EXCLUSIF : [PROTOTYPE]
Avec les adaptations de Scarface, des Simpson ou encore de Hulk sur les différentes consoles du marché, les Canadiens de Radical Entertainment ont su s’imposer comme les champions du portage. Une tache ingrate dont le studio a su s’acquitter avec un tel professionnalisme qu’il en est longtemps resté prisonnier. Refusant de voir sa créativité étouffée, l’équipe a su attendre son heure, oeuvrant discrètement sur un titre plus personnel, son tout premier à paraître sur les nouvelles consoles. Monde ouvert urbain, ultra-violence, héros tout puissant, le studio assume complètement son passé et réunit les meilleurs ingrédients de ses précédents projets dans une œuvre brutale, à paraître dans un peu plus d’un an. Premier contact, exclusif, avec [PROTOTYPE].
La nature a ses secrets, qu’il est parfois bon de ne pas chercher à percer. En animal assoiffé de savoir et partiellement irresponsable, l’homme a, hélas, souvent la mauvaise idée d’ouvrir la boîte de pandore à coups de lance-roquettes. Cachant ses méfaits dans des laboratoires ultrasecrets, le bipède conquérant est régulièrement dépassé par les événements. La catastrophe met parfois des décennies à survenir, mais le résultat est toujours spectaculaire. Quarante ans après l’identification d’un mystérieux virus par des chercheurs chevronnés, voici Alex Mercer. Alex possède, en apparence, tous les attributs d’un être humain standard, mais il n’en est pas un. Alex est un organisme intelligent qui essaie d’avoir une apparence humaine. Et Alex, c’est vous.
Le premier homme
Au cœur du projet Prototype, il y a donc ce héros singulier, aux motivations obscures mais à la détermination sans faille. Radical a osé la fusion des personnalités les plus malsaines pour donner naissance au plus sombre des anti-héros. Croisement féroce entre Darth Maul, Travis Bickle – personnage central de Taxi Driver – et Hannibal Lecter, Alex Mercer est un prédateur froid et calculateur, un tueur appliqué lâché dans la nature. L’entité possède néanmoins une fragile étincelle d’humanité et, surtout, un certain charisme. A l’instar du héros de Old Boy, film dérangeant de Park Chan-wook et autre référence cinématographique complètement assumée, Alex est un être blessé, animé par la vengeance, prêt à tout pour retrouver ceux qui ont fait de lui ce qu’il est désormais. Une quête insensée qui se déroulera à New York, une ville qui a décidément les faveurs de bien des studios. Une unité de lieu qui facilite évidemment la comparaison avec GTA IV, mais que les développeurs justifient habilement en arguant du statut de la Grosse Pomme. "New York est l’une des rares villes au monde où les gens veulent absolument être", rappellent Tim Bennison et Eric Holmes, respectivement producteur et lead designer du jeu. Mais être à New York en même temps qu’Alex, c’est jouer avec sa vie ! Le héros du jour reprend ses esprits – sur une table d’expérimentation ! – alors que de mystérieux événements bouleversent quelque peu le quotidien de la mégapole. Des foyers épidémiques apparaissent un peu partout dans les 20 km² de l’aire de jeu, un étrange corps organique géant jaillit du sol au cœur de Time Square, seul environnement de la démo, et une milice inconnue mais aux moyens délirants tente de contenir la situation. Sortis de nulle part, les Black Watch Special Forces semblent en avoir tout particulièrement après Alex, et ne vont pas hésiter une seconde à sortir l’artillerie lourde pour se débarrasser de lui, dussent-ils faire quelques victimes dans les rangs des civils. Ca tombe bien, notre héros n’est pas non plus du genre à faire dans le détail.
The walking slaughterhouse
Véritable abattoir ambulant, pour reprendre l’expression très imagée de Tim Bennison, Alex sort de sa léthargie initiale doté de quelques solides pouvoirs. Pivot du jeu, la capacité d’assimilation dont il dispose va considérablement l’aider dans son aventure. Vous dirigez votre boucher en vue à la troisième personne et il vous suffit de vous saisir de n’importe quel personnage du jeu, qu’il s’agisse d’un passant innocent, d’un soldat belliqueux ou du pilote d’un hélicoptère, pour pouvoir l’absorber, au sens littéral du terme. Son corps se fond au votre et tous les acquis, toutes les connaissances que votre victime a développées au cours de son existence sont désormais les vôtres. Fort de cette capacité d’apprentissage quasi-infinie, Alex est quasiment invincible. Doté d’une résistance hors normes, d’une puissance physique évidemment inhumaine, il peut trouver les réponses à toutes ses questions et pénétrer dans les lieux les plus sécurisés juste en croisant (et en assassinant) la bonne personne. Les possibilités qui s’ouvrent à lui sont aussi vertigineuses que les tours new-yorkaises.
