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Ce n’est pas parce qu’il s’affiche avec un nouveau suffixe que cette version de Star Ocean : The Last Hope s’en retrouve subitement sublimée. Identique en tous points à la version Xbox 360, parue l’année dernière, le titre de Square Enix possède les mêmes qualités et défauts que ce dernier. Proposant certainement les personnages les plus horribles jamais créés, abritant sans doute l'un des pires donjons du monde du RPG, Star Ocean : The Last Hope fait longtemps très peur. Pourtant, à l'image de son prédecesseur, une fois la vingtaine d'heures fatidique passée, se découvre un RPG classique dans sa forme mais terriblement captivant dans ses fondements. Correctement réalisé, doté d'une ambiance prenante et d'un système de combat exceptionnel, il n'accrochera sûrement pas les nouveaux venus qui lorgneront plutôt du côté d'un Tales of Vesperia bien plus charmant, mais convaincra sans doute les perfectionnistes du jeu pour le jeu. Mais combien de temps la licence tiendra-t-elle dans son obsession de ne parler qu'à une niche de joueurs ?
- Un système de combat extrêmement prenant
- Un côté découverte bien retranscrit
- Un scénario classique dans son écriture mais surprenant
- Une profondeur de jeu effarante
- Le Calnus
- Des aires de jeu étendues
- Une grande durée de vie
- Une réalisation plutôt soignée...
- … exceptée dans le cas des personnages
- Des cut-scenes bien trop statiques
- Certains personnages vraiment inutiles
- Quelques donjons horripilants
- Une carte très mal pensée
- Le doublage américain assez plat
- Une bande-son inégale
Huit mois après sa sortie sur Xbox 360, Star Ocean : The Last Hope débarque enfin sur PlayStation 3, dans la même optique de réconcilier les fans de RPG japonais, un peu lésés ces dernières années par des productions. Affublé du suffixe International, cette adaptation s’annonce comme une version améliorée du titre original. Quelles sont les nouveautés apportées ? Y a-t-il véritablement des changements majeurs ? Rien n’est moins sûr…
S'ouvrant sur une Troisième Guerre Mondiale ayant transformé le monde en un tapis continu de cratères et de villes démantelées, Star Ocean : The Last Hope se construit comme une sorte de projection futuriste de l'après Seconde Guerre Mondiale. Basé sur une course à l'espace, le contexte politique des années 50-70 se meut ici en une tentative désespérée de trouver une nouvelle planète d'accueil pour une population exsangue. Dix ans après la catastrophe, les premiers sauts spatiaux aboutissent enfin. Il faudra dix années supplémentaires pour démarrer une réelle exploration de la galaxie et découvrir de nouvelles possibilités d'établissement du genre humain. L'âge spatiale remplace désormais les calendriers habituels et les premières missions de colonisation débutent. C'est à travers l'une d’entre elles que commencent ce Star Ocean, véritable déclaration d'amour à la conquête spatiale et plaidoyer sur la dangerosité des dérives scientifiques. Reprenant en nettement moins poussée l'excitation de la découverte de nouvelles formes de vie et d'interaction entre les peuples (initiée dans Mass Effect), Star Ocean : The Last Hope contient toutefois un élément important : le sentiment de participer à une avancée, de poser le premier le pied sur des terres inconnues avec les espoirs de millions de personnes. Un parti-pris scénaristique très intelligent, mais qui n'atteint pas complètement ses objectifs à cause des "impératifs" de RPG japonais ancienne génération, à savoir le fan-service, le casting imposé et surtout une mise en scène sans relief. Un cahier des charges inconscient qui, heureusement, tend à s'amincir au fil des heures. Le problème étant que cette relance n'intervient qu'au bout de 20 heures de jeu, dans la veine d'un Star Ocean 3 également un peu paresseux.
