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Reposant sur une jolie histoire, classique mais émouvante, le titre de Game Republic se montre convaincant lorsqu'il s'agit de composer des énigmes, que ce soit dans la manière souvent très fine de vaincre les boss ou dans les diverses zones à explorer. Mais hors de ces limites et de son concept d'interaction, à la fois accessible et touchant entre Teotl et Tepeu, Majin and The Forsaken Kingdom a du mal à captiver le joueur à cause de sa construction redondante.
- L'esthétique globale
- Le design de Teotl
- Un univers attachant
- Des énigmes/puzzles bien pensés
- Des thèmes musicaux de grande qualité
- Doublage français convaincant
- Un monde assez vaste
- Une jolie histoire
- Une construction redondante
- Graphiquement daté
- Phases de plates-formes mal gérées
- Quelques bugs gênant
- Un peu court
Devenu involontairement célèbre suite à une triste présentation de Genji : Days of the Blade à l'E3 2006, qui avait traumatisé la presse, Game Republic n'a jamais vraiment eu l'occasion de retrouver une aura positive malgré des Dragon Ball : Origins sympathiques et un Folklore perfectible mais surprenant. Malheureusement pour lui, Majin and The Forsaken Kingdom arrive juste après un horrible Choc des Titans qui ne le place pas vraiment dans une dynamique de réussite. Et pourtant.
Désireux de parler à un public depuis longtemps mondialisé, Majin and The Forsaken Kingdom prend la forme universelle d'un conte basé sur l'amitié. Mélangeant inspirations arabisantes et extrême-orientales, autour d'un ensemble de codes bien connus à base de princesse prisonnière, de mal ténébreux et de château inaccessible, le titre de Game Republic se rend immédiatement accessible, sans être niais. Bien au contraire. Tombé malencontreusement dans les ruines d'une cité abandonnée, le jeune voleur Tepeu va rencontrer le fameux Majin, un démon pour certains et une divinité protectrice pour les autres. Libérée de l'emprise des ténèbres par Tepeu, cette créature nommée Teotl va donc considérer le jeune homme comme son sauveur et décider de l'aider à éradiquer les ombres ayant envahi les terres de Q'umarkaj. Majin and The Forsaken Kingdom choisit donc la voie de la coopération dans une interdépendance qui est la base non seulement du gameplay mais également de la transmission d'émotions.
Sur les épaules d'un géant
A l'image du dernier épisode de la série Prince of Persia ou du récent Enslaved, Majin and The Forsaken Kingdom fonctionne sur le principe de compétences partagées entre deux personnages qui s'aventure un peu plus loin que le simple élément ludique. Marqué par l'influence d'ICO, le jeu met en avant la relation qui unit Tepeu et Teotl, une sorte de besoin réciproque des capacités de l'autre. Intelligent mais relativement faible, le voleur est obligé de compter sur la force d'un géant aux réflexions limitées. A la fois pataud et puissant, ce dernier bénéficie d'un design qui mélange idéalement le sentiment de crainte et d'affection que son statut inspire. Éprouvé par ce que le royaume endure et par des souvenirs douloureux lui revenant par bribes, Teotl est souvent émouvant dans une détresse qui semble coincée derrière ses grands yeux ronds. Descendant de Yorda dans sa maladresse et l'obligation pour Tepeu de lui dégager régulièrement la voie, le Majin s'en éloigne tout autant en tant que principal pivot du gameplay. Indispensable dans votre progression, Teotl nécessite d'être sans cesse dirigé par le biais des ordres donnés par Tepeu afin de lui éviter toute confrontation risquée. Car malgré sa puissance, il reste lent et très sensible aux attaques de groupes d'ennemis eux très véloces. Fonçant dans le tas sans vraiment de stratégie, il peut donc rapidement être tué si vous ne lui précisez pas quoi attaquer en priorité et comment. D'autant qu'il est également le seul à pouvoir aspirer les résidus de ténèbres qui s'accumulent sur Tepeu à chaque coup encaissé, conduisant le voleur à se transformer lui même un guerrier de l'ombre une fois recouvert.
Descendant de Yorda dans sa maladresse et l'obligation pour Tepeu de lui dégager régulièrement la voie, le Majin s'en éloigne tout autant en tant que principal pivot du gameplay. Indispensable dans votre progression, Teotl nécessite d'être sans cesse dirigé par le biais des ordres donnés par Tepeu afin de lui éviter toute confrontation risquée."
