat Boy, un petit jeu Flash paru deux ans auparavant, a su convaincre de très nombreux joueurs puisqu'elle s'est vendue à plus d'un million d'exemplaires. Cette réussite est due à un gameplay exigeant, ce jeu de plateformes faisant totalement sien le credo du "die & retry". Et ce Super Meat Boy Forever alors ? On prend les mêmes ingrédients et on recommence ? Eh bien, pas tout à fait….
Avant d'expliquer dans le détail ce qui sépare Super Meat Boy Forver de Super Meat Boy tout court, commençons par préciser quelques points communs entre les deux titres, dont la filiation est tout de même bien réelle. Ainsi, le scénario met à nouveau en scène notre saignant héros Super Meat Boy, sa rose compagne Bandage Girl, et le méchant Dr Fetus qui fait rien qu'à les embêter ! Mais alors que le vil embryon en armure/costume kidnappait systématiquement Bandage Girl dans le premier volet, il s'est trouvé cette fois une nouvelle victime en la personne de Nugget, qui n'est autre que l'enfant de Super Meat Boy et Bandage Girl. Aussi basique et prétexte soit-elle, cette histoire nous est tout de même contée à travers de sympathiques petites scènes cinématiques, dont la direction artistique franchement cartoon fonctionne très bien. Ces séquences restent d'ailleurs parfaitement raccord avec les graphismes du jeu, qui proposent des couleurs vives et des contours épais, afin d'assurer une excellente visibilité en toutes circonstances.
Quels que soient les obstacles qui se présentent sur notre chemin, on comprend toujours ce que le jeu attend de nous (après quelques essais infructueux naturellement). D'ailleurs, Super Meat Boy Forever sait se renouveler et nous présente des niveaux très variés. Si la partie commence en douceur avec seulement quelques scies circulaires à éviter, on se retrouve assez rapidement à devoir gérer des ventilateurs qui nous dévient de notre trajectoire, des tapis roulants, des murs qui s'effritent, des étendues de seringues mortelles, des parois de verres à briser, des clés à ramasser, des serrures à débloquer, des crochets mouvants à agripper, des interrupteurs à actionner et bien d'autres choses encore. Le jeu propose douze mondes différents, renforcés par la présence de warp zones secrètes, et nous fait régulièrement affronter des boss fort sympathiques. Ces derniers sont l'occasion de varier encore plus le gameplay, et il appartient au joueur de bien maîtriser les schémas d'attaques de ces ennemis souvent gigantesques pour pouvoir en venir à bout.
IL COURT, IL COURT, LE FILET…
Mais alors, quelle peut donc bien être la rupture entre cet épisode et le précédent ? En vérité, Super Meat Boy Forever s'éloigne de son prédécesseur sur deux points essentiels, le plus important des deux concernant les contrôles. Nous n'avons plus affaire à un jeu de plateformes classique, où l'on peut diriger notre cube de viande comme on le souhaite, mais à un "autorunner". Comprenez par là que Meat Boy fonce en permanence tout droit, et que vous n'avez absolument pas la main sur sa vitesse ou sa direction. D'ailleurs, deux touches suffisent pour manier notre héros. L'une permet de sauter ou de frapper les ennemis une fois en l'air, tandis que l'autre sert à glisser ou plonger vers le bas. Le jeu semble avoir été pensé pour les plateformes mobiles, et ce manque de maîtrise sur l'action risque de rebuter beaucoup d'habitués. Les premiers pas sont extrêmement déroutants, notamment lorsqu'on souhaite faire demi-tour et que l'on se rend compte que cette manœuvre est totalement impossible à réaliser, à moins de trouver une paroi sur laquelle rebondir. Ce qui n'est pas toujours une bonne idée d'ailleurs, puisque atteindre le bord gauche de l'écran aboutit généralement à un game over pur et simple. Cependant, nous invitons tous les réfractaires à cette course automatique qui posséderaient déjà le jeu à persister dans leurs efforts, car on finit tout de même par s'habituer à ce système.
L'autre grand changement apporté par Super Meat Boy Forever concerne l'architecture des niveaux, qui sont désormais générés aléatoirement à partir de 7200 sections différentes. C'est évidemment une bonne nouvelle en ce qui concerne la rejouabilité, mais on perd tout de même toutes les subtilités et l'équilibrage aux petits oignons d'un level design entièrement fait main. Cela complique également les speedruns et les recherches de solutions, même si un système de seed permet tout de même de générer, et donc de comparer, des parties identiques.
ELLE EST PAS FRAÎCHE MA VIANDE ?
Les fans de la licence risquent donc d'être pas mal perturbés par la direction de ce nouveau volet, qu'on aurait presque envie de qualifier de spin-off plutôt que de véritable suite. Il reste heureusement quelques repères auxquels s'accrocher, à commencer par l'aspect die & retry, qui s'avère aussi important qu'auparavant. Le fait de mourir en boucle est quasiment mis en valeur, puisque le replay d'une partie affiche tous les Meat Boy infructueux à la fois en plus de celui qui a réussi à passer le niveau. Bon prince, le jeu place automatiquement des points de sauvegarde à l'entrée de chacune des sections formant un niveau entier, ce qui aide à faire passer la pilule des innombrables morts. En cas d'échec, on retente instantanément et sans avoir besoin de repasser une étape déjà réussie.
Pour les plus acharnés, Super Meat Boy Forever propose un système de scoring (zéro mort pour atteindre le rang S dans un niveau) ainsi que des tétines à récolter dans certains niveaux. Ces objets prennent la relève des pansements du Super Meat Boy de 2010, et permettent donc de débloquer de nouveaux personnages. Hélas, la version PC que nous avons testée reprend également à son compte un bug fort gênant, qui n'a jamais été corrigé dans l'épisode précédent et qu'il faudra donc peut-être supporter ad vitam æternam ici aussi : l'impossibilité de jouer à la manette. Cela ne concerne évidemment pas tout le monde, mais nous faisons partie des malchanceux touchés par cette malédiction. Ce bug regrettable se double d'un problème supplémentaire, qui concerne cette fois le clavier. En pleine partie, il est impossible de mettre le jeu en pause ou de quitter le niveau autrement qu'à travers un brutal Alt+F4. Seule solution alternative : atteindre la fin du niveau pour pouvoir revenir à l'écran de sélection. Là encore, tout le monde n'est pas concerné par ce problème, mais cela traduit tout de même une finition approximative.