Test A Plague Tale Innocence : une belle histoire qu'il ne faut absolument pas rat-er
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- La gestion organique des rats
- L'attention portée aux détails
- L'interface personnalisable
- La BO aux accents médiévaux
- Très bonnes VA et VF
- Une narration maîtrisée
- L'aberration chromatique, aberrante !
- Des gardes vraiment pas malins
- L'absence d'expressions faciales
- Une durée de vie qui ne dépasse pas les dix heures
Nous sommes en l'an de grâce 1348, dans le beau royaume de France. La famille De Rune coule des jours heureux, à peine troublés par les échos de la guerre de Cent Ans et l'étrange mal dont souffre le petit Hugo. Bon d'accord, le tableau n'est pas exactement idyllique. Mais par rapport à ce qui va arriver, ce n'est rien ! Entre l'assassinat de leurs parents par l'inquisition et le déferlement de rats porteurs de peste, Hugo et sa grande sœur Amicia ont clairement mangé leur pain blanc. A Plague Tale propose un univers à l'image de sa direction artistique : globalement réaliste, avec quelques éléments fantastiques ici ou là histoire de pimenter la recette. Le tout fonctionne très bien et se voit renforcé par une narration maîtrisée, qui sait prendre son temps quand il le faut, développer les relations entre les différents personnages, et aborder certains sujets avec beaucoup moins de légèreté que la plupart des jeux vidéo. Ainsi, les premiers meurtres commis par Amicia et Hugo, aussi inévitables et justifiés soient-ils, seront plutôt mal vécus par ces derniers. Leur jeune âge et leur bonne éducation ne les ont pas préparés à cela, et le jeu en tient compte. De manière plus attendue, mais également réussie, les liens fraternels qui unissent nos deux héros sont largement mis en avant, via les dialogues et les événements scénaristiques essentiellement, mais également à travers quelques petites interactions touchantes. En début d'aventure on passe par exemple beaucoup de temps à contrôler Amicia alors même qu'elle doit tenir quasiment en permanence la main de son petit frère. Au fil du temps d'autres gamins viendront enrichir la tribu, et à chaque fois les relations entre ces différents compagnons de route seront développées avec soin. De plus, certains passages effectués en compagnie de ces personnages pas si secondaires sont l'occasion de petites modifications de gameplay temporaires, puisqu'il est possible de leur donner des ordres simplistes (Hugo peut se faufiler dans certains passages, Melie sait crocheter les serrures, Rodric est capable d'assommer les ennemis isolés...)
Vous le savez certainement déjà, A Plague Tale fait la part belle à l'infiltration, ce qui s'avère d'ailleurs parfaitement cohérent avec le profil de nos jeunes héros. Pour éviter la confrontation avec les soldats de l'inquisition on pourra donc s'accroupir derrière des éléments de couverture, se dissimuler dans des hautes herbes, ou encore lancer des pierres sur des objets métalliques ou casser des pots pour détourner quelques instants l'attention d'un ennemi. Par ailleurs, Amicia est munie d'un fronde, certes bruyante mais capable de mettre hors d'état de nuire un soldat démuni de casque. Tout cela est très classique, mais la présence de véritables hordes de rats (le jeu peut en gérer plusieurs milliers simultanément) vient rapidement changer la donne. Visuellement, la gestion organique de ces amas de rongeurs est très impressionnante. Ils grouillent littéralement, dévorent tout ce qui se trouve sur leur passage, et se faufilent dans le moindre interstice pour éviter les sources de lumière. Cette faiblesse est naturellement mise à profit par Amicia et sa bande qui, pour éloigner ces immondes rats noirs, pourront porter des torches, enflammer des bâtons (qui se consument rapidement), pousser des brasiers mobiles, orienter des projecteurs pivotants, ou encore utiliser la fronde pour décrocher des lustres. A l'occasion, on pourra également faire tomber des jambons pour attirer les rongeurs, ou briser les lanternes portées par certains gardes afin qu'ils se retrouvent rapidement désossés. Tout cela constitue le cœur d'un gameplay un poil dirigiste et mécanique par moments, mais qui arrive à dépasser le stade du gimmick ou du très bon prototype grâce à une évolution constante. Ainsi, Amicia devient capable au fil de temps de créer de l'Ignifer pour allumer les braises, du Somnum pour endormir un ennemi approché par l'arrière, du Devorantis pour forcer un soldat à retirer son casque, du Luminosa pour détruire un groupe de rats, de l'Odoris pour attirer les rongeurs à un endroit précis (si possible près d'un ennemi…) et de l'Exstinguis pour éteindre les feux. Et on gardera sous silence une dernière possibilité disponible vers la fin de l'aventure, histoire de ne pas vous gâcher la surprise. Toutes ces capacités servent à la fois à échapper aux ennemis et à résoudre quelques énigmes environnementales jamais trop complexes.
AH C'EST BEAU STUDIO
Les amateurs d'artisanat et d'arbres de talents seront quant à eux heureux d'apprendre qu'il est possible de ramasser alcool, tissu, cuir, outils, salpêtre et autres ficelles dans les décors afin d'améliorer l'équipement et les aptitudes d'Amicia. On dénombre ainsi une vingtaine d'améliorations (déplacements plus silencieux, visée plus rapide, quantité de munitions plus importante, durée de l'Odoris augmentée, fronde capable de faire sauter les casques, etc.). Tous ces éléments servent donc un gameplay agréable, auquel on pourra tout de même reprocher un effort minime en matière d'intelligence artificielle. Il est notamment très facile de semer des gardes qui nous ont repérés, ces derniers ayant tendance à ne nous poursuivre ni loin ni longtemps. Mais ce serait une grave erreur de bloquer sur ce défaut (d'ailleurs commun à beaucoup de jeux d'infiltration) car A Plague Tale a beaucoup de qualités à faire valoir. Notamment en ce qui concerne l'attention portée aux détails. Ainsi, plutôt que d'aiguiller le joueur bloqué dans une énigme par un système d'indices artificiel, le jeu préfère glisser une indication orale par l'intermédiaire des personnages à l'écran. C'est nettement plus immersif, et certains joueurs n'auront peut-être même pas conscience d'avoir été aidés. On peut également remarquer de nombreuses animations "inutiles donc indispensables", comme Hugo qui croque dans une pomme qu'on vient de lui donner, Amicia qui n'utilise pas un inventaire magique pour ranger un gros livre mais l'attache dans son dos, des personnages qui ralentissent et lèvent exagérément les pieds quand ils traversent une étendue boueuse, et tout plein de petites animations venant renforcer le lien entre les personnages évoqué plus haut (Amicia qui porte Hugo quand il se sent mal, qui aide les plus jeunes à grimper, qui attend son frère en bas d'une échelle...).