Test également disponible sur : PC

Test eXpérience 112

Test eXpérience 112
La Note
note eXpérience 112 15 20

eXpérience 112 ne ressemble à rien de ce que vous avez pu jouer jusqu'à présent. Certes, vous y retrouverez l'ambiance de certains bon vieux survival-horrors, sans les monstres (ni les flingues), et y accompagnerez une héroïne court vêtue, sans la natte (ni les flingues), mais vous découvrirez avant tout une interface unique, des interactions peu communes et un rapport au personnage principal absolument inédit. Tout cela est techniquement imparfait, manque souvent de rythme et l'univers (60's, expériences, mystères abyssaux, grandes découvertes), bien qu'extrêmement bien conçu, ne séduira pas tout le monde, néanmoins, l'oeuvre singulière de Nicolas Delaye mérite l'attention de tous les aventuriers las des pointés cliqués fadasses. 


Les plus
  • Concept vraiment novateur
  • Background extrêmement travaillé
  • Ambiance singulière
  • Un rêve pour les fouineurs
Les moins
  • Usine à gaz
  • Bugs vicieux
  • C'est quand même très lent
  • Scénario et univers ne plairont pas à tout le monde
  • Pas très beau
  • Prise en main difficile
  • Voyeurisme trop soft !


Le Test

Dans des mondes virtuels trop souvent standardisés, l'originalité n'est pas nécessairement une qualité, et une idée géniale ne fait toujours un grand jeu. Porté par ses somptueux In Memoriam, Lexis Numérique se fait fort de réaliser des jeux vidéo à la fois novateurs et extrêmement agréables à jouer. Dire que nous attendions avec impatience la nouvelle production du studio français est donc un bel euphémisme. Découvert il y a quelques mois dans les nouveaux bureaux aixois du développeur, eXperience 112, titre à part bâti autour d'un concept voyeuriste, nous avait méchamment intrigué et nous n'en pouvions plus d'attendre de ne pas prendre le contrôle de son héroïne. Une idée géniale pour un jeu... différent !


Les règles élémentaires de déontologie, Léa Nichols les a toutes violées. Dans son milieu, la recherche pas très nette, s'amouracher d'un sujet test est une faute grave qui peut compromettre une entreprise aux retombées scientifiques gigantesques. Le cœur a certes ses raisons, mais un esprit cartésien comme celui de cette jeune chercheuse très appliquée doit savoir l'ignorer. Incapable de le museler, la petite rouquine a franchi la ligne de non-retour et s'est donnée bien du bon temps avec le cent douzième candidat à une drôle d'expérience. Et cette relation l’a mené bien plus loin qu'elle ne le pensait.

 

Ghost Ship

 

Léa s'éveille un beau matin sur sa couchette, vêtue d'une très seyante chemise de malade. Autour d'elle, le chaos. Le tanker échoué dans lequel est installée la base de recherche du projet EDEHN n'est plus que ruine et désolation. Une flore vigoureuse a pris possession du navire, dont les fenêtres brisées et les structures rouillées indiquent un état d'abandon avancé. L'état de décomposition des quelques cadavres que l'héroïne trouve rapidement sur sa route la plonge encore davantage dans un abysse de perplexité. Incapable de se souvenir de quoi que ce soit, Léa voit sans comprendre : quelque chose est arrivé il y a des années à l'improbable équipage de ce navire sans destination. Un événement auquel elle a miraculeusement réchappé, tout comme elle semble ne pas avoir été affectée par le poids des années. Fraîche comme au premier jour de son activité à bord, elle va chercher à savoir, à découvrir la genèse du drame. Elle dispose, pour y parvenir, d'un allié de taille, seul capable de s'y retrouver parmi les enchevêtrements métalliques. Ce partenaire, c'est le joueur, parachuté responsable du système de surveillance de la base, capable de tout voir et de tout entendre mais incapable d'intervenir physiquement dans l'environnement. Lexis Numérique, studio particulièrement créatif, reprend ici la bonne idée de ses In Memoriam, et amène à reconsidérer la simple relation de l'utilisateur au support du jeu. Tout comme le CD d'In Memoriam ne devait pas être considéré comme un "jeu vidéo", mais plutôt comme une base de données communiquée par des enquêteurs dépassés, le DVD d'eXpérience 112 veut faire croire qu'il n'est qu'une simple application permettant de se connecter en direct au réseau de sécurité du tanker. Le support ouvre une porte vers cette jeune femme perdue, dont le seul espoir de s'en sortir réside désormais dans les  mouvements réguliers des caméras de surveillance que vous contrôlez. 

 

Fini de jouer

 

