Bodycam : le coup marketing de génie de ce FPS hyper réaliste fait par 2 Français de 17 & 20 ans
On ne le dira jamais assez, mais depuis la sortie de l'Unreal Engine 5 en 2021, le moteur 3D d'Epic Games a facilité le travail de nombreux développeurs, notamment les plus indépendants, ceux qui bossent parfois dans leur chambre. Les outils et la technique ont tellement évolué qu'il est plus facile aujourd'hui de sortir des jeux rapidement et avec un rendu visuel de haute volée. Cela ne signifie pas pour autant qu'on peut pondre un bon jeu en quelques mois, mais disons que les créateurs ont plus de facilité aujourd'hui, surtout vu ce que propose le store d'Assets de l'Unreal Engine 5 aujourd'hui. C'est grâce à tout cela que le studio Reissad, fondé par les deux frères Lucas et Leo, ont pu sortir cette version Early Access de leur jeu Bodycam en seulement 1 an. Avant de vous parler des méthodes qui font grincer quelques dents sur la façon dont ils ont conçu leur jeu et comment ils le vendent aussi, on va déjà parler du jeu en lui-même puisque j'y joue depuis plusieurs semaines, depuis que les deux frères m'ont envoyé un code.
Depuis un peu plus d'un an, il y a un genre dans le FPS qui fait le buzz, les fameux Bodycam Games. Ils sont apparus en avril 2023 avec le jeu Unrecord, un projet développé par un studio indépendant du nom de Drama Game. Il s'agit d'un studio co-fondé par la rappeur Foda C du groupe Columbine, qui s'est mis en retrait du rap et de la musique en raison de problèmes de santé au niveau de la voix. Et ce dernier a décidé de se reconvertir dans le jeu vidéo avec ce FPS Unrecord, aux graphismes tellement réalistes, qu'il a décontenancé pas mal de gens, au point que certains ont hurlé au fake. Mais il s'agit bel et bien d'un jeu vidéo développé avec le moteur Unreal Engine 5 et qui offre un rendu graphique assez époustouflant de réalisme. Qualité des textures, reflets, éclairages et animations, Unrecord stupéfait par son photo-réalisme, d'autant que la caméra fish-eye placée au niveau du thorax rend l'immersion encore plus folle, un peu comme si on regardait un footage caméra enregistré par la Police américaine. Unrecord sera un jeu solo assez ambitieux avec des idées de game design, mais il n'a pas de date de sortie pour l'instant, et il n'est pas jouable non plus. En revanche, depuis le 7 juin dernier, il y a un autre jeu qui est disponible, il s'appelle Bodycam, et il reprend exactement le même principe que Unrecord, sachant qu'il est développé lui aussi par 2 Français, 2 frangins même, Lucas et Léo Dassier, qui ont respectivement 20 ans et 17 ans. Oui, c'est très jeune, mais ça ne les empêche pas d'être très malins, vous allez voir. Et depuis le début de cette vidéo, j'ai volontairement mélangé des vidéos d'Unrecord et de Bodycam et vous avez certainement vu aucune différence. Un flou artistique sur lequel les deux frères créateurs de Bodycam ont eux aussi misé pour à la fois surfer sur la hype de Unrecord, mais aussi le coiffer au poteau en le sortant en Early Access au prix de 30€. C'est osé, voire culotté mais pour nous, c'est un formidable coup marketing, même si certaines personnes évidemment parlent de scam.
LES RAGEUX L'APPELLENT BODY-SCAM
Contrairement à Unrecord qui se veut une expérience solo, Bodycam prend le parti-pris d'être un jeu purement multijoueur. Pour le moment, il n'y a que 3 modes de jeux qui sont disponibles : Deathmatch, Team Deathmatch et Body Bomb. Pas besoin de vous expliquer les deux modes, vous connaissez je pense. En ce qui concerne Bodybomb, il s'agit d'un mode où deux équipes s'affrontent pour soit faire sauter une bombe, soit la désamorcer. La bombe peut être placée partout, au sol ou collée contre un mur. C'est simple, mais efficace et il faut bien admettre qu'on se prend rapidement au jeu, surtout que le jeu en équipe fonctionne plutôt pas mal. En termes de gameplay, Bodycam apporte une nouvelle façon de jouer, pas forcément dans les mécaniques, mais plutôt dans les sensations. Etant donné qu'on est sur une vue subjective façon caméra de surveillance et avec un vision grand angle fish-eye, les développeurs ont opté pour des mouvements de caméra qui risquent de vous dérouter. C'est normal, comme c'est nouveau et qu'on a l'habitude aux FPS classiques, il faut plusieurs dizaines de minutes et plusieurs matchs avant d'appréhender la proposition des frères . En gros, on a l'impression qu'il y a un décalage entre le regard du personnae et les mouvements de ce dernier, comme si la jouabilité était flottante, un peu comme dans les jeux VR. Mais soyez rassuré, vous n'aurez pas de motion sickness, juste le besoin de vous adapter à cette nouvelle proposition. Ca change, mais l'immersion n'en est que plus poussée. Par contre, il est évident que ça ne plaira pas à tout le monde.
