Test South of The Circle : contemplatif, très peu interactif mais pas si déceptif
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Avec un ratio gameplay/narration aussi déséquilibré, South of the Circle ne plaira clairement pas à tout le monde. Les quelques mécaniques de jeu présentes sont réellement anecdotiques, à tel point que même le système de choix n'aboutit pas à différentes fins comme le veut pourtant la tradition. Il faut donc impérativement aborder cette production sous l'angle de l'aventure essentiellement narrative, voire carrément se placer dans l'esprit "je regarde un chouette film d'animation de 3h30". Car c'est clairement dans le scénario, l'ambiance, la musique, les voix et la direction artistique que se situent les qualités de ce demi-jeu. Abandonnez tout espoir d'interactions significatives, et vous passerez alors un bon moment.
- Une ambiance surannée très agréable
- Une direction artistique assez inhabituelle
- Des thématiques intéressantes
- Une bande-son absolument parfaite
- Des voix anglaises qui sonnent toujours juste
- De bonnes idées de mise en scène par moments
- Un système de symboles pas très explicite
- Des choix sans réelles conséquences
- Des collisions et autres problèmes graphiques
- Quelques soucis de traduction dans les sous-titres
- Une durée de vie limitée à 3h30
Qu'il s'agisse de Frostpunk, This War of Mine, Children of Morta ou encore la série Anomaly, l'éditeur/développeur 11 bit studios nous a régulièrement fourni de jolies pépites. Les polonais publient aujourd'hui sur PC et consoles South of the Circle, un jeu développé par le studio State of Play (à ne pas confondre avec le rendez-vous régulier de Sony). Cette aventure, qui avait fait ses premiers pas en octobre 2020 sur le service Apple Arcade, privilégie clairement la narration sur le gameplay. Nous avons décortiqué tout cela pour vous.
Nous sommes en 1964 et Peter, conférencier à l'université de New Hall à Cambridge, se retrouve en très mauvaise posture en plein Antarctique. Le petit avion qui le transportait vient de s'écraser, et le pilote s'est blessé à la jambe. Dès lors, notre héros du quotidien va devoir partir à la recherche de secours auprès des bases alentours, sous la neige et par -20 degrés. Si ce contexte aurait pu donner lieu à un jeu de survie, c'est bel et bien à une aventure narrative que nous avons droit. Très rapidement des flashbacks jouables, qui alternent régulièrement avec les séquences polaires, viennent enrichir notre compréhension de la situation. Alors qu'il travaillait sur un papier climatologique important pour l'avancement de sa carrière, Peter a rencontré Clara, une autre universitaire. Un rapprochement aussi bien professionnel que personnel s'en est bien sûr suivi.
Enjeux internationaux et moments intimes capturent parfaitement l'atmosphère des années 60, délicieusement surannée et bien plus douce et calme que notre époque survoltée. En privilégiant les aplats de couleurs pastels plutôt que l'utilisation de textures détaillées, la direction artistique reflète habilement cette ambiance.
Le jeu déroule plusieurs séquences intéressantes, qui abordent des thématiques variées et importantes. Se mêlent ainsi des réflexions sur la guerre froide, sur la place de la femme dans la société ou encore sur le respect (ou non…) du Traité sur l'Antarctique par les anglais, les américains et les soviétiques. Enjeux internationaux et moments intimes capturent parfaitement l'atmosphère des années 60, délicieusement surannée et bien plus douce et calme que notre époque survoltée. En privilégiant les aplats de couleurs pastels plutôt que l'utilisation de textures détaillées, la direction artistique reflète habilement cette ambiance. Elle bénéficie également de plusieurs astuces bienvenues : grain cinématographique sur l'image, pans entiers de décors volontairement plongés dans le noir (pour mieux souligner ce qui importe et laisser place à l'imagination) et habiles transitions entre les deux époques (une église prend la place d'une montage, un trajet dans la neige se transforme en balade sur les routes anglaises…). L'aspect audio n'est pas en reste puisqu'il cumule des voix anglaises parfaitement professionnelles et convaincantes, ainsi que de sublimes compositions au piano qui retranscrivent parfaitement l'émotion du moment.
GAMEPLAY CONTEMPLATIF
Le gameplay se limite quant à lui au minimum. Quelques séquences de déplacements basiques, de très rares objets à observer dans les décors, une ou deux actions sommaires (tourner la mollette d'une radio pour trouver la bonne fréquence), et voilà tout ! Le jeu enchaîne les séquences comme le ferait un film, et laisse très peu de place à l'interactivité. La mécanique principale réside dans des choix de dialogues, deux ou trois réactions nous étant généralement proposées. La sélection s'effectue à travers un système de symboles et non de phrases, ce qui semble intéressant de prime abord mais se révèle assez confus par la suite. Un rond rouge correspond à "paniqué, perplexe ou inquiet", un cercle bleu clair à "attentionné, honnête ou ouvert", un rectangle gris à "franc, fervent ou affirmatif", un soleil à "enthousiaste, intéressé ou curieux", et un point mauve à "pessimiste, timide ou déprimé". Ces catégories sont à la fois trop vagues et trop vastes, et il arrive régulièrement que la réaction du personnage ne s'accorde pas vraiment avec l'intention initiale du joueur.
CIRCLE OF LIFE
De temps en temps, des icônes plus visuelles et explicites (avion, neige, silhouette…) nous sont tout de même proposées. Par ailleurs, les choix le plus importants sont signalés à l'écran par le "stockage" de l'icône correspondante. Chaque décision majeure ultérieure donne alors lieu à l'affichage temporaire des différentes icônes retenues jusqu'alors, et ce jusqu'à la séquence finale. Et là, attention à la déception ! Alors que l'aventure emprunte les codes des jeux interactifs à multiples embranchements, elle s'arrange par un artifice scénaristique (pas forcément malvenu du pur point de vue de la narration d'ailleurs) pour ne proposer qu'une seule et unique fin. Nos choix n'ont donc au final quasiment aucune conséquence, en dehors du ton et du contenu des dialogues. Ce n'est pas là le seul reproche que l'on peut faire à South of the Circle, qui peine également d'un point de vue technique. Certes, la direction artistique est charmante, et il est plaisant de constater que des traces de pas et de pneus s'impriment dans la neige. Mais il faut également faire avec des soucis réguliers de collisions (bras des personnages qui se traversent, corps qui passe légèrement à travers les murs…), un effet de pop-up sur certains éléments des décors, et un drôle d'effet de tremblement des modèles 3D qui laisse croire par moments que le jeu rame (alors qu'il tourne bel et bien à plus de cent images par seconde). Les sous-titres français sont également imparfaits puisqu'ils hésitent souvent entre le tutoiement et le vouvoiement, y compris dans la même phrase parfois ("vous avez fait tous tes relevés ?"). Quelques coquilles supplémentaires sont également de la partie, du type "C'est un nouveaux et les choses se seront tassées", "Ne t'en fais, mon vieux" ou encore "ce qui m'effraie, ce que tout ceci distraie les gens". Enfin la durée de vie se limite à 3h30, le seul moyen de prolonger le plaisir consistant à parcourir les bonus, qui regroupent de nombreux croquis et photos.