Risquant d'apparaître comme un simple outil ambulant, Teotl bénéficie de suffisamment de caractère et d'indépendance pour paraître vivant et donner une véritable impression d'entraide. Un système de collaboration qui fonctionne d'ailleurs très bien, grâce à une I.A convaincante qui réagit globalement rapidement et définit ses priorités de façon concluante. Une solidité dans les mécanismes du jeu sur laquelle il est agréable de pouvoir se reposer lors d'affrontements obligeant à changer souvent d'approche. Même si cela n'empêchera pas Teotl de refuser certains mouvement lors de combats de masse, qui s'avèrent par ailleurs l'un des points noir du titre. Confus visuellement et montrant les limites d'un Tepeu qui ne peut esquiver que par une roulade qui perd la caméra et oblige le joueur à recadrer à la main, ces derniers sont heureusement peu nombreux. La majorité des situations impliquent seulement quelques types de créatures qu'il est possible d'éliminer soit de manière furtive avec un sympathique empalement, soit à grands renforts de coups classiques en association avec Teotl. Une complicité qui s'insinue jusque dans le système de combat avec une série de « finish » incluant les deux personnages et qui permettent d'infliger de gros dégâts aux ennemis une fois ces derniers à terre ou groggy. Un bon moyen de remporter des éclats de gemme rouge qui augmentent le niveau d'amitié et par extension la force des ces attaques spéciales. Les éclats bleus étant quant à eux réservés à la montée en niveau de Tepeu et obtenus simplement lors de la défaite d'un soldat des ténèbres ou au fond d'un coffre. N'impliquant pas de leveling à outrance, ce système peut néanmoins être un support face à certains boss, dans un souci de ne jamais bloquer le joueur. Rarement difficiles, ces derniers demandent juste suffisamment de résistance pour venir à bout de la petite énigme qu'ils proposent à chaque rencontre, basée sur les éléments que le Majin récupère au gré de l'aventure.
Earth, Wind and Fire
Restant dans le thème des grandes quêtes fondatrices ou dans la filiation évidente avec Ocarina of Time du point de vue du game design, Majin and The Forsaken Kingdom met en avant la magie élémentaire par le biais de la collecte de fruits. Les plus imposants renferment les divers pouvoirs magiques du Majin, comme la foudre, le feu, ou encore le vent et sont la base des méthodes utilisées pour passer outre les divers obstacles que vous rencontrerez dans chaque zone. Les autres, plus réduits, contiennent des bonus de force, de résistance ou encore des augmentations de pouvoirs pour les magies élémentaires suivant leur couleur. Un principe de level up détourné à destination de Teotl en substance. Bien cachés au centre de zones prenant la forme de grands puzzles, ces fruits élémentaires nécessaires à la progression s'obtiennent en utilisant les pouvoirs préalablement acquis. Une avancée à la Zelda qui n'a rien d'originale, mais qui s'avère exploitée avec une certaine intelligence dans des "énigmes" bien pensées et très logiques, demandant parfois de longs détours avant d'entrapercevoir le but de la manœuvre. Une conception qui fonctionne idéalement dans chaque environnement mais qui s'inscrit dans un ensemble redondant conçu sur le fameux schéma : donjon – pouvoir – boss à vaincre avec ce même pouvoir. Et si évidemment les zones à traverser proposent à chaque fois des obstacles différents, la construction globale reste identique jusqu'à la fin. Un manque de surprise qui casse en un sens l'intérêt de la découverte et qui donne un aspect haché à une narration pleine de promesses. La présence pourtant agréable d'un monde semi-ouvert ne profite donc pas à un concept étonnamment binaire.
Petite parenthèse à la fois sobre et efficace, le titre de Game Republic n'est pas une sorte de successeur d'ICO ou un The Last Guardian avant l'heure comme ses choix de game design pourraient le laisser penser."
D'autant qu'avec une obtention chronologique des pouvoirs, il est possible de revenir dans des zones déjà visitées – grâce notamment à un transporteur accessible assez tardivement – afin de collecter certains coffres ou fruits. La progression elle-même se fait par allers-retours habilement masqués, donnant le sentiment d'effectuer une longue marche vers la conclusion. La cassure due à la construction répétitive n'en est que plus frustrante. Surtout quand des détails énervants viennent s'ajouter à cet aspect un peu trop mécanique, à l'image de l'inertie très appuyée de Tepeu qui rend certaines phases de plates-formes problématiques et une gestion des collisions pas vraiment au point, notamment dans les combats avec les soldats des ténèbres. Un aspect perfectible qui s'accompagne d'une réalisation très irrégulière qui risque de couper totalement le jeu du public. Malgré ses atours pas franchement affriolants, en dépit d'une direction artistique de grande qualité, lorgnant parfois justement sur Folklore, Majin and The Forsaken Kingdom est un jeu profondément attachant. Petite parenthèse à la fois sobre et efficace, le titre de Game Republic n'est pas une sorte de successeur d'ICO ou un The Last Guardian avant l'heure comme ses choix de game design pourraient le laisser penser. Réussissant à proposer un gameplay travaillé et bien pensé, Majin and The Forsaken Kingdom pèche par un classicisme forcené dans sa progression, qui ne permet pas à ses idées de se développer. Ce qui n'en fait pas un mauvais titre, simplement une belle aventure qui regarde trop vers le passé.