LES FRAGILES LE TROUVENT TROP RÉALISTE
Autre chose qu'il faut évoquer avec Bodycam, ce sont les graphismes qui offrent un rendu photo-réaliste. Et c'est normal, le jeu est basé sur la la technologie de photogrammétrie qui consiste à prendre de vraies photos qu'on a appliqué sur les textures dans les environnement. C'est saisissant voire même déroutant, si bien qu'on a l'impression de se balader dans le monde réel. On le voit dans les maps en intérieur, mais surtout sur la carte en forêt où il y a de quoi être décontenancé. D'ailleurs, en parlant de la map forêt, c'est celle qui m'a le plus déçu, car non seulement il y a des murs invisibles extrêmement grossiers, mais surtout l'éclairage est mal branlé, si bien que certaines zones sous les arbres sont illisibles à cause des ombres. On ne voit absolument rien. Alors oui, on peut allumer la lampe-torche sur les armes, mais c'est donner sa position à l'adversaire. D'ailleurs, si jamais vous êtes abattu avec la lumière de votre arme allumée, elle le restera, ce qui permettra d'éclairer une zone précise. Plutôt pratique. De toutes les façons, s'il y a bien un défaut dans le rendu visuel de Bodycam, c'est l'éclairage de manière global, qui mérite d'être réajusté. Tout comme la météo dynamique qui arrive un peu trop brutalement. Soleil, pluie et même neige, c'est très cool de voir ces changements climatiques, mais il n'y a pas suffisamment d'impact sur le gameplay. Ça aussi, ça mérite un meilleur travail, mais en tout cas, la volonté est là, c'est déjà bien.
L'immersion de Bodycam est d'autant plus renforcée que le sound design est lui aussi de grande qualité. J'imagine que les deux frangins sont allés puiser dans des banques de sons réels car le bruit des armes est vraiment ultra réalistes, d'autant qu'ils n'ont pas hésité à monter les potards pour saturer certains sons, comme les coups de feu puissants, ce qui simule encore plus le côté son brut capté par une bodycam. Bien vu franchement. Le feeling des armes déroute lui aussi de prime abord, puisqu'il est lié aux mouvements assez originaux du jeu, mais une fois qu'on s'y est habitué, on prend un malin plaisir à shooter à tout va. Les sensations sont bonnes. Autrement, Bodycam possède aussi une physique très réussie des ragdolls. Tous les corps qui tombent dans le jeu chutent de manière ultra réalistes et réagissent surtout en fonction de l'environnement. Il peut par exemple hurter plusieurs éléments avant de chuter au sol avec les animations qui vont avec, rouler dans un escalier également de manière réaliste, se recroquiviller sur lui-même après avoir mis une rafale de balle dans le ventre, etc.
A ce propos, lorsqu'on meurt, on prend automatiquement les contrôles d'un drone, qui est en quelque sorte une seconde chance pour vous, puisque vous pouvez signaler les positions ennemies à vos coéquipiers. Et pour vous faciliter la tâche, le drone possède trois types de vision : normal, infra-rouge et thermique. Attention tout de même, parce que le drône peut se faire abattre à tout moment, et si c'est le cas, vous passez alors en mode caméra assistée. Cela dit, passé la découverte et les bonnes sensations, Bodycam est un jeu qui montre ses limites très rapidement. Le gameplay reste assez basique et peu évolutif, le contenu est archi pauvre et surtout le nombre de maps très insuffisant et de qualité inégale. Autre souci, le jeu est accusé d'avoir utilisé des cartes qui proviennent des assets proposés par l'Unreal Engine 5 et donc qu'il n'y a eu aucun travail effectué dessus. Certains diront que des éléments ont été rajoutés par-ci par-là, mais les deux frères sont quand même pointés du doigts pour ce recyclage qui est tout de même vendu 30€. C'est vrai que face au contenu rachitique du jeu en Early Access, le prix est clairement abusé.
CAPITALISER OU PARTIR AVEC L'ARGENT ?
Récemment, on a appris qu'une roadmap a été mise en place pour intégrer du contenu en plus, et on espère qu'il ne s'agit pas juste d'une carotte qu'on agite devant un âne, parce que les deux frères ont quand même réussi un exploit : surfer sur la hype de Unrecord pour sortir leur jeu le plus rapidement possible et se positionner sur à peu près tous les aspects. Non seulement la ressemblance graphique entre les deux jeux est troublante, mais le fait aussi d'avoir nommé le jeu Bodycam, c'est clairement du génie marketing. Combien de personnes vont confondre les deux jeux ? Combien de personnes se rappellent du nom Unrecord ? Pas grand monde en vrai, alors que le terme "bodycam" est sans doute celui qui est le plus recherché justement quand on essaie de se souvenir d'Unrecord. En termes de SEO, c'est du génie. Quand on sait que le trailer de Unrecord a fait 7.5 millions de vue sur la chaine officielle et plus de 10 millions sur celle de IGN, c'est clairement un move incroyable de la part des 2 français. Il me semble que les ventes de Bodycam sont très bonnes, et j'espère que les deux frères vont capitaliser sur ce succès pour faire évoluer leur jeu et pas se sauver avec la thune comme des vieux scammers. A bon entendeur...