Clive Barker's Jericho
Heureux en littérature, malheureux au cinéma, peintre à ses heures, le très accompli et très imaginatif Clive Barker s’intéresse depuis quelques années aux possibilités offertes par les jeux vidéo. Six ans après Clive Barker’s Undying, FPS hanté par l’héritage de Poe et de Lovecraft et certainement l’un des titres les plus terrifiants de ces dernières années, le Britannique s’associe avec les Madrilènes de Mercury Steam pour nous délivrer Jericho. Ou comment une bande de Rainbow Six se frotte au diable dans un contexte géopolitique chaud bouillant…
Le Moyen-Orient, vous commencez à connaître. Des villes rongées par la poussière, une chaleur toujours accablante et tout un tas de terroristes qui rejettent les bienfaits de la démocratie. Vous avez beau avoir visité virtuellement les lieux une demi-douzaine de fois, le Mal semble bien ancré dans la région. Clive Barker a peut-être localisé l’origine du problème. La bonne vieille cité d’Al Khali ressemble à toutes les agglomérations que vous avez pu ravagées, à ceci près que quelque chose de très inquiétant, de très agressif et de totalement inhumain jaillit de ses sous-sols nauséabonds. Le Malin et ses sbires ont en effet fait des lieux un avant-poste idéal vers l’enviable monde des vivants et dévorent tout ce qui passe à porter de leurs crocs moisis.
Les Sept Fantastiques
Le monde libre est heureusement bien protégé, et peut compter sur l’expertise de sept maniaques de la gâchette, mercenaires dérangés envoyés sur tous les fronts occultes où ils peuvent exercer à la fois leurs talents d’exécuteurs et jouer de leurs pouvoirs paranormaux. Télékinésie, maîtrise d’un élémentaire de feu, ralentissement du temps, projection astrale, soin à distance, chacun des membres de l’unité très spéciale Jericho possède deux compétences qui permettront à la petite troupe d’arrêter toutes les créatures des profondeurs, même celles que les balles laissent totalement indifférentes. Décharnés ou épouvantablement gras, lestes ou titubants, armés ou pas, vos adversaires ont peut-être les orbites vides mais leur instinct de prédation reste intact. Amenés, par le biais de divers failles dans l’espace-temps, à visiter bien des époques, vous croiserez du templier cadavérique, du dignitaire romain ayant bien mal tourné et tout un tas de créatures au design plutôt réussi. Hélas, le côté très Rainbow Six de l’action casse un peu l’ambiance. L’unité Jericho est en effet divisée en deux escouades, souvent séparées par les événements mais qui finissent toujours par se rejoindre, et auxquelles vous pouvez donner des ordres basiques ("avancez", "tenez la position", …). Vous contrôlez le soldat de votre choix, en vue évidemment à la première personne, et pouvez en changer à tout moment, à l’exception des quelques séquences où le jeu vous impose un personnage. Ces phases sont certainement les plus angoissantes, puisque vous ne pouvez plus compter sur vos alliés pour vous épauler et devez incarner une unité dont vous ne vous sentez pas nécessairement le plus proche. Idée curieuse dans un FPS mais plutôt bien exploitée, ces passages en solitaire donnent même lieu à des phases d’instant action, où vous devez appuyer sur le bon bouton au bon moment, par exemple pour descendre à mains nues dans un puits malfamé, ou pour vous faufiler le long d’une corniche branlante.
Rainbow 666
Bien que fréquents, ces intermèdes étaient toujours brefs sur la démo (très incomplète) dont nous disposions. L’essentiel de la partie semble consister à explorer, en groupe, des décors pas toujours très bien finis en vidant des chargeurs infinis sur de solides armadas. Assez soutenue, l’action est parfois brutalement interrompue par des énigmes sans grand intérêt, qui exploitent maladroitement les skills de vos héros. Autre élément perturbant, le surnombre de personnages qui composent la team Jericho sème souvent la confusion. Chaque unité étant désignée, en fonction des dialogues, soit par son nom, soit par son prénom, il est difficile de bien identifier ses troupes en début de partie et de savoir qui fait – et peut faire – quoi. Le titre souffre également d’un léger problème de localisation des dégâts, particulièrement contre les boss. Enormes mais assez peu dangereux, tous possèdent un point faible, dont le mitraillage ne s’accompagne pas forcément d’un hurlement de douleur ou d’une animation claire. Résultat, on s’acharne sur une partie de leur corps sans être réellement sûr de l’efficacité de l’attaque et quand, enfin, la bête meurt, on se demande encore si c’était bien là qu’il fallait tirer ou si on a buté l’animal par inadvertance. Joyeusement sanglant, Clive Barker’s Jericho semble toutefois pouvoir constituer un divertissement défoulant pour tous ceux qui aiment charcuter du zombie. Bien que peu originales, les armes se prêtent plutôt bien à l’exercice, même si un peu plus de corps à corps sauvage façon Condemned aurait considérablement augmenté tant la tension que la brutalité de ce titre qui se veut horrifique mais ne s’avère, à première vue, que bêtement fantastique et incapable de faire vibrer notre trouillomètre.