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Retrouvez plus bas la suite de notre test de Soul Sacrifice
- L'ambiance mélancolique, glauque franchement très réussie
- Un univers crédible et chiadé
- Un gameplay idéal pour le genre et pour la Vita
- Un scénario qui joue le contre-pied
- Librom, quelle bonne idée de gameplay
- On aurait apprécié d'avoir mieux graphiquement !
- Un bestiaire stylé mais pas super varié...
- Manque d'explications et de tutos
Dans la famille des Sorcières et Sorciers, on peut trouver, au pif, la vieille peau qui a refilé une pomme empoisonnée à Blanche-Neige (qui s’est quand même pas montrée super fut-fut’ sur le coup), cette tête à gifles d’Harry Potter, mais aussi des mecs qui sont près à se priver temporairement de peau ou de bras pour pouvoir lancer un sort digne de Michael Bay et ainsi se débarrasser d’une des abominations qui peuplent la Terre. Oui, incontestablement, la famille des Sorciers brasse large, mais autant vous le dire tout de suite, Soul Sacrifice s’intéresse plutôt à la dernière catégorie. Dans le monde mythologique créé par Keiji Inafune, les Sorciers sont une caste détestée à cause de leurs affinités magiques et de la pratique des sacrifices. Ils sont pourtant un mal nécessaire puisqu’ils sont les seuls à pouvoir éradiquer les Humains qui, aveuglés par leur cupidité, auraient muté pour devenir de terribles et immenses créatures. Magusar est l’un d’entre eux. Mais Magusar a légèrement perdu la tête et il a désormais mis le monde sous sa coupe, sans que l’on connaisse vraiment le pourquoi du comment. Vous faites partie de son vivier de prisonniers, et vous allez lui servir de sacrifice très bientôt. Votre seule chance d’en réchapper se nomme Librom, un bouquin magique qui a déjà offert ses services à de nombreux détenus avant vous. Evidemment, aucun de ces bougres n’a réussi à l’utiliser assez bien pour s’en tirer. Vous devrez les surpasser.
Assassin's Creed n'est plus seul
La particularité de Librom, outre le fait qu’il puisse vous faire la conversation, c’est qu’il contient en réalité le journal personnel d’un Sorcier qui a notamment fait équipe avec Magusar. A travers ses écrits, vous allez vous approprier son identité, revivre sa vie et ses combats dans le but final d’intégrer ses pouvoirs de Sorcier et de détruire Magusar. Ca n’a l’air de rien, mais cette astuce de gameplay et de narration est le rouage essentiel qui fait tourner l’aventure de Soul Sacrifice. En effet, Librom sert à la fois de seul et unique interlocuteur mais aussi d’interface de jeu. Le journal est en effet un grand menu dans lequel on navigue pour sélectionner ses missions, découvrir le background, l’univers, la mythologie du jeu, ou encore modifier son portrait (c’est-à-dire choisir son équipement et son apparence). C’est original et ça donne du cachet à l’exercice traditionnel et redondant de navigation dans le HUD. Mais Librom constitue surtout un ressort de gameplay autant qu’une facilité de scénario fort bien trouvée. En effet, un peu comme dans Assassin’s Creed, on revit ici les combats d’un autre à travers ces missions que sont les quêtes fantômes. Aucun décès n’est donc irréversible. On peut rejouer chaque quête à l’envi par exemple pour essayer de faire péter le score et d’obtenir de meilleures récompenses. Mais surtout, il est possible de rejouer pour choisir d’autres embranchements scénaristiques et ainsi débloquer de nouvelles missions.
En tant que Sorcier, votre tâche est de punir les âmes égarées en les sacrifiant et en absorbant ainsi leur énergie dans le bras droit. Toutefois, à chaque ennemi abattu, le choix vous est laissé : l’épargner, désobéir au Code et bénéficier de son Energie Vitale pour améliorer Défense et Santé ? Ou le sacrifier froidement comme prévu et prendre son Energie d’Ame pour faire monter Attaque et Magie ? Mais avant d’en arriver à cette réjouissante perspective, il faudra de toute façon dézinguer les organismes atrocement déformés qui se présenteront devant vous et là encore le Sacrifice est une option. Pour le joueur d’abord, qui peut choisir de sacrifier une partie de son corps (avec malus à la clé) afin de déclencher une furie surpuissante ou de sacrifier un allié à l’agonie pour un résultat similaire. Mais c’est aussi un choix à faire pour vos alliés, qui pourront choisir de prendre votre vie si votre barre de santé est vide ! Vous devenez alors une âme qui ne peut influer sur le champ de bataille que par l’écran tactile, afin d’augmenter l’attaque d’un allié ou baisser la défense ennemie. Quand on vous dit qu’aucune mort n’est irréversible !
