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Les amateurs du genre peuvent foncer les yeux fermés. City Life nous offre presque un sans faute et apporte un renouveau total dans les simulations urbaines. On aimerait autant d’audace dans tous les jeux de gestion.
- L’aspect sociologique
- Une ville ultra détaillée
- De très bons mécanismes de jeu
- Temps de chargement
- Pas de décrets possibles
Et voici qu’arrive le plus curieux des jeux de gestion urbaine. Prenant le contre-pied absolu des cadors du genre, le développeur Monte Cristo signe ici un de ses meilleurs jeux. Et si nous n’étions pas en période de grippe aviaire, j’oserais bien un cocorico car c’est un studio français.
Depuis le premier Sim City, les joueurs ont pu voir défiler sur leurs écrans de très nombreux jeux de gestion où ils incarnaient le maire d’une bonne petite bourgade tout droit tiré de Desperate Housewives. Jusqu’à aujourd’hui, le but de ces jeux – en général, ils n’ont pas de fin – consiste à gérer la ville la plus propre possible, sans une tâche d’huile sur la route, sans peau de banane sur les trottoirs. Le joueur optimise donc les rouages de la cité pour que les habitants mangent à leur faim, avec des services de santé parfaits et que la police ne joue qu’un rôle de prévention, voire d’assistante sociale. Bref, de la science-fiction où l’utilisateur propre sur lui fonde une ville à son image. Le propos ici n’est pas de critiquer l’excellent Sim City mais il faut bien admettre que cette série sent un peu l’eugénisme. C’est un peu comme si tous les habitants de Sim City travaillaient chez Ikea, si l’on a un peu en tête la vision de Brad Pitt dans Fight Club. City Life, n’a heureusement rien à voir avec ça. Ici, ce ne sont pas simplement les bâtiments placés aux bons endroits qui permettront à votre ville d’être équilibrée, un autre paramètre entre en ligne de compte, et peut être même le plus important. Dans City Life, il existe six types de communautés, des plus pauvres (les démunis), aux plus riches (les élites), en passant par les alters, les bobos, les cols blancs et les cols bleus. Et là…
Et là, c'est le drame...
La plupart de ces communautés ne peuvent pas se supporter. Si vous regardez bien ce qui se passe dans les rues, l’élite qui se promène dans un quartier de démunis se fera sans doute agresser. Il convient donc de ne pas mélanger les genres. Vous devrez donc gérer la topographie des lieux mais également délimiter les quartiers huppés des quartiers populaires avec plein de pauvres dedans. Beurk ! Jamais l’ironique phrase de Bedos n’aura été aussi vraie : "Vouloir mourir pour le peuple ne signifie pas être d’accord pour vivre avec". D’un autre côté, les pauvres de City Life sont plutôt cools. On leur met une quinzaine de CPE sur la tronche, rien, pas une manif. A première vue, le joueur se dit qu’il va créer six quartiers bien distincts, de plus en plus riches pour jouer les Rockefeller. Ce n’est malheureusement pas aussi simple que cela. Chaque communauté possède des bâtiments spécifiques : les entreprises et les structures de loisirs. C’est justement grâce à elles que le joueur peut attirer tel ou tel type de personnes dans une zone. Les choses se compliquent quand on commence à examiner les entreprises. Prenons par exemple un hôtel d’un certain standing. Peut-être sera-t-il dirigé par une élite mais il faut bien des larbins pour nettoyer chambres et vaisselle… Vous aurez donc besoin de tout le monde, et dans des proportions assez égales. Vous vouliez créer la ville parfaite, rempli de nababs milliardaires dont la seule préoccupation est de choisir le home cinéma idéal, Monaco, en quelque sorte ? Ce jeu n’est pas fait pour vous. Une ville sans démunis ne peut faire fonctionner de façon optimale ses installations électriques et ne peut évacuer ses déchets. La ville peut prospérer mais elle doit importer de l’énergie et faire appel à des sociétés extérieures pour les poubelles. Et cela reste extrêmement onéreux
Il faut de tout pour faire un monde
Dans le même ordre d’idée, les cols bleus ou les alters occuperont des postes clés dans les hôpitaux. Sans eux, la santé se détériore et toutes les belles constructions des élites fondront comme peau de chagrin. Cela demeure frustrant de ne pas pouvoir bénéficier de la plus belle ville du monde. Mais à moins de faire ramasser les poubelles aux élites, c’est impossible. J’ai tenté de faire bosser le vicomte dans les égouts, rien n’y fait, il campe sur ses positions, droit dans ses bottes. Bref, un équilibre de jeu assez délicat à trouver mais tellement passionnant. J’ai cependant trouvé une astuce diaboliquement efficace. En général, dans un début de partie, vous examinez la géographie et vous estimez le futur agencement de la ville. Les pauvres par ici, les plus riches par là. Vous fondez un quartier d’alters, un autre de col bleu (pour créer un quartier de démunis, il faut vraiment le vouloir et ne placer aucune infrastructure publique). Plutôt que de vous lancer dans une ville moyenne, commencez par fonder quelque chose de navrant, un bidonville total. Aucun médecin, rien à bouffer. Créez d’énormes quartiers, avec des entreprises destinées aux démunis (avec les bâtiments spécifiques à cette classe). D’une part, ce n’est pas cher et les coûts d’entretien sont ridicules. Votre ville ne ressemblera à rien (les dernières photos représentent une cité de ce genre). Mais vous allez engranger un pognon fou car aucune structure administrative ne vous coûtera des sous. En quelques mois, grâce aux impôts, vous aurez en poche l’équivalent de deux ou trois fois l’emprunt maximum du jeu ! Ce n’est que petit à petit que vous améliorerez chacun des quartiers créés au début. Un seul petit regret dans les mécanismes ; on aurait aimé, comme dans Sim City la possibilité d’utiliser des décrets pour régler certains problèmes de façon globale (transports en commun gratuits, par exemple). Sinon, nous sommes bien devant un véritable concurrent de Sim City, sans doute même plus intéressant, mais il faut supporter la vue des pauvres.
TechniCITé
Ces remarques élogieuses arrivent pourtant après quelques longues séances d’agacement. Les temps de chargement sont en effet prodigieusement longs. Oui mais bon, les louanges vont recommencer. En effet, l’attente vaut le coup car la qualité graphique atteint des sommets. Reprenons notre Sim City par exemple. Le rêve de Maxis a toujours été de zoomer dans la ville jusqu’à observer chaque personne comme dans les Sims. Ce sera peut-être pour la prochaine fois. City Life y arrive. Bien entendu, ce que l’on voit au zoom maximum, ce sont des voitures qui passent et des gens qui se promènent, sans grande variété de mouvements. De temps en temps, l’un d’entre eux porte des sacs, un autre promène un landau. Non, ils ne se regardent pas dans la glace pendant des heures pour augmenter leur charisme, ne peignent pas toute une soirée pour améliorer leur créativité et baisser leur stress. Néanmoins, ça grouille de partout et ce sont surtout les éléments du décor qui frappe. Certaines des photos dans ce test ne vous paraîtront pas des plus intéressantes. Elles ne sont là que pour montrer le niveau de détail dans la ville. Les panneaux sont d’un grand réalisme, par exemple. Ce n’est pas grand-chose mais il faut avoir en tête que le dézoom maximum est une vue satellite ! On peut lire les noms des journaux dans les distributeurs et les exemples sont très nombreux.