Clichés et plans fixes
Choisissant dès ses premières minutes une approche étonnamment mature, Star Ocean : The Last Hope semble se diriger dans le sens contraire de ce qui lui a souvent fait défaut, à savoir une volonté de proposer un Space Opera mais sans y mettre d'ambition ou de réflexion sur la notion d'expédition spatiale. Ici, l'axe principal est justement le défrichement des recoins de l'univers, dans une optique de sauvegarde d'un peuple, tout en développant les relations avec les populations extraterrestres et en sauvegardant les particularismes des peuples sous-développés. Des notions déjà abordées dans les épisodes précédents, mais qui prennent une autre dimension dans Star Ocean : The Last Hope, tout étant à découvrir. L'autre développement inédit dans la saga s'avère être la mise en avant de la gestion de l'équipe et surtout des relations entre chaque membre, donnant à ce voyage (d’une durée d’une cinquantaine d'heures) des airs de Star Trek allégé. Changeant de point de vue, le soft privilégie la logique de groupe au développement de chaque personnage. De ce fait, le joueur s'attache, non pas à l'un des protagonistes en particulier, mais à un véritable équipage dont Edge est le capitaine. Sans révéler les divers rebondissements de la trame, Star Ocean : The Last Hope aborde également des thèmes comme l'attachement aveugle à sa Terre natale, l'outre-passement des lois à but personnel, ou encore une très habile réflexion sur les responsabilités à prendre dans la fuite vers l'avant de la science. Des responsabilités qui aboutiront par ailleurs à des conséquences particulièrement traumatisantes. Un changement d'orientation salvateur qui permet à ce Star Ocean de bâtir de nouvelles bases tout en proposant un scénario accrocheur et souvent surprenant, du moins dans les limites d'une certaine aseptisation.
L'autre développement inédit dans la saga s'avère être la mise en avant de la gestion de l'équipe et surtout des relations entre chaque membre, donnant à ce voyage (d’une durée d’une cinquantaine d'heures) des airs de Star Trek allégé."
Objectifs de vente et réels manques de finalisation obligent, Star Ocean : The Last Hope intègre malheureusement des lacunes plus ou moins sévères en terme de narration et de construction de personnages. Votre quotidien vidéoludique sera donc criblé de cinématiques pour la plupart bien trop statiques et de protagonistes indubitablement ratés. Si Edge, Myuria, Arumat, voire Reimi s'avèrent crédibles et réussis, étant les plus nuancés au niveau psychologique, le reste du casting s'engouffre dans des clichés dommageables. Si le soft en joue lors de quelques scènes, tournant en ridicule certains caractères, les réactions complètement fantaisistes de Lymle, de Meracle et d'une Welche totalement insupportable diminuent l'impact des choix scénaristiques et sabordent parfois un dialogue au départ bien écrit. De même, certaines séquences (aux perspectives séduisantes) se trouvent drastiquement limitées par des coupes dans la mise en scène, et qui font d'un drame naissant un éclair vite oublié. Heureusement, ces facilités n'envahissent pas totalement le titre et le scénario devient même plus qu'intéressant vers la fin de la première partie. Malheueusement, la maturité de surface et les sursauts d'originalité subissent le joug d'un fan-service dont les RPG japonais ne parviennent pas à se défaire. Le tout en accord avec des choix artistiques et une réalisation discutables.
Le retour des lapins fuchsias
Si la série de tri-Ace n'a jamais été le mètre-étalon du bon goût en matière de chara-design et de direction artistique, elle a toujours su tout de même offrir au joueur un minimum de qualité, ne serait-ce que dans le design des vaisseaux et de tout ce qui a trait à une inspiration futuriste. Dans le même esprit, les personnages de Star Ocean 3 par exemple - tout en étant classiques - ne choquait en aucune manière. Modélisés avec suffisamment de soin, ils faisaient quasiment honneur à leurs artworks, plus fins et fouillés. Le cas de Star Ocean : The Last Hope est bien plus problématique. Malgré le chara-design de Katsumi Enami (série animée Baccano) convaincant sur le papier, la matérialisation à l'écran des personnages démontre une nouvelle fois la difficulté de transposer une esthétique manga à l'aide d'un moteur 3D "réaliste". Evitant soigneusement la voie d'un cel shading qui s'est pourtant révélé idéal dans des titres comme Eternal Sonata ou encore Tales of Vesperia, Star Ocean 4 propose, en lieu et place de beaux protagonistes soulignés d'un trait noir, une armada de personnages lisses à la peau rappelant une texture plastique. Si l'habitude prend le relais au bout d'une poignée d'heures, le choix de ce rendu est clairement une faute de goût, retirant une grande partie du caractères des esquisses préparatoires. Dans le même ordre d'idées, l'animation durant les scènes narratives reste souvent raide, à l'inverses des phases de combat, durant lesquelles vos guerriers (et guerrières) se déplacent avec une fluidité déconcertante. Pourtant, le moteur choisit par tri-Ace cache un vrai potentiel technique, se dévoilant notamment au sein des environnements très variés du jeu.