Préhistorique chasseur de monStres
Dans la forme, le parallèle avec Monster Hunter se justifie par l’aspect général des affrontements qui sera familier pour certains. Les objectifs des quêtes fantômes sont certes assez classiques : éradiquer un boss, éliminer un certain nombre de créatures de taille moindre ou trouver des objets dans l’arène. Jusque-là, rien de bien fou, surtout que le bestiaire, aussi stylé soit-il, n’est pas bien varié et s’avère être souvent constitué de déclinaisons des mêmes monstres. Pourtant Soul Sacrifice met clairement Monster Hunter à la ramasse au niveau du système de combat. A côté des niveaux d’Energie Vitale et d’Energie d’Ame que nous avons vu plus haut se trouvent également les runes, à graver sur le bras droit de l’avatar avant le combat pour lui octroyer différents bonus une fois dans l’arène. Suivant son type de bras (occulte ou divin en fonction de votre clémence ou de vos sacrifices), chacune d’elles libérera ou non un bonus supplémentaire. Mais le sel des combats, ce sont les offrandes, six objets à équiper associés à un sort particulier et utilisables un certain nombre de fois. Leur variété fait partie des qualités de Soul Sacrifice puisque plus d’une centaine d’entre elles peuvent être glanées en fin de mission et qu’il est également possible de les combiner avant un combat (via une manip’ assez simple mais pas super intuitive).
A côté des sortilèges classiques, elles peuvent aussi conférer aux héros des avantages temporaires comme une arme, une armure ou un bonus de stats. Tout cela aurait pu être bien lourd d’utilisation si Sony Japan n’avait pas réussi à sortir un système de raccourcis simple et efficace : on switche entre deux trios de pouvoirs grâce à la gâchette droite, et chacun d’entre eux est alloué au bouton carré, triangle ou rond. C’est instinctif, efficace et ça laisse la croix pour l’esquive et le sprint. Et oh ! Alléluia ! Les développeurs ont laissé l’archaïsme de côté, on a droit dans Soul Sacrifice à un vrai verrouillage avec la gâchette gauche ! Même si la caméra n’en fait parfois qu’à sa tête, notamment à cause du côté un peu cloisonné des niveaux, cela demeure bien plus jouable que Monster Hunter et on peut enchaîner esquives et sorts sans choper la gerbe. On en retire évidemment plus de précision et donc plus de facilité à appliquer sa tactique contre les boss. A ce titre, le Troisième oeil, qui permet de localiser les parties maudites du monstre (ses points faibles) apparaîtra peut-être comme une facilité à certains joueurs, mais les créatures bougent beaucoup et il est impossible de lancer des sorts durant son utilisation… Par ailleurs, les arènes ont beau être limitées en espace, elles se veulent un tant soit peu interactive. Les décors sont partiellement destructibles et on peut y trouver des recharges d’offrandes et des sorts gratis. Dommage que le jeu ne soit pas un peu plus abouti graphiquement : le mouvement reste fluide et c’est une bonne chose, mais on aurait aimé un peu plus de finesse notamment dans les textures qui font parfois un peu pâté de pixels.
Soul Sacrifice s’impose comme une œuvre baroque pour adultes en manque de déprime."
Cependant, il faut bien avouer que les affrontements, même s’ils sont carrément bien huilés, bénéficient grandement de l’ambiance générale terriblement glauque et envoûtante du soft. Que ce soit par le design torturé des monstres, dont on peut découvrir l’histoire via une encyclopédie très complète (que l’on vus encourage d’ailleurs à lire), ou par la bande-son mystique, épique et en même temps complètement mélancolique, Soul Sacrifice s’impose comme une œuvre baroque pour adultes en manque de déprime. C’est cette facette du jeu qui pousse à aller plus loin dans l’histoire de ce Sorcier Inconnu, littéralement et métaphoriquement rongé par le sacrifice de sa partenaire, et de Magusar le Dément, afin de découvrir comment il a basculé du côté obscur. Le scénario tire d’ailleurs sa force d’un développement inattendu, loin d’être aussi manichéen et biblique qu’on le penserait au départ, et se plaît à nous prendre à contre-pied en peuplant le récit de Janus, cette divinité aux deux visages de la mythologie romaine. Les pages effacées, inaccessibles dès le début en raison des troubles de la mémoire de l’Auteur, font partie de ce même mécanisme qui dévoile un jeu différent au fur et à mesure de l’aventure. Il est d'ailleurs possible de faire avancer l'histoire ou simplement de remplir des quêtes pour Avalon, l'organisation des Sorciers, afin de faire du leveling.