Nicky Larson : Netflix a réussi l'impossible avec son City Hunter live-action (CRITIQUE)


Nicky Larson : Netflix a réussi l'impossible avec son City Hunter live-action (CRITIQUE)

Adapter City Hunter / Nicky Larson en prise de vues réelles est un exercice très périlleux, et ce pour plusieurs raisons. Hormis de rares exceptions, les adaptations live-action de nos mangas ou animés préférés par Netflix, c'est jamais très probant. Cela dit, il est vrai que ces derniers temps, la plateforme de streaming s'est rattrapée avec One Piece et dans une moindre mesure Avatar le Dernier Maître de l'Air. L'autre problème avec City Hunter en 2024, c'est que le personnage peut poser problème aujourd'hui. Forcément, quand on sait que Ryo Saeba / Nicky Larson est un gros pervers doublé d'un obsédé sexuel et qui passe son temps à faire valoir la notion de Mokkori, c'est-à-dire l'éloge de l'érection, de nos jours, on est pas loin de la polémique ou d'un drama Twitter. Adapter City Hunter sans dénaturer ce qu'il représente donc, c'est marcher sur des oeufs. Mais vous savez quoi ? Non seulement Netflix a trouvé la parade pour ça, mais en plus est parvenu à trouver le meilleur acteur qui pouvait incarner au mieux Ryo Saeba, un Ryohei Suzuki, qui nous livre une prestation hors du commun.


C'est assez difficile à croire, mais saviez-vous qu'avant la proposition 2024 de Netflix, il n'y a jamais eu d'adaptation live de City Hunter par les Japonais ? Et pourtant, c'est parfaitement véridique. Il y a eu le film de Jackie Chan en 1993, complètement farfelu et qui n'avait rien à voir avec l'oeuvre originale. Je l'ai revu avec mes yeux d'adulte il y a une dizaine d'années et j'avoue que c'était délire, limite nawak. Et puis, il aura fallu attendre la proposition de Philippe Lacheau en 2019 et pour laquelle j'ai une grande tendresse, car c'était avant tout une adaptation réussie de la version française de Nicky Larson du Club Dorothée, charcutée à l'époque avec leurs moyens du bord. Le film a d'ailleurs une vraie fan-base et j'ai revu le film il y a quelques jours juste avant l'adaptation de Netflix et c'est vrai que Lacheau avait compris quelque chose et que c'était quelque chose de sincère, un film qui vient du coeur. Perso je trouve que c'est le métrage le plus réussi de la filmo de la bande à Fifi. Il y a bien eu d'autres films non officiels qui ont repris l'esprit City Hunter, mais c'était des projets bien trop obscurs et qui sont passés inaperçus même auprès des initiés. C'est donc Netflix qui s'est collé au projet, avec Yuichi Sato à la réalisation et Tatsuro Mishima à l'écriture, lui qui avait déjà adapté Yu Yu Hakushu pour Netflix il y a quelques mois. Ensemble, ils ont réussi à accoucher d'un film réussi, loin d'être parfait c'est sûr, et on va revenir sur les choses qui m'ont gênées dans quelques minutes, mais en tant qu'adaptation live-action, c'est une belle réussite c'est indéniable. Ils ont surtout réussi à capter l'esprit du manga et on le voit dès les 10 premières minutes du film.



Déjà, on se retrouve plongé en plein Tokyo, dans le quartier de Shinjuku, là où se passe le manga depuis toujours et qu'on retrouve pour la première fois dans un film en vrai. Rien que ça, ça te pose un contexte et puis pour les gens qui sont déjà allés au Japon, c'est un plaisir visuel de tous les instants de voir Kabukicho filmer de cette manière, avec ses restaurants, ses échoppes, ses dédales labyrinthiques, ses néons partout, ses rues étriquées, ses gens farfulus... Shinjuku, c'est le 4è personnage du film après Ryo Saeba, Kaori et son frère Hideyuki Makimura. Il y a d'ailleurs un moment que j'aime beaucoup dans le film, c'est la course-poursuite avec ce plan zénital où la caméra suit les protagonistes dans leurs courses. Rien n'innovant ou d'exceptionnel, mais ses quelques plans montrent tout de même qu'il y a une envie de se donner du mal en terme de mise en scène. Quelque chose qu'on retrouvera souvent dans les scènes d'action, notamment la scène de gunfight à la fin du film.

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MOKKORI SHOW

Donc oui, ces 10 premières minutes donnent le ton du film et ce qui est aussi génial, c'est que le métrage ouvre d'emblée sur la personnalité bien foutraque de Ryo Saeba. Oui, c'est un détective privé qui tire au Magnum comme personne, mais c'est avant tout un gros pervers et ça, le film ne l'a pas oublié. Au point que les premières images, c'est le regard de Ryo Saeba qui plonge dans le décolleté de sa cliente, pour ensuite le voir sur les toits de Shinjuku pour mater des filles qui sortent des bains publics et chanter qu'il a la banane, en toute décontraction. Un peu plus tard, on a carrément une scène dans un club privé où Ryo Saeba nous fait le plaisir d'un Mokkori Show, complètement à poil, avec juste quelques ustensiles pour masquer son sexe. Un peu plus tard, l'étalon de Shinjuku n'hésitera pas à faure usage de son gros cheval pour empêcher des photographes, eux aussi pervers, de photographier une cosplayeuse en contre-plongée, c'est-à-dire sous sa jupe. Une scène vraiment bien délire, d'autant que la mise en scène et le montage appuie bien à chaque fois sur l'humour. Donc, même en 2024, en pleine ère post MeToo, ce City Hunter ne cache jamais les penchants obscènes de son personnage principal, sans jamais sombrer dans le vulgaire ou franchir une ligne trop sexiste.

