Test Sim City DS

Sorti de l’esprit tordu de Will Wright, l’empereur du Sim (toujours aucun rapport avec le comique du même nom), Sim City est un jeu américain, développé par des Américains. Les esprits chagrins iront même jusqu’à ajouter "pour des Américains", tant la ville que vous allez concevoir se développe selon des mécaniques typiques. Parachuté maire d’une vaste portion de territoire découpée en cases vierges de toute construction, vous allez, en piochant dans la bourse généreusement octroyée par des autorités publiques certainement irresponsables, organiser peu à peu les lieux. Routes, bâtiments vitaux (centrales électriques, stations de pompage, écoles, stades, commissariats, etc.), éléments d’agréments, tant que vos poches sont pleines, vous pouvez faire n’importe quoi. Le plus important consiste tout de même à établir des zones (résidentielles, industrielles ou commerciales), dans lesquelles viendront vivre et travailler vos chers administrés. Ceux-là ne se satisferont évidemment pas d’un bête carré résidentiel perdu au milieu de nulle part. Pour attirer le futur imposable, celui-là même qui remplira les coffres que votre gabegie aura vidés, il vous faut parvenir à créer un cadre de vie agréable, correctement desservi, bien équipé, et bien américain. La tentation de la dispersion commerciale, à l’européenne, est à proscrire : créez des petits quartiers d’affaires dans tous les coins de la quatre, et la moitié péricliteront ; établissez une bonne grosse zone dédiée au centre de la ville, et vous serez le témoin d’une croissance remarquable.

La DS au risque du SD

Pour rendre cet élégant produit de la culture "sim" californienne un peu plus accessible aux plus jeunes et au marché nippon, les chargés de cette conversion ont eu la très mauvaise idée de la japoniaiser un peu. Si les consommateurs de l’archipel ont largement récompensé cet effort, ce choix éditorial laisse l’acheteur occidental totalement dubitatif. Première hérésie, vous êtes désormais assisté dans toutes vos taches par un insupportable conseiller au look SD (en gros, une tête énorme sur un corps minuscule), qui vous invite à rencontrer, par le biais de non moins odieux écrans de blabla, des citoyens lambdas typiquement nippons. De l’otaku inquiétant obsédé par les trains à la lycéenne brûlée par les UV, c’est tout un petit monde sorti de l’univers manga qui vient quémander, qui de nouvelles gares, qui un zoo. Ces interventions, censées vous indiquer les principaux défauts de votre ville et les moyens d’y remédier, tapent vite sur le système. Elles s’avèrent surtout bien moins utiles que les bons vieux graphiques, tableaux, éditions du journal local, bref, que tous les outils qui vous permettaient de mieux comprendre les attentes de votre communauté sur les versions PC. Simplifié, voire mutilé, ce Sim City DS se fourvoie sur la voie d’une accessibilité qu’il n’atteint jamais. En effet, passé un certain cap, il est difficile de comprendre comment entretenir la croissance de sa cité, qui se déploie sur des cartes finalement bien petites. Les quelques statistiques disponibles sont parfois obscures et systématiquement incomplètes, et des données qui pourraient être utiles ne sont tout simplement pas intégrées. Combien d’étudiants font semblant d’apprendre dans ces universités qui vous coûtent si cher ? Combien de voyageurs empruntent ces bus que vous mettez en place en positionnant des gares routières aux grandes intersections ? Impossible d’avoir des réponses à ces questions pourtant essentielles. Et si vous finissez par percevoir les principaux défauts de votre stratégie de développement, bon courage pour les corriger. Pas franchement maniable, la grille qui vous sert de plan de travail étant découpée en carrés très petits et malaisés à sélectionner au stylet, Sim City DS est également peu lisible. Les bâtiments sont difficiles à identifier de loin, et s’il est possible de zoomer, le scrolling très laborieux ne vous permet pas d’explorer toute la carte en vue rapprochée. Faute de parfaitement exploiter le dual screen, cette conversion tente tout de même d’offrir quelques quelques mini-jeux "tactiles", qui se révèlent totalement vains. Se résumant essentiellement à des phases de clic frénétique – sur un Père Noël survolant votre ville le soir du 24 décembre ; sur des feux d’artifice refusant d’exploser – ces courtes séquences aussi futiles que redondantes agacent plus qu’elles ne distraient. Les quelques scénarios bonus qui viennent compléter le mode de jeu libre et les vagues options multijoueurs pimenteront peut-être un peu le quotidien des affamés de gestion. Mais, sans être une pure catastrophe ludique, ce Sim City DS tronqué ne manque pas de laisser un goût amer à tous ceux qui ont joué à l’une des nombeuses versions de ce mythe du jeu vidéo.