Test My Friend Pedro : le nouveau défouloir signé Devolver donne-t-il la banane ?
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Violent et décalé comme savent l'être les jeux Devolver, My Friend Pedro tient les promesses de son joyeux slogan "Blood.Bullets.Bananas". Et on pourrait ajouter Bullet time dans l'allitération en b puisqu'au delà du sang, des balles et des bananes, le ralenti tient un rôle primordial pour qui souhaite décimer les ennemis avec style et marquer un maximum de points. Dédié au scoring et aux speedrunners, le jeu reste étonnamment très accessible, voire facile, pour peu qu'on se contente de tracer dans les niveaux sans chercher à optimiser les mortelles chorégraphies. La durée de vie s'en ressent, mais il ne tient qu'aux joueurs de la démultiplier en cherchant à grimper dans les classements en ligne de cette petite production fort sympathique.
- Accessible à tous...
- ...mais exigeant si on souhaite scorer
- Des fusillades qui ont la classe
- Des checkpoints parfaitement placés
- La sauvegarde de GIF qui fait plaisir
- Court si on ne cherche pas à scorer
- Quelques animations maladroites
- Une direction artistique un peu monotone
- Les headshots plus simples à la souris qu'au pad
Au delà d'être indépendant et suédois, le studio DeadToast Entertainment a ceci de particulier qu'il est constitué d'une seule personne. Ce sont donc les petites mains de Victor Ågren qui se sont occupées de la conception, des graphismes, de la programmation, du scénario et de la conception sonore de My Friend Pedro, aidées par quelques musiciens additionnels pour la bande-son. Dès lors a-t-on affaire à un jeu minimaliste et pixelisé ? Bien au contraire, notre ami Pedro nous propose une action explosive et un gameplay bien stylé.
Levons tout de suite une ambiguïté potentielle : Pedro n'est pas le protagoniste du jeu (qui n'a en réalité pas de nom), mais la banane qui l'accompagne. Car oui, dans un jeu Devolver on considère qu'il est tout à fait normal de converser avec un ami imaginaire en forme de banane. Et bien sûr, il est encore plus banal de massacrer tous les êtres humains qui se trouvent sur notre chemin. Il faut dire que notre héros du jour se réveille malencontreusement dans les sous-sols d'une boucherie des plus glauques, puisqu'elle n'hésite pas à utiliser de la viande humaine pour maximiser ses profits. Dans ces conditions il ne lui reste plus qu'une seule chose à faire : ramasser le premier flingue qui traîne et décimer du mafieux à tour de bras. Et l'expression peut quasiment être prise dans son sens le plus littéral car l'ami de Pedro fait preuve d'une souplesse extrême. Il peut ainsi éviter les tirs ennemis en tournoyant sur lui-même, réaliser des saltos, rebondir sur les murs, faire le cochon pendu accroché à une corde qui se balance ou encore, et surtout, tirer sur deux ennemis situés dans des directions opposées en écartant les bras. Pour le joueur cette manœuvre s'effectue en lockant une première direction d'un coup gâchette ou de clic droit, puis en tirant simplement dans une autre direction. D'une manière générale le jeu est parfaitement maniable, mais on notera tout de même qu'il est bien plus simple de placer des tirs à la tête à la souris qu'à la manette. Le titre de DeadToast Entertainement étant très orienté vers le scoring et les speedruns, les joueurs PC auront donc certainement un avantage sur leurs homologues consoles. A noter toutefois que My Friend Pedro ne se montre jamais élitiste. A partir du moment où l'on se satisfait d'un score C ou B dans la plupart des niveaux, on peut tout à fait terminer l'aventure sans jamais se prendre la tête, les prouesses n'étant nécessaires que pour atteindre les paliers A et S.
LA GROSSE BANANE ?
Il faut dire que le jeu est très généreux en barre de vie et de concentration, cette dernière servant à déclencher un effet de bullet time digne de Max Payne. L'aspect compétitif (y compris contre soi-même) est donc totalement optionnel, le but est avant tout de prendre du plaisir. D'ailleurs en cas d'échec, on recommence instantanément, à quelques mètres seulement du lieu de notre décès, et sans que les ennemis déjà décimés ne réapparaissent. On s'amuse donc en permanence, surtout que la bande-son s'avère bien entraînante et que les situations ne manquent pas d'humour. Entre notre ami la banane, certains ennemis prenant la forme de hardcore gamers devenus ultra-violents à cause de "décennies passées à jouer à des jeux brutaux", et notre héros qui se réfugie malencontreusement au réveillon de Noël du club des chasseurs de primes alors que sa tête est mise à prix, il y a de quoi faire. Du côté de la réalisation, seules quelques animations un peu raides ou qui s'enchaînent de manière imparfaite viennent trahir le fait qu'un unique développeur est à la manœuvre. Mais Victor Ågren n'a pas chômé, car sur la quarantaine de niveaux qui composent l'aventure, il réussit à nous proposer régulièrement des petites nouveautés. Ici on découvre qu'on peut donner des coups de pied dans des objets pour les balancer sur les ennemis, là on tire sur une poêle à frire afin de tuer les ennemis par ricochets, et là encore on a la possibilité d'enfourcher un skateboard sur quelques mètres. Sans oublier les tyroliennes, les tonneaux à faire rouler, les sauts de corde en corde, les mécanismes à leviers, etc.
Plus varié dans son gameplay qu'on pourrait le penser de prime abord, le jeu souffre en revanche d'une direction artistique un peu trop monotone, qui pâtit en plus du caractère urbain des niveaux. Il faut aimer les entrepôts, chantiers, égouts et autres sous-sols. Heureusement, My Friend Pedro sait également faire preuve de variété de temps à autre, comme ces niveaux qui se déroulent dans l'inconscient du héros (ou de Pedro, on ne sait pas trop), celui qu'on parcoure en chute libre, celui dans un train ou le très jouissif passage à moto. D'ailleurs, on aurait aimé pouvoir enfourcher le deux-roues plus d'une fois dans l'aventure mais, heureusement, il est possible de refaire ce niveau à volonté, histoire d'améliorer son score par exemple. En réalité, le jeu est très honnête dans sa proposition, puisqu'il ne recycle pas ses bonnes idées à l'infini histoire de rallonger artificiellement la durée de vie. Le deal es le suivant : vous pouvez terminer l'aventure en quatre heures, mais la marge de progression dans les scores reste énorme. Si vous voulez en avoir pour votre argent, il ne tient qu'à vous de recommencer encore et encore pour vous améliorer. Histoire de motiver le "beau jeu", chaque fin de niveau nous gratifie non seulement d'un écran de score détaillé, mais également d'un petit extrait de nos exploits choisi automatiquement, et qu'il est possible de sauvegarder sous forme de GIF animée et de tweeter directement depuis le jeu. C'est plutôt malin ! Au final, My Friend Pedro s'avère dans l'ensemble très plaisant. Jamais révolutionnaire, certes, mais est-ce vraiment ce qu'on lui demande ? Le plaisir de tuer avec style se suffit à lui-même.