Test Another World sur PC

Il y a quinze ans, un jeu vidéo pouvait se réaliser à la force et à la volonté d’un seul homme. Programmeur, graphiste et concepteur, Eric Chahi donnait naissance à Another World, jeu culte s’il en est, avec l’aide de Jean-François Feitas, responsable des musiques abyssales de ce soft. Depuis, les choses ont changé, évolué. Devenue une industrie de masse et lucrative, le jeu vidéo est parvenu en l’espace d’une quinzaine d’années à dépasser le cinéma en matière de chiffre d’affaire. Avec l’arrivée des nouvelles techniques, la production et le développement d’un jeu demandent désormais de grands moyens pour obtenir un résultat digne de ce nom. Pour autant, malgré un développement on ne peut plus modeste, Another World possède incontestablement l’aura des grands. Et son scénario, au niveau de lecture multiple, fait indéniablement partie des plus grand atouts du titre d’Eric Chahi.

L’autre monde

L’histoire d'Another World est pourtant simple. Lester Knight Chaykin, jeune scientifique hors-pair, est sur le point de faire une découverture inédite sur l’accélération des particules. Manque de pot, notre jeune homme va être subitement propulsé dans un autre monde, suite à une expérience qui ne s’est pas déroulée comme il le souhaitait. Quand la foudre s’en mêle… Toujours est-il que Lester va devoir faire face à ce monde hostile auquel il se sent subitement étranger. Où se trouve-t-il ? Quelle est donc cette race de créatures à la civilisation avancée et à la maîtrise technique supérieure aux Humains ? On n’en saura pas plus et c’est cette absence de réponse qui fait partie intégrante du charme qui se dégage d’Another World. Cette redécouverte inespérée du jeu signé Chahi nous permet de constater que les critères de jeu imposés en 1991 n’étaient guère les mêmes. Comme tous les jeux old school de la fin des années 80 et du début des années 90, Another World mise sur la mise à l’épreuve du joueur et de la progression par l’échec. En d'autres termes, il faut perdre et recommancer des passages plusieurs fois, avant de pouvoir progresser. Et à moins de connaître le jeu par cœur et de maîtriser chacun des mouvements de Lester, il sera difficile d’atteindre son but sans jamais perdre une vie. Tout est calibré, millimétré et le moindre faux pas se conclut aussitôt par une mort immédiate. Fort heureusement, un système de sauvegarde par mot de passe permet de reprendre là où l’on s’était arrêté, mais les énigmes parfois complexes rendent le jeu encore plus difficiles à terminer.

Comme tous les jeux de cette époque, Another World : Edition Spéciale 15ème Anniversaire se contentait d’une poignée de boutons pour pouvoir pendre le jeu en mains. La course, le saut et le tir (en mettant de côté les déplacements de Lester), voilà à quoi se résument les mouvements de notre héros solitaire. C’est peu certes mais amplement suffisant pour travers la trentaine de niveaux qui nous attend. Pas de progression ni de customisation pour parvenir à ses fins, il va falloir faire preuve de sang-froid, de dextérité mais aussi d’un peu de jugeotte pour espérer résoudre quelques énigmes pas toujours évidentes à capter. Vous l’avez compris, Another World : Edition Spéciale 15ème Anniversaire ne change absolument rien au titre original en termes de gameplay et de sensations, laissant la nostalgie gagner les émotions des plus vieux joueurs que nous sommes. Désormais jouable sous Windows et dans les résolutions actuelles, cette nouvelle version du jeu a reçu un léger lifting graphique, tout en conservant son aspect épuré de l’époque. La palette de couleurs a également été revue à la hausse et on passe désormais de 16 couleurs différentes à un nombre beaucoup plus important, ce qui apporte un confort visuel des plus appréciables. Spéciale Edition oblige, Another World : Edition Spéciale 15ème Anniversaire dispose d’une série de bonus plutôt appréciables. "Making of" intéressant, journal de développement, carnet technique, bande originale remixée sur un second CD, il y a de quoi se faire plaisir, d’autant que le jeu est vendu moins de 10 €. Manquer une telle occasion relèverait presque du crime de lèse majesté.