Composé de huit planètes, l'infime morceau de cosmos que vous foulerez du pied réserve toutefois son lot de paysages plus ou moins étranges et enchanteurs, allant de vastes landes à des revêtements technico-organiques, en passant par des structures extraterrestres épurées. Si certains de ces corps célestes restent malheureusement très restreints, la majeure partie propose des environnements étendus non dénués de reliefs, autorisant de fait des phases d'explorations agréables. On retrouve en quelque sorte le fonctionnement par "zones" de Star Ocean : Till the End of Time, ces dernières s'avérant ici nettement plus vastes et tortueuses. Malgré un rendu un peu froid, les divers lieux qui composent le titre affichent un réel cachet, à grands renforts de nombreux petits détails visuels et surtout d'une gestion de la lumière de grande qualité. Plus qu'un rendu technique concluant, l'ambiance se dégageant de la majorité des décors donne à l'immersion de solides prises. Mais encore une fois, ce Star Ocean reste inégal et les environnements intérieurs se limitent quelquefois à de la répétition de morceaux de textures. Un constat que l'on remarque aisément après trois heures passées successivement dans un donjon.
Attaque Surprise
Labyrinthiques, les donjons de Star Ocean : The Last Hope – à part deux exceptions – restent dans la veine des RPG old school avec leurs lots de mécanismes à actionner et de détours malicieux. Leur principal défaut n'étant pas entièrement réductible à leur taille ou à leur complexité, mais à la présence d'une carte très déstabilisante. En effet, dès que vous pénétrez dans un donjon, cette dernière est entièrement découverte, vous indiquant toutes les salles et les couloirs présents. Une initiative qui paraît louable durant quelques minutes mais qui se transforme rapidement en une mauvaise surprise. Dans les méandres torturés d'une station spatiale ou d'un palais médiéval, autant il est aisé de retrouver son chemin avec un carte qui se découvre petit à petit, autant il est assez difficile de se situer sur un plan totalement visible, le joueur ne sachant plus où il vient de passer et s'il a déjà emprunté tel ou tel passage. Une erreur de conception qui vous obligera à faire acte de mémorisation. Et si l'habitude permet de s'en sortir au bout de quelques heures, les premières confrontations avec les enchevêtrements de ce Star Ocean 4 vous laisseront sûrement des souvenirs impérissables. Reste que ces donjons s'avèrent paradoxalement bien moins pénibles que ceux de Star Ocean 3, jouant plus sur l'étendue que sur les allers-retours insistants. Mis à part la séquence de torture du soft, la planète Cardianon. Si la logique pure de traverser une planète entière justifie les trois heures et demi que vous passerez à errer dans des couloirs, la logique ludique le justifie elle beaucoup moins. Certains pourront peut-être y trouver l'occasion de pousser dans ses retranchements l'excellent système de combat.
Star Ocean : The Last Hope apparaît en effet comme une sorte de vitrine pour ses concepteurs, démontrant que l'on peut pousser le plaisir ludique d'un combat de RPG très loin."
Reprenant les bases habituelles de la saga, à savoir la possibilité de se déplacer librement sur le champ de bataille et d'attaquer vos ennemis en temps réel, via des attaques de bases et des coups spéciaux affiliés aux boutons de tranche, le titre de tri-Ace parvient à sublimer ce principe. Star Ocean : The Last Hope apparaît en effet comme une sorte de vitrine pour ses concepteurs, démontrant que l'on peut pousser le plaisir ludique d'un combat de RPG très loin. S'étant séparé du principe très contraignant de la mort une fois la jauge de MP épuisée, Star Ocean 4 gagne en prise de risque. Un risque justement symbolisé par le système des attaques surprises, insérant une dose supplémentaire de spectaculaire et de technique dans un gameplay déjà extrêmement abouti. Dans les faits, cet assaut se déclenche si vous parvenez à passer subitement dans le dos de votre ennemi, vous permettant de multiplier les attaques critiques sans lui laisser la possibilité de contre-attaquer immédiatement. Pour ce faire, vous devez vous concentrez, puis vous décaler immédiatement dès que l'ennemi vous prend pour cible. S'en suit un ralenti classieux durant lequel vous contournez votre opposant afin de le mettre à terre rapidement. Néanmoins, si vous opérez une concentration trop intense ou si vous ne patientez pas suffisamment face à un monstre tenace, vous subirez dans le premier cas un évanouissement et dans le second un contre fulgurant. L'apprentissage de cette technique inédite requiert un temps non négligeable, mais une fois maîtrisée, elle permet au joueur de prendre vraiment son combat en mains, choisissant un style plus direct, ou tablant davantage sur l'attente.
Ô mon tableau !