Si le savoir des passants ne vous sera pas d’une grande utilité, dévorer un quidam vous permettra d’en simuler l’apparence. Une petite blonde passe ? Jetez-vous sur elle, et, en une fraction de seconde, vous pourrez vous retrouver aux commandes d’un Alex particulièrement sexy. Traqué par les forces de l’ordre, on apprend rapidement à faire bon usage de cette possibilité autrement plus radicale que la tactique de simple travestissement adoptée par Solid Snake et autres Agent 47. Mais c’est contre vos véritables ennemis que ce pouvoir révèle tout son potentiel. Pour reprendre les exemples précédents, si vous absorbez un soldat armé, vous pourrez non seulement modifier votre morphologie afin de vous faire passé pour un bidasse, mais vous aurez surtout appris au passage à vous servir d’une arme. Du flingue de base à l’équipement d’assaut, vous devrez bouffer du troufion pour pouvoir vous emparer de toutes les pétoires du jeu. Et si vous parvenez à choper un pilote d’hélico, de tank, ou de tout autre engin motorisé et si possible lourdement armé, vous serez immédiatement incollable sur le maniement desdits engins. Encore mieux : en vous emparant d’un capitaine d’escadrille, vous deviendrez non seulement capable de rejoindre la Patrouille de France, mais, si vous conservez l’apparence du bonhomme, pourrez diriger les têtes brûlées placées sous son commandement et leur ordonner, le plus naturellement du monde, d’atomiser un bâtiment.
N’en déplaise aux terroristes en herbe, il n’est toutefois pas question ici de raser Manhattan. Alex se contentera de légèrement revoir l’aménagement de la ville et d’en diminuer drastiquement la population. Car le New York dans lequel vous débarquez ne manque pas d’animation. Loin des axes semi déserts, seulement hantés par quelques badauds vite dispersés, fréquents dans les jeux récents, Alex se pointe dans une ville plus vivante que nature, où la foule, bigarrée, s’écoule le long des gigantesques avenues. C’est simple, la densité de PNJ nous a rappelé le très chargé Dead Rising ! Sauf qu’ici, le terrain de jeu est autrement plus vaste. Si l’essentiel de l’aventure se déroule en extérieur, quelques bâtiments mériteront bien une petite visite et, à l’image de Crackdown, Prototype exploite intelligemment la verticalité de la ville. Quand il n’absorbe pas les gens, Alex peut, entre beaucoup d’autres pouvoirs mutants qu’il débloquera au fil de la partie, transformer ses bras en deux appendices démesurés s’achevant par des griffes et pulvériser tout ce qui passe, ou grimper aux immeubles afin d’échapper aux regards ou de profiter du panorama. Et les perspectives qu’il découvre alors valent le coup d’oeil ! Déjà joliment animé, malgré de prévisibles ralentissements, Prototype en jette. Extrêmement dynamique, avec une caméra plutôt bien fichue, la mise en scène de l’action lorgne, une fois encore, du côté du cinéma. Tim et Eric ont notamment souligné l’influence de Spielberg, et cherchent à donner à leur œuvre la même force visuelle qui se dégage d’un film comme Il faut sauver le soldat Ryan ! Les développeurs ont beau minimisé l’importance de la technique, en soulignant que leur objectif premier était de créer un jeu next gen au sens ludique, qui proposeraient des mécaniques de jeu réellement inédites et impensables sur Xbox et PS2, ils n’ont toutefois pas manqué de soigné leurs effets.
Ultimate Destruction
Le plus dur reste toutefois à faire. En jetant un héros polymorphe dans l’arène d’une ville-monde, les Canadiens doivent faire face à de multiples défis techniques, dont le plus important est certainement la mise au point d’une I.A. cohérente et ultra-réactive. Car brutaliser un individu au milieu d’une foule compacte ou se mettre à grimper au premier immeuble venu après avoir massacré une demi-douzaine de personnes a forcément des conséquences… pourtant invisibles sur la démo. Après avoir absorbé un soldat, il suffisait à Alex de se métamorphoser devant les yeux des compagnons d’arme de celui-ci pour que tout le monde oublie sa précédente action. Les ajustements nécessaires risquent d’être d’autant plus complexes que l’aventure pourra se vivre à deux en coop en ligne. Chacun dirige alors un Alex, et si les deux participants peuvent s’amuser tranquillement dans deux coins différents de New York – la ville étant découpée en différentes zones – l’exercice le plus plaisant consistera à semer de concert la zizanie dans un quartier. Un beau bordel en perspective, mais qui s’annonce sacrément défoulant. Machine à tuer, Alex fracasse, empale à distance n’importe qui en faisant jaillir des pics organiques acérés du sol, dans une chorégraphie d’une violence rarement atteinte mais particulièrement jouissive. Prévu pour le troisième trimestre 2008 sur PC, PS3 et Xbox 360, cet inconcevable carnage interactif risque bien de tous nous assommer par sa brutalité. Comme quoi, si la nature a ses secrets, pour notre simple plaisir ludique, elle fait bien de ne pas tous les garder !