Pour son premier projet personnel, Nicolas Delaye a donc vu grand, très grand, repensant totalement la relation entre le "joueur" et le jeu, n'hésitant pas à redistribuer les rôles. Ici, l'héroïne c'est Léa, et vous n'agissez qu'en agent facilitateur de sa belle épopée. Une telle remise en perspective génère évidemment quelques frustrations. Très occupé à jouer votre propre rôle – un utilisateur lambda derrière un écran – vous ne vous identifierez probablement pas au personnage principal et peinerez à ressentir quoi que ce soit à l'égard d'une bien curieuse souris blanche qu'il vous faudra pourtant mener au bout d'un sinistre labyrinthe. Pour vous affranchir de votre mission, vous disposez d'un accès quasi-total au système d'exploitation utilisé par le service de sécurité du tanker. Et le terme d'OS est vraiment approprié : multi-fenêtrages, dossiers et sous-dossiers, dont certains sont verrouillés par des codes à récupérer, on a souvent l'impression de s'amuser avec une version basique, et visuelle, de Windows. L'élément essentiel mis à votre disposition n'est rien d'autre qu'une carte des lieux, sur laquelle sont localisés, sous la forme d'icônes interactives, toutes les caméras, toutes les portes et tous les systèmes électriques et électroniques. En cliquant sur une caméra, une nouvelle fenêtre s'ouvre qui vous présente son point de vue. Vous pouvez parfois procéder à une rotation afin d'observer un élément en particulier et, en progressant dans l'aventure, Léa débloquera différentes améliorations pour vos pupilles artificielles, qui vous permettront, entre autres, de voir la vie en infrarouge. La demoiselle est toutefois totalement dépendante, et s'en remet entièrement à vous pour avancer. Les caméras vous permettent donc d'évaluer la dangerosité de l'environnement (fort dépeuplé au demeurant) et, surtout, de trouver, en zoomant partout, le papier qui traîne, la clé qui brille dans un tiroir et tout autre accessoire indispensable à la bonne marche de l'aventure. Voir, c'est une chose, mais faire comprendre à la demoiselle qu'elle doit regarder à tel endroit est une autre affaire, et il vous faudra, pour y parvenir, jouer avec les lumières, les diodes et autres téléphones pour attirer son attention.

 

Eloge de la lenteur

 

L'exercice aurait pu être périlleux : un level design défaillant, une IA mal en point, et c'est tout le concept qui risquait de sombrer. Après trois ans de travail, le studio aixois de Lexis Numérique a su éviter la plupart des écueils, sans toutefois parvenir à atteindre la perfection. Il est ainsi fréquent d'attirer l'attention de Léa vers quelque chose par simple automatisme, un peu comme l'habitué des point'n'click balaie systématiquement tous les écrans des jeux du genre afin de ne rien rater. Ici aussi, on ne réfléchit pas toujours : on clique et on voit ce qu'il se passe. L'interface ne donne de toute façon pas envie d'agir intelligemment. Pour original qu'il soit, le système de fenêtrage est assez indigeste, et l'on passe  autant de temps à réorganiser son bureau virtuel qu'à chercher des infos à l'image. Il n'est pas rare non plus de se perdre dans les dossiers des différents membres de la base, qu'il est pourtant indispensable de consulter pour récupérer des codes personnels et comprendre un peu ce qui s'est tramé dans ce coin perdu de l'océan. Pour ne pas vous ruiner l'aventure, on se gardera d'ailleurs bien de vous révéler quoi que ce soit sur la seconde partie du jeu, dans laquelle Léa est amenée à rencontrer... l'inattendu. Mais avant de faire de grandes découvertes, il vous faudra préalablement vous accommoder du rythme à part d'eXperience 112. Loin de la nervosité de la plupart des jeux vidéo actuels, le titre de Nicolas Delaye est un véritable éloge de la lenteur, un titre où la minutie et la patience sont récompensées. Léa n'est pas une flèche, elle réfléchit doucement, parle beaucoup et ne court pas. Des caractéristiques qui tendent à rendre fou, particulièrement lorsque vous venez de traverser la moitié du tanker (qui, bien que salement endommagé, reste un grand bateau) et que la donzelle tend son joli minois vers une caméra et vous dit "allons chercher ça à l'autre bout du navire". Pour ne rien arranger, la version commercialisée est percluse de bugs irritants. Mais attention, il ne s'agit pas ici de crashs bien propres ou de polygones qui partent en vrille, mais uniquement de trucs vicieux. Scripts qui ne s'enclenchent pas, échelles "creuses", ils sont fort nombreux, ces petits pépins qui pourrissent la vie des aventuriers. Evidemment, tout cela finira par être corrigé, mais en attendant, la communauté donne déjà de la voix.

 

Une expérience expérimentale

 

Lent, buggué, paré d'une interface aussi sexy qu'une machine-outils soviétique, eXpérience 112 souffre aussi d'une maniabilité complètement atroce durant les rares phases où le joueur dirige quelque chose (en l'occurrence un robot et un bathyscaphe) ainsi que d'une réalisation assez moyenne. N'espérez pas pouvoir jouer les voyeurs opportunistes, la chemise que porte Léa au début du jeu est loin d'être souple, et la texture de sa peau est à des lieux de ce que l'on peut voir chez la concurrence. Lexis Numérique a naturellement une excellente raison de ne pas s'être payé la dernière mouture de l'Unreal Engine : le joueur pouvant utiliser jusqu'à trois caméras simultanément, un affichage en temps réel de la même scène selon trois angles différents avec un rendu haut de gamme aurait mis à genoux toutes les machines du marché. Beaucoup de défauts donc, mais auxquels il ne faut pas s'arrêter. Evidemment, si vous aimez les FPS ou les RTS et que ce que vous cherchez en priorité dans les jeux vidéo, c'est un moyen sain de vous libérer de vos pulsions violentes, eXpérience 112 n'est pas fait pour vous. Au contraire, son rythme lent et les longues heures nécessaires à l'exploration complètes des éléments de background pourraient bien vous donner une irrésistible envie de balancer votre unité centrale à la tête du premier quidam. En tentant de réapprendre aux joueurs à prendre leur temps, le titre de Lexis Numérique se fera certainement plus d'ennemis que d'amis. Mais pour son ambiance élégamment oppressante, sa belle qualité d'écriture, son concept extrêmement original et sa louable volonté de rappeler que l'aventure sur PC ne peut se résumer à quelques point & click plus ou moins misérables, eXpérience 112 mérite toute l'attention des vrais aventuriers.





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