AMY
A une époque lointaine, Paul Cuisset se rêvait en rock-star. Parvenu à quelques encablures de la cinquantaine, le solide développeur n’a pas fait trembler le top 50 ni mis le feu aux festivals estivaux. L’homme est toutefois un héros aux yeux de nombre de vieux gamers, qui vivent dans le souvenir de son chef-d’œuvre absolu : Flashback. Se retrouver avec une meute de trentenaires barbus pour seuls fans n’a nullement atteint le moral de celui qui co-dirigea Delphine Software. Au contraire, après un bref passage à vide, Cuisset cultive encore aujourd’hui son côté joyeusement rock’n’roll. Un état d’esprit qui lui a permis de construire sa carrière à l’envie, au culot, de s’attaquer à des genres aussi variés que l’aventure, le hack’n’slash ou la course de moto, bref, d’avancer sans se retourner, ou alors uniquement lorsqu’il s’agissait de ressusciter de vieux projets inaboutis. C’est justement le cas d’Amy, sa dernière œuvre, imaginée au début des années 2000 mais qui n’avait pas dépassé le stade de démo chez Delphine Software.
Comment se distinguer lorsque l’on est un petit studio français, co-propriété d’une modeste compagnie indépendante, qui n’a encore jamais rien publié sur les consoles de salon ? Vector Cell, nouveau foyer de Paul Cuisset et société affiliée à Lexis Numérique, pense avoir trouvé la solution : en voyant grand sur PlayStation Network. Loin d’être inintéressante, la production en ligne tend à se résumer à quelques heureux portages de légendes des 90’s et à diverses productions indépendantes souvent emballantes mais pas toujours ambitieuses d’un point de vue technique. Amy tente de se distinguer de ses pairs dématérialisés en offrant une expérience à la fois originale, intelligente et visuellement percutante, bref, en proposant en ligne et à 9,90€ une aventure que certains n’auraient pas hésité à graver sur un blu-ray et à vendre en magasin au tarif plein.
Contaminée
"Avec Amy, nous cherchions à faire un jeu qui se rapproche des codes narratifs du cinéma mais qui laisse également une grande liberté aux joueurs", nous explique Paul Cuisset. Un survival horror qui s’inspire des procédés du grand écran, la démarche a déjà fait les beaux jours de Silent Hill, Resident Evil ou Dead Space, trois titres auxquels Amy emprunte beaucoup. Univers urbain oppressant, zombies monstrueusement déformés à tous les étages, héroïne fragile et sexy, armes blanches, la production française pioche bien des idées chez ses concurrents directs mais tente d’apporter sa touche personnelle au genre. L’élément de gameplay du jour est ainsi incarné par Amy, la petite fille autiste et muette qui donne son nom à l’œuvre. La demoiselle n’est toutefois pas le personnage principal du jeu puisque vous y incarnez une jeune femme, Lana, chargée de protéger Amy. Victime d’un accident de train lié à la chute d’une météorite sur Terre, celle-ci découvre en reprenant ses esprits que ses compagnons de voyage sont atteints d’un étrange mal qui les transforme en créatures immondes affamées de chair humaine. Première difficulté, l’agent pathogène à l’origine de ces mutations a également contaminé Lana. Rongée de l’intérieur, la jolie blonde tend à se zombifier si elle ne se soigne pas rapidement. Pour éviter cette décrépitude accélérée, qui s’accompagne d’effets visuels, sonores et ludiques assez sympathiques, mais également pour se sortir de situations complexes, Lana peut compter sur les pouvoirs particuliers de sa petite associée.
Une Amy qui vous veut du bien
"Explorer cette relation entre une jeune femme et une petite fille, essayer de la faire évoluer au fil du jeu", voilà ce qui a intéressé Paul Cuisset et son équipe. La carte de la coopération, les titres récents la jouent de plus en plus, mais le concepteur français se montre plus aventureux que ses confrères, et place l’empathie au cœur de l’expérience, à la manière d’un Ico. Ainsi, pour être soignée par Amy, Lana devra lui tenir la main. A cette occasion, elle ressentira le rythme cardiaque de la petite fille, qui varie en fonction de la situation. Une caractéristique qui ne tient pas du gadget : Amy « perçoit » les ennemis à distance, et une accélération de son pouls devra inciter son associée à faire preuve de prudence et à mettre à l’abri une enfant bien incapable de se défendre contre des brutes sanguinolentes. Parfaitement complémentaires, fragiles mais débrouillardes, Amy et Lana se protègent mutuellement au cours des six chapitres d’une aventure qui s’annonce joliment mise en scène. Avec sa grosse ambiance sonore – une constante dans les travaux des anciens de Delphine Software – un très beau travail esthétique et un scénario que Paul Cuisset nous annonce soigné, ce petit Amy a déjà tout d’un grand jeu vidéo. Préparez-vous donc à trembler, de peur comme d’émotion, dès le mois de juin et exclusivement sur PSN.