Red Dead Redemption
La traversée du désert se poursuit pour les amateurs de westerns virtuels. Sur PC comme sur les machines de salon, les titres mettant à l’honneur l’univers cher à John Ford, Sergio Leone ou Clint Eastwood sont aussi rares que les points d’eau dans la Vallée de la Mort. Rapidement venus à bout de Call of Juarez : Bound in Blood, FPS multiplateforme paru l’été dernier, les cowboys d’appartement rongent depuis leur lasso. Le salut viendra peut-être de Rockstar qui, plus de cinq ans après Red Dead Revolver, remet en selle son GTA-like aux temps des pionniers.
Ancien hors-la-loi, John Marston coule aujourd’hui des jours heureux loin de l’agitation perverse des campements nés de la ruée vers l’or, et surtout à bonne distance de ses anciens associés, gueules cassées patibulaires et psychotiques. Hélas, et comme le savent si bien bon nombre de héros, le passé est chose autrement plus difficile à enterrer qu’une cassette pleine d’or dans la grande prairie. Pour les besoins de la nouvelle production de Rockstar San Diego, l’ami John va donc être amené à ressortir son attirail de pistolero.
L’homme qui n’a pas d’étoile
Une winchester, un six-coups, un lasso et un canasson, il n’en faut guère plus à notre parvenu pour redevenir la terreur de l’Ouest qu’il fut en des temps lointains. Ainsi paré, Marston va tenter de chasser ses vieux fantômes, ou plutôt de flinguer ses acolytes d’hier. Une quête violente et solitaire, qui lui permettra de largement explorer une région conquise mais loin d’être pacifique. Malgré l’anéantissement de la résistance indienne et l’arrivée du chemin de fer, les pistes du grand Ouest restent dangereuses, tout particulièrement depuis que les Etats-Unis et le Mexique se disputent la région. Divisé en trois secteurs – West Elizabeth, New Austin et Nuevo Paraiso – Red Dead Redemption se déroule d’ailleurs des deux côtés de la frontière officielle et sur un terrain de jeu plus grand que celui de GTA San Andreas. Les territoires les plus vastes ne font pas forcément les plus grands jeux, ce dont Rockstar Games est d’autant plus conscient que le décor choisi pour son nouveau produit n’est pas le plus vivant qui soit. Vastes plaines désertiques, canyons écrasés par le soleil, le Far West fait moins rêver lorsque l’on doit y chevaucher pendant des heures. En as du divertissement, les développeurs californiens ont donc conçu leur produit autour d’un triptyque a priori miraculeux, qui devrait éviter au joueur de mourir d’ennui au cours de sa chasse à l’homme : exploration, action, aventure. Monté sur un fier destrier, qu’il aura emprunté à quelqu’un ou acheté dans un bled perdu, à moins qu’il n’ait réussi à passer le licol à un cheval sauvage, le repenti pourra effectivement explorer librement les alentours, tous les alentours ! C’est simple, si vous voyez quelque chose au loin, vous pouvez vous y rendre. La profondeur de champ est assez fabuleuse et si les distances sont plus courtes qu’il n’y paraît, l’impression de liberté est franchement saisissante. De plus, les étendues qui s’offrent à vous ne manquent pas de mystères. Des trésors y sont enterrés – que vous pourrez retrouver en mettant la main sur des cartes plus ou moins codées – et des bandits s’y terrent. N’étant pas un tendre, Marston se fera un plaisir de flinguer tous les foies jaunes qui croisent sa route, et en profitera pour libérer ici la veuve, là l’orphelin. Une diligence est attaquée sous ses yeux ? Il aura tout loisir de lui porter secours. Des prisonniers s’échappent d’un convoi pénitentiaire ? Il pourra les rattraper au lasso, ou les descendre. Les massacres de bandits ou les bonnes actions lui permettront de gagner quelques poignées de dollars, mais également des points d’honneur et/ou de réputation… ou d’en perdre si les dommages collatéraux de ses exploits sont trop nombreux. Plus son score sera élevé, plus les bénéfices seront importants. Coups de main de l’armée, ristournes chez les marchands, vous goûterez vite aux avantages de la vie de star du Nevada.
Coups de feu dans la sierra
Mais la célébrité attise les jalousies, et plus votre réputation sera élevée, plus nombreux seront les chiens fous à venir vous provoquer en duel. Nous n’avons hélas pu assister à l’un de ces têtes-à-têtes sanglants, mais les quelques séquences de gunfight dévoilées lors de la démonstration font honneur au genre. C’est joli, ça canarde en vue à la troisième personne, ça saigne de partout et, si l’on passe sur le ragdoll foireux des morts, les animations des différents protagonistes sont aussi soignées que détaillées. Ainsi, lorsqu’un ennemi tombe sous votre mitraille, son doigt se crispe une dernière fois sur la gâchette de sa pétoire, qui crache une ultime balle dans une direction forcément aléatoire. Gare au civil qui passe par là ! Bien qu’un bullet time bienvenu vous permette d’ajuster votre tir, ici comme ailleurs, ennemis et amis se confondent parfois dans le feu de l’action. Et ce d’autant plus que les amis d’hier ne seront peut-être pas ceux de demain. John va en effet vivre une sacrée aventure, forcément riche en rebondissements. Le héros doit composer avec les troubles politiques qui agitent la région et composer à la fois avec les rebelles mexicains et l’armée régulière. Qu’il descende un représentant de l’autorité officielle, et il verra se multiplier les affiches "Wanted" décorées de sa bouille et passera du statut de chasseur de primes à celui de hors-la-loi recherché. Heureusement, dans l’Ouest, un petit service ou quelques dollars règlent bien des problèmes, et il lui suffira d’aider l’administration (à se débarrasser d’un indésirable par exemple) ou de racheter sa liberté dans un bureau du télégraphe pour être pardonné. Une fois redevenu un honnête citoyen, il pourra retourner en toute tranquillité en ville, et faire une petite virée au saloon où l’attendent alcools, jeux de hasard et prostituées. Seuls les deux premiers peuvent être consommés, John, en homme intègre et droit, préférant le badinage à la bagatelle. Le plaisir n’en sera pas moins au rendez-vous tant les dialogues sont savoureux et la mise en scène classieuse. La finition graphique des personnages n'est pas toujours parfaite, mais Rockstar semble nous préparer là une vraie belle balade sauvage, brillamment écrite et franchement riche. Apprentis cow-boys, lustrez votre selle, votre solitude prendra fin sur Xbox 360 et PS3 en avril 2010.