Outre cette nouveauté réjouissante, Star Ocean : The Last Hope fait entrer en jeu un nouveau tableau de bonus. En effet, suivant vos exploits de guerrier, vous collectionnerez au fur et à mesure des affrontements des pierres de couleur qui viendront s'incruster dans un tableau dans la limite des emplacements disponibles. Toujours visible dans l'action, ce dernier apporte des modifications à vos gains pouvant grandement modifier votre expérience de jeu. En effet, les cristaux bleus par exemple augmentent l'expérience acquise de 10 %, les roses vous rendent 1 % de vos HP et MP, les verts influent sur vos points de compétence et les jaunes vous donnent l'occasion de remporter plus de fols (monnaie locale) en fin de combat. Bien entendu, il est possible de les combiner entre eux afin d'obtenir des bonus d'expérience pouvant atteindre les 140 %. Se débloquant sous certaines conditions, ces pierres spéciales doivent être liées entre couleurs identiques, si vous désirez les conserver le plus longtemps possible. Car si vous subissez une contre-attaque lors d'un assaut surprise ou si vous encaissez trop de dégâts, le tableau peut se briser et vos bonus s'envoler dans le même temps. Vous pouvez toutefois éviter que tous les fragments disparaissent en même temps, si justement vous avez eu la présence d'esprit de les réunir par couleurs. Dans un premier temps, seules les pierres non liées s'évanouiront, vous laissant la possibilité d'en économiser une partie. En revanche, si vos opposants continuent à vous asséner des coups, vous perdrez l'ensemble de vos acquis pour de bon. Une seconde petite touche de stratégie qui ajoute aux combats très dynamiques de ce Star Ocean une tension et une "réflexion" inhabituelles dans la saga, obligeant en quelque sorte à maîtriser le système jusque dans ses fondements.
Percutants, jouissifs et nerveux, les affrontements sont également le moyen d'engranger des points de compétence qui vous serviront évidemment à améliorer vos personnages, tout en développant leurs techniques (cuisine, art, ingénierie, etc.) mais surtout à la création d'objets. Comme dans tous les épisodes de la série, cette capacité vous donne accès aux meilleurs items du jeu mais vous permet aussi désormais d'inventer des éléments que vous pourrez disposer dans votre vaisseau personnel : le Calnus. Entre un jukebox pour écouter les différentes pistes musicales, un scanner pour gérer vos statuts et autres outils de décoration, votre engin deviendra rapidement un intérieur cossu. La richesse de la création est encore une fois impressionnante, la liste d'objets modifiables et imaginables étant littéralement immense. Le système lui reprend dans les grandes lignes la forme de celui de Star Ocean 3, ne vous autorisant pas à expérimenter vos recettes en pleine campagne, mais uniquement par le biais de l'interface du Calnus. Le tout en plus des pierres de monstres, artefacts vous conférant le pouvoir d'y intégrer les caractéristiques d'une créature rencontrée un certain nombre de fois et de vous en servir comme d'une pièce d'équipement. Les possibilités de customisation de votre partie sont donc fascinantes d'exhaustivité, faisant de la simple recherche un pan entier de l'expérience Star Ocean : The Last Hope.
Et pourtant, malgré une certaine naïveté, malgré des choix esthétiques frôlant le mauvais goût, Star Ocean : The Last Hope réussit à se distinguer, à donner au joueur ce qu'il recherche, sans afficher d'ambitions malvenues."
Toute la problématique du soft de tri-Ace repose de fait sur ses choix profonds. Privilégiant le gameplay pur et les coups scénaristiques au détriment d'une narration prenante et de personnages forts, il se rapproche clairement de son aîné tout en apportant une dimension "spatiale" bien plus prégnante. Haché, inégale graphiquement, parfois ridicule dans un fan-service dommageable il sait aussi être épique, puissant ludiquement et fin dans l'approche de certains faits. Il ne parvient pas vraiment à se hisser plus loin qu'une sorte de Star Ocean 3 HD et surtout plus loin que le cahier des charges déjà dépassé du RPG japonais. Et pourtant, malgré une certaine naïveté, malgré des choix esthétiques frôlant le mauvais goût, Star Ocean : The Last Hope réussit à se distinguer, à donner au joueur ce qu'il recherche, sans afficher d'ambitions malvenues. Il se veut un RPG old school, aux rouages parfois un peu rouillés, tout en découvrant des idées ludiques intéressantes, des pistes scénaristiques efficaces et développant surtout une frénésie de la modification dans un but de performance. Moteur des jeux tri-Ace, il faut croire que cette machinerie fonctionne toujours.