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RYOHEI SUZUKI : LA RÉVÉLATION

Tout cela aurait pu virer au graveleux un peu gênant ou maladroit si l'acteur en question n'était pas parvenu à retranscrire l'esprit de Ryo Saeba / Nicky Larson, mais là encore, la production a eu un flair incroyable en proposant le rôle de notre détective au comédien Ryohei Suzuki. Je ne le connaissais pas, malgré sa grande filmographie, mais bordel, c'est la révélation du film. Ryo Saeba en live-action, c'est lui, aussi bien dans le physique que l'interprétation. Et puis surtout, il est capable de passer du sérieux au côté absolument pervers et burlesque de Ryo Saeba en un claquement de doigt. Jamais il n'est ridicule, il est à chaque fois dans le bon ton. C'est juste incroyable la perfection de ce choix de casting. Il en va de même avec le personnage de Hideyuki Makimura, son coéquipier et frère adoptif de Kaori / Laura, incarné par Masanobu Ando. Lui aussi est parfaitement casté. Quand je pense que le mec a bientôt 50 ans, c'est juste du délire total tellement il fait jeune. Et enfin, le personnage de Kaori, ou Laura en VF, est elle aussi une réussite de casting, avec l'actrice Misato Morita qui l'incarne plutôt bien, sachant qu'on est davantage sur les débuts du personnage, bien avant qu'elle n'évolue aux côtés de Ryo Saeba, qu'elle apprenne à le connaître avec son côté pervers et qu'elle tombe finalement amoureuse de lui. Il y a donc une retenue dans la personnalité du personnage qui tranche avec le manga, mais ça c'est normal, on est sur une origin story complète de l'oeuvre de Hojo, avec ses propres libertés, et là aussi, je trouve que c'est parfaitement bien amené.

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Cette origin story a vraiment du sens puisque ça permet aussi de séduire un public autre que celui qui connaît le manga ou l'animé, même celui du Club Dorothée. D'ailleurs, à ce propos, concernant la VF et les sous-titres français, sachez que ça risque de faire un peu polémique, dans le sens où Netflix France a fait le choix de garder les noms de la version française pour capitaliser sur la notoriété de la licence en France, notamment auprès des quarantenaires. Est-ce une bonne idée ? Je sais pas, mais je comprends le dilemme de Netflix quelque part. Par contre, comment ne pas rigoler quand Hideyuki Makimura se fait appeler Tony Marconi alors qu'on est au Japon, que l'acteur est japonais, et surtout si vous regardez le film en japonais sous-titré français, vous allez entendre les noms originaux japonais, mais avec les noms français. C'est assez perturbant en vrai... Mais je comprends le dilemme pour Netflix. Autant j'aurais fait pareil pour le doublage VF, autant pour la VOST, j'aurais opté pour les noms originaux.

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On pourrait donc croire que tout est parfait jusque-là, mais il y a tout de même des choses qui sont moins peaufinées, moins convaincantes, notamment dans la réalisation du film. Rien de dramatique ni de scandaleux, mais on reste sur une mise en scène globalement assez timide, assez générique, j'en envie de dire. On est sur une prod Netflix quoi. Il y a pourtant quelques bonnes idées et même des fulgurances, notamment dans certains choix de plans et dans certaines scènes de combat, notamment dans l'intro et à la scène finale, mais tout le reste n'arrive pas à aller plus loin que la réalisation propette sans plus. De même, un truc qui m'a pas mal interpellé, c'est qu'on est à Tokyo, à Shinjuku, l'un des quartiers les plus excentriques de la capitale avec Harajuku, mais ça pète pas assez. On aurait dû avoir un festival de couleurs, des plans iconiques du Japon, des trucs un peu plus poseurs, mais le réalisateur ne va jamais trop loin, il reste dans son cadre, dans ses clous. Il manque ce grain de folie global, même si encore une fois, à la fin du film, il se fait plaisir dans certains passages. D'ailleurs, je trouve ça un peu trop découpé dans le montage, le film aurait gagné en amplitude si on avait laissé les scènes se prolonger et qu'on ne cut pas toutes les 3 secondes.

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Mais ne boudons pas notre plaisir, car in fine, on a passé un bon moment devant le film et voir que les producteurs et Netflix ont compris comment retranscrire l'esprit City Hunter en un film de 1h44, ça laisse de l'espoir pour la suite. On espère maintenant que si suite il y a, les personnages seront davantage développés, qu'on pourra compter sur l'arrivée de Umibôzu (le fameux Mammouth en VF), le grand absent du film, même si le doublage VF y fait référence. Là encore, on soupçonne un souci de trraduction, car en VO japonais, son nom n'est jamais mentionné...

NOTRE NOTE : 